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Le gras de bébé — Texte : Stéphanie Dumas

Un petit message à vous qui commentez le poids de mon bébé qui n’a même pas encore 2 ans. À

Un petit message à vous qui commentez le poids de mon bébé qui n’a même pas encore 2 ans. À vous qui le faites à voix haute devant lui en lui tripotant le ventre ou les bras.

Nous avons régulièrement droit en tant que parents à des phrases comme « Il est bien nourri cet enfant ! » ou encore « Il est bien dodu » et même « Il n’est pas mince avec son petit gras ». Ces remarques sont énoncées devant lui qui comprend très bien le sens de vos paroles. Mon enfant comprend ce que vous dites même si vous ne vous adressez pas directement à lui. Cela pourrait faire en sorte qu’il développe une image de lui-même et des normes sociales.

Pour vous, ces paroles semblent anodines comme s’il était normal de dire devant lui qu’il est gras alors que cela ne se fait pas devant les adultes et les enfants plus vieux.

De plus, vous le touchez sans retenue afin de témoigner du sens de vos paroles alors qu’il ne vous connaît même pas ! Ces « petites » remarques sont parfois désagréables et n’ont pas lieu d’être face à l’enfant.

Bien sûr, vous tentez d’adoucir vos paroles en ajoutant qu’il s’agit de gras de bébé et qu’il va le perdre avec les années et que le gras de bébé est mignon. Malheureusement, cette technique ne fonctionne pas vraiment.

Évidemment, rien ne vous empêche de le penser, mais vous pouvez pour retenir de les verbaliser ouvertement.

 

Stéphanie Dumas

 

Insécurité – Texte : Audrey Boissonneault

Et si on parlait de nos peurs ? De nos insécurités ? Et si on parlait de ce qui nous fait trem

Et si on parlait de nos peurs ? De nos insécurités ? Et si on parlait de ce qui nous fait trembler de l’intérieur ? De ce qui rend nos yeux froids et larmoyants. Et si on parlait de ce qui plonge notre regard dans le vide ? De ce qui nous donne l’envie d’arrêter ?

On dirait que je n’ai aucune idée par où commencer, parce que non, il n’y a pas de début. C’est un tout. Et avant que t’oses le préciser, je sais très bien qu’il y a pire. Par contre, ça n’enlève en rien nos propres douleurs. On préfère ne rien dire et hocher la tête pour répondre que tout va bien. On encaisse pour ne pas déranger les gens, pour ne pas être catégorisée « dépressive » ou « braillarde », oui en 2022, certains les catégorisent encore ensemble.

Je dois avouer que plus le temps avance, plus on me donne de la difficulté à assumer ce que je suis. Celle que je suis et tous les morceaux qui sont accrochés à moi. De l’extérieur, on me mettrait dans la même catégorie que les jeunes femmes de mon âge, bon peut-être plus jeune, à cause de mon visage rond semblable à celui d’un bébé. Dès que j’ouvre la bouche, je me vois obligée de préciser dans quel état je suis. Parce que la moitié partira sans même comprendre l’impact sur ma vie. En enlevant une couche de vêtements, ils verront les cicatrices, la « bosse » et les défauts qui recouvrent mon corps. En relevant la tête, je verrai les trois quarts qui sont partis. Puis ça, c’est sans avoir expliqué pourquoi je panique lorsque je prends quelques kilogrammes, mais que je sais que je suis dans le tort en les perdant.

Puis y’a tous mes rêves qui jouent en boucle dans ma tête.  Vouloir parcourir le monde sans savoir si mon souffle sera assez puissant pour le marcher. Vouloir être maman de petites merveilles sans savoir s’il y aura un bon moment relié avec la maladie et l’énergie.  Vouloir avancer et être à la même hauteur que les gens de mon âge, mais de ne pas savoir quand on va me donner le « go » d’être assez en santé pour continuer l’école.  Vouloir bâtir un chez-soi, sans savoir si un jour, j’aurai la scolarité pour bien travailler.

Ça c’est sans parler de cette voix porteuse d’images nocives. Celle qu’on nous répète d’ignorer, alors que sa présence est, un peu trop, imposante. Un petit élément qui prend la place entière. Celle qui fait en sorte que tu bégaies lors d’un appel ou que des palpitations t’envahissent dans un endroit rempli de personnes. Tes mains tremblantes en t’imaginant la prochaine journée de travail. Ton insomnie face à toutes ses pensées qui t’envoûtent. Puis, ça c’est sans parler de chaque selfie que tu fais en cachant tes imperfections.

Pour la énième matinée, j’observe, devant mon miroir, les détails sur ma peau. Ma main glisse contre chaque anomalie sur mon corps, me rappelant une histoire à raconter. Mes yeux roulent sans pouvoir s’en empêcher, parce qu’on sait bien que l’inconnu fait peur.

C’est le travail d’une vie d’apprendre à s’aimer encore plus lorsqu’on sait que c’est si facile de prendre la fuite.

Audrey Boissonneault

 

Cher trouble alimentaire — Texte : Audrey Boissonneault

Cher trouble alimentaire, Je t’ai, longtemps, évité. Je te cachais comme un pull qu’on lais

Cher trouble alimentaire,

Je t’ai, longtemps, évité. Je te cachais comme un pull qu’on laisse traîner au fond d’un tiroir. Tu t’es fait une place dans mon corps et par la suite, dans ma tête. Je me suis détruite à me répéter à quel point on me trouvait grosse et que personne n’allait m’aimer. Chaque jour, tu me laissais un goût amer lorsque je croisais mon reflet dans le miroir.

Les magazines, les publicités, les réseaux sociaux sont tous des aspects nous fixant un sentiment d’infériorité. Ce trouble, je l’ai vu apparaître, il y a plusieurs années déjà. J’ai, toujours, été très sévère envers moi ; face à mon poids, mon apparence. J’ai écouté chaque commentaire qui me rappelait à quel point je n’étais pas à la hauteur de ceux qui m’entouraient.

Trop souvent, j’ai rentré mon ventre en m’imaginant plus mince. À chaque petit pas, je montais sur la balance pour une énième fois dans la journée. C’était une routine de se lever, prendre une photo en sous-vêtement puis embarquer sur le pèse-personne afin de savoir quel nombre indiquer sur la photo. Tu es arrivé, tout doucement, puis tu as pris de l’ampleur sans jamais t’arrêter. Le plus fou dans tout ça, c’est que peu importe le chiffre, je n’ai jamais réussi à m’apprécier. Je voulais juste en perdre encore et encore. Ce n’était jamais assez. J’imagine que c’était ta façon de me protéger de chaque douleur, chaque rire et chaque insulte qu’on m’a lancés.

J’ai toujours été la fille à qui on disait : « Tu n’es pas grosse », mais dans mon dos, j’étais considérée telle que la petite grassouillette. Je n’avais pas le ventre plat ni un corps parfait sans cellulite, j’étais la dodue de la « gang ». Je n’étais pas assez belle pour qu’on me considère en tant que blonde, je restais l’amie de fille. Puis de l’autre côté, on me reprochait ce complexe-là, on me disait que je n’avais pas à me plaindre, parce que d’autres personnes avaient plus de raisons pour le faire.

Mon cher déséquilibre alimentaire,

Je vais être sincère avec toi, je veux que tu partes. J’ai assez de problèmes comme ça, je n’ai pas besoin d’un « poids » supplémentaire lorsque vient le temps de manger. Je n’ai pas besoin de me faire dire que je suis correcte comme ça ou qu’à force d’en perdre, je vais disparaître. Je n’ai pas besoin de me faire dire comment manger, je le sais déjà, ou même de me faire répéter que me peser n’aidera pas à mon obsession pour mon corps. Je les connais, les mots, et chacun d’eux a l’effet d’un coup de poignard dans le cœur.

On te décrit en tant que problème sévère. Je ne veux plus que tu sois là, je veux que tu partes. Je veux que tu arrêtes de me torturer la tête, arrête-toi lorsque mon estomac commence à crier de faim. Arrête de me faire passer pour une folle, parce que non, ce n’est pas un choix. C’est tellement loin d’être le cas.

 

Audrey Boissonneault

Le poids de l’inconscient

Prendre du poids. Perdre du poids. Avoir de l’acné, ou pas. Être jolie et bien dans sa peau. Êt

Prendre du poids. Perdre du poids. Avoir de l’acné, ou pas. Être jolie et bien dans sa peau. Être jolie et mal dans sa peau. Se sentir moche. Être gênée et peu parler ou au contraire, être volubile et parler fort.

Je pourrais passer des heures à vous énumérer des aspects physiques et psychologiques qui font de nous des êtres uniques, mais qui peuvent aussi faire de nous des êtres complexes et complexés.

La vie c’est ça, la recherche d’un bonheur qu’on croit connaître, mais qui ne nous convient pas toujours une fois obtenue.

Pour toi qui me lis, j’aurais une petite question. Une toute petite et simple question. Au plus profond de toi, t’aimes-tu à 100 % ? Es-tu ce que tu as toujours souhaité être ?

Peu de gens admettront haut et fort que la réponse est non.

Maintenant, mon autre question est celle-ci : te sens-tu jugée par les gens autour de toi ? Peu importe la situation.

 

Vous devez vous demander où je veux en venir hein ? Je vous explique.

Depuis quelque temps, je remarque une tonne de citations concernant notre droit à être ce que nous sommes sans jugements des autres.

  • Cessons de juger les gens avec un surplus de poids, ils ont le droit de s’habiller comme ils veulent.
  • Cessons les filtres, vous avez le droit de vous montrer sous votre propre jour sans jugement.

 

Aujourd’hui, je me suis demandé comment je me sentais face au regard des gens, et ce, depuis toujours.

Quand j’étais plus jeune et plus mince, je détestais m’arranger. J’avais toujours peur que les gens se disent « Check l’autre guidoune qui s’arrange ben trop ». Je ne portais pas de talons hauts (sauf pour mes émissions de Vendre ou rénover), je ne me maquillais presque pas. Quand ça arrivait et que j’avais un compliment, je le prenais comme une remarque pas si positive. Je ne me baignais pas, parce que j’avais un peu de cellulite et que je ne voulais pas que les gens le remarquent et en parlent.

 

Avec les années, mes trois grossesses et… le fait que j’aime manger, j’ai pris 40 livres. Je ne porte pas de jeans, parce que… les jeans, c’est pour les femmes minces.

Je porte des chandails toujours très lousses pour que les gens ne me jugent pas en disant que les chandails serrés ne sont pas faits pour les femmes plus dodues.

 

Etienne m’a invitée à de multiples reprises sur son podcast pour animer avec lui les entrevues, parce qu’il ne cesse de me dire que je suis excellente. J’y suis allée deux fois et en me voyant à l’écran, je n’ai pas reconnu la Maïka d’avant Livia, d’avant mes 40 livres. J’ai donc commencé, subtilement à refuser ses invitations à faire partie du podcast. Je ne voulais pas que ses invités me voient et se disent « Eh boy, elle a pris du poids ».

 

Quand on reçoit à la maison, je porte des robes lousses, parce que je sais que les gens qui me connaissaient d’avant vont voir le changement et se dire que j’ai vraiment pris du poids.

Je m’occupe à faire plein de choses pour qu’ils ne puissent pas s’attarder à ce que je suis devenue.

Pendant que les gens se baignent, peu importe leur âge, leur poids… Moi, je reste assise en disant que je n’ai pas chaud. Je regarde mes amies et ma famille s’amuser dans la piscine avec mes enfants, alors que j’aimerais moi aussi faire partie de ce beau moment. Mais s’ils me voyaient sous ma robe…

 

Et puis, je réalise que les gens n’en ont rien à faire. Oui, ils vont probablement se dire que j’ai pris du poids, mais c’est vrai après tout. Après cette réflexion, ils vont continuer leur vie et se contreficher de ce que JE pense de moi.

Je suis ma pire critique. Je suis celle qui m’empêche de vivre ma vie par peur du regard des gens.

 

Où je veux en venir, c’est que plusieurs d’entre nous avons un travail à faire sur nous-mêmes.

Cessons de penser que les gens nous jugent constamment. OK soyons francs, il y a des tatas partout qui passent leur temps à juger haha ! Ceux-là, mettons-les dans une classe à part, genre la classe des idiots à ignorer.

 

Vous êtes votre pire critique. Vous êtes en train de passer à côté de plein de belles choses simplement parce que VOUS vous autocritiquez en pensant que ce sont les autres qui le font.

Chaque fois, donnez-vous le défi de faire quelque chose que vous n’auriez JAMAIS osé faire avant.

Apprenez-vous à vous aimer. Et si vous n’en êtes pas capable, travaillez à améliorer les points qui vous rendent heureux.

 

Mais cessons de toujours tout mettre sur le dos des autres, le fait que leur regard nous gêne.

Une personne peut vous regarder en se disant « Oh wow, sa robe est vraiment belle », et automatiquement notre cerveau se met à paniquer en imaginant le pire.

Non, les gens ne vous jugent pas toujours négativement.

On se juge déjà assez soi-même…

 

Sur ce, je vais retourner mettre mes chandails lousses et continuer à faire des stories en ne montrant que le haut de mon corps.

Par contre, je vais aller magasiner un maillot. Parce que je n’en ai pas. Et j’irai me baigner avec mes enfants. Parce que je n’ai qu’une vie.

Un pas à la fois, les filles…

 

Qui sait, demain je porterai peut-être un jean ! 🙂

 

Apprenez à vous respecter et à vous aimer, tout comme vous le faites pour de purs étrangers.

 

Xxxx

Maïka

 

Sois belle, pour vrai – Texte : Joanie Therrien

L’image corporelle, on en parle tellement. Il y a tellement de gen

L’image corporelle, on en parle tellement. Il y a tellement de gens formés en conditionnement physique et en nutrition que ça en est FOU. Pose une question et en deux minutes, tu trouves environ huit réponses toutes différentes les unes des autres. Leurs différences entrent souvent en concordance ou en désaccord les unes avec les autres.

Dernièrement, j’ai réalisé que malheureusement, j’en savais juste TROP. Ma tête est pleine d’informations sur le sujet, aussi bonnes que fausses. Je me promène dans tout ça depuis plusieurs années, car tous ceux qui me connaissent savent que depuis au moins dix ans, je n’ai qu’une idée en tête : perdre du poids.

C’est la façon dont je me caractérise. Je ne souhaite tellement pas que les gens croient que je suis bien comme ça, que dès notre première ou deuxième rencontre ensemble, tu sauras que je ne suis pas bien dans ma peau. On parle souvent de trouver ce qui nous définit et moi, depuis maintenant dix ans, j’ai été une cégépienne qui utilise tous les moyens « faciles » pour perdre du poids. Qui dit facile ici dit impossible à long terme. J’ai été une amoureuse qui, jour après jour, se tapait sur la tête à cause de son physique. Je suis devenue une maman. Qui essaie du mieux qu’elle peut d’inculquer de bonnes habitudes à ses enfants et une acceptation de ce qu’ils sont, tout en se battant contre ses démons intérieurs. J’ai joué au yoyo, j’ai jeûné, j’ai bu de l’eau, j’ai pris des nutriments, j’ai pris des suppléments, j’ai essayé des régimes restrictifs en sachant très bien que ce n’est pas la solution. Je me suis entraînée tous les jours et tout croche, puis je me suis blessée.

Et vous savez quoi ? Je me suis rendue MALADE.

En dix ans, j’ai pris beaucoup de poids, c’est tout ce que j’ai récolté. En ce moment, je suis à terre. Parce qu’à force de pousser toujours plus fort de la mauvaise façon, on finit par tomber. Je dois me reconstruire, au complet. Ce n’est pas rien. J’ai un dos faible comme il ne l’a jamais été et une tête encore pire. Un cœur éclaté par l’autosabotage et une image corporelle en miettes.

L’amélioration de mon état viendra. J’ai tellement confiance en la vie ! Elle fait les choses comme elles doivent être faites et on doit apprendre à l’écouter. Et en ce moment, c’est ce que je fais. J’écoute chaque signe, chaque message et chaque tape dans le dos qu’elle m’envoie. C’est la place que je lui donne dans ma tête qui lui donne tout son pouvoir. Être en forme, en santé, et mordre dans la vie, c’est TOUT ce que je veux et j’y arriverai. Mais pour l’instant, j’ai du chemin à faire. En dedans.

Joanie Therrien

Tu seras la plus belle femme rondelette enceinte – Texte : Kim Boisvert

Je vous le jure, c’est une vraie phrase qu’on m’a dite quand

Je vous le jure, c’est une vraie phrase qu’on m’a dite quand j’ai annoncé ma grossesse à une bonne connaissance.

« Tu seras la plus belle rondelette femme enceinte qui existe sur la Terre tout entière ».

J’serai pas la plus belle femme enceinte tout court, non ! Je serai la plus belle femme rondelette enceinte.

J’étais enceinte de jumelles, 4 mois de fait avec une bedaine bien apparente, et j’en avais aussi une avant, of course. J’imagine que le RONDELETTE vient qualifier ma bedaine d’avant. Mais être enceinte, ça ne nous rend pas déjà plus rondelette ? Qu’on le veuille ou non ? J’pensais qu’à la base, c’était pas si important, que tout le monde était conscient que la femme subit une transformation extrême inversée et que c’était pas si facile à vivre. Du moins, pas pour toutes. Mais enceinte, j’ai compris que mon corps n’appartenait pas juste aux deux petits Aliens tout à fait sympathiques qui poussaient en moi. Oh ! Non, mais bien à tout le monde qui avait une opinion, qui voulait toucher à mon ventre ou même juste me donner des conseils santé sur comment bien me nourrir. Laissez-moi manger ma crème glacée.

J’avais juste envie de crier « Écoute-moi bien, Madame, jusqu’à tout dernièrement, je vomissais ma vie du matin au soir et maintenant, si je ne vomis pas, tout me lève le cœur ou presque. Je suis rendue à avoir une bonne journée d’énergie sur deux. C’est pas si parfait, mais ce qui rentre est toujours mieux que ce qui sort. Alors si je te dis que mes bébés grossissent, mais que j’ai pris une seule minuscule livre depuis le début de ma grossesse gémellaire, j’pense pas que t’as le droit de juger ma situation, encore moins de me rappeler que comme j’étais déjà rondelette avant, je viens désormais avec une deuxième étiquette. Parce que je sais bien que ce n’était pas normal que mes bébés grossissent sans que je prenne de poids. »

Mais encore là, c’est normal de mettre une étiquette sur le corps d’une femme enceinte. La plupart du temps, c’est fait sans méchanceté, parce que la maternité semble donner le droit à qui le veut bien de commenter cedit corps comme s’il n’appartenait à personne. La propriétaire de ce corps doit vivre au quotidien avec des changements, des peurs et dans mon cas, le miroir.

Le choix de mots pour qualifier une femme enceinte ne devrait jamais porter sur la grosseur. Parce que se faire dire qu’on est rendue une belle rondelette enceinte ou une grosse toutoune, ça ne devrait pas faire pas partie de la normalité de la maternité. Je préférais de loin avoir les nausées que d’entendre les gens parler de combien j’étais énorme ou combien je le serais !

La grossesse est censée être empreinte de bonheur et de légèreté. D’amour et d’excitation. Pourtant, chaque jour, je vérifiais dans le miroir à quoi ressemblait mon corps. Ce corps portait la vie, deux vies et demie dans mon cas, si j’inclus leur sœur triplette rendue en étoile. Et je l’ai oh ! combien maltraité ce corps durant des dizaines d’années. Et pourtant, malgré tout le travail, ces remarques me mettaient encore un poignard dans le cœur. Un doute en tête. Des craintes de ne jamais retrouver un poids correct. De ne jamais réussir à courir à nouveau. De revenir au travail après un an et de ne pas avoir réussi à retrouver un poids d’équilibre. La peur que sur les photos du party de Noël, mon surplus de poids paraisse. Pourquoi ces peurs ? C’est insensé.

Alors, la prochaine fois que vous verrez une baleine qui marche un peu en clown, à la place de lui dire qu’elle est rendue énorme, tournez votre langue dans votre bouche. Ou mangez un beigne et encouragez-la. Parce que sincèrement, personne n’a besoin de se faire rappeler la circonférence de son corps, peu importe le poids ou la situation.

Kim Boisvert

Ma boulimie, mon ennemie – Texte : Kim Boisvert

Chers lecteurs, chères lectrices,

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Chers lecteurs, chères lectrices,

Comme vous l’avez probablement déjà lu dans d’autres articles écrits sur ce blogue, je suis personnellement touchée par un trouble du comportement alimentaire. J’ai envie de vous aider à comprendre ce que c’est d’être sous l’emprise de cette difficulté au quotidien. Plusieurs d’entre vous serez probablement surpris de mes prochains propos.

Ce n’est pas quelque chose qu’on balance dans une conversation d’après Match :

Kc ou Tempa ?

J’sais pas mais je suis boulimique. Et toi ?

 

Voici quelques stats, question de rendre le tout plus factuel. Je vous invite aussi à consulter le site d’Anorexie et Boulimie Québec pour les infos complètes et à jour, pour des dons ou si vous avez besoin d’aide. Il y a des gens pour vous aider, ok ?

Les divers troubles alimentaires (anorexie, boulimie, orthorexie, hyperphagie boulimique…) touchent majoritairement les femmes, mais attention ! 10 % des gens diagnostiqués sont des hommes !

Dans notre beau pays, presque 1 adolescente sur 3 âgées de 12 à 18 ans souffre d’un comportement alimentaire anormal. C’est alarmant. Vous avez des enfants ? Votre fille a des copines ? Si ce n’est pas votre fille, probablement qu’une de ses copines à elle souffre en silence. Ces troubles se placent au troisième rang des maladies chroniques les plus répandues chez les adolescentes… Triste réalité encouragée par la société et sa soif de maigreur. Les revues, les émissions, les vitrines de magasins… toujours des jeunes filles minces.

On encourage toujours la perte de poids, sans savoir que ces mots peuvent être tranchants :

T’as donc bien maigri, ça te va bien !

Je l’ai entendue celle-là, dans mes nombreux yo-yo de perte de poids et de régime. Ça te va bien. Et ma personnalité, est-ce qu’elle me va bien, elle ?

Pour vous faire comprendre l’absurdité et la complexité du trouble alimentaire, je commencerai par ceci : je viens de me peser, il est 23 h 45, mardi soir.

C’est ma réalité. La balance a toujours été présente dans ma vie. Beaucoup trop, comme un boulet que je n’ai pas choisi mais qui reste accroché. Je me pèse désormais que 3 fois par semaine. Oh, ne vous inquiétez pas, c’est une victoire pour moi ! Je me pesais 3 à 5 fois par jour en 2014 ! Une fois le matin à jeun, sans vêtement, après avoir fait pipi. La deuxième fois le midi, au gym, après avoir perdu quelques calories et finalement la troisième fois, le soir avant de me coucher. Maintenant, c’est parfois même 1 à 2 fois par semaine ! Ces semaines-là, je suis tout excitée, comme si j’avais gagné un morceau de robot ! Un putain de gros morceau ! Genre, un jarret de robot. Un grand dorsal de robot. Bref, faites-vous une image de robot dans votre tête et donnez-moi le plus gros morceau. Mais ces victoires‑là, je les garde secrètes.

Arrête de faire ça, c’est pas bien.

NON ?!? Sérieux ? Moi qui pensais que c’était super sain de se mesurer par rapport à un + ou un — ! Je le sais que c’est pas bien. Toi, arrête donc de fumer, c’est pas bien. Et toi, arrête donc de t’enfiler du papier de toilette, c’est pas bien (avez-vous déjà écouté mon étrange dépendance ? Gosh! Quand on se compare, on se console ?)

Depuis plusieurs années maintenant, j’ai cessé de me faire vomir. Oh, vous ne le saviez pas ? Je suis boulimique.

Je dis encore que je le suis parce que je ne crois pas que ça part entièrement, un trouble alimentaire. On reste toujours un peu sensible. On apprend à le gérer, à le reconnaître et à le manier. Pour moi, ça a commencé très jeune. J’étais dans la fourchette d’âges que je vous ai mentionnée plus haut. J’étais la plus dodue de mes amies et je ne pouvais pas accepter que toute cette graisse fasse partie de moi. Mais chez moi, on ne mangeait pas toujours super bien. Je n’en ai jamais voulu à ma mère ni à ma grand-mère, elles ont toujours fait ce qu’elles pouvaient et on mangeait avec les mœurs du temps. On n’a jamais manqué de bouffe, au contraire ! La maison était toujours pleine !

Un moment donné, j’ai entendu vomir une fille aux toilettes. Je lui ai demandé si elle allait bien et elle m’a répondu que oui, elle avait juste trop mangé. Mon déclic. Moi aussi, je mangeais trop. Me faire vomir était alors devenu une option, ce que j’ai commencé tranquillement. Et au secondaire, c’est l’endroit parfait pour jaser de : Comment fais-tu pour pas que tes parents ne s’en rendent pas compte ? Comment fais-tu pour vomir plus vite ? Je vous le dis, c’est accessible beaucoup plus qu’on le croit.

Et comme ce n’était pas assez concluant et que le bout de ma brosse à dents sentait toujours l’acide gastrique, j’ai essayé de ne pas manger au dîner, et le moins possible au déjeuner. Facile, je jetais mon lunch en sortant de la maison et je disais simplement que je n’avais pas de lunch aux copines qui me le demandaient. Ou mieux, je disais que mon lunch était dégueu (mea culpa). Un jour, ma meilleure amie du temps est arrivée avec un sandwich au jambon/moutarde préparé par sa mère. Je pliais du genou quand on parlait de ces sandwichs. Et c’est tranquillement, à grandes pelles d’Amour avec un grand A, que ma passe anorexie s’est éclipsée. Je dois dire que les : Bonne journée Kim XXX ou les Bon dîner Kim XXX inscrits sur les sacs à sandwichs ont aidé fortement. Et j’ai continué de manger. Merci, sincèrement. J’ai jamais su si c’était par amour ou par conscience que ce n’était pas normal, mais ça m’a sauvé en grande partie.

Manger. Beaucoup. L’hyperphagie est quand, dans une courte période, on mange une quantité immense de nourriture. Pas le temps d’y goûter, rien ne satisfait l’envie, la faim géante. C’est juste de remplir un vide. Je pouvais manger 1 sac de chipits, 2 biscuits, des chips et une toast au beurre de peanut arrosés d’un grand verre de lait dans un espace de 5 minutes. Je terminais habituellement le tout avec de la crème glacée. Et ça, c’était la nuit. Je me levais, trop honteuse de faire ça devant mon chum… !

C’est le chemin que j’ai emprunté, celui-là et la boulimie, selon la façon dont je me sentais. Et j’ai fait des régimes… Minçavi était mon préféré. Ça a marché, mais trop. Ça a juste amplifié mon trouble alimentaire. Si je devais prendre 1/2 tasse de riz, j’en mettais un petit peu moins, pour être certaine d’avoir un — à ma prochaine pesée ! Parce que se mettre en ligne pour se faire juger par un bout de métal froid, c’est un peu intense à mon goût. Ma conseillère de Québec était une femme en or ! Ne pensez pas que je suis contre ce régime ! Mais pour moi, ça ne fonctionne pas. Vivre l’échec lorsqu’il y avait un + ne faisait qu’augmenter mon obsession.

Le trouble alimentaire, c’est difficile. Au quotidien. C’est se faire vomir au bureau après un BBQ parce que, selon moi, c’était de trop. C’est se retirer d’une soirée entre amis pour trouver la balance dans la salle de bain (je vous le dis, plusieurs de vos balances m’ont prise sur elles !). Et c’est surtout poser un regard de dégoût sur son propre corps. Toujours. En permanence. Mon corps était ma prison. Mon enveloppe n’allait pas du tout avec ma vision d’une belle femme. Je ne me trouverais jamais de copain, d’emploi, ni d’amies… ! Ma dentiste m’a déjà dit, alors que j’avais la bouche grande ouverte : Kim, il va falloir que tu arrêtes de te faire vomir. L’émail de tes dents en souffre aussi. J’avais simplement répondu : OUWdjsu OUSss (oui, oui, je sais).

Oh, croyez pas que c’est fini cette bataille. Mais avec du soutien, j’ai réussi à la comprendre, la gérer et mettre des mots sur des sentiments. Je ne savais pas que j’étais boulimique jusqu’à ce qu’on me le verbalise. C’est là que j’ai compris que ça se travaillait, que ça se guérissait. C’était pas juste dans ma personnalité, je n’étais pas née comme ça. J’étais devenue boulimique, je pouvais donc apprendre à dealer avec. Et c’est ce que je fais, un jour à la fois.

Il y a eu une longue période dans ma vie où je n’avais pratiquement pas de traces de sa présence. J’étais équilibrée, heureuse et non anxieuse. Mon ex-copain et moi, on s’est séparés et j’ai eu un autre conjoint, destructeur à tous les niveaux. J’ai donc repris entièrement le poids que j’avais perdu, et j’ai perdu toute l’estime que j’avais gagnée. Cette période de tempête s’est terminée lorsque j’ai balancé cette relation malsaine.

Maintenant, je crois avoir trouvé MA manière à moi de me nourrir. Bien que ça dérange parfois des gens, c’est mon choix et je suis enfin bien avec la nourriture que je mets dans mon corps. Je me sens en contrôle, de manière saine. Plus de vomissements ni de binge (compulsions) quotidien. Mon corps change et je le trouve de plus en plus beau. Je perds des kilos, oui. Mais je me sens bien, je ne pèse plus ma nourriture ni ne calcule le nombre de pains que je mange. J’arrive tranquillement vers un équilibre alimentaire et je me sens enfin libre !

Soyez à l’écoute des gens qui vous entourent. Un petit comportement suspect peut démontrer un besoin criant. On n’a pas tous la chance d’avoir identifié le problème et d’y travailler.

Vous voyez que c’est complexe. Et c’est un combat au quotidien.

Je suis là si t’as besoin, mais please, reste loin des régimes et autres.

Kim Boisvert

Et si aujourd’hui… Texte : Maïka

Souvent, je me parle à moi-même. Je m’écris des lettres, dans m

Souvent, je me parle à moi-même. Je m’écris des lettres, dans ma tête. Pendant que je fais le souper ou pendant que je fais du ménage. Je m’explique à moi-même comment je me sens. Comme si ça allait faire du bien, comme si transposer mes émotions sur cette page blanche imaginaire allait faire que tout se replace.

Cette semaine, on m’a dit que j’avais toujours l’air heureuse. Pour vrai… qui est toujours heureux dans la vie ? Personne. On a tous des hauts et des bas. On est humains ! Le problème, c’est ce que les autres voient de nous, et ce qu’ils veulent bien nous laisser voir.

En fait, le bonheur, c’est quoi ?

C’est une multitude de petites choses qui s’emboîtent jour après jour pour former un noyau qui nous tient debout, qui nous tient en vie.

Le problème survient quand ce noyau n’est plus suffisant ou plutôt quand on s’est trompé de noyau.

À la base, le bonheur devrait être vous-même.

Chaque jour, on devrait être en mesure de se regarder et de s’aimer. Parce que si on ne s’aime pas assez, qui le fera pour nous ?

Je suis la première à me dire que l’important, mon vrai bonheur, c’est ma famille… mes enfants.

Mais quand mon Chum part au travail et que mes enfants sont à l’école, je me retrouve inévitablement confrontée à celle que je ne connais plus et que je délaisse depuis tant d’années : moi-même.

C’est à ce moment que ça rentre dedans.

As-tu déjà pris le temps de t’asseoir devant le miroir et de t’analyser. Pas seulement physiquement, mais mentalement. T’analyser sous toutes tes coutures.

La question est celle-ci : es-tu heureuse avec toi-même ? Voudrais-tu que tes enfants suivent ton chemin ?

Pour certaines, la réponse est sans contredit OUI !

Pour d’autres, c’est ambigu… oui sur des points et non sur d’autres.

Et malheureusement, pour plusieurs, la réponse sera NON !

Et si aujourd’hui, je te disais quelque chose que tu sais déjà, mais que tu as sûrement oublié.

Si je te disais que de t’aimer et de t’apprécier est la chose la plus importante au monde… pour toi ET pour tes enfants.

Un jour, ils referont inévitablement ce qu’ils ont vu toute leur vie.

Si tous les soirs, tu rentres de travailler la mine basse, sans la moindre vie intérieure… c’est ce qu’ils tiendront pour acquis à propos de la vie.

Si tu te chicanes sans cesse avec les gens autour de toi, ils reproduiront les mêmes choses avec leurs amis et les gens autour d’eux.

Si tu ne t’aimes pas et tu ne te respectes pas, ça va transparaître et se ressentir et ils finiront peut-être par engloutir ton énergie jusqu’à ce qu’elle fasse partie d’eux aussi. Parce que les enfants, ce sont de vraies petites éponges à émotions.

Tantôt, je te disais que tu devais être la plus importante pour toi-même alors, pourquoi est-ce que soudainement, je rapporte tout à tes enfants ? Parce que c’est souvent le meilleur moyen de faire comprendre quelque chose à une maman.

C’est là que ça fait mal, que ça blesse. De prendre conscience qu’on pense agir dans le meilleur intérêt pour nos enfants et nos proches, et que malheureusement, c’est le contraire.

On n’agit correctement ni pour nous ni pour eux !

Alors, pour une fois… choisissons-nous !

Et pour celles qui seraient tentées de se dire que je parle au travers de mon chapeau en ne sachant pas ce que c’est de ne pas s’apprécier…

Aujourd’hui, je me suis levée et j’ai évité le miroir. Jusque-là, c’est pas nouveau…

Je n’ai pas fait mes sourcils depuis des années… et je ne me maquille jamais sauf si je suis en tournage.

Je me lave les cheveux une fois par semaine, au point où même mes enfants remarquent quand je ne ressemble pas à la chienne à Jacques.

J’ai pris quarante livres depuis trois ans. Et non, ce n’est pas à cause de ma grossesse. C’est parce que je m’alimente tout croche et que je manque de rigueur quand vient le temps de couper ce qui est mauvais pour ma santé et mon poids.

Je n’ai pas de manteau d’hiver qui me fait. Je porte celui de Hayden, que je lui ai acheté au début de l’année. Celui qu’il ne veut pas porter parce que je l’ai pris trop grand pour lui.

La fermeture éclair ne fonctionne pas… c’est chic ! Je pourrais clairement en acheter un large de femme… mais NON, parce que c’est bien mieux d’attendre de reporter mes anciens Xsmall (J’écris et je me trouve moi-même ridicule…).

Je n’ai aucune paire de jeans qui me fait et je refuse d’en acheter d’autres parce que depuis dix-sept mois, je me dis que je vais rentrer dans mes foutus jeans taille 27 sous peu. La réalité, c’est que je porte du 30 et que le 27 ne monte pas plus haut que mon genou.

Mes chandails sont tous des chandails hyper confos et très grands. Ça me permet de bien me cacher et comme ce sont des oversize, psychologiquement, je me dis que je porte encore du Xsmall et du small…

Est-ce que je fais pitié ? PANTOUTE !

Je comprends que j’ai choisi, sans le vouloir, d’être ce que je suis aujourd’hui.

J’ai choisi de mal m’alimenter. J’ai choisi de ne pas m’arranger. J’ai choisi de ne pas m’acheter des vêtements à ma taille !

Je suis le maître de ma vie, et présentement, ça ne vole pas haut.

Mes enfants sont heureux et ne manquent de rien. Mais moi, je manque de… MOI !

Et je ne veux SURTOUT pas qu’Anna et Livia pensent que c’est normal d’être ainsi.

J’ai réussi au niveau professionnel. Je fais des sous et je suis indépendante financièrement. Le problème est loin d’être par rapport à ça… C’est beaucoup plus profond.

On parle ici de respect de soi et d’amour-propre.

C’est fou pareil parce que je suis certaine que je ne suis pas la seule à vivre ce genre de situation.

J’ai réalisé aujourd’hui que j’avais 34 ans… dans ma tête, j’en ai encore 30 ! Comme si ma vie s’était mise sur pause à une période distincte de ma vie.

Voilà c’est dit ! J’ai enfin mis sur papier tout ce qui me passe habituellement par la tête.

Tout ce que je mets dans un petit tiroir de mon cerveau et que je referme une fois que j’ai réussi à m’exprimer.

C’est cliché, mais… Et si aujourd’hui était le premier jour du reste de ma nouvelle vie ?

Et si aujourd’hui était le premier jour du reste de… ta nouvelle vie !

Maïka

Miroir, miroir, dis-moi…

Depuis toujours, toi, Miroir, tu me joues des to

Depuis toujours, toi, Miroir, tu me joues des tours. Depuis toujours, l’image que tu m’envoies n’est pas à mon goût. Du plus loin que je me souvienne, regarder mon reflet n’a rien d’agréable. Je prendrais un peu plus de ci et un peu moins de ça. Et pourtant…

Quand je regarde les photos de moi, plus jeune, je me trouve magnifique. J’en conclus donc que c’est toi, cher Miroir, qui me rends la vie dure. À moins que ce soit ton ami, Pèse-personne. Là, je l’avoue, tout est déréglé. Le nombre inscrit sur le cadran est celui d’une grosse fille. Mais quand je m’attarde aux images du passé, je vois une belle fille. Que se passe-t-il ? Où est le problème ?

Dans mon magazine « Fille d’aujourd’hui », les filles sont minces, blondes avec des cheveux raides. Elles remplissent leur soutien-gorge beaucoup plus que moi. Toi, tu me renvoies l’image d’une brunette, frisée, avec des fesses. C’est bien confortable, mais ce n’est pas à la mode. Les pantalons sont toujours trop serrés pour moi, même ceux à ma taille. Je dois être grosse.

 

Un peu plus tard arrive le terme « poids santé ». Ça y est, ce que tu me montres depuis des années est confirmé par les experts. Ce n’est pas rien. Ils doivent bien le savoir. Je suis grosse. Alors, tu avais raison, mon cher. S’enchaînent donc régimes de toutes sortes et entraînements. Mais la conclusion demeure la même. Pèse-personne me dit toujours que je fais de l’embonpoint et toi, Miroir, tu m’envoies encore la même image.

Puis un jour, je suis devenue maman. Mon image a changé pour vrai. Ce n’est pas juste toi qui me joues des tours. Mon ventre a perdu sa fermeté, des lignes y sont apparues par dizaines. Quelques rides de souci ont commencé à tapisser mon front. Les filles des magazines aussi ont changé. On commence à parler d’un concept tout nouveau : la diversité corporelle. Mon regard envers moi-même s’adoucit. Pèse-personne ne fait plus partie de ma vie.

Aujourd’hui, à plus de 40 ans, je dois te l’avouer, je me trouve belle. Tu me renvoies l’image de mes taches, mes vergetures, mon petit surplus de poids, mes rides et mes cheveux blancs. Et tu sais quoi ? Je m’en fous ! Je me trouve belle comme je suis. Alors, Miroir, je dois avouer que je t’ai accusé à tort. Tu n’es pas le problème. C’est plutôt la société qui envoie depuis des années une image lisse de la femme. Offre mes excuses aussi à Pèse-personne qui n’y était pour rien lui non plus.

Maintenant maman de deux magnifiques adolescentes, je veux leur montrer l’exemple de l’acceptation de soi, que la beauté est dans la différence. La personnalité d’une personne la rend unique et magnifique. J’ai envie qu’elles n’attendent pas d’avoir 40 ans pour se trouver belles.

Heureusement, les temps changent et des femmes différentes sont représentées dans les diverses publications. J’ai espoir pour les filles qui grandissent. On a encore du chemin à faire, mais nous sommes sur la bonne voie. Vive la diversité corporelle !

 

 Nancy Pedneault

Le démon de la balance

Quand je suis tombée enceinte, j’ai eu accès pour la première fois à

Quand je suis tombée enceinte, j’ai eu accès pour la première fois à un vrai suivi médical. Et comble de chance, je suis tombée du même coup sur un médecin humain, compréhensif et à l’écoute. À mon premier rendez-vous, il a fait son examen de routine, ce qui incluait évidemment une pesée en règle.

Quand je suis montée sur la balance, son regard est devenu beaucoup plus sévère. « Il faut que tu prennes du poids », m’a‑t‑il lancé. Moi ? Prendre du poids ? Pourquoi ? On m’avait toujours répété que le bébé allait prendre ce dont il avait besoin, peu importe le poids de la mère. Et moi, naïvement, je m’étais aveuglément accrochée à cette croyance. Le doc m’a regardé, toujours avec son air sérieux, et a déposé son crayon.

Il m’a dit : « Oui, c’est vrai. Le bébé va prendre tout ce dont il a besoin. Mais tu es tellement en dessous de ton poids santé qu’il ne te restera plus rien pour toi… et comme tu es aussi ma patiente, je m’inquiète pour toi. Si tu ne prends pas au moins 40 livres dans cette grossesse, l’un de vous deux va en souffrir. Et ce bébé aura besoin d’une maman forte et en santé pour prendre soin de lui. » Ces paroles ont changé ma vie.

Partout, on voit des publicités de mamans enceintes ou en post-grossesse qui s’entraînent au gym, qui sont minces et musclées, qui suivent mille et un cours et programmes de remise en forme. Et on les encourage. On les félicite. On les louange. Depuis qu’on est toutes petites, on nous rentre dans la tête qu’il faut ressembler à ça. Être une fitmom.

Ma nouvelle expérience de maman m’a amenée à réfléchir à mon enfance et au modèle de maman que je voulais devenir. Quand j’étais enfant, ma mère se pesait tous les jours, matin et soir. Chaque demi-livre prise venait indéniablement avec son petit commentaire cinglant. « Fini le pain pour moi ! », « Je n’aurais pas dû manger de gâteau à la fête hier… », « Il faut vraiment que je me mette au régime »… Ma mère a toujours été mince. Et depuis aussi longtemps que je me souvienne, tout le monde la louangeait pour ça. « T’es tellement chanceuse toi d’être mince ! » Chanceuse ? Si seulement ces personnes savaient tout ce qu’elle infligeait à son corps pour garder sa taille de guêpe si enviée des autres…

Et moi, j’ai hérité de sa génétique. Un fabuleux cadeau empoisonné… parce que moi aussi, depuis que je suis enfant, on me félicite pour ma taille. On me dit que j’ai tellement de chance. On me fait sentir à quel point c’est un vrai don de Dieu, d’être mince. La vérité, c’est que je n’étais pas mince, j’étais maigre. Cette maigreur a toujours été encouragée. C’est juste tellement malsain. Les gens ont toujours voulu bien faire, ce ne sont que des compliments, ils se veulent tous positifs en fait ! Mais en réalité, ils viennent avec la pression terrible de devoir garder ce poids, ce fameux chiffre sur la balance.

Je n’ai jamais été consciente de cette pression, jusqu’au jour où ce médecin m’a demandé de prendre du poids. J’ai réalisé que je répétais bien des comportements de ma mère, sans même m’en apercevoir. Je travaillais beaucoup, et de longues journées, alors je sautais des repas parce que j’étais trop occupée. Le frigo était souvent vide parce que j’achetais uniquement le nécessaire pour cuisiner chaque repas. J’ai vu ma mère faire ça toute sa vie… Puis, j’ai réalisé qu’aucun travail ni aucun chiffre sur une balance ne valait plus que ma propre santé.

Et j’ai changé toutes mes habitudes de vie. J’ai suivi des cours en alimentation. Certaines personnes comptent leurs calories pour tenter de perdre du poids. Moi, je me suis mise à calculer mes calories pour m’assurer d’ingérer à chaque repas un nombre suffisant de vitamines, de nutriments, d’aliments sains. J’ai commencé à travailler moins, à diminuer mon niveau de stress. J’ai appris à boire de l’eau, souvent. Je me suis fait la promesse de ne jamais mettre les pieds dans un gym. J’ai commencé à sortir dehors avec les enfants, dès que j’en ai eu l’occasion. Jouer au soccer avec eux, aller faire du vélo, nager dans la piscine… Les enfants ont beaucoup plus à nous apprendre sur l’exercice physique sain que toutes les fitmoms du monde !

Puis, j’ai commencé à prendre du poids. Sainement. Mon bébé est né en santé. J’ai appris à me réapproprier ce nouveau corps, ces nouvelles courbes. J’ai cessé d’essayer de rentrer dans des jeans d’adolescentes et je me suis acheté des pantalons dans lesquels j’étais confortable, tout simplement.

Je refuse d’avoir une balance à la maison. Premièrement parce que je ne veux pas savoir combien je pèse. Me sentir bien dans mon corps me suffit. Et deuxièmement parce que je ne veux pas que mes enfants grandissent dans cette obsession malsaine. J’achète 95 % d’aliments sains à l’épicerie. Mon frigo est toujours, toujours, toujours plein à craquer. Pleins de fruits, de légumes et de bonnes choses à manger. Mes enfants n’auront jamais faim. Ils mangent quand ils le veulent. Et oui, il y a un sac de chips, du popcorn et de la tartinade au chocolat dans l’armoire, parce qu’on se permet aussi ce genre de cochonneries de temps en temps, et qu’il ne faut pas virer fou non plus. L’orthorexie n’est pas mieux que l’anorexie.

Évidemment, ce vieux démon de la balance a laissé des traces… Je le combats encore souvent dans ma tête. Après un accouchement, je dois être patiente pour laisser mon corps cicatriser de chaque grossesse. Et c’est souvent très dur d’être patiente ! Je vois des tonnes de mamans s’inscrire aux cours de remise en forme, au cardiopoussette, au yoga-bébé, au zumba-kangourou… Et moi, je me répète sans cesse que mon corps a mis presque un an pour mettre au monde un enfant, et qu’il est tout à fait normal qu’il prenne presque un an encore pour reprendre sa forme. Je me répète aussi qu’il a le droit de ne pas reprendre sa forme. Parce que malgré ce que la société nous répète, c’est d’essayer d’avoir un corps d’adolescente toute sa vie qui n’est pas normal…

Eva Staire

Jokes de gros

À l’âge de 11 ou 12 ans, alors que je dansais dans la cuisine sur

À l’âge de 11 ou 12 ans, alors que je dansais dans la cuisine sur l’air de Beat it, mon frère m’a lancé à la blague : après Michael, Janet et Tito, voici Jumbo Jackson. C’était drôle. On a ri.

Au début de l’adolescence, alors qu’Isabelle Brasseur et Lloyd Eisler étaient au sommet de leur gloire, ma cousine et moi tentions des doubles axels dans le salon en les imitant. Ma mère, à la blague, nous a dit que nous avions davantage le physique pour faire de la lutte gréco-romaine que du patinage artistique. C’était drôle. On a ri. 

Quand j’étais enceinte, assise sur le bord de la piscine, hésitante à sauter dans l’eau froide, mon amie m’a dit : « Ah ben, c’est pratique d’être enceinte. Avant, t’avais juste l’air grosse ; maintenant, t’as une excuse pour avoir une bedaine. » C’était drôle. On a ri.

Cet hiver, en parlant du légendaire porté de Patrick Swayze dans Dirty Dancing, mon humain de proximité m’a dit : « Eh boy, tu m’casserais ben le dos si on essayait de faire ça ensemble. » C’était drôle. On a ri.

J’ai ri de beaucoup de commentaires et de blagues qu’on m’a faits sur mon apparence. 

J’ai ri parce que j’ai un bon sens de l’humour.

J’ai ri pour éviter les malaises.

J’ai ri pour ne pas dire que j’étais blessée.

Les blagues de gros ou les blagues sur l’apparence des gens, même déplacées, vous avez raison, ce n’est pas la fin du monde. Le truc, c’est que lorsqu’on est différent ou non conforme, ce n’est pas LA blague lancée sans méchanceté qu’on ne trouve pas drôle, mais plutôt la 3448e blague qui ne nous fait plus rire. Ce n’est pas LE commentaire déplacé qui nous blesse, c’est le 2567e qui s’ajoute aux 2566 autres commentaires déplacés qui nous blesse. Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’aux blagues de gros ou sur le poids, s’ajoutent tous les autres commentaires, remarques et regards blessants.

Oh wow, t’es vraiment belle depuis que tu as maigri ; ou Imagine comme tu pourrais être belle si t’étais plus mince.

T’es cute, mais je suis pas sûr que je banderais avec une fille qui a du poids en trop.

Si tu avais cette shape‑là, je passerais mes journées à te faire l’amour.

T’es sûre que tu as encore faim pour un dessert ? 

Si tu veux rester grosse, c’est ton choix.

Et j’en passe. Et j’en passe. 

Ceci, c’est un échantillon de ce que j’ai entendu de la bouche de gens qui avaient de l’affection pour moi. Ça vous donne une idée de ce qu’on peut entendre de la bouche des gens qui n’ont aucun lien affectif avec nous. Et c’est encore bien plus soft que ce que les gens obèses vivent au quotidien. Une blague de gros, ça fait écho à toutes les blessures qu’on porte en soi et ça nous rappelle qu’on ne fit pas dans le moule — encore une fois. 

J’ai souffert de troubles alimentaires plus de la moitié de ma vie. Encore aujourd’hui, ça reste quelque chose de très fragile. La relation que j’entretiens avec mon corps et le regard que les autres posent sur lui viennent avec un lot de tristesse et de défis. Et je ne suis pas socialement marginalisée à cause de mon poids. J’imagine difficilement ce que peuvent ressentir ceux qui le sont, mais l’empathie, ça sert à ça. À se mettre à la place de l’autre pour mieux comprendre ce qu’il vit, pense, entend, ressent.

Se fâcher les uns contre les autres, ça ne sert à rien. Ça nourrit les stéréotypes, ça ajoute de l’huile sur les bobos qui font déjà mal et ça ajoute encore plus de distance entre les gens qui sont différents. Aujourd’hui, je vais avoir de l’empathie pour Martin Matte qui doit vivre quelque chose à quoi il ne s’attendait pas. Je vais avoir de l’empathie pour tous les gens qui n’ont pas compris la tristesse ou l’indignation de ceux qui n’ont pas ri de la pub de Maxi. Et je vais avoir de l’empathie pour les gens qui ont été profondément blessés. Pas par CETTE blague‑là précisément, mais par les 3448 d’avant.

Liza Harkiolakis