Un matin, j’en ai eu assez. Assez de toujours me « battre » av
Un matin, j’en ai eu assez. Assez de toujours me « battre » avec elle pour devoir la coiffer.
Ma fille de cinq ans est hypersensible. En gros, elle ressent plus fort certaines choses, comme les bruits, les textures et les bobos par exemple. Ou les nœuds dans ses jolis cheveux que je dois démêler. Elle n’est pas capricieuse, elle est hypersensible. Mais il y a des matins, vous savez, ces matins… Où la patience de chacun coopère moins, où il faut aller vite, où fiston boude dès son réveil, où bébé renverse tout; où c’est le chaos. Et souvent, ces matins-là, il y a ma grande qui hurle quand je passe la brosse dans ses cheveux, malgré ma bonne volonté, malgré mes années d’expérience de coiffeuse, malgré les malgré; elle hurle. Comme si je lui arrachais les cheveux un à un. Et pour en rajouter, ces matins-là, moi je finis par surchauffer et je crie.
Il y a eu ce matin où j’en ai eu assez. Assez de tout ça. Parfois, j’ai besoin de me parler un peu et de me rappeler que je suis une bonne maman. Ce fameux matin, je me suis shakée un brin et je me suis rappelée tous mes bons coups accomplis dans le but d’aider ma petite/grande anxieuse et tous ceux qui apportent de la magie dans la vie de mes minis. Je ne veux pas que mes enfants se souviennent de la maman qui crie, mais de celle qui a des idées quelquefois bizarres, mais souvent chouettes. En essayant de trouver un moyen de rendre le moment de la coiffure positif, je me suis souvenue d’une vidéo que j’avais vue circuler sur les zinternets. Celle d’un papa qui faisait réciter un mantra à sa toute mini puce, pendant qu’elle se regardait dans le miroir.
Ça y est! J’avais eu une idée de génie! Le lendemain, je lui ai dit qu’on la coifferait dans sa chambre, devant son miroir. Elle trouvait ça curieux, mais elle a accepté. J’ai commencé à brosser et je lui ai demandé de répéter après moi :
« Je suis belle. Je suis forte. Je suis gentille. Je suis intelligente. Je vais toujours travailler fort, même quand ce sera difficile. »
Wow! Elle répétait tout, avec le sourire et ne bronchait presque pas quand ça tirait. Alors j’ai continué :
« Je suis respectueuse. Je ne suis PAS meilleure que personne. PERSONNE n’est meilleur que moi. J’ai confiance en moi…»
OOPS. Du haut de ses cinq ans, elle n’a pas voulu répéter la dernière phrase. Mission accomplie, j’avais terminé sa jolie coiffure (plus élaborée qu’une couette en plus!)! Elle n’a pas voulu répéter ces mots : J’AI CONFIANCE EN MOI. OUTCH! Je lui ai fait remarquer et elle n’a pas voulu. En insistant gentiment et avec le sourire, j’ai réussi à lui faire dire, mais très mollement. Ce matin-là, mon cœur a eu mal. Ma fille de cinq ans reconnaissait déjà qu’elle n’avait pas confiance en elle. Ce matin-là, j’étais contente d’avoir trouvé un beau moyen pour qu’on ne se chicane plus pendant que je lui démêle les cheveux et que je la coiffe. Mais surtout, j’étais contente d’avoir trouvé un moyen pour essayer de construire l’estime et la confiance d’une belle petite fille qui deviendra grande. Je me suis promis de recommencer, mais je ne voulais pas que cela devienne un fardeau ou quelque chose de banal.
Le lendemain, tel le jour de la marmotte, est arrivé le moment où l’on doit attacher les cheveux avant de partir pour l’école. Elle m’a dit elle-même « Viens maman, on va le faire devant mon miroir et je vais répéter tes mots. » Comme j’étais fière! Elle en avait ressenti du bien-être? Hallelujah! Mais encore une fois, arrivée à la même foutue phrase, elle n’a pas voulu la répéter. Niet. Pantoute. Elle m’a dit : « Pourquoi tu dis toujours ces mots-là? Ceux-là, je n’ai pas envie de les dire. » Double OUTCH. Et là, j’ai réalisé qu’à trente et un ans et trente-deux ans, son père et moi, bien que nous soyons des personnes épanouies, heureuses, gentilles, respectueuses, travaillantes…Pour lui et moi, ce sont aussi des mots que nous avons encore de la difficulté à répéter. Alors le plus de matins possible, depuis ce jour, je répète ces mots avec ma fille. Je les répète en ME regardant dans le miroir, pas en la regardant. Je les dis à la petite fille de cinq ans qui m’habite, celle qui excellait dans presque tout, mais qui n’arrivait pas à lever la main à l’école pour poser une question, par peur de se tromper. À celle qui ne disait rien pour ne pas contredire, pour ne pas déplaire. À celle pour qui prendre des risques a pris trente ans. (Faites le calcul, j’en ai 31!)
Avoir des enfants est le plus beau cadeau et le plus beau, grand et difficile défi qui soit. Parfois, grâce à des matins chaotiques et banals, on peut arriver à faire de bien grandes choses. Pour nos enfants et aussi, pour nous. On continuera à répéter ces mots, elle, ses frères et moi, et à travailler fort jour après jour. Pour que jamais ils n’oublient qu’ils sont beaux, gentils, forts, respectueux et intelligents. C’est le travail d’une vie, je le sais… Pour que si un jour, où ils arrivent fièrement dire « J’ai confiance en moi », ils n’oublient jamais aussi qu’ils ne sont pas meilleurs que personne. Mais… que personne n’est meilleur qu’eux! Et disons le, ça ne fait pas de tord à la mère de se le dire! Je vous mets au défi de prendre le temps d’essayer, vous verrez! … Tout ça pour arriver à faire une couette sans entendre crier… pas pire hein! 🙂