Archives mars 2019

10 choses à savoir sur Jessica Archambault

1- Depuis combien de temps écris-tu pour MFMC ? <p style="text-align: ju

1- Depuis combien de temps écris-tu pour MFMC ?

J’écris depuis deux ans et demi. La maternité m’a permis de concrétiser mon envie d’écrire. Ça faisait longtemps que je voulais le faire sans arriver à m’y mettre (ou oser ?). La parentalité m’offre plusieurs sujets très près de moi. Je me fais la main doucement en attendant d’écrire autrement.

 

2- Pourquoi écris-tu pour MFMC ?

Enceinte de mon premier enfant, j’ai commencé à suivre plusieurs blogues et pages Facebook de mamans et de parents. Je me retrouvais dans plusieurs textes, d’autres me faisaient réfléchir. Mon envie d’écrire grandissait, mais je n’envoyais rien parce que je n’adhérais complètement à aucune de ces pages. Que ce soit la gestion des commentaires ou certains sujets abordés, il y avait toujours un petit quelque chose qui me mettait juste assez mal à l’aise pour ne pas vouloir y être associée. Jusqu’à ce que je tombe sur MFMC. Je trouve qu’Étienne et Maïka ont réussi à créer une communauté respectueuse basée sur l’entraide et non sur le jugement. Je m’y suis reconnue particulièrement et leur ai envoyé des textes.

 

3- Quel est ton rituel d’écriture ?

Je pense à mes textes assez longtemps, à ce que je veux dire, comment, dans quel ordre. Lorsque je m’installe, généralement quand les enfants sont couchés, ça va assez vite parce que j’ai pris le temps de placer mes idées doucement dans ma tête, souvent pendant plusieurs jours.

 

4- Qu’est-ce qui te fait du bien, te rend heureuse ?

Aussi cliché que ça puisse paraître, mes enfants. Je ne reste jamais, ou excessivement rarement, de mauvaise humeur en leur présence. Ils me ramènent à l’essentiel et me font énormément rire. Je le dis souvent, je n’ai jamais autant ri que depuis que j’ai des enfants. Bouger, m’entraîner me fait aussi le plus grand bien. Cuisiner reste la façon la plus efficace de me vider l’esprit.

 

5- Quel est ton dicton préféré ?

Je ne sais pas si on peut qualifier cette phrase de dicton… « La vie est un mystère, y’a juste les grandes personnes qui pensent le contraire. » Elle est tirée du film L’Audition de Luc Picard. Elle est aussi le premier tatouage à s’être trouvé une place sur ma peau il y a plus d’une dizaine d’années. J’ai le bonheur facile, je m’émerveille facilement et je trouve ça précieux. Par contre, avec les préoccupations, le stress, la vie qui va vite, j’ai parfois besoin de me le rappeler. C’est ce que cette phrase évoque pour moi  : laisser la vie nous impressionner, tout le temps.

 

6- Soirée entre amis ou soirée à écrire ?

Assurément une soirée entre amis, ça me recentre. J’ai des amis précieux qui contribuent grandement à mon équilibre par les rires faciles, l’écoute sans jugement et les opinions sincères et bienveillantes. Je n’arrive pas à le faire autant que je le voudrais, comme bien des parents de jeunes enfants, mais le bien que ça me fait chaque fois me rappelle l’importance de faire une place à mes amis.

 

7- Peux-tu vivre sans ton cell ?

J’essaie de plus en plus de le faire. Je tente de le déposer lorsque je vais me coucher. Le rapport au temps change quand je l’utilise et je me retrouvais souvent à m’endormir beaucoup plus tard que mon intention initiale. J’ai commencé à le mettre en mode « ne pas déranger » lorsque je fais la sieste avec les enfants. J’ai supprimé tous les jeux qui s’y trouvaient.

On essaie aussi de diminuer son usage avec les enfants. Notre trois ans commence à trouver nos téléphones beaucoup trop intéressants. Quand il nous demande de s’en servir lui aussi, on le remercie de nous rappeler de le déposer et on le range. Pour l’instant, ça semble fonctionner, mais il reste que j’ai souvent mon téléphone en main et que je suis très (trop ?) facile à joindre !

 

8- Quel sujet n’aborderais-tu jamais ?

Je crois qu’on peut parler de tout. Cependant, certains sujets plus délicats ou plus complexes nécessitent, à mon avis, un certain travail de recherche et de réflexion. Je n’aborderai donc jamais un sujet si je ne sens pas que j’ai suffisamment fait mes devoirs pour en parler. Être « gérante d’estrade », non merci !

 

9- À part l’écriture, qu’est-ce qui te passionne ?

Mon travail me passionne, je suis enseignante. Bien que le système dans lequel nous évoluons soit parsemé de failles et m’amène souvent à me questionner, jamais je ne doute de mon amour pour l’enseignement. Accompagner ces ados dans un bout de leur parcours est stimulant, enrichissant et touchant. Ça me permet de me remettre en question, de chercher à faire mieux et plus juste tout le temps. Même s’il y a des impacts négatifs sur notre vie (salut, la correction et le stress), ça me fait grandir comme être humain et ça se répercute dans toutes les sphères de ma vie.

 

10- Quelle est ta principale préoccupation (sociale, parentale, etc.) ?

Tout ce qui touche au racisme de près ou de loin. J’y ai toujours été sensible, mais en épousant un homme d’origine haïtienne et en ayant des enfants métis, ça s’est exacerbé. J’écoute, j’observe, je tente de me renseigner du mieux que je peux. Je n’ose pas trop me prononcer parce que je sens que je ne maîtrise pas encore assez la question et parce que je sens que je n’en ai pas vraiment le droit, en tant que Blanche… le fameux sentiment d’imposteur. Mais j’y travaille, pour mes enfants.

Je me questionne beaucoup. Je veux qu’ils sachent qu’on peut prendre position sur des sujets délicats, qu’il faut le faire en fait. Mais qu’il est nécessaire et respectueux de bien le faire, de s’informer, de s’intéresser à tous les angles et points de vue, d’user de son sens critique. C’est le cas pour tout d’ailleurs, pas seulement pour le racisme. Mais c’est certain que j’espère contribuer à faire évoluer notre société sur ce point en particulier, et que je souhaite de tout cœur que mes enfants n’y seront pas confrontés. S’ils le sont malgré tout, j’espère que nous les aurons outillés adéquatement pour y faire face.

Petite maman, « sors danser! »

« Oui, tu l’aimes ton nouveau petit bébé, tu l’aimes tellem

« Oui, tu l’aimes ton nouveau petit bébé, tu l’aimes tellement que tu es en train de t’oublier. Alors, sors danser pour une soirée! »

J’ai été comme toi tu sais… Lorsque je suis devenue mère, mon attention n’était centrée que sur mon nouveau‑né. Il était le plus beau, le plus charmant, le plus fin, le plus drôle, il était le plus plus plus, et le tout tout tout. Tout comme toi, petite maman, j’ai développé un lien intense avec mon enfant, et personne ne pouvait comprendre ça. J’étais FULL en amour et en admiration.

En le mettant au monde, j’ai réalisé que j’avais un grand rôle à jouer. Je m’étais fixé des attentes et des responsabilités plutôt élevées face à mon rôle de maman, probablement comme toi! On va se l’avouer, devenir maman peut surprendre parfois. En tout cas, ça a été mon cas!

Pendant des années, je n’avais que moi à qui je devais penser et dont je devais me préoccuper. La vie était simple, paisible et sans stress! Mon quotidien a vite été remplacé par la nécessité de prendre en charge cette autre personne que moi. En fait, j’étais probablement comme toi, petite maman : toute mon attention était dirigée vers mon enfant et tranquillement, j’ai banalisé (voire ignorer) mes propres besoins.

J’avais tellement peur de ne pas être assez :

  • présente, et ce, malgré ma présence à ses côtés jour et nuit ;
  • disponible, et ce, même si j’étais disponible jour et nuit ;
  • bonne mère, et ce, même si j’y mettais toute mon énergie!

J’avais peur de quitter mon bébé, car il était l’être le plus merveilleux. Lorsque je le quittais, je vivais un gros manque. Je ressentais un vide à l’intérieur puisque je m’ennuyais de sa petite binette. Plus rien ne m’attirait, car je m’étais persuadée que rien ne valait la peine, sauf si ça tournait autour de mon bébé.

J’avais omis que j’étais une femme et que je pouvais vivre autre chose de merveilleux en dehors de mon rôle de maman. Pire encore, je vivais une énorme culpabilité dès que j’avais une petite pensée pour ma personne!

Je crois que les gens autour de moi le voyaient. Mais moi, je souriais. J’étais convaincue d’être super équilibrée, puisque j’avais le plus beau trésor entre les mains.

Un jour, ma mère m’a regardée et m’a dit : « Va danser, ma fille! »  Quand j’ai entendu ses mots, les deux bras me sont tombés! Elle avait remarqué que tranquillement, mon rôle de maman avait commencé à me peser sur les épaules. « Va danser, ma fille! Tu en as besoin. »

« Va danser! »… Ces mots me sont restés en tête pendant quelque temps avant que je comprenne réellement ce que ma mère me disait. J’ai compris que ma mère me passait le plus grand message du monde en me disant que je devais m’occuper de moi également. Qu’elle remarquait tout mon dévouement envers mon enfant, mais que je m’oubliais tranquillement.

Elle venait de me donner l’autorisation que je n’arrivais plus à me donner. L’autorisation de me retrouver en tant qu’individu. D’arrêter de vivre avec de la culpabilité et de pouvoir me donner du temps, du bonheur, de la valeur et de l’amour en tant que femme et en tant que personne tout simplement.

J’ai compris que pour bien aimer les autres autour de moi, je devais me préoccuper de moi aussi. J’ai compris que pour bien aimer, je devais aimer la vie que j’avais choisi de vivre et que je devais trouver un bel équilibre.

Par ces simples mots, ma mère m’a enseigné que le bonheur d’être mère est important, mais que prendre du temps pour moi est une nécessité. Satisfaire mes besoins, prendre soin de moi, m’accorder de la valeur humaine ne signifie pas que je suis égoïste, bien au contraire. Penser à moi contribue à mieux m’occuper des autres! De mon enfant.

Alors, si un jour, je te vois perdre ton beau sourire, petite maman, je t’inviterai à danser! Et si tu hésites à m’accompagner, appelle ta maman et écoute‑la. Elle te dira :

« Ok ma belle, sors danser, je vais garder! »

Maman Gonflée

« Souris, papa »

Le bruit m’affecte. Beaucoup. Et c’est invivable.

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Le bruit m’affecte. Beaucoup. Et c’est invivable.

Pourquoi? Je n’ai pas de réponse précise à cette question, mais je continue à chercher des solutions.

L’été dernier, j’ai découvert un outil qui m’aide grandement : me boucher les oreilles. On était allés à une plage publique sur le bord d’un lac. J’y étais allé un peu à reculons, mais je voulais faire plaisir à mes enfants.

Sur place, j’étouffais. Il y avait plein de gens et la musique était vraiment forte. En bon militaire, je me suis concentré sur ma mission : rendre ma famille heureuse. Je devais trouver un moyen de décompresser à travers cela.

Finalement, je me suis trouvé un espace pas trop achalandé. Je me suis installé là avec ma chaise zéro gravité. Avec des coupe-sons de style industriel sur mes oreilles, mon chapeau et mes lunettes fumées, j’ai fermé les yeux pendant au moins deux heures. Après ce temps, j’ai ouvert les yeux de façon graduelle afin de m’adapter à l’endroit et ça a fonctionné. Depuis ce temps, je porte des bouchons dans mes oreilles. C’est beaucoup plus discret, j’avoue!

Les enfants grandissent et font de plus en plus de bruit le matin. Les petits cris aigus sont assez fréquents. Les chicanes aussi. Les rires sont de plus en plus forts. J’ai eu des crises intenses de rage, de la misère à me contrôler, et ce, pendant des années. Le bruit m’irritait, mais je ne savais pas pourquoi.

Au fil du temps, j’ai commencé à comprendre certaines choses. Ma psychologue m’aide à reconnaître les signes physiques de détresse pour m’aider à trouver des solutions. Maintenant, le matin, lorsque mes enfants parlent fort, crient ou se chicanent, je suis conscient des signes.

En découvrant les signes, j’ai découvert que j’avais des « blackouts ». Ne me demandez pas ce qui se passe pendant mes « blackouts ». Je ne pourrais pas vous le décrire.

Un matin de semaine, l’an dernier, aussitôt arrivé dans la cuisine, le bruit me faisait (physiquement) mal. Je me suis mis à paniquer. Très vite, mon irritabilité a grimpé. Le ton de ma voix a aussi grimpé soudainement. Mon rythme cardiaque s’est emballé. Ma respiration s’est faite plus courte. Mon champ de vision a commencé à rétrécir et ma vision à se brouiller. Une série d’événements s’est produite, mais à ce stade‑là, je ne voyais plus rien. J’avais un « blackout ». Ma femme m’a vu dans un moment de panique totale. J’avais de la misère à coordonner mes mouvements. Je ne savais plus quelle direction prendre. C’était le noir total.

« Souris, Carl. »

« Souris, papa. »

J’étais dans le noir total et j’ai entendu leurs voix.

C’est alors que je me suis « réveillé ». Je suis sorti dehors pour prendre l’air et décompresser.

C’est un exemple parmi tant d’autres. Mais c’est celui dont je me souviens le mieux.

« Souris » est un mot de code dont nous avions convenu ensemble lors d’une rencontre familiale avec la travailleuse sociale de la clinique de Blessure de Stress Opérationnel. Cette rencontre avait pour but d’expliquer aux enfants pourquoi papa avait une blessure et avait des services de réadaptation. Nous nous devions aussi de trouver des solutions pour m’aider à m’en sortir. Il a donc été convenu avec les enfants que lorsque papa aurait une crise, ils pourraient simplement dire : « Souris, papa ».

Et ça fonctionne!

Beaucoup de gens n’osent pas parler, car ils pensent qu’ils sont en train de devenir fous. Et bien moi, je vous en parle. Et je ne suis pas fou.

Les « blackouts » sont un des aspects les plus sévères du TSPT. J’en ai eu souvent. J’ai aussi fréquemment une réduction de mon champ de vision. Ça fait partie de mon quotidien si je m’expose en public.

« Souris, Carl. »

« Souris, papa. »

Je suis confiant que bientôt, « blackouts » et autres symptômes seront chose du passé, grâce aux personnes que j’aime le plus au monde!

Carl Audet

 

Les loups ne sont pas toujours ceux qu’on pense

Hésitation. Peur. Et pourtant, conviction.

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Hésitation. Peur. Et pourtant, conviction.

J’ai peur du torrent de jugements et de reproches que pourrait susciter ce texte. J’ai peur de me faire dire, encore, que j’exagère. Que j’invente. Que je capote pour rien. Et pourtant. Je sais.

La DPJ a mauvaise réputation. Certains d’entre vous ont vécu des histoires tristes ou bouleversantes liées à la Direction de la Protection de la Jeunesse. C’est sûr que les représentants de cet organisme se pointent rarement dans notre vie quand tout est rose.

Je ne dirai pas qu’il n’y a jamais d’abus ou de mauvaises décisions de leur part. L’affaire est gérée par des humains, comme vous, comme moi. Donc, l’erreur est possible. Il y a tout un système derrière les décisions prises, derrière le retrait d’un enfant de sa famille, derrière un signalement non retenu. Et comme tout système, il y a des failles, des principes qui s’appliquent par défaut à des situations qui auraient dû être traitées de façon particulière.

Soit.

Ce texte vous racontera une histoire qui se finit bien mieux que celle du Petit Chaperon rouge. Personne ne finit dans le ventre d’un loup, le panier de petits gâteaux n’est pas renversé au milieu de la forêt, le grand méchant loup ne finit pas éventré par le chasseur.

Ce texte vous racontera aussi une histoire qui aurait pu se terminer beaucoup plus tôt si j’avais osé faire appel à la DPJ avant. Si j’avais osé parler sans hésitation, sans peur et avec conviction.

Des menaces ont mené à des événements qui ont mené à des craintes, à des promesses de changer et à des événements répétés. Progressivement, ça va de soi. Une violence subtile, en mots, en gestes, mais rien qui laisse des marques visibles. Ou si peu.

Des enfants qui s’embarrent dans une pièce parce qu’ils ont peur. Un enfant qui tremble dans le noir en position fœtale. Des cris toujours plus durs et plus fréquents. Et moi qui veux à la fois protéger mes enfants et celui que j’aime. Moi qui veux comprendre, nuancer, croire que ça va changer. « Il n’a jamais été violent… » Moi qui me sens impuissante, presque complice parce que je n’impose pas de pancarte « Stop ».

Moi qui me promets que la prochaine fois, je prends mes petits sous le bras et je quitte. Moi qui jure de dénoncer. Moi qui hésite, encore. Moi qui ai peur, encore. Pas des représailles, non. Du jugement. Des reproches de ceux qui croiraient que je manipule, que j’exagère, que j’invente. C’est puissant, la peur.

Jusqu’à cette nuit où j’ai fait le saut vers la vérité. J’ai dénoncé. J’ai appelé la DPJ. J’ai crié à l’aide. J’étais convaincue que rien n’arrêterait sans ça. Le déni de violence était trop grand.

La travailleuse sociale de la DPJ a rencontré mon enfant à l’école. Elle m’a fait venir d’urgence dans ses bureaux. Elle est débarquée chez lui, sans avertissement. Elle a rencontré les autres membres de la famille. Connaître l’ampleur du mal, limiter la menace, protéger les enfants. Empêcher le mal de se reproduire et de tuer l’enfance. Assurer le développement et la sécurité.

Il n’y a pas eu d’accusation. Pas d’arrestation. Un retrait volontaire. Une promesse de garder la paix. Un engagement à s’instruire à propos de la pédagogie positive et de faire une thérapie familiale.

La plainte a été retenue, puis le dossier a été fermé. La suite nous appartient. La DPJ n’a pas tout réglé. Son travail n’est pas de faire un suivi une fois que les engagements ont été respectés, mais bien de protéger les enfants et les familles.

Quand j’ai signalé le numéro de la DPJ, j’ai ressenti un stress gigantesque. Une nervosité comme si je jouais ma vie. C’était un peu ça. Mais j’ai surtout ressenti un soutien sincère. J’ai constaté des méthodes d’enquête compétentes, un désir réel d’aider ceux qui en ont besoin, en gardant en tout temps l’enfant au cœur des préoccupations.

J’ai senti que je n’étais plus seule devant l’urgence de protéger mes petits.

Eva Staire

Quand les enfants ne veulent plus répondre au téléphone

Driiiiiing. Je me lance vers le combiné s

Driiiiiing. Je me lance vers le combiné sans fil qui se trouve sur le comptoir de la cuisine.

Évidemment, il n’est pas sur le chargeur… (Ah! Cette maudite loi de Murphy.) L’une de mes deux filles l’a sûrement pris sans le remettre à sa place. Étant un père aguerri, j’écoute les sonneries suivantes pour localiser un autre combiné (je sais qu’il y en a deux autres quelque part dans la maisonnée).

Driiiiiing. Ah, il semble y en avoir un dans la salle de séjour ; je m’y rends aussitôt. Driiiiiing. Non, finalement, ça semble venir de la salle à manger. Driiiiiing. Merde, pas là non plus. Driiiiiing. J’arrête de courir partout et lâche un cri :

— Les filles! Répondez, bon sang!

J’entends la réponse nonchalante de l’aînée (onze ans) provenir du fin fond de la grotte dans laquelle elle se terre à l’étage avec sa sœur cadette (huit ans).

— On ne peut pas répondre, papa… on n’a pas de téléphone près de nous.

Hein? « On n’a pas de téléphone près de nous. » Mais ça veut dire quoi, ça? Que mes filles ne se lèvent plus pour répondre au téléphone? Ben voyons donc.

L’heure est grave.

Dans mon jeune temps, quand j’avais à peu près le même âge que mes filles, chaque fois que le téléphone sonnait chez nous, et je dis bien CHAQUE FOIS, c’était la course folle entre ma sœur et moi, à savoir lequel de nous deux réussirait à se rendre le plus rapidement à l’un des deux téléphones fixes pour répondre à l’appel. Et les téléphones étaient situés aux extrémités de notre grand logement familial : un sur une petite table décorative dans la salle à manger près de la fenêtre et l’autre sur une table en coin dans le salon.

Il faut préciser que nos parents ne nous demandaient jamais de répondre au téléphone. Mais on voulait chacun la même chose : être plus rapide que l’autre et répondre en premier. Ça prenait juste un Driiiiiing. Juste un. Et l’adrénaline coulait à flots dans nos veines, nos sens s’enflammaient et on se garrochait comme des malades!

C’est à cette époque qu’on pouvait voir, en direct, les meilleurs sprints sur courte distance dans le corridor de la maisonnée, les multiples techniques d’attrapage du chandail par-derrière pour ralentir l’autre, les jambettes disgracieuses, les placages vicieux sur les murs ou sur les cadres de portes… Tous les coups étaient permis!

Et je me souviendrai toujours de l’inoubliable plongeon par-dessus le divan que ma sœur a fait un bon matin pour décrocher le combiné en premier. Du jamais vu. Je revois la scène au ralenti… Je suis assis par terre dans le salon et je regarde tranquillement un dessin animé à la télé. Driiiiiing. Mes réflexes s’activent aussitôt. La chance me sourit. Je tourne la tête vers le téléphone qui se trouve derrière moi, à quelques pieds seulement, sur le dessus de la table en coin entre le divan à deux places et celui à trois places. Je décroise mes jambes ; mes mains s’appuient sur le plancher pour me propulser. Au même moment, je l’entends : elle galope dans le corridor. Driiiiiing.

Je suis presque levé. Horreur : ma sœur apparaît dans le cadre de la porte du salon. Elle bondit dans les airs. Je suis maintenant levé et j’étire la main vers la table en coin en criant « Nooooooooon! ». Je la vois passer devant moi, survolant le divan à deux places, les bras étirés vers l’avant. J’ai même le temps de voir l’expression sarcastique sur son visage qui semble me dire « Kin toé, t’es pas assez vite. »

Elle atterrit brusquement sur l’accoudoir du divan, étire le bras et décroche le combiné en soufflant un « Allo? » victorieux. Ah! Ces courses folles auraient pu facilement devenir une nouvelle discipline olympique, et ma sœur et moi en serions devenus les pionniers.

Ah… je vous le dis, c’était le bon vieux temps.

Mais aujourd’hui, ce n’est plus pareil.

Chez nous, quand le téléphone sonne, ben il sonne.

Pis sonne.

Pis sonne encore.

Mes filles ne courent pas dans la maison pour aller répondre.

Elles ne se bousculent pas non plus pour répondre en premier.

Ce qui aurait pu devenir une discipline olympique n’est plus.

Hélas, la plupart du temps, les appels tombent dans la boîte vocale.

Martin Dugas

Ne pas oublier la règle numéro 4

Ça s’est passé samedi matin. Je m’étais levé tôt, pour fair

Ça s’est passé samedi matin. Je m’étais levé tôt, pour faire changement. Normalement, je n’ai pas beaucoup d’énergie et je dors beaucoup.

Je m’étais dit que j’allais faire un petit spécial pour aller dans un magasin à grande surface, tôt, au lieu d’y aller pendant la semaine.

J’ai commencé à paniquer à mon arrivée dans le stationnement. J’ai eu de la misère à me trouver un espace de stationnement et mon cœur battait à pleine vitesse. J’ai donc pris une pause à l’extérieur avant d’entrer. J’avais peur de faire face à beaucoup de gens une fois à l’intérieur.

Lorsque je me suis senti un peu plus calme, j’ai décidé d’entrer.

Règle numéro 1 : Ne pas trop regarder les gens.

Tout n’allait pas trop mal, mais mon champ de vision avait rétréci. Ma vision s’était embrouillée un peu.

Règle numéro 2 : Me concentrer sur ma mission.

Ma mission était d’acheter seulement ce dont j’avais besoin. J’avais une liste afin de me faciliter la vie.

Règle numéro 3 : Ne pas perdre de temps.

J’avais décidé d’accélérer le pas, même si je boitais un peu et que ma jambe gauche me faisait mal.

Règle numéro 4 : Prendre mon médicament de secours ou sortir.

J’ai toujours mon médicament de secours avec moi, à prendre en cas de perte de contrôle. Je n’en étais pas encore à ce point.

Ça se passait moyen et je tenais le coup. Les allées larges étaient presque vides et pas du tout achalandées. Dans des allées étroites, j’étouffe!

Boom! Attaque d’anxiété dans le coin des fruits et légumes! Dans ce département, il y avait plein de gens et j’avais de la misère à passer. Mon champ de vision a rétréci encore davantage. Mon rythme cardiaque a augmenté. Ma respiration est devenue de plus en plus rapide. J’essayais de prendre de bonnes respirations pour diminuer mon stress, mais soudainement, ça a commencé à me tirer à droite, dans le visage. Là, je le savais, mon visage allait commencer à devenir tout croche.

Alerte! Règle numéro 4. J’ai décidé de sortir. Donc je me suis dirigé vers la caisse avec la file d’attente la plus courte. Je n’avais même pas pris le temps de mettre ma tuque et mes gants pour sortir. Instantanément, une fois dehors, j’ai commencé à mieux respirer. Mon champ de vision s’est élargi et est devenu de plus en plus clair. La tension dans le côté droit de mon visage a diminué tranquillement. Sur le chemin du retour à la maison, tout allait mieux, mais je ressentais beaucoup de fatigue.

Je tenais vraiment à vous expliquer ce symptôme très sévère du TSPT. Il s’agit d’un signe physique à ne pas négliger si l’on souffre de cette blessure.

Carl Audet

 

Mon sourire niaiseux

J’ai été cette femme qui pleure en conduisant parce que la chans

J’ai été cette femme qui pleure en conduisant parce que la chanson à la radio fait remonter le trop-plein de la vie. Celle qui garde tout en dedans, qui filtre les signes du désespoir pour continuer à fonctionner. Celle qui éclate en sanglots ou en cris. Celle qui voit même la neige en noir tellement il fait sombre dans sa tête.

J’ai été cette personne qui ne croit plus en rien. Celle qui en veut à Dieu et à Satan. Celle qui s’en veut surtout à elle pour tous les choix et les non-choix qu’elle a faits dans le passé ou le matin même. Celle de qui s’est évaporé tout espoir, tout courage d’affronter un autre matin occupé ou une autre nuit esseulée.

J’ai été cette femme qui a décidé de changer ce qui n’allait pas, de risquer de tout perdre pour tout gagner. Celle qui est partie, celle qui a dit « C’est fini ». Celle qui a démissionné d’un emploi et d’un couple. Celle qui a remisé certaines amitiés qui faisaient mal au lieu de lui faire du bien. Celle qui a fini par mettre des limites et des priorités. Celle qui s’est mise en priorité.

Et maintenant, je suis celle qui sourit en conduisant. Celle qui a le goût de rire ou de danser en écoutant la chanson à la radio. Celle qui se dit que le conducteur dans l’autre voie doit se dire : « Mais qu’est-ce qu’elle fait là, elle, avec son sourire niaiseux? » Elle, elle est heureuse, tout simplement. Elle est celle qui aime la vie, tout simplement. Celle qui profite d’un petit moment calme en voiture pour constater à quel point les choses ont pris un chemin positif depuis qu’elle a donné un coup de volant dans sa vie.

Si quelqu’un m’avait dit il y a deux ans que je serais celle qui sourit sans raison à tout moment, je ne l’aurais pas cru. Je n’aurais même pas eu la force de rire de lui. Et pourtant, je souris maintenant, sans même me forcer. Juste parce que.

J’ai été celle que vous êtes parfois, ou souvent. Et je vous dis que de l’autre côté du mur de désespoir qui vous rentre dedans à chaque seconde, il y a du beau et du bon. Et de l’espoir.

Nathalie Courcy

Ce jour où j’ai accompagné mon ami

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Ce matin, j’ai tenu la main de mon ami afin de lui faire franchir le premier pas vers la réadaptation. Il y a plusieurs années, il avait choisi insidieusement, le chemin de la dépendance et du mensonge. Des mensonges envers lui-même, envers ses ami(e)s et envers sa famille. Je l’ai accompagné dans sa plus grande vulnérabilité et dans une profonde tristesse.

 

Il s’est ouvert, il s’est libéré d’une partie de sa souffrance, mais ce n’était que le début de ce grand voyage. Chaque pas franchi le faisait reculer de deux. Il y a eu le moment où il a tenté de me convaincre, une fois de plus, qu’il n’avait pas de problème, qu’il n’était pas comme ces « ivrognes » ou ces « junkies » au sens péjoratif. La route était longue et le silence était lourd… Il avait encore ce doute qui planait, qui lui faisait encore croire que ce n’était pas sa place. Cette petite lueur d’espoir de s’en sortir par lui-même…

 

Puis, il y avait toute cette histoire des derniers jours… Il avait laissé tomber le voile et avoué sa double vie à sa blonde… mon amie… Ce fut pour lui son élément déclencheur, cette claque en plein visage. Il était temps que quelque chose se passe, qu’il songe à arrêter de sombrer dans sa dépression. Être dépressif et prendre un dépresseur comme l’alcool en prime, c’était loin d’être la solution gagnante pour se débarrasser de ses démons.

 

J’aidais donc mon ami vulnérable à tenter de se libérer de sa dépendance alcoolique, mais aussi de l’emprise du mensonge. J’avais toute cette pression sur les épaules de réussir cette mission, de le motiver à débuter sa démarche vers la réadaptation. Je voulais réussir pour lui et pour sa famille… Même si au fond, je savais bien que la motivation première devait venir de lui‑même. Ne jamais vouloir plus que la personne qu’on aide… Je devais me détacher de toute implication émotionnelle.

 

Nous avons discuté de longues heures. Il était ce grand livre ouvert et je me devais de le mettre en confiance et de garder ses confidences. Ma tête voulait exploser, mais je tenais le fort. Je recevais toute cette souffrance, ce mal de vivre et cette incapacité à accéder au bonheur. Et, en même temps, je pensais à sa conjointe qui avait appris le mensonge de la trahison quelques jours avant. J’avais mal pour elle. Je devais être neutre, car l’histoire ne m’appartenait pas.

 

Puis enfin, il a physiquement franchi ce pas vers la thérapie. Un dernier texto et tout était fini pour ma part… Il faut être courageux pour faire ce qu’il a fait ; il ne doit pas lâcher! Encore bravo à lui! La porte s’est refermée et j’ai eu ce sentiment de soulagement et d’accomplissement.

 

Amélie Roy

 

 

BFF

« Tes vrais amis, tu peux les compter sur les doigts d’une main.

« Tes vrais amis, tu peux les compter sur les doigts d’une main. »

Vous avez déjà sûrement entendu cette phrase si populaire qu’on nous répète depuis l’adolescence. Maintenant, c’est à mon tour de la répéter à mes enfants. Qu’on se le dise, celui qui a osé clamer tout haut cette vérité a bel et bien raison.

On commence à se faire des amis dès nos premières années. Bon, ce ne sont pas de vrais amis, ce sont surtout des connaissances avec qui on passe le temps à la garderie! De vrais amis, tu commences à en avoir à l’école. Tu t’appropries « ta gang », ce sont tes meilleurs amis pour la vie. Vous devenez inséparables.

Ce n’est pas tout à fait ce qui arrive… Tu rentres au secondaire et plusieurs de tes bons amis ne vont pas à la même école que toi. Alors, c’est la recherche de ta prochaine « gang ». Celle‑là tu vas probablement la garder plus longtemps. Même que rendu adulte, tu vas te faire des soupers retrouvailles où tu jaseras du bon vieux temps!

Avec les années et mon expérience de vie, j’ai moi aussi fait la découverte de cette célèbre phrase citée plus haut. Quand tu vis plusieurs événements difficiles comme une séparation, une maladie ou un arrêt de travail et que tu remarques que ce sont toujours les mêmes amis qui sont là pour toi, alors tu peux vraiment les considérer comme des vrais. Ceux qui se battent pour toi et qui feraient tout pour que tu sois heureux, ce sont des vrais!

Mes deux meilleures amies ne sont pas arrivées dans ma vie durant l’adolescence. Non, elles sont là depuis peu, mais elles sont vraies, elles sont les meilleures, elles sont là pour moi et je suis là pour elles. On peut toujours compter l’une sur l’autre.

Une de mes vraies amies, je l’ai rencontrée il y a cinq ans en déménageant juste à côté de chez elle. Elle était enceinte de treize semaines et moi de douze semaines. Nous avons accouché à dix jours d’intervalle et nous avons passé nos journées ensemble à rire, pleurer et chialer qu’on n’en pouvait plus. Quand on nourrissait nos bébés la nuit, on s’écrivait, on échangeait, on se motivait. On a tout fait ensemble… cuisiner, se promener, aller au parc, pleurer, se baigner, voyager sans jamais se juger. Quelle belle amitié! C’est mon âme sœur féminine! On s’aime!

Mon autre vraie amie fait partie de ma vie depuis seulement un an. C’est ma pharmacienne! Une fois, je suis arrivée à son comptoir en pleurant, car mon plus jeune fils n’allait vraiment pas et elle m’a écoutée comme une vraie mère. Je l’ai revue quelques jours plus tard dans un stationnement et c’est elle qui ne feelait pas, alors j’ai tendu l’oreille. On s’est rendu compte que nos plus jeunes allaient au même CPE et qu’on s’entraînait au même gym. On s’est dit : « On est dues pour être amies! ». De là est née une amitié sans limites, des fous rires sans fin, des textos de conseils, des sorties entre célibataires et des sorties avec nos enfants. Elle se préoccupe plus de mon bien que du sien! Une vraie de vraie!

L’amitié, la véritable amitié, peut survenir à n’importe quelle étape de notre vie. Il suffit d’être prêt et à l’écoute de nos besoins. Dites-vous bien qu’un vrai ami est là pour vous soutenir et non vous juger. Un vrai ami est là dans vos pires comme dans vos meilleurs moments. Un vrai ami est capable de vous dire vos quatre vérités sans vous blesser. J’ai plusieurs amis, mais mes vrais, je peux les compter sur les doigts d’une main.

Vidée

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« Chérie, qu’est-ce que t’as? T’es sûr que ça va? T’avais pas l’air de feeler tantôt? »

Au téléphone, je réponds simplement : « Mais oui. Je suis fatiguée comme d’habitude, c’est tout. »

Je voudrais tant lui dire à quel point ça ne va pas. Que mes pensées sont souvent en guerre et que mes larmes en sont le sang versé. Que mon corps fatigué en est le champ de bataille.

Mais cette belle douleur, je la garde pour moi. Je lui dois d’être forte.

Mais qu’est‑ce que je pourrais bien lui dire alors que je ne connais pas réellement la source de mes douleurs? De quoi vais‑je encore me plaindre?

J’ai la chance d’avoir un homme qui m’aime, trois enfants en santé.

Alors, lorsque je me retrouve seule, pourquoi ai‑je la folle sensation que je vais tomber? Que j’ai fait le dernier pas possible, que mes genoux vont enfin lâcher afin que je puisse m’avouer vaincue… vidée.

Ce point dans ma poitrine qui s’est pointé le bout du nez il y a plus d’un mois maintenant m’a fait réaliser que je ne suis pas faite d’acier. Un jour, je tomberai.

Je suis si douée pour prendre soin des autres… pourquoi suis‑je incapable de prendre soin de moi? Ou est‑ce un laisser‑aller inconsciemment volontaire?

Je ne sais pas. Je ne sais plus.

Maman est vidée. Littéralement vide. J’avance sur le pilote automatique en espérant de toute mon âme croiser la station d’essence très bientôt. J’ai besoin de faire le plein ou de me brancher dans une source d’énergie. De sentir cette belle énergie me submerger à nouveau.

Pour l’instant, mes pleurs se font discrets sous la chaleur réconfortante de la douche. Le jet arrive directement sur mon visage, la chaleur apaise ma douleur. Mes larmes se font transporter par le courant de l’eau jusqu’aux égouts, pour aller directement à l’usine d’épuration d’eau. On y enlève tous les déchets afin que mes larmes soient déversées dans la rivière.

À partir de ce jour, chaque fois que je contemplerai une rivière, la mer… peu importe le courant d’eau, je penserai à toutes ces femmes qui ont su maintenir le niveau de l’eau. La mer est faite de larmes. Vos larmes sont maintenant nettoyées de toute tristesse afin de se transformer en vraie beauté.

 

C’est la relâche : à go, on se compare!

À quoi ressemblera votre semaine de relâche? Des plans de voyage?<

À quoi ressemblera votre semaine de relâche? Des plans de voyage?

Selon les dires de mes enfants, TOUS les élèves de leurs classes partent en voyage chaque année à la semaine de relâche (et encore à Noël, à Pâques et pendant les vacances d’été). Nous sommes apparemment les seuls qui ne font pas le tour du monde dès qu’il y a une fin de semaine de quatre jours.

– Mon amie Ariel a passé la semaine à Disney avec ses grands-parents!

– Mon voisin Christophe est allé visiter l’Italie l’été dernier!

– Le cousin de la fille de mon enseignante revient de Los Angeles, elle a rencontré plein d’acteurs.

Tant mieux pour eux.

– Oui, mais, maman! Pourquoi nous, on ne voyage pas? On est les seuls qui restent ici.

– Vraiment?

Chaque année, nous avons la même discussion en famille.

Mes chéris, je comprends que vous aimeriez voyager et découvrir le monde. C’est vrai qu’ils sont chanceux, vos amis. Si leurs histoires de voyages sont vraies, évidemment (se pourrait-il, par hasard, que certains « inventent » des aventures vraiment cool pour bien paraître en classe? Et que dans la vraie vie, ils soient restés sur leur divan toute la semaine?)

Quand vous étiez plus jeunes, on a beaucoup voyagé avec vous. Avant d’entrer en maternelle, vous aviez déjà visité quelques états des États-Unis, la France, Monaco, Hawaii et l’Alberta. Votre terrain de jeux, c’était les Rocheuses de la Colombie-Britannique. On a visité une bonne partie de l’Ontario et du Québec avec vous. Pas si mal, quand même! Mais c’est vrai, on n’est jamais allés à Disney. Et c’est vrai, dans les dernières années, nos expéditions ne nous ont pas amenés aussi loin.

Pourquoi, donc?

Entre autres parce que par bout, vous avez des comportements tout à fait inadéquats en voyage. Je ne parle pas juste des petites chicanes de frères et sœurs ou d’un refus de dire merci à un serveur au restaurant. Non. Je parle de crises monumentales dans l’avion ou dans un musée. Je parle de pétages de coche destructeurs déclenchés par l’heure de dormir ou par un « les enfants, c’est le temps de rentrer ». Je parle de comportements qui effritent les relations familiales, qui dérangent les autres voyageurs et qui m’épuisent. Énormément.

Aussi parce que voyager avec quatre enfants peut coûter un bras, une jambe et une hanche. Juste prendre l’avion, pensez-y! 5 000 $ de billets d’avion, plus les repas, l’hôtel, les activités… disons que ça fait un pas pire trou dans un budget! Je sais, je sais, il y a des façons moins dispendieuses de voyager, et c’est là-dessus que je mise. Mais je me vois mal m’embarquer dans une semaine de camping dans le bois, seule avec deux ados et deux p’tits pets. Le défi me semble juste trop disproportionné par rapport à mes capacités actuelles. Ça changera sûrement dans les prochaines années, quand vous aurez grandi et que j’aurai repris confiance en moi.

Une des raisons pour lesquelles on ne voyage pas à l’étranger pour l’instant, c’est que je choisis de prendre le temps libre qu’on a en famille pour visiter les gens qu’on aime et de qui on habite loin, et aussi pour vous faire connaître des coins de notre monde. Les parcs, les plages et les musées de notre coin de pays sont diversifiés et valent la peine de les découvrir.

Je choisis aussi, une fois de temps en temps, de prendre ce temps pour nous tous seuls. Pour se coller en regardant un film dans la maison que j’ai choisie pour nous, pour que nous y soyons bien et que nous vivions de beaux moments. Si nous sommes toujours partis, à quoi ça sert d’avoir un nid qu’on aime?

Et même, mère effrontée que je suis, je choisis parfois d’avoir du temps pour moi, de ne pas être épuisée le soir après une journée de déplacements et d’activités à l’extérieur de la maison. Je choisis d’avoir le temps d’organiser notre espace de vie, de jardiner, de peindre vos chambres ou tout simplement de regarder nos plantes pousser. Ça aussi, ça donne des souvenirs mémorables, et ça permet de rendre la routine un peu moins folle le reste de l’année.

Disney existera encore dans dix ans (j’y suis allée pour la première fois pour célébrer mes quarante ans). Les avions continueront de voler. Et checkez ben ça le fun qu’on aura cette année encore à la relâche! C’est peut-être vous que les autres élèves envieront.

Nathalie Courcy