Tag deuil

Faire un deuil de l’abstrait…

<span style="font-family: 'Candara',sans-serif;"

À toutes celles (et tous ceux) qui vivent un deuil périnatal,

À vous toutes qui avez vécu le pire en ce temps de pandémie, vous n’êtes pas seules. Même si vous êtes passées par tous les échelons médicaux sans épaule pour pleurer, sans main pour vous tenir debout, sans les yeux doux de votre partenaire pour vous soulager. 

Nous sommes plusieurs femmes à partager cette souffrance. En silence, mais ensemble. Nous avons entendu les mots : avortement spontané, grossesse ectopique, grossesse pathologique. Notre monde s’est arrêté, la réalité qu’on s’imaginait s’est effacée. Nous avons dû entamer un deuil de l’abstrait, si c’était notre première grossesse. Un deuil plus concret si nous connaissions déjà la joie d’être parent.

À toutes celles qui ont pleuré devant ces spécialistes qui sont immunisés face à ces nouvelles désastreuses, qui ont pleuré lors de leurs contrôles d’hormones, qui ont pleuré dans leur lit, vous n’êtes pas seules.

À tous ces partenaires bienveillants qui vivent le même deuil, mais à qui on ne donne pas la chance d’être aux rendez-vous médicaux, vous n’êtes pas seuls. Nous avons vu vos cent pas dans le stationnement, nous avons senti vos caresses douces et apaisantes. Vous méritez tous les éloges puisque vous êtes ces rocs qui traversent la tempête avec tellement de courage.

À vous tous qui vivez ces moments indescriptibles et douloureux, en temps de pandémie, même si vous vous sentez seuls au monde, sans vos proches et leur présence physique, vous n’êtes pas seuls.

Je nous souhaite de prendre le temps de combler cette absence et d’en sortir un peu plus forts. Je me sens moins seule en sachant que vous comprenez ce deuil de l’abstrait, comme moi.

Geneviève

Ta dernière photo – Texte : Kim Boisvert

Quand t’as pris cette photo, le savais-tu que c’était ta derniÃ

Quand t’as pris cette photo, le savais-tu que c’était ta dernière ?

En voyant tes joues pleines de rosacée et tes cheveux trop blancs apparaître sur le mur Facebook d’une amie, suivis du lien vers la chronique nécrologique, la tienne, mon cœur a vraiment fendu en deux. Deux beaux morceaux. Tu m’en partageais tout le temps de tes morceaux, d’ailleurs.

Et la première chose qui m’est venue en tête, après les condoléances et pensées pour ta famille, c’est vraiment de savoir si au moment précis où tu as pris cette photo, tu savais que c’était presque la fin.

Un peu plus d’un an après ta retraite. Ça m’a fait réfléchir, Coco. Tu me disais tout le temps que t’en profiterais de ta retraite pour gâter ton petit-fils et passer du temps avec ta fille. Que c’était ça, le plaisir d’être grand-maman. Tu pouvais garder, jouer et ensuite, tu le « shippais » à sa mère. La belle vie ! Ta belle vie de retraitée n’aura duré qu’un peu plus d’un an.

Ça m’a fait réfléchir, Coco. On passe notre vie à planifier notre retraite et le temps où on sera plus lousse, plus tranquille. Mais dis donc, le savais-tu que c’était pour être aussi court ? As-tu eu le temps de profiter de tes belles armoires de cuisine dans ton condo ? Ce soir, en regardant les miennes, je penserai à toi. Parce que mes armoires, je les aime pas tant que ça. Je devrais bien penser à les mettre à mon goût avant ma dernière photo.

Ça m’a fait réfléchir, Coco. Parce que tu me disais tout le temps : « Ben y vont attendre ». Toi, y’ont pas attendu ben ben, je trouve. Me semble que douce comme t’étais, y’auraient pu t’en laisser un plus gros boutte et venir chercher des gens pour qui ça vaut pas la peine d’attendre. Je peux même « name dropper » du monde, si tu veux.

Ça m’a fait réfléchir, Coco. Je me souviens que tu m’avais dit que j’étais mieux de partir heureuse que de rester malheureuse. Toi, es-tu partie heureuse ?

Kim Boisvert

Le jardin de paix — Texte : Jessyca Brindle

Parce qu’avant de partir, de mettre la clé dans cette porte, je d

Parce qu’avant de partir, de mettre la clé dans cette porte, je devais faire le ménage de mes pensées, faire le ménage de ce qui me fait du mal, pour n’apporter que ce qui me rendra plus légère. Il y a quelques semaines, je suis tombée sur les papiers du rapport du coroner et du rapport détaillé des ambulanciers. Je n’ai pas pu m’empêcher de lire et de re-re-lire ces documents qui m’amènent tellement de peine et en même temps de la frustration.

Pendant plusieurs jours, cette émotion, je la transportais dans un bagage invisible mais tellement douloureux. J’ai décidé de prendre un instant pour voir ma psychologue et pour lui parler de ce que je ressentais et à quel point mon esprit était encore dans ce tourbillon interminable de souffrance. Elle m’a expliqué que ces papiers ne me rappellent rien de bon ; ils ne me rappellent que le décès de ma fille. Que si j’en étais capable, il était temps pour moi de brûler ces papiers pour que plus jamais, je ne puisse retomber dessus. Cela m’éviterait tellement de mal et pourrait apporter simplement du doux dans ma vie et dans mes pensées.

Ce n’est pas instantané ni magique, mais juste une liberté qui se développera un peu chaque jour. Je me suis assise auprès du feu, j’ai ressorti les documents. On dirait qu’ils pesaient si lourd entre mes doigts pourtant, il n’y avait que six pages au total. Je n’ai pas relu ces papiers, j’ai simplement parlé à ma fille et je lui ai expliqué pourquoi maman se devait de brûler les papiers (avec l’accord de papa, bien sûr).

Ma plus grande crainte était qu’elle ne nous le pardonne pas et qu’elle se sente oubliée. J’ai donc eu une discussion en tête à âme avec elle. Je lui ai déclaré tout mon amour inconditionnel. Je lui ai expliqué que c’était ma façon de lui donner enfin ses ailes d’ange.

Une fois les papiers brûlés, j’ai ressenti cette chaleur se déposer sur mes genoux. J’ai ressenti un sentiment d’apaisement et de soulagement. Je me donnais le droit de me libérer et de respirer davantage pour mieux me connecter à ce que la vie m’inspire.

J’amène avec moi du doux, de la légèreté, du bonheur, de la paix, mais aussi le droit d’être tout simplement, en me donnant le droit d’amener les souvenirs d’amour…

Jessyca Brindle

Oui, ta m̬re va mourir РTexte : Kim Boisvert

J’aimerais ça te dire, ma belle grande brune aux cheveux sexy et

J’aimerais ça te dire, ma belle grande brune aux cheveux sexy et aux jambes longues comme l’hiver, que l’aventure qui commence pour toi va être le fun, sereine et pas si difficile que ça. Attache-toi bien, ce que je vais te dire sera pas doux.

Tu m’as écrit un courriel pour me dire que pour ta maman, les médecins avaient abandonné. C’est officiel, ils la laissent dériver dans une rivière qui bouge un peu trop à ton goût. Probablement à son goût à elle aussi. Au mien aussi, by the way. Ça m’attriste et en écrivant ces quelques lignes, je me rends compte que ça t’aidera peut-être pas tant que ça pour te réconforter, mais je mise sur le fait que tu me connais, tu sais que je vais pas t’écrire une belle chanson d’amour avec plein de rimettes pour te dire que la vie à venir va être chouette. Ça aura au moins le mérite d’être différent que ce que 90 % des gens vont te dire dans les prochains jours, mois, semaines. Plus difficile, mais pas vide.

Ta mère va mourir. C’est tough à lire, tu trouves ? Attends de le vivre. Moi, je n’ai pas eu la chance que t’as d’être proche de ma mère. En fait, c’est peut-être plus une chance pour moi, finalement. Bref, j’avais envie de te raconter des vérités.

— Elle va mourir. On ne sait pas quand. Alors, arrête de penser que ce sera demain. Parce que tout le temps que tu passes à attendre sa mort, tu oublies de vivre ta vie à toi. Ce serait bête que le cancer te gruge ta vie à toi aussi, tu ne trouves pas ?

— Elle aura certainement besoin que tu sois forte pendant les derniers jours. Mais t’as le droit de craquer. T’as ben beau avoir le cul tight, des beaux enfants, une belle carrière pis une superbe personnalité, calme-toi, t’es pas Wonder Woman. Pleure, crie, varge, mais sors ce qui te blesse. Accepte ta peine. Vis ta peine. Dis-le que t’as de la peine. Fais pas comme si t’en avais pas. Je ne te croirais pas.

— Tu vas te sentir impuissante. Y’a rien à faire, fais-toi à l’idée. Mais t’es juste impuissante face à sa maladie. T’as le pouvoir sur tout le reste. Comment tu vas réagir face aux prochains jours, semaines, mois et années. T’as le pouvoir de décider de vouloir profiter de chaque moment. T’as le pouvoir de lui dire tout ce que tu lui as jamais dit. T’as le pouvoir de décider de la faire rire le plus longtemps possible. T’as le pouvoir de continuer ta vie. T’as le pouvoir. Prends-le.

Ma belle grande brune au sourire éclatant, ça ne sera pas drôle. Mais ce qui est génial, c’est que t’as encore du temps, une famille, des souvenirs à chérir. T’es riche d’amour. Demande-lui de t’écrire ses recettes préférées, des recettes de ton enfance. Elle vivra alors gaiement dans tes chaudrons. Demande-lui de t’écrire une lettre que tu ouvriras à tes 40 ans. Payez-vous un shooting photo professionnel en famille pour célébrer la vie, et non vos souvenirs de la maladie. Demande-lui si elle a peur et écoute-la. Demande-lui qu’elle te dise trois choses qu’elle regrette de ne pas avoir faites dans sa vie et si vous n’avez pas assez de tours au compteur de lousses pour réussir à les faire avant son grand départ, fais-les plus tard, pour elle, pour vous.

C’est là, alors que tu sais que tu ne peux rien contrôler, que tu dois tout faire pour être en paix avec ce qui arrive.

C’est là, alors que je sais que je ne peux rien faire pour t’aider, que j’ai écrit quelques lignes pour te montrer mon soutien.

Parce que quand j’ai perdu ma mère, j’aurais préféré avoir le vrai et le laid.

Kim Boisvert

Fak, maman – Texte : Kim Boisvert

Maman,

T’es déjà dans ton t

Maman,

T’es déjà dans ton trou, que tu t’es toi-même creusé, tu sais donc pas ce que ça fait de sentir le sien grossir.

Aujourd’hui, j’voulais me mettre belle pour souligner ton décès. J’pense que ça m’aide habituellement à faire passer cette journée. Mais pas aujourd’hui. J’ai l’nez qui coule autant que mon envie de te crier des bêtises. Fak, d’où t’es, tu m’verras partir pour le bureau les yeux un peu moins brillants et avec un chandail vieux comme le monde. J’espère que t’es contente.

On t’a enterrée, on dirait que c’était hier. J’aimerais ben ça suivre mon cœur pour te dire des mots doux de cadette en peine, mais ce matin, aujourd’hui, assisse sur ma petite chaise d’ordinateur, je me rends bien compte pourquoi j’ai pas pu suivre mon cœur ; il est en morceaux. Je sais donc pas quel boutte suivre. Fak, fais avec, oh, et je vais m’attacher les cheveux, je sais que t’aimais mieux quand ils étaient lousses.

J’imagine que tout le restant de ma vie, je vais avoir un peu le feeling d’avoir été semi-orpheline. Je dis semi parce que t’auras pas été là à beaucoup d’étapes. On en a grillé pas mal, t’en as volontairement scrappé, et les autres, j’voulais pas te les partager. J’pensais que j’avais le temps de te faire vivre ma colère, le temps d’une vie. J’savais juste pas que t’avais décidé de t’abandonner dans la maladie. Carpe diem, paraît. Fak à cause de ça, tu verras jamais ma passion pour la photo grandir, tu verras jamais mes enfants. Elles ne pourront connaître de toi qu’une photo vieille de quand j’avais 27 ans et toi 49. Tu ne seras pas là le jour de mon mariage. Tu sais, à cause de toi, y’aura pas de table d’honneur, parce que sinon ça me rappellerait que je suis semi-orpheline. Fak, j’espère que t’es contente.

J’sais pas trop si tu sais qu’en bas, on était là pour toi. Ce que je sais c’est que toi, tu seras pu jamais là pour nous. Ni pour personne. Fak aujourd’hui, j’irai pas t’voir, pis j’vais essayer de pas penser à toi toutes les minutes de cette journée. Parce que tu nous as abandonnés une journée d’automne, pis que c’est ma saison préférée.

Kim Boisvert

Le deuil en temps de pand̩mie РTexte : Carolanne Fillion

Depuis le début de la pandémie, on accorde une très grande import

Depuis le début de la pandémie, on accorde une très grande importance au nombre de décès causés par la Covid-19 sans y ajouter les décès reliés à d’autres causes. Avez-vous pensé au nombre de personnes endeuillées qu’il pouvait y avoir pour chaque décès ? Faites-vous partie de ces Êtres Humains qui ont perdu un être cher ? Que vous soyez un endeuillé ou l’accompagnateur d’une ou peut-être même de plusieurs personnes décédées, ce texte vous parlera sans doute. Et pour ceux qui ont la chance de ne pas avoir vécu le départ de quiconque d’important à leurs yeux depuis le début de la pandémie, je vous invite à terminer votre lecture et à écrire par la suite à une personne que vous aimez pour le lui dire.

Le décès d’une personne commence, la plupart du temps, par la maladie, la détérioration de l’état de santé. Les mesures mises en place ne permettent pas d’aller rendre visite à ceux qui sont en santé et encore moins aux personnes malades. Ce qui veut donc dire que, depuis le début de cette pandémie, il y a maintenant presque un an, on ne peut voir ceux qu’on aime que par visioconférence. Et la visioconférence, c’est pour les chanceux, ceux qui ont encore leur être cher en vie. Mais peut-être avez-vous eu la chance de parler à ceux que vous aimez avant qu’ils rendent leur dernier souffle. Pour ma part, ma famille proche a pu voir ma fille une dernière fois avant qu’elle soit mise en terre, une dernière fois dans son cercueil. Ça faisait un an que personne ne l’avait vue rire, sourire, vivre…

Parlant de cercueil, les funérailles… Les funérailles, c’est pour les chanceux qui peuvent assister à l’exposition et au dernier au revoir du défunt. Parce que, malheureusement, cette chance n’est pas réservée à tous les proches qui ont perdu quelqu’un. Un maximum de 25 personnes est autorisé dans les salons funéraires et les églises. 25 personnes, si on fait un calcul rapide pour ma fille, ça inclut les parents, grands-parents, arrière-grands-parents et nous avions déjà plus de la moitié de la capacité maximale. Depuis quand, lorsqu’on perd l’un des nôtres, devons-nous choisir qui peut et qui ne peut pas être présent ? Depuis l’arrivée de ce virus, il n’est plus autorisé de faire des funérailles à la hauteur de la personne décédée. Parce que, maintenant, les funérailles c’est un maximum de 25 personnes qui doivent porter un masque, qui doivent être à deux mètres les unes les autres, qui ne peuvent se donner la main ni même se prendre dans les bras.

Le deuil, c’est une série d’étapes qui peuvent être dans un ordre différent d’un endeuillé à l’autre. Les mesures sanitaires nous empêchent depuis près d’un an d’être entourés pour faciliter une ou même plusieurs étapes. Elles nous obligent à vivre tout ça entre les quatre murs de notre maison, seul, seul avec notre peine. Ce qui était rassurant pour moi, c’était de savoir que je pouvais aller voir ma fille au cimetière quand je ressentais le besoin de lui parler ou juste pour m’étendre à côté d’elle pour regarder les étoiles. Mais depuis quelques semaines, on me force à ressentir ce besoin entre 5 h et 20 h. Nous devons donc apprendre à vivre notre deuil sans la présence physique de nos proches…

J’aimerais finir par souhaiter mes plus sincères condoléances à tous ceux et celles qui ont été touchés de près ou de loin par la perte d’un être cher au courant de leur vie. Que ce soit en temps de pandémie ou non, le décès d’une personne aimée entraîne des sentiments difficiles à vivre, peu importe l’année qui est gravée sur l’épitaphe.

Carolanne Fillion

Mes deuils, nos deuils, leurs deuils… Texte : Ghislaine Bernard

On nous dit qu’il y a des étapes : déni, colère, marchandage,

On nous dit qu’il y a des étapes : déni, colère, marchandage, dépression, acceptation sont leur nom. Même si au départ, ces cinq étapes étaient le résultat d’une recherche concernant l’annonce à une personne atteinte d’une maladie incurable et non endeuillée (Dre Kübler-Ross), nous pouvons facilement trouver des similitudes entre ces étapes et les sentiments que l’on vit à la perte d’un être cher.

Je vous parle de cela aujourd’hui, car je suis en deuil, en deuil de plusieurs personnes qui m’ont été d’importance. Je me réveille tout juste d’un rêve (un cauchemar ?) où mes disparus chantaient et dansaient. Oui, il y a plusieurs façons de voir cela. Ils dansaient sur la mélodie publicitaire très populaire en son temps « Amène-moi à la ronde » et ils dansaient tous ensemble, en ronde un peu loufoque. Ils étaient joyeux, ils riaient et semblaient au comble du bonheur. Se sont ajoutés à cette ronde tous mes disparus, du plus récent au plus ancien.

Je peux vous dire que mon réveil fut brutal. Émotive, sous le choc, je me suis levée tremblante et j’ai lutté contre cette panique, cette anxiété qui est mon lot quotidien depuis quelques mois et à laquelle j’apprends à ne pas succomber le souffle coupé, les membres tremblants de sueurs. Mes tempes résonnent au moment d’écrire ce texte et j’ai ce ver d’oreille qui persiste…

Si je reviens aux fameuses étapes, le déni. Refuser de croire que la réalité est ce qu’elle est. Que le passage d’une personne s’achève ou soit définitivement terminé. Je crois que cette réaction normale est en fait une surprise (pas du genre plaisante, j’en conviens !) Un sentiment d’irréalité. Lorsque mon amie nous a quittés il y a quelques semaines, j’étais abasourdie par toute la vitesse, le dénouement, cela me semblait fantasque. Comment était-ce possible ? Puis, la réalité ne pouvait être niée : elle n’était plus là. Simplement… douloureusement.

La colère. Je peux vous dire que chaque départ me vrille le cœur et je me révulse contre l’injustice de certains départs par rapport aux gens qui restent, mais qui ne… méritent pas cette chance ! (oui, je porte encore cette colère, mon deuil étant très récent et présent. Veuillez m’en excuser.) Mes sentiments ne sont aucunement confus. Je suis en colère, encore à ce jour, de l’injustice de la fatalité, mais je n’y puis rien. Je crois, je sais, que la colère s’estompera.

Marchandage. Je n’ai pas envie de marchander. Je ne PEUX pas humainement marchander. Comment pourrais-je avoir veto de vie ou de mort? Mes défunts, qu’ils reposent en paix, ne sont pas plus importants que les vôtres. Ne font pas plus souffrir que les disparus des autres. Alors qui suis‑je pour penser qu’une personne aurait dû « partir » avant les miens ? Même si…

Dépression. Bon, je suis depuis plusieurs mois en dépression majeure. Je me relève petit à petit. Je suis bien prise en charge et le décès de cette amie chère en tout pour moi est survenu alors que j’étais déjà… malade. Ça m’a scié les jambes, mes symptômes ont été décuplés durant quelque temps. Je suis, encore, à me battre avec les ressentis de ses symptômes. Je revois pour l’instant cruellement des instants de vie. Des anecdotes joyeuses et moins heureuses. Je revois en moi derrière mes paupières NOS moments. La peine que ce soit fini, que ça ne se reproduira plus jamais est immense. Ça fait mal, tellement mal !

L’acceptation, socialement souhaitable, personnellement préférable pour continuer d’avancer. Passage obligé si l’on ne veut pas être submergé. Je n’accepterai jamais cette injustice. Cette douleur d’une perte si prenante. Mais je peux accepter les faits, je n’en ai pas le choix. La réalité est ce qu’elle est, aussi dure et douloureuse soit-elle.

Bref, cinq étapes. Je crois que ce sont de beaux mots pour nous aider à nous accrocher à du vrai, à du concret pour ne pas être submergés définitivement. Alors voilà, je ne sais pas trop où me mène cet échange avec vous. Ce partage de ma douleur. Je sais tellement que nous en portons tous ! Je sais qu’une perte est parfois plus « importante » dans le sens plus près, plus forte dans certaines situations. Mais n’oublions jamais que nos douleurs, elles sont les pires à nos yeux, car ce sont les nôtres. Ce sont NOS sentiments, nos peines. Il n’y a rien de pire que ce que l’on porte et nous avons le droit de l’exprimer. Nous avons le devoir, oui le devoir d’exprimer nos deuils. Car la mort fait partie de la vie.

Je voulais vous partager tout ceci, ne serait-ce que pour encourager ceux qui, comme moi, souffrent ou souffrirons… Demandez de l’aide si vous en avez besoin. Si vous ignorez en avoir besoin, parlez avec des professionnels, ne serait-ce que pour éviter un déni qui vous fera d’autant plus de mal. Ne restez pas seuls, vous ne l’êtes pas… nous sommes tous dans le même bateau :

Nous naissons, nous vivons et nous mourrons… un éternel cercle de vie… « Amène-moi à la ronde, la ronde… »

Simplement Ghislaine

N.B. Il existe énormément de ressources d’aide pour « vivre » et surtout survivre au départ définitif d’une personne. Voici quelques liens :

https://www.lagentiane.org/

https://www.indexsante.ca/clsc/

https://www.esantementale.ca/Quebec/Deuil/index.php?m=heading&ID=132

Quand la vie s’épuise – Texte : Marie-Eve Massé

La mère de mon chum est en phase terminale. Nous avons reçu le dia

La mère de mon chum est en phase terminale. Nous avons reçu le diagnostic du cancer mi‑janvier : phase 4, non opérable et guérison impossible. Le coup a été pas mal brutal. Elle a été hospitalisée deux semaines… Deux semaines épuisantes comme pas possible. Je passais tout mon temps à l’hôpital, mes journées entières à rencontrer des spécialistes, des médecins de tout genre, à répéter à ma belle-mère ce que le personnel lui expliquait, à expliquer encore et encore quel serait le prochain test, à vulgariser son dossier, à la réconforter et à l’accompagner dans tout ça. Je me suis découvert une force et des talents que je ne connaissais pas… et mon dieu que je me suis épuisée à la tâche.

Avant tout ça, elle était en forme malgré qu’elle soit affaiblie suite à un petit AVC et une pneumonie, nous avons bon espoir qu’elle sera admissible à certains traitements. Il lui reste entre six mois (sans traitements) et deux ans à vivre. Nous attendons impatiemment le rendez-vous avec l’oncologue dans deux semaines pour connaître la suite des choses. Elle s’affaiblit de jour en jour à cause de la pneumonie, mais nous gardons tous l’espoir d’une fin de vie relativement longue et dans le confort de son foyer. Son conjoint et elle parlent de se marier au printemps.

…

Le rendez-vous était censé être aujourd’hui. Samedi dernier, après notre départ de chez elle, elle se sentait très mal. Vers 8 h, elle est partie en ambulance parce que son taux d’oxygène était très bas et elle commençait à être déshydratée malgré que nous sommes aux petits soins. La roue de l’hospitalisation a recommencé à tourner. Mais elle s’est mise à tourner tellement vite ! Dimanche, nous parlions d’une infection au poumon et d’un retour à la maison avec de l’oxygène d’appoint. Puis lundi, les médecins sont venus nous dire que le cancer évoluait trop vite, qu’il y avait trop de dégâts. Lundi midi, j’ai expliqué à ma belle-mère qu’elle serait partie avant l’été. Qu’on pouvait à peine espérer le printemps. Qu’elle ne pourrait plus jamais retourner chez elle. J’ai annoncé à mon beau-père que les médecins estimaient qu’elle avait moins que trois mois à vivre… J’ai appris à mon chum que d’ici une petite poignée de semaines, il serait orphelin.

Hier, nous avons décidé de passer aux soins palliatifs. Ma belle-mère m’a demandé d’être présente avec son fils pour la discussion. J’ai essayé de faire garder ma puce, mais je ne suis pas arrivée à trouver quelqu’un. J’avais prévu l’installer avec un film et des écouteurs pour la protéger de la lourde discussion qui s’en venait mais, sous l’émotion, des bouts de phrases et des mots compliqués et lourds ont fusé avant que je sois prête. Finalement, je me suis isolée dans le couloir avec ma fille pour tenter de lui expliquer ce qui se passait. J’avais peur qu’elle reste seule à jongler avec des bouts d’information et qu’elle fasse sa propre interprétation en silence.

Hier soir, je me suis accroupie près de ma fille de huit ans à côté du bureau des infirmières pour lui expliquer ce qu’est un arrêt de traitement et ce que veut dire « aide médicale à mourir ».

Ce vendredi, c’est la Saint-Valentin, l’anniversaire de ma belle-mère et sa journée préférée dans l’année. Aujourd’hui, après avoir passé une longue entrevue pour un poste permanent au boulot, j’ai couru les magasins à la recherche des ingrédients parfaits pour fabriquer un miracle.

Vendredi, mon beau-père va demander à la femme qui partage sa vie depuis dix ans de l’épouser. Le miracle sur lequel je travaille, c’est de leur organiser un mariage splendide… malgré la jaquette d’hôpital, les cheveux en bataille et la possibilité qu’elle n’arrive pas à se lever du lit. Mon miracle, c’est d’arriver à faire oublier à ma belle-mère, l’espace d’un instant, qu’elle va mourir bientôt. Plus que tout, mon miracle c’est d’arriver, l’espace d’un instant, à chasser du regard de mon chum cet air d’enfant perdu qui l’habite depuis des jours. C’est de lui fabriquer un petit bout de souvenir doux et heureux à travers l’océan de détresse qui le submerge…

Je suis épuisée… Tellement épuisée… mais si j’arrive à le voir sourire vendredi, ça vaudra toutes les nuits blanches du monde.

…

Nous voilà dimanche, ma belle-mère est décédée cet après-midi, entourée des deux hommes de sa vie. Elle est partie paisiblement dans les bras de son fils, son bébé. J’espère de tout cœur qu’elle emportera avec elle les souvenirs de cette journée. J’espère avoir réussi à fabriquer une dernière image de bonheur à mon homme pour que ces souvenirs soient un peu plus doux.

16 février 2020

Marie-Eve Massé

Ce soir, tu n’es plus là

Le 17 novembre dernier, nous nous préparions à passer une petite

Le 17 novembre dernier, nous nous préparions à passer une petite soirée tranquille pour fêter notre anniversaire de couple. Huit ans, déjà. Le téléphone sonne, on me demande de venir chercher ma fille et de se rendre à l’urgence. La nuit à l’hôtel s’est transformée en une nuit à l’hôpital.

Après seulement vingt minutes, déjà trois personnes différentes me demandaient si nous acceptions la réanimation en cas de complications. J’ai dit non à la réanimation ! Après quelques tests, résultats : pneumonie et plusieurs problèmes reliés à sa maladie neurodégénérative.

Nous sommes le lendemain matin, 18 novembre. Nous transférons la petite à la maison de soins palliatifs pédiatriques en soins de confort sans trop savoir si c’est la fin. On commence la médication pour enlever la douleur. 19 novembre, son état est stable, on a encore des chances qu’elle s’en sorte. Elle ne reçoit que de la médication, plus rien dans l’estomac, il l’a lâché depuis maintenant deux jours. 20 novembre, on augmente très rapidement les doses pour enlever la douleur. La famille proche doit faire vite. Son état se détériore rapidement.

21 novembre, 8 h 15. Son dernier souffle. Je la regarde, j’attends, j’espère qu’elle reprendra un autre respire, j’attends… Je dépose ma main sur son cœur, il ne bat plus. C’est la fin. La fin de sa vie sur terre, la fin de son combat, la fin de mes inquiétudes, mais surtout, la fin de ses douleurs.

Ce soir, je suis étendue, sur un matelas dans le sous-sol de mes beaux-parents. Un soir de plus où les larmes coulent sur mes joues et où je crie intérieurement. Encore un soir où j’essaie d’écrire quelques mots pour revenir sur le mois qui vient de se passer. Ces mots qui ne peuvent être assez puissants pour dire avec justesse comment je me sens.

Ce soir, je t’aurais appelée par vidéo pour prendre des nouvelles de toi comme je le faisais chaque fois que tu allais dormir chez tes grands-parents. Mais ce soir, je dois aller dans un cimetière pour savoir comment tu vas. Il neige, j’ai froid, très froid, et pourtant je suis habillée chaudement. J’aimerais tant me coucher là, et te réchauffer comme toutes les mamans le font quand leurs enfants ont froid. Mais moi, je ne peux pas, je ne peux plus…

La vie m’a arraché ma vie. Et ce n’est pas peu dire. Lorsque tu as pris ton dernier souffle, mon cœur devait battre deux fois plus pour me permettre de rester en vie. Ce soir, je dois encore me battre contre la vie. Je réalise qu’il y aura toujours des larmes qui couleront sur mes joues. Je devrai vivre avec ce que la vie m’a enlevé, TOI.

Noël arrive à grands pas et comme des milliers d’autres, je ne pourrai être avec l’une des personnes qui me sont le plus chères. Sauf que moi, c’est pour tous mes prochains Noëls.

Tu es mon soleil, ma lune et toutes mes étoiles. Rayonne de tout ton amour.

Tu seras à jamais dans mon cœur !

Repose-toi où il n’y a plus de douleur.

Carolanne Fillion

La mort

La mort, elle rôde autour de nous. Nous ne pouvons la quantifier, m

La mort, elle rôde autour de nous. Nous ne pouvons la quantifier, mais elle est là près de nous, près des gens qu’on chérit. Elle est sournoise et sans merci. Elle attaque quand on s’y attend le moins. Elle détruit des vies, des couples, des familles…

La mort, elle nous enlève des gens qu’on aime. Des gens qui sont si importants dans notre vie. Elle nous prive d’une partie de nous. Elle nous prive de continuer à bâtir des moments heureux avec eux. De les entendre rire, de leur permettre de nous étreindre et de nous rassurer…

La mort, elle fait des ravages à la personne atteinte, mais elle en fait autant à ceux qui restent. Elle nous oblige à nous réconforter nous-même. Elle nous oblige à vivre avec un vide immense pour une partie de notre vie. Elle nous oblige à devoir passer par-dessus cette tristesse et à continuer notre vie sans cette personne essentielle.

La mort, elle nous amène à être seul avec nous-même. Seule avec notre peine, avec cette douleur insupportable qui nous transperce de l’intérieur. Ce manque indescriptible. Elle nous amène à devoir vivre différemment. À devoir garder la tête en dehors de l’eau pour ceux qui restent.

La mort, elle nous amène à parler au passé des gens qu’on aime. À nous remémorer ces beaux souvenirs qui font que ceux qui sont partis restent près de nous. À nous remémorer le plus souvent possible la voix de celui qui nous manque, dans la crainte de ne plus s’en souvenir. À se rappeler chaque détail de son visage pour continuer à pouvoir l’imaginer.

La mort, elle nous amène à restructurer notre vie. À apprendre à revivre sans celui qui est parti. À s’adapter. Elle nous force à passer au travers. Elle nous amène à apprendre à ré-aimer la vie différemment sans jamais oublier ceux qui nous ont quittés…

 

Cynthia Bourget

Cher 27 novembre

<img class="alignnone size-medium wp-image-18455" src="https://maikadesnoyers.com/wp-content/uploads

Cher 27 novembre 2005, que ce soit en 2008, en 2013 ou en 2020, je ne t’aime pas. Je te déteste même. Je t’haïs. Tu as volé une partie de moi, une partie de ma sœur, une partie de ma mère, une partie de ma famille. 2020 est déjà difficile, je ne peux pas être avec ma sœur ou ma mère ni les serrer dans mes bras.

Cher 27 novembre 2005, tu m’as pris mon père, mon papa, mon papounet. Sans avertissement. Brutalement arraché à nos vies. Détruite, anéantie, en douleur constante. Tu me l’as pris devant mes yeux, des images que je ne peux pas effacer de ma mémoire. Des images horribles, traumatisantes.

15 ans. Ça fait 15 ans qu’à chaque 27 novembre, je revis la journée, minute après minute, je me rappelle quand il tombe, le son que ça fait, le voir convulser, voir le chaos régner partout autant à l’intérieur qu’à l’extérieur, marcher pieds nus dans la neige parce que je suis en panique. Voir mon père sortir de la maison les deux bras de chaque côté de la civière et un ambulancier par‑dessus qui fait le massage cardiaque. Ce genre d’images ne disparaît pas et ne disparaîtra jamais.

15 ans. Savais-tu, cher 27 novembre 2005, que cette année a une signification affreuse ? 2020 signifie que ma sœur a vécu la moitié de sa vie sans son père. Oui, elle avait 15 ans quand tu nous l’a pris. 15 ans. Ça fait beaucoup d’années. Certains diront « Ben ça doit être moins pire avec le temps. » La réponse est simple : NON. Comment ça devrait être moins pire ? J’étais très proche de mon père, nous n’avions pas besoin de parler pour comprendre l’autre. Notre père était un papa présent, attentif, fier de ses filles et de sa femme. Comment le fait de perdre un parent peut devenir moins pire ? Oui, je suis capable de parler de lui sans pleurer et même d’avoir un sourire sur mon visage, mais la douleur de sa perte est là, vive. Je m’ennuie de lui chaque minute de chaque jour. Je m’ennuie d’appeler quelqu’un « Papa ».

Cher 27 novembre 2005, j’aimerais tant t’oublier, passer par-dessus cette date, par-dessus le mois de novembre. Ça fait mal d’entendre mes enfants dire à quel point ils auraient aimé connaître leur papi Barbier. Ma mémoire a oublié le son de sa voix, son rire qui était contagieux ; son visage est flou dans mes souvenirs. Le temps, le temps ne guérit pas toujours tout. Le temps adoucit peut-être.

Ce 27 novembre, je vais regarder des photos et des vidéos de toi, papa. Je vais pleurer, me rappeler chaque instant cette journée parce que c’est plus fort que moi. Je sais qu’à 13 h, tu vas tomber. À 13 h 5, je vais appeler le 911. À 13 h 15, je vais sortir dehors et mon voisin va entrer dans la maison pour faire le RCR. À 13 h 20, la police va arriver. À partir de 13 h 30, des pompiers vont arriver. À 13 h 40, l’ambulance va arriver. À 14 h 30, les ambulanciers vont sortir mon père et le mettre dans l’ambulance. À 14 h 40, je vais appeler le travail pour dire que je n’entre pas. À 15 h, ma sœur, mon chum et moi, on va partir pour l’hôpital. À 15 h 20, on va courir jusqu’à la porte de l’urgence. À 15 h 22, on va voir le médecin et une infirmière sortir de la salle familiale et à 15 h 27, mon oncle va nous annoncer que papa est parti, son cœur a lâché.

À 15 h 30, mon monde s’est effondré.

Je t’aime papa et je m’ennuie tellement de toi.

Cindy LB