Au nom du père

Aujourd’hui c’est la fête des Pères. De TOUS les Pères.

Les jeunes, les vieux, les nouveaux, les bons, les beaux, les absents.

Oui, c’est ta fête aussi, toi, le père de mon enfant. Toi qui ne l’as jamais voulu. Toi qui, maintenant, revendiques tes droits au nom du Père, du Fisc et du Mâle démis.

Oui, toi! C’est ta fête aussi. Du moins, selon le calendrier…

Alors pour ta fête, j’ai quelque chose à te dire, à toi que j’ai choisi pour être le père de mon enfant. Ou devrais-je dire que la vie a choisi, car quand j’y repense, ce n’est pas TOI que j’ai choisi, c’est la vie de notre enfant, en refusant d’avorter alors que ce petit bout de nous avait décidé de s’installer dans mon ventre sans être désiré. Une conception maculée de parjures au nom du Père, du lit et de ton Sacrosaint pénis.

Oui, je le confesse sans honte désormais. Notre enfant n’est pas le fruit de notre amour. Il est le pêché originel qui a donné le coup de grâce à ce qui me restait d’amour-propre. Il est à la fois ma damnation et ma rédemption pour les souffrances que cette relation toxique a stigmatisées dans mon être, au nom du Père, du Vice et du Mal appris.

Je t’entends déjà me dire que je confonds encore conjugalité et parentalité. Que nos histoires de couple et la violence que tu m’as fait subir pendant nos dix ans de vie commune n’ont rien à voir avec notre enfant. Que c’est pour qu’il ne soit plus témoin de cette violence que tu m’as quittée dans une autre démonstration de la puissance de ta colère à laquelle notre enfant a encore assisté, au nom du Père, du Vil et du Sang vomi.

Tu m’as quittée, mais cela n’a pas mis fin à ton comportement violent envers moi, parfois encore devant notre enfant. Mais plus souvent, de façon sournoise et tout aussi efficace, sous couvert de la loi. Je suis soulagée, cependant, que notre enfant soit moins directement exposé à tes instincts destructeurs envers sa mère. Mais ne t’attends quand même pas à ce que je te donne ma bénédiction au nom du Père, du Fils et de l’ex soumise.

M’avoir quittée ne fait pas de toi un meilleur père. Même si tout au long de ces années de vie commune, tu as tenté de me convaincre que tout était de ma faute, et en particulier ton comportement envers moi. Que c’était moi qui faisais ressortir le méchant en toi. Que je suis une mauvaise mère parce que je tente de protéger notre enfant de son père. À t’écouter, je devrais me faire exorciser au nom du Père, du Psy et du Satirique.

Je te l’accorde, je suis maudite, car je partagerais toujours l’autorité parentale de cet enfant avec toi. Pour le meilleur et surtout pour le pire. Tu es son père. Légalement et biologiquement. Cela ne fait pas de toi un Saint-Père pour autant. Le titre n’est pas la fonction. Mais au regard de la fête des Pères, je m’en remets au jugement dernier de notre Fils, au nom de la Mère, du Lys et du Sain d’esprit.

 

Eva Staire

 



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