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La fin du secondaire

Hier soir, mon fils célébrait la presque fin de son secondaire. Mo

Hier soir, mon fils célébrait la presque fin de son secondaire. Moment émouvant que de les voir tous vêtus d’une toge et d’un mortier (oui, oui, le petit chapeau noir sur la tête comme dans les films), fiers, souriants et applaudis dès leur entrée dans l’église. On leur remettait alors leur attestation de présence scolaire.

Je les trouvais beaux. Pas que de belles jeunes femmes et de beaux jeunes hommes en devenir. Je les trouvais inspirants. Je voyais en eux notre futur. Je les aurais toutes et tous pris dans mes bras afin de leur souhaiter le meilleur. Leur dire que malgré leurs doutes, malgré les tempêtes et les soleils, malgré que ce soit parfois trop rapide pour décider ce que l’on veut devenir dans la vie à dix-sept ans, malgré qu’on ne sache pas toujours dans quoi on souhaite s’accomplir pour le restant de sa vie, malgré tout ça, il n’y a pas d’urgence.

Vous avez l’instant d’aujourd’hui et la vie de demain. Vous avez la vie que vous choisirez au rythme des jours, au rythme de votre humeur et de vos choix. Vous écouter et vous respecter devra devenir votre leitmotiv malgré les bons conseils et les attentes de papa et maman. Vous vous choisirez d’abord et avant tout, qu’importe ce que les gens en disent. Qu’importe qu’ils soient en accord ou non. Vous ne vivrez pas la vie de vos parents. Vous ne vivrez pas la vie de vos amis. Vous vivrez la vôtre et vous devrez assumer ce qui vous a emmenés dans cette vie, c’est-à-dire vous.

Vous échouerez et vous vous relèverez. Vous réussirez et vous perdrez l’instant d’après. Vous serez aimés puis rejetés. Vous recommencerez les mêmes erreurs et apprendrez. La vie n’a rien d’un long fleuve tranquille. On peut croire à cette illusion en étant un inconscient bienheureux, mais pas en ayant les yeux ouverts et le cœur prêt à vivre.

Que votre vie vous ressemble. Que vos rêves ne demeurent pas des rêves. Que vos actions soient la continuité de ce que vous dites. Le monde vous appartient. À chacune et chacun d’entre vous : être heureux et accompli demande des efforts, de l’intégrité et de la persévérance. Cette petite voix qui vous parle, qui chuchote en dedans de vous, écoutez-là. Le cœur ne ment jamais.

Et au final, qu’importe ce que j’en pense, rien n’est encore une fois important. Prenez ce qui a du sens pour vous. Gardez les valeurs familiales qui vous sont chères, faites le ménage dans ce qui ne vous ressemble pas. Devenir adulte est une succession de deuils et de naissances. Rien ne sera facile. Faites-vous confiance, tout simplement. L’objectif n’est pas toujours ce qui est le plus important. C’est plutôt la route qui y mène et qui fera de vous ce que vous souhaitez devenir.

Et après tout ça, j’ai serré très fort mon fils contre moi.

Isabelle Bessette

 

Les jeunes de nos jours!

Les jeunes de nos jours sont curieux, empathiques, allumés et gén

Les jeunes de nos jours sont curieux, empathiques, allumés et généreux.

Le titre vous donnait sûrement l’impression qu’un texte sur les ados qui sont donc exaspérants allait suivre, mais non! Bien au contraire, je crois fermement que ceux qui se plaignent des ados n’en côtoient pas. S’ils prenaient le temps de s’intéresser à eux un peu, leur opinion changerait très certainement.

Quand j’ai commencé à enseigner au secondaire il y a neuf ans, j’avais 21 ans. Mon adolescence était donc assez proche pour que j’en aie un souvenir très clair. Ils ne sont pas pires que les générations précédentes, du moins pas pires que la mienne!

Leur réalité diffère de la nôtre sur certains points, c’est vrai. L’aspect technologique constitue le principal point d’incompréhension pour leurs aînés. Ils gèrent donc leur vie sociale, leurs conflits et leurs joies pas tout à fait de la même façon que nous. Ça fait, par exemple, que les problèmes les suivent à la maison au lieu de rester à l’école. Ça fait aussi que leurs amis peuvent leur envoyer une photo du devoir à remettre le lendemain qu’ils ont oublié à l’école. C’est certain que, comme pour plusieurs autres sphères telles que la sexualité, les relations interpersonnelles et la consommation, ils doivent être éduqués. Les côtés négatifs ou risqués d’une nouvelle réalité n’enlèvent pas pour autant les côtés positifs à ces différences générationnelles. Sensibilisez-les aux risques, outillez-les au lieu de dénigrer leurs façons de faire.

Oui, les ados peuvent se montrer bêtes ou insolents. Ils développent leur personnalité, apprennent à s’affirmer, à communiquer, à dire non… On doit les accompagner dans les méthodes qu’ils utilisent pour y arriver. Oui, ils peuvent être « mous » et paraître sans intérêt. Ils grandissent, vieillissent. Ce qu’ils aimaient plus jeunes ne leur plaît peut-être plus, sans qu’ils aient nécessairement trouvé autre chose qui les allume. On peut leur faire découvrir de nouvelles choses, contribuer à élargir leurs horizons. Il ne faut pas oublier non plus que ce n’est pas parce qu’on ne partage pas leurs centres d’intérêt qu’ils n’en ont pas.

Ils peuvent sembler égocentriques. Ils le sont même souvent. Cette période ingrate, où tout change, où ils ne se comprennent pas eux-mêmes, rappelez-vous que vous l’avez aussi traversée. Tout ce qui leur arrive ­— peine d’amour, chicane entre amis, vie sociale — tout prend des proportions immenses, tout ce qui leur arrive leur semble la fin du monde. C’était la même chose pour nous. Ils en sont à apprendre à faire la part des choses et à porter attention à ceux qui les entourent. Ils y arriveront mieux et plus rapidement s’ils sont guidés à travers ces apprentissages.

Évidemment qu’il y a des exceptions à la règle. Bien sûr que vous avez le droit de vous plaindre de vos ados de temps en temps! C’est humain, c’est normal! Des parents qui se plaignent de leur « terrible two » quand ils sont brûlés l’aiment évidemment plus que tout et sont de bons parents quand même. Je suis aussi tout à fait consciente que cette période peut être très difficile à gérer pour l’entourage. Simplement, n’oubliez pas que les ados entendent et comprennent tout, qu’ils apprennent encore beaucoup par mimétisme. Assurez-vous de ne pas les dénigrer et que même si vous chialez une fois de temps en temps, vous les valorisez autant, sinon plus.

Les jeunes de nos jours s’intéressent à un paquet de choses et, bien que leur culture générale puisse nous sembler bien limitée, ils peuvent nous en apprendre sur pas mal de sujets qu’on ne maîtrise pas du tout.

Intéressez-vous à eux, parlez-leur! Parlez-leur de tout, surtout des sujets sensibles comme la drogue et la sexualité. Vous allez voir qu’ils sont trippants! Que ce soit votre nièce, votre filleul, votre voisine, ceux que vous coachez, celui qui tond votre pelouse… ça prend un village, comme on dit! Vous contribuerez certainement à rendre ces adultes de demain des êtres dont vous serez fiers et en qui vous aurez confiance pour gérer notre monde!

Jessica Archambault

Qu’est-ce que ça va être quand elle sera ado?!

Si j’avais dû manger toutes les crises de bacon que notre fille a

Si j’avais dû manger toutes les crises de bacon que notre fille aînée a faites jusqu’à ses treize ans, je serais morte depuis longtemps d’une attaque de cholestérol grimpant. Quand ton enfant te répond bête à dix-huit mois, qu’il lance son matelas queen au bout de ses bras à trois ans, qu’il détruit l’intérieur de ta minivan à sept ans… tu te dis que ça ne sera pas jojo à l’adolescence, une fois que les hormones règneront en reines.

Combien de fois ai-je croisé des regards découragés ou horrifiés (dont le mien dans le miroir!), des têtes qui se dévissaient en faisant des « non » incrédules ou qui s’efforçaient de s’invisibiliser pour ne pas devoir intervenir? Combien de fois ai-je entendu des parents, des proches et des éloignés, des pertinents et des étrangers, qui donnaient leur opinion sur la situation : « Qu’est-ce que ça va être quand elle sera ado?! » Parce qu’évidemment, un enfant agressif, violent même, ne peut qu’empirer. Il ne peut que poursuivre sa dégringolade sur la route du pas-de-classe et de la délinquance…

Bien sûr, mon mari et moi aussi, nous nous inquiétions. Nous espérions franchement que les choses se replaceraient avant que les conséquences s’aggravent. Mais juste avec de l’espoir, on ne va pas loin, alors on a travaillé fort ensemble, avec notre fille et avec plein d’intervenants. Et avec le temps, qui fait parfois de la magie.

Notre grande Peanut a eu treize ans il y a quelques semaines. Le fameux chiffre 13. La malchance, le malheur, les règles, les hormones full pin, les faces de baboune qui ne veulent plus rien faire avec leurs parents, les mâchoires qui s’ouvrent à peine et juste pour dire « m’hein? », les bras qui traînent à terre tellement ils ont poussé sans prévenir. Intense comme l’est notre fille, on s’attendrait à ce que ce soit l’enfer en la demeure! Qu’on essuie dix crises par demi-heure…

Mais non! (Et c’est ici que les parents désespérés verront poindre la lumière au bout du tunnel.) Notre grande Peanut est devenue… heureuse! Elle est toujours aussi intense et émotive et drama queen, mais de façon positive. La plupart du temps (sinon, la barre serait trop haute pour les trois autres qui frapperont éventuellement le mur de l’adolescence). Elle se sait différente, et elle en est fière. Tellement qu’elle se sent plus solide face aux élèves qui la niaisent et essaient de la faire sortir de ses gonds. « Maman, ils doivent être mal dans leur peau pour essayer autant de me prendre en défaut. J’ai décidé que c’était leur problème, pas le mien. »

Elle qui lisait des tonnes de livres (elle est en train de se faire toute une paire de quadriceps à force de monter les six étages de l’école jusqu’à la bibliothèque!), elle les écrit maintenant, les publie sur WattPad, me les fait réviser (alors que la moindre remarque auparavant la faisait entrer dans une de ces rages!). Elle qui n’a jamais voulu suivre des cours d’arts parce qu’elle ne tolérait pas de se faire dire quoi faire, elle est maintenant dans un programme d’arts et multimédias et tripe à fond, persévère et travaille avec acharnement pour s’améliorer. Elle qui éclatait sous la pression de ses émotions fortes, elle exprime maintenant ses sensations et toute la subtilité de ses sentiments avec des mots et des nuances, avec confiance.

Elle qui voulait mourir, elle est maintenant addict à la vie, et à toute une vie! Une vie pleine, belle, remplie d’espoir et tournée à la fois vers le moment présent et vers un avenir rayonnant. Elle sait, et nous savons, qu’il y aura parfois des périodes creuses, mais nous profitons de l’ici-maintenant et de cette magnifique percée de soleil pour continuer de construire sur le positif. Et surtout pour y croire, intensément.

Belle ado, belle jeune femme en devenir, je t’aime et je t’ai toujours aimée!

Parents, grands-parents qui êtes découragés devant votre enfant qui s’adolescentise… gardez espoir. Et ne cessez jamais d’accompagner votre jeune. Un jour, ce sera son tour de vous tendre la main pour tenir la vôtre.

Nathalie Courcy

Le jour où j’ai arrêté de manger

J’avais quinze ans. Dans le miroir, je ne voyais que du gra

J’avais quinze ans. Dans le miroir, je ne voyais que du gras, du gros… Je haïssais cette enveloppe dans laquelle je devais avancer chaque jour. Je détestais chaque partie de ce corps en perpétuel élargissement changement. Alors, je suis partie en guerre, avec mes armes, jusqu’à la mort.

Ça a commencé par une petite réflexion « anodine » concernant la taille de mes fesses. Tu sais, le mot de trop… Celui qui anéantit le peu de confiance que je m’acharnais à bâtir. Je me suis mise à passer des heures et des heures devant le miroir. J’ai débuté un régime… Insidieusement, la maladie s’est installée… Je contrôlais tout : ce que je mangeais (en infime quantité), les kilomètres que je parcourais dans l’eau de la piscine, les heures de sport et d’entraînement que j’infligeais à mes muscles pour dépenser le peu de calories que je m’octroyais, mes notes brillantes à l’école, mes relations si parfaites avec les autres et pourtant si conflictuelles avec des miens… Je croyais que je contrôlais tout…

Quelle illusion que cette maladie! La surpuissance du corps, la force du mental… Je croyais que j’allais être bien. Mais mon esprit était prisonnier… Je me pesais plus de cent fois par jour. C’était un véritable rituel d’embarquer sur cet instrument de torture. Je mettais un pied, je me tenais sur le mur, un autre pied, puis je lâchais doucement le mur regardant l’aiguille monter, monter avec mon angoisse, avec mon désespoir… Chaque jour, je pesais un peu moins lourd, chaque jour je mangeais moins et courais plus, afin de maigrir encore et encore…

Je me suis retrouvée dans un cercle infernal. Je mentais et je manipulais mes proches pour arriver à mes fins : me détruire. J’étais en guerre contre ce corps si horrible, si laid, si gros. Rien ne pouvait m’arrêter.

Et, un jour, j’ai arrêté de manger. Je buvais une quantité d’eau terrifiante afin de fausser la pesée chez le médecin. J’ai commencé à avoir des pertes de conscience. Je n’avais plus mes règles depuis des mois et sous ma peau, mes os étaient saillants… Je me vidais par en dedans. Mon âme a commencé à s’éteindre. Tout est devenu si noir…

Devant le miroir, je me trouvais énorme. Rien ne comptait plus que ce fichu miroir et cette maudite balance… Je passais mes journées, à bout de force, à regarder mon corps dépérir. Jusqu’à ce que plus rien ne rentre. Jusqu’à ce que je ne sente ni la douleur, ni la faim, ni l’amour, ni la haine, ni la peur… et que je flotte…

Le jour où j’ai arrêté de manger et que j’ai bien failli gagner cette guerre contre mon moi. Jusqu’à la mort… Je me souviens… l’ambulance, les bruits, le choc, les cris, la douleur…

Je ne sais pas où je suis allée puiser la force de redonner vie à ce corps qui a subi des mois de souffrances et de privation, la force de faire entrer un rayon de soleil dans mon esprit et de m’y accrocher… J’ai infligé le pire à mon être et ça a été un long chemin que de me relever… Et comme l’alcoolique qui ne peut plus boire une seule goutte, je ne pourrai jamais monter à nouveau sur un pèse-personne…

L’anorexie mentale est une maladie mortelle. Je ne sais par quel miracle j’ai survécu. Il faut connaître la noirceur pour savourer la lumière…

 

Gwendoline Duchaine

 

Être un adolescent, plus difficile que je ne le croyais

Pourquoi personne ne m’avait dit de me préparer ? Pourquoi ne m

Pourquoi personne ne m’avait dit de me préparer ? Pourquoi ne m’avait-on pas avertie que ce serait si difficile ? Depuis déjà deux ans, je suis définitivement une adolescente. Tout le monde me disait que ce serait une des plus belles périodes de ma vie. Alors pourquoi j’en pense le contraire ?

Je sais ce que maman pense. Elle se demande pourquoi j’agis ainsi, pourquoi je lui pique des crises existentielles sans aucune raison, pourquoi je suis sensible vis-à-vis de certains sujets qui lui semblent pourtant tout à fait normaux, etc. Eh bien, maman, pour moi, l’adolescence est une étape de ma vie où je ne me reconnais plus.

Si tu savais à quel point le secondaire, au 21e siècle, est difficile et stressant. Peut-être que cela ne se voit pas à travers mon bulletin, mais en moi, tout est si compliqué. Si seulement tu savais quel poids nous avons sur les épaules, nous, les premiers de classe. On ne veut jamais faire d’erreurs par peur d’être jugé. Pourtant, nous savons très bien qu’il faut se tromper pour s’améliorer, mais ce n’est pas ce que tout le monde sous-entend.

Ensuite, plaire. Satisfaire mes professeurs par mon comportement et par mes notes est un travail très complexe. Toujours conserver une moyenne en haut de 85 % et me taire en classe semblent beaucoup plus évident que ça en a l’air. Plaire est plus stressant que tu ne peux l’imaginer.

Puis les frères et sœurs. J’essaie souvent de me concentrer sur mon travail, mais c’est sans succès. Souvent, les cadets veulent seulement que leur grande sœur vienne jouer avec eux. Ils ne font rien de mal, je le sais. Mais c’est parce que je suis tellement frustrée d’avoir été dérangée que je pique cette crise incompréhensible. Je sais, ils n’ont rien fait. Ils croient peut-être être la cause de mon comportement, mais ils n’y sont pour rien. Je te promets, maman, j’essaie de me contrôler, mais c’est toujours sans succès…

Pourquoi ne m’avait-on pas dit que tous ces sentiments allaient jouer sur mon comportement ? Peut-être que dans deux ans, ce sera comme avant. J’aurai peut-être compris que tout ça ne devrait pas me stresser.

Pour l’instant, comprenez chers adultes, qu’être adolescent n’est pas si facile.

Juliette Roy

 

Sérieux, Man?

Mon grand a huit ans. Un beau petit mec de huit ans tout blond qui r

Mon grand a huit ans. Un beau petit mec de huit ans tout blond qui ressemble lentement, mais sûrement, plus à un début d’ado qu’à un petit garçon. Un petit monsieur qui se développe, se construit et devient un lui à part entière, à part de moi et à part de quiconque. Son lui à lui.

Hier, j’ai eu droit à un « Sérieux, Man? » quand je lui ai dit d’aller prendre sa douche… Mon premier. Perplexe que j’étais, je n’ai pas réagi immédiatement. Mon premier réflexe a été de me demander « c’est qui ça Man? » Moi??? C’est quoi? C’est fini ça, maman, ma petite maman d’amour, mamaaaaaan et toutes ces variantes que j’entends depuis huit ans? À compter de maintenant, je vais m’appeler Man? Seigneur! Je baignais dans le doute. Est-ce que j’aime ça, Man, ou je mets un stop à cela? Je le laisse s’émanciper ou je le couve?

Et puis, c’est quoi cette nouvelle manie de me demander si je suis sérieuse à chaque intervention? J’ai trois enfants, un chum, un ex, de nombreux amis, des collègues de travail, vingt-cinq appels de job par jour, des parents retraités qui ont plein de temps pour jaser, une belle-famille, des voisins, des interactions obligatoires quotidiennes avec la fille de l’épicerie, le gars du dépanneur, la cosméticienne de la pharmacie… Est-ce qu’il pense qu’après tout ça, je pourrais encore avoir un soupçon d’envie de parler pour rien? De jaser pour jaser? De donner des consignes « pas sérieuses »? Euh, sérieux, non!

Mais je sais que je m’en vais lentement vers cette fabuleuse adolescence qui m’amènera assurément son lot de « Sérieux, Man? » et je m’y prépare bon gré, mal gré. Et de là une toute nouvelle réflexion qui germe en moi : comment être un parent cool et un peu ami, tout en demeurant dans notre rôle de parent? Je veux bien que nous ayons des discussions intéressantes et que je fasse partie de leurs confidences, mais je dois jauger correctement pour demeurer ce que je serai à jamais : leur mère!

La ligne est mince et difficile à tracer pour ne pas verser dans un côté ou l’autre. Comprenons‑nous bien, mes enfants, je les A-DO-RE! Mais je ne veux pas être juste leur amie-cool. Et je ne veux pas juste être leur mère-figure-d’autorité. Je veux du respect, de bonnes manières et de l’obéissance. Je veux également de la complicité, des discussions et des confidences. Mon plus grand souhait est l’équilibre parfait entre les deux.

Et l’équilibre, il se construit au fil du temps, selon moi. On le développe lentement, on le façonne selon nos expériences et sûrement par des essais-erreurs aussi. J’espère être à la hauteur. J’espère qu’ils me trouveront cool et auront envie de me confier leurs états d’âme. J’espère que je saurai garder une poigne de fer dans un gant de velours maternel. J’espère qu’ils sauront faire leur bout de chemin pour qu’on arrive à se retrouver au centre. J’espère que nous aurons toujours envie de nous retrouver à cet endroit où l’amie-cool et le parent ne font qu’un et que ça fonctionne.

Souhaitons‑nous le meilleur. Comme chaque parent se souhaite de ne jamais perdre le fil invisible du lien qui nous unira toujours. En attendant, Man va aller lui répéter de prendre sa douche et jouer son rôle de parent pour que ça bouge un peu… Mais ce sera assurément maman qui ira le border ce soir; Man laissera sa place le temps d’un bisou et d’un câlin.

Isabelle Rheault

Iglou iglou, mais pas chez nous

Du monde saoul, j’en ai vu dans mon enfance! La matante pu capable

Du monde saoul, j’en ai vu dans mon enfance! La matante pu capable de nourrir son enfant dans un party de parenté tellement elle a frenché le goulot… Le mononcle qui cale sa caisse de six pendant un trajet de quarante-cinq minutes, qui arrête trois fois en chemin pour se vider la vessie sur le bord de la 55. Heureusement, son épouse compréhensive avait depuis longtemps pris le relai derrière le volant. Et ce même mononcle de cinquante ans en train de vomir sa vie à odeur de Labatt 50… à peine une heure après le début du réveillon des Fêtes… bel exemple pour la jeunesse. Des cousins ruinés à cause des dettes d’alcool et de drogues, qui ne voient tellement plus clair qu’ils ne voient plus d’espoir, sauf au bout d’une corde… Sans compter ceux qui ont perdu leur emploi et leur famille à cause de la divine bouteille!

Et le grand frère alcoolo avant même de finir son secondaire… jusqu’au jour où le téléphone sonne à huit heures du matin : « Euh… je suis à l’hôpital… Je comprends pas trop ce que je fais ici… le doc m’a dit que j’ai passé la nuit en camisole de force… Il paraît que j’ai calé un 40 onces en trois heures… Je me suis pété la gueule en tombant… Je suis devenu violent… Perdu la carte… Faudrait que m’man vienne me chercher… » Ç’a été la fin de l’abus d’alcool pour lui.

Mais pour d’autres, la dépendance à l’alcool est encore et toujours omniprésente. T’sais, quand en quatre décennies, tu as vu une personne une seule fois à jeun… ça donne une idée qu’elle n’a pas passé beaucoup de journées lucide. Ça donne une idée du nombre de « premières fois » de ses enfants dont elle ne se souvient pas parce que les vapeurs d’alcool étaient trop épaisses. Ça explique aussi pourquoi j’ai longtemps eu peur des effets de l’alcool dans ma vie.

Adolescente, à l’époque des premières rencontres avec la bouteille, mon œsophage se fermait automatiquement après une bière. Comme si j’avais un détecteur de surplus d’alcool intégré. Alors, au lieu de caller l’orignal comme plusieurs expérimentateurs, je flattais le dos de ceux qui se vidaient l’estomac dans le bol de toilette (ou ailleurs). Je téléphonais aux parents des jeunes qui avaient dépassé les bornes, et je lavais les cheveux gluants des filles avant que leurs parents arrivent. Et je ramassais les corps morts et les botchs de cigarettes au petit matin.

Adulte, j’ai eu quelques excès. Une bouteille de Caribou un soir de Carnaval… un enterrement de vie de fille sur la Grande-Allée… mais tout ça de façon plutôt contrôlée. Quand j’ai rencontré mon futur époux, notre première soirée s’est déroulée autour d’un (deux-trois) pichets. Mais rapidement, on a compris qu’on n’était pas dans la gang des alcoolos. On aimait prendre un petit verre en soupant, lui aimait goûter des bières et collectionner les verres qui vont avec, c’est à peu près ça.

Mais ça m’inquiétait tout de même. Chaque verre rempli, chaque verre vidé sonnait une alarme en moi. « Fais attention : alcoolique potentiel! » J’en avais tellement vu… J’en avais trop vu. Quand j’en parlais, ça créait quelques frictions. Il avait l’impression que j’exagérais, que je voyais des bibittes partout. « Voyons donc, je suis loin d’être alcoolo, relaxe un peu! » Mais l’alarme sonnait encore la fois d’après.

À force de vivre ensemble, de discuter, d’analyser ma peur et mon passé, on a compris. J’avais toutes les raisons du monde de craindre l’alcoolisme, mais j’étais tombée sur un gars qui n’avait pas ce problème. Il aimait le goût de l’alcool, il aimait prendre un verre entre amis ou en amoureux, mais pas à n’importe quelle heure, pas dans n’importe quelle occasion, pas au point d’être tout le temps guerlot. Il était bien ancré dans la réalité. Bien loin d’une dépendance.

Il a respecté ma limite, ma crainte. Il m’a écoutée. Il m’a expliqué. Avec douceur. J’ai pris le temps d’observer. D’analyser notre réalité sous l’angle du présent et non du passé. Et j’ai compris que l’alcool pouvait être synonyme de plaisir partagé, de plaisir momentané, de plaisir contrôlé. Je ne regrette pas d’avoir exprimé mes craintes, ça m’a permis de les soigner.

Ce que nos enfants voient, c’est notre relation saine à l’alcool. Ils savent que ça existe, ils savent que ça peut être bon et agréable, ils savent aussi (parce qu’on leur en a parlé) que ça peut faire déraper quelqu’un pendant une soirée ou une vie. Et à mon plus grand bonheur, ils trouvent que ça a l’air dégueulasse!

Faites le test! Mesurez votre niveau de dépendance

http://aa-quebec.org/AA_Quebec/Templates/index.htm

Alcooliques Anonymes Québec

http://aa-quebec.org/AA_Quebec/Templates/index.htm

Dépendances: alcool, drogues, jeu (Portail Santé Mieux-Être du gouvernement du Québec)

http://www.sante.gouv.qc.ca/problemes-de-sante/dependances/

 

Jeunesse J’écoute: Alcool et drogues

http://aa-quebec.org/AA_Quebec/Templates/index.htm

Nathalie Courcy

Une place pour moi

Bonjour,

Bonjour, je m`appelle Samuel et j`ai onze ans. Je fais partie de ceux qui ne sont pas motivés par l’école. Ceux qui ne se sentent à leur place nulle part. Je vous parle de cela, car il n’y a pas longtemps, je voulais tout lâcher. J’ai imaginé une place qui aiderait les jeunes comme moi à découvrir leurs forces, ce qui les passionne. Un endroit où on ne serait pas obligé d’être comme les autres et d’entrer dans un moule. Une place où on ne serait pas jugés.

 

J’ai essayé de trouver une place avec ma mère où je pourrais me retrouver, faire le point et me connaître moi-même. Malheureusement, ces endroits ne sont pas pour moi. Je suis soit trop jeune ou je ne suis juste pas considéré comme un cas qui en a vraiment besoin. Pourtant, je dois passer mes journées tranquille, assis à ma place à écouter mon professeur. Pour y arriver, ça me prend beaucoup d’énergie parce que je dois me contrôler. Donc, à la longue, je me tanne et j’en viens à ne plus aimer aller à l’école.

 

Je sais que je ne dois pas lâcher et que c’est important d’aller à l’école. Sauf que j’ai l’impression que rien n’est pour moi là-bas. Je ne peux pas faire aller mon imagination comme je voudrais. Plus tard, j’aimerais créer un endroit pour les jeunes comme moi. Les jeunes qui ont besoin d’une pause et de faire le point. Certains ne sont pas faits pour aller s’enfermer dans un bureau pour parler de leurs émotions à un psy. Juste parler autour d’un jeu à quelqu’un qui nous comprend et qui ne nous juge pas peut faire une grande différence.

 

Dans la place que je voudrais bâtir, les jeunes pourraient se confier. J’aimerais aussi pouvoir offrir des ateliers volontaires pour que les jeunes puissent peut-être découvrir une passion. Ça pourrait être un atelier de cuisine, de photographie, de fleuristerie, de mécanique… Tellement de possibilités. Nous sommes préparés à l’école pour le cégep et l’université, et je me sens poussé vers une voie que je ne veux pas. Peut-être que j’irai, mais pour le moment, je suis surtout découragé et perdu.

 

Pour finir, j’espère un jour trouver ma place. J’aimerais que la société s’ouvre les yeux et fasse une place aux jeunes comme moi. Que des mesures soient mises en place, car pour le moment, plusieurs ont juste le goût de baisser les bras.

 

Samuel

 

 

 

 

Merci pour tout, mon père!

Je me souviens encore de ces matins où nous jouions à la main chau

Je me souviens encore de ces matins où nous jouions à la main chaude toi et moi, assis à la table de cuisine. Ma toute petite main attendait avec impatience que ta grosse main la frappe. Doucement, comme une caresse. Très fort pour qu’elle devienne rouge et que ce soit encore toi qui gagnes. Je me souviens de ces fins de semaine à la maison, quand je revenais après le patin et que nous faisions le ménage au son de Rod Stewart ou Santa Esmeralda. Je me souviens de ces soirées au Lac Aylmer ou nous pêchions la barbotte au bord du feu. Je me souviens de ces matins très tôt où nous partions en bateau pour aller « troller » en espérant attraper le plus gros brochet, le plus gros doré ou le plus gros achigan. Je me souviens de ces week-ends en bateau, ces moments où Francis Cabrel chantait et où on profitait de la vie en famille. D’ailleurs, chaque fois que j’entends Francis Cabrel, Rod Stewart ou Santa Esmeralda, je pense à toi.

Je me souviens des couvre-feux à mon adolescence, quand je descendais en ville à pied pour aller rejoindre mes amies au terrain de balle et que tu me disais que si je n’étais pas revenue à neuf heures, la porte serait barrée. De cette soirée avec mon premier chum où Mom m’attendait assise dans les escaliers à la maison. De cette soirée où vous étiez censés passer la semaine sur le bateau et que vous êtes revenus parce qu’il y avait une tempête sur le lac. Il n’y avait pas de cellulaires dans le temps. J’ai eu la peur de ma vie quand je suis revenue à la maison et que toutes les lumières étaient allumées.
Je me souviens d’un père aimant, travaillant, intègre. Un père strict, mais tellement généreux. Un père tendre et affectueux qui aime sa femme et ses enfants de tout son cœur. Un père taquin et drôle. Ton rire contagieux résonne dans mes oreilles quand je lis une histoire drôle ou qu’on me raconte une blague. Tu aimes tellement rire… Voir la maladie qui te gruge aujourd’hui me brise le cœur. Tant de souffrances. Malgré tout, j’ai la chance de pouvoir te dire à quel point je t’aime. À quel point je te serai à tout jamais reconnaissante d’avoir fait de moi la femme que je suis aujourd’hui. La mère qui essaie du mieux qu’elle peut de faire que ses enfants se souviennent de leur papy comme moi. Un papy qui les aime plus que tout.

Alors aujourd’hui, je te dis : MERCI POUR TOUT, MON PÈRE! Tu resteras à tout jamais dans mon cœur. Le chemin est difficile, mais je t’accompagnerai jusqu’au dernier moment. Je tiendrai ta main pour que ton départ soit plus doux…
Je t’aime, mon Père xxx

Fuir ou frapper : pas les seules options

Mes filles arrivent à l’âge où j’ai fait subir à ma mère l

Mes filles arrivent à l’âge où j’ai fait subir à ma mère l’inquiétude aiguë de ne pas savoir où j’étais, mais de savoir que j’allais mal. En deuxième année du secondaire, je me suis sauvée deux fois de l’école privée. J’ai fugué. Pas longtemps, pas loin, mais assez pour semer la panique. Et je ne voudrais tellement pas que mes enfants fassent la même chose! (Je m’excuse encore, maman…)

La Nathalie de l’époque était malheureuse. Elle avait le goût de mourir. Elle avait des amis, elle réussissait très bien à l’école, elle avait des buts dans la vie (gagner les compétitions de fanfare avec les cadets, gagner le concours de dessins et la dictée annuelle), elle avait un toit pour se couvrir et une famille aimante. Tout pour être heureuse et bien dans sa peau, mais apparemment, quelque chose manquait.

Il manquait un père, qui me manquait terriblement depuis son décès cinq ans plus tôt. Le deuil s’étirait, et l’expression du deuil n’était pas toujours bien accueillie. À l’âge où je vivais mon trip d’Œdipe, lui apprenait qu’il avait un cancer incurable. Alors à l’âge où j’aurais eu besoin de mon papa policier pour me policer et m’aimer, il me manquait. Un manque dans le sens de sevrage. Avec des souffrances et des séquelles.

Je ne manquais pas de confiance en moi, je connaissais mes forces et j’étais capable de répliquer aux terreurs de cinquième secondaire qui essayaient de terroriser la classe de petites bollées que nous étions. Mais derrière l’ado frondeuse que j’étais, derrière la mi-rebelle, mi-nerd, il y avait une fillette terrorisée, jammée à l’âge où son papa était parti et où elle subissait des abus de la part de jeunes garçons en rut. Pas facile de se définir comme jeune fille, quand nos repères masculins sont aussi biaisés.

Et puis, j’avais deux frères, eux aussi premiers de classes et rebelles à leurs heures. Ils étaient passés maîtres dans l’expérimentation des mauvais coups de la vie. Alcool, drogues, découchages, tests d’explosifs, violence… Je me rappelle avoir eu cette conversation avec moi-même : « Tu dois faire quelque chose qu’eux, ils n’ont pas fait. » Ils n’avaient jamais fugué, alors c’est ce que j’ai fait. Probablement par manque d’attention, aussi pour exprimer un mal-être.

Quand on habite dans un petit village de campagne perdu entre Montréal et Québec, le choix des destinations est limité. La première fois, j’avais planifié l’expédition. J’avais apporté un deuxième manteau pour éviter d’être repérée grâce à mon manteau rose bonbon. J’avais calculé le temps que je devais niaiser à ma case pour que les autres élèves partent à leur cours avant moi. J’avais choisi la journée où notre première période avait lieu dans un autre pavillon. Ça me donnait une raison pour sortir de l’école. Il ne me restait qu’à passer par un chemin où je ne serais aperçue par personne et ce serait tiguidou.

J’ai marché, marché, marché. Et encore marché. Le long de la rivière gelée en contemplant l’idée très attirante de me pitcher dedans. Deux visions m’en ont empêchée : la panique que je ressentirais avant que mon corps s’endorme, et l’impact que ce suicide aurait sur les compétitions de fanfare. Je ne voulais pas, bien sûr, que ma famille et mes amis aient de la peine, mais au bout du compte, c’est bel et bien mon appartenance aux cadets qui m’a retenue sur la rive.

J’ai marché dans le froid hivernal jusqu’à une forêt. Et là, je me suis couchée en boule sous une chaloupe qui y avait échoué. Comme moi. Je ne sais pas combien de temps j’y suis restée, mais je sais que j’ai marché dans le sens inverse tout l’après-midi. À 3 h 45, je montais dans l’autobus jaune comme si de rien n’était. Pendant que moi, j’étais dans ma tête, en plein débat sur ma volonté d’en finir, de continuer à marcher ou de revenir, ma mère, mes profs, la direction de l’école étaient en mode panique : où est Nathalie?

Il n’y a pas vraiment eu de conséquences, peu de discussions à la suite de cette fugue. J’ai perdu des points de bon comportement à l’école parce que je m’étais absentée sans permission. Dossier clos.

La deuxième fois, ce n’était pas prévu. Mais bien sûr, comme rien n’avait été réglé, la répétition était prévisible. Je ne me souviens même plus de ce qui a déclenché mon départ, mais je suis partie de l’école encore une fois. Et j’y suis revenue quelques heures plus tard. Le soir, ma prof titulaire m’a téléphoné, inquiète. Elle a été très présente toute l’année et son écoute m’a soulagée d’une grande tristesse. Plusieurs années plus tard, je l’ai croisée par hasard et j’ai pu la remercier. Mais maintenant qu’elle est décédée, je reste avec le regret de ne pas l’avoir remerciée assez.

Le lendemain de ma fuite, la directrice générale a demandé à me rencontrer dans le corridor : « Nathalie, normalement, on devrait te mettre à la porte du collège. Tu as perdu tous tes points à cause de tes absences non autorisées et aussi parce qu’il t’arrive d’insulter des profs (vous savez, ceux qui m’appelaient “Poison” ou “Microbe” parce que je parlais trop et que je dessinais en classe…). Mais tu es une de nos meilleures élèves. J’ai l’impression que c’est juste une mauvaise passe. Acceptes-tu de rester avec nous? »

J’ai eu un samedi de retenue (pendant lequel j’ai pratiqué mes pièces au cor français en vue des compétitions, et aussi mangé du sucre à la crème préparé par la surveillante) et j’ai dû promettre de ne plus m’enfuir. Promesse tenue, je ne suis plus partie de l’école ni de la maison.

Quand on pense aux « si » (si ç’avait été dans une grande ville, si je n’étais pas revenue la journée même, si j’avais sauté dans la rivière, si quelqu’un m’avait embarquée, si la police avait été lancée à mes trousses, si j’avais reçu plus d’aide dès la première fois, si j’avais été mise à la porte du collège, si, si, si…), on angoisse facilement. Dans mon cas, ces « si » ne se sont pas produits. J’ai été chanceuse et j’ai aussi fait ma chance en revenant chez moi, en acceptant le compromis avec l’école et en apprenant de cette leçon.

Et maintenant que c’est à mon tour d’être maman d’ados, j’espère que je ne serai jamais confrontée aux « si » d’une fugue. J’essaie d’être à l’écoute des signes et d’enseigner à mes enfants d’autres options afin que fuir et frapper ne leur apparaissent pas comme des solutions. On verra si ce sera suffisant.

Nathalie Courcy

Ces méchantes petites filles

C’est connu depuis des années que les petites filles sont méchan

C’est connu depuis des années que les petites filles sont méchantes entre elles. Il y a d’ailleurs eu un documentaire de Jasmin Roy sur ce phénomène : BITCH : Les filles et la violence. Le documentaire met en lumière le caractère méchant des filles entre elles. Il parle des ados, mais ce phénomène se produit très tôt. Ma fille de onze ans est d’ailleurs victime de ce genre de méchanceté entre fillettes.
Depuis la quatrième année, une petite fille de son niveau a décidé de prendre ma fille en grippe. Elle s’en prend à elle pour un tout et pour un rien. Avant le début de l’année scolaire, j’avais décidé que je réglerais le problème en discutant avec la mère et la fille. J’avais décidé que je ne voulais pas que ma fille vive sa sixième et dernière année de primaire comme la méchante de leur petit groupe de filles. À la première journée d’école, la petite manipulatrice est venue voir ma fille pour s’excuser de la méchanceté dont elle faisait preuve envers elle. Tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes jusqu’à aujourd’hui, lorsqu’en groupe, elle insulte ma fille, fait semblant de tomber en disant aux autres que ma fille l’a poussée et réclame l’aide des autres qui elles accourent pour l’aider. Je ne suis pas témoin de ces épisodes, mais je lis les textos que la petite lui envoie. Elle exige qu’elle s’excuse sous peine de se retrouver seule et sans amies. Elle la traite de bébé et d’autres insultes.

Bon, je ne dis pas que ma fille n’a aucun tort, qu’elle n’a rien fait pour mériter cela, car je ne suis pas avec elle à tout moment. Par contre, les gens qui la connaissent savent très bien que ma fille n’est pas méchante pour cinq sous. Elle aime rire et faire des blagues. Elle a une bonne oreille et est toujours prête à aider tout le monde. Lorsqu’elle va chez des amies, il n’y a que des bons mots pour elle. Alors pourquoi cette petite agit ainsi et pourquoi réussit-elle à convaincre toutes les autres que c’est ma fille qui est dans le tort? Est-ce que ce serait par jalousie?

Ça vient tellement me chercher de voir ma fille pleurer et se demander si le lendemain, à son retour à l’école, ses amies lui parleront. Je me demande vraiment ce que ça donne de mettre les autres à part et d’être méchante entre elles. L’an passé, j’avais même fait appel au prof de ma fille pour qu’il intervienne dans la cour d’école parce que ma fille était mise à l’écart.

Dernièrement, ma fille m’a réclamé d’avoir un compte Instagram. Je le lui ai refusé, mais je lui ai accordé Snapchat avec accès à son compte. Ses amies ont toutes un compte Instagram. Avec tout ce qui se passe en ce moment, je suis contente de lui avoir refusé, car qui sait, peut-être que ça se poursuivrait sur ce réseau. Est-ce que les parents des autres petites filles de onze ans vont voir les textos de leur fille tout comme moi? Et si oui, comment accepter que leur enfant soit si méchant avec d’autres? En tout cas, jamais je n’accepterais qu’un de mes enfants en insulte un autre verbalement, physiquement, par écrit ou sur les réseaux sociaux. Les conséquences des actes posés à cet âge peuvent avoir un impact sur la vie de ces jeunes. Je me demande vraiment pourquoi les petites filles agissent de cette façon. J’ai aussi un garçon et les chicanes de BFF, de « sa mère m’aime plus que toi », de « tu n’as pas le droit de jouer avec elle », ça ne se produit pas. Mon fils joue avec plusieurs amis à la fois ou même séparés, et ces petites chicanes de possession ne se produisent pas.

Ma consolation dans cette histoire, c’est que l’an prochain, c’est le secondaire. Les amies seront donc séparées. Ma fille ira dans une autre école par choix et par hasard, car elle n’a pas été acceptée dans la même école qu’elles. C’est un hasard, mais parfois, le hasard fait bien les choses. C’est extrêmement difficile pour une maman de voir sa fille démolie comme ça. Un jour, tout va bien et le lendemain, c’est la crise de larmes. Comment la consoler, la rassurer? J’espère vraiment que ces épisodes n’ébranleront en rien la confiance en elle que j’essaie de bâtir depuis qu’elle est toute petite. J’espère que ce n’est pas une petite de onze ans qui réussira à détruire ce que je bâtis depuis maintenant onze ans.