L’apprentissage de l’amitié — Texte : Jessica Archambault

Lorsque nos enfants vivent de belles fiertés, des succès et des bons coups, on trouve ça si merveilleux, on partage leur joie, on a même l’impression de les vivre avec eux. D’un autre côté, lorsqu’ils vivent des difficultés ou des épreuves, ça peut parfois éveiller de vieilles blessures d’enfance.

En amitié, je suis plus heureuse avec quelques très bon(ne)s ami(e)s qu’une meilleure amie fusionnelle. Cependant, les enfants ont souvent un ou une meilleur(e) ami(e), ce qui fait que j’ai souvent eu l’impression, à l’époque, de servir de bouche-trou, qu’on jouait avec moi en attendant que la « best » revienne. En vieillissant, j’ai réalisé que je trouvais trop envahissant la relation avec une seule meilleure amie. Mes quelques très bons amis me convenaient tout à fait. Encore aujourd’hui, je suis très heureuse avec mes précieuses, comme j’aime les appeler.

Mon grand a toujours été un peu maladroit pour entrer en relation. En maternelle, le contexte des îlots de quatre à faire diverses activités comme du dessin, du bricolage, des blocs, etc. était propice à créer de beaux liens avec d’autres enfants. Malheureusement, en raison de la gestion du territoire de notre secteur, plusieurs enfants ont réintégré leur école de quartier pour la première année. Mon grand s’est donc retrouvé à devoir créer de nouveaux liens surtout dans la cour d’école qui était en mode « guerre des tuques » à la rentrée et une partie de l’automne.

Depuis qu’il est petit, lors de différents conflits ou lorsqu’il est attiré vers des enfants qui ne sont pas nécessairement gentils avec lui, nous lui répétons que les gens qu’on aime, nos amis ou nos amours, doivent nous rendre heureux, qu’ils doivent nous faire nous sentir bien, qu’on peut se chicaner parfois, mais que ceux qui nous aiment voudront qu’on soit bien. Donc, par le fait même, si un autre enfant ne le fait pas se sentir bien, c’est probablement parce que ce n’est pas un bon ami. Rien pour critiquer les autres enfants, plutôt une façon de lui expliquer qu’il y a des « matchs » amicaux et que si ça ne clique pas avec certains, on les respecte, on peut jouer avec eux à la garderie ou à l’école, mais ce n’est pas obligé d’être plus, on n’a pas à les inviter à la maison ou à forcer les choses.

Il a continué à fréquenter ses amis (quand les parents s’entendent bien, ça aide !) qui ne sont plus à son école. Nous avons également tenté de l’accompagner dans ses nouvelles relations avec d’autres enfants de l’école bien que notre cœur se soit serré quelques fois lorsqu’il nous racontait les chantages émotifs et les commentaires désobligeants sur son physique.

Lorsqu’est venu le temps de prévoir son anniversaire, il a d’emblée voulu inviter ses amis précieux. Seulement deux de l’école ont été choisis. Au début, ça le préoccupait. Il jonglait avec l’idée d’inviter des garçons de sa classe. Nous lui avons proposé également d’en inviter un ou deux à jouer à la maison avant, question de voir si ça clique, de l’aider à développer des liens, tout en lui rappelant qu’il a déjà de si bons amis. Après réflexion, il a décliné en nous disant qu’il veut être certain qu’un enfant soit son ami avant de l’inviter chez lui. Il a maintenu ses invitations d’anniversaire telles quelles. Il en avait invité tout de même sept.

Je les regardais dimanche… Ils étaient si beaux. Sept amis, dix enfants au total avec les petits frères, certains se connaissant, d’autres non. Ils se sont tous bien entendu, ont joué, dansé, discuté. Aucun commentaire désobligeant sur qui que ce soit, aucun geste d’impatience envers les petits frères si contents d’être avec les grands. Notre grand brillait au milieu de sa gang, heureux, lui-même, accepté et aimé au complet pour tout ce qu’il est par ses amis. J’étais émue.

Je me suis dit qu’il comprenait des choses bien plus vite que moi. Peu importe d’être cool ou populaire, peu importe ce que les autres enfants de l’école disent, il sait s’entourer d’enfants positifs et développer de saines amitiés.

Il y a d’autres défis et il y aura d’autres embûches, mais à travers tous les questionnements que soulève notre rôle de parents, à travers cette perpétuelle quête de l’équilibre, ça fait du bien de s’arrêter parfois pour souligner les bases solides que nous aidons nos enfants à bâtir.

Jessica Archambault



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