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Je ne suis plus la m̻me РTexte: Nathalie Courcy

Mon plus jeune aura dix ans dans deux semaines.  <span st

Mon plus jeune aura dix ans dans deux semaines. 

Si je calcule: 

4 ans de processus en fertilité + mes 4 grossesses + mes 4 accouchements + mes 4 allaitements + ma fausse-couche + les presque 19 ans depuis la naissance de ma fille aînée… on approche du quart de siècle!

Plus de la moitié de ma vie consacrée à mon rêve de famille et à ma famille. 

C’est une pas pire moyenne au bâton!

Une décennie depuis mon dernier accouchement. Que s’est-il passé depuis? 

D’abord, j’ai cessé de rêver d’avoir un autre enfant. Depuis le début de ma vingtaine, mon esprit et mon corps étaient remplis par les mots ovulation, test de grossesse, rendez-vous, bébé, grossesse, enfant, lait, couche, dodo, pleurer, colique, premiers pas, sieste, rot, siège d’auto, vaccins, développement de l’enfant, garderie… Limite obsession. 

Mais mon dernier, je savais que ce serait le dernier. Mon corps avait maintenant peur d’accoucher. Mon sac à désir de grossesse était vidé, j’avais vécu ce que j’avais à vivre. J’étais la mère que je voulais être en termes de nombre d’enfants. Mais en termes de qualité de maman? Hum…

On le sait, les bébés, ça ne vient pas avec un mode d’emploi. En plus de dix-huit ans, j’en ai lu, des livres! J’en ai rencontré, des spécialistes? Pour moi et pour eux. J’en ai compris, des choses! Et je sais encore plus qu’avant que c’est impossible de tout savoir. 

Si la maman que j’étais à l’époque (oui… c’est si loin que ça semble une autre époque… et si vous demandez à mes enfants, ils vous diront en riant que c’était même une autre ère…) avait su tout ce que je sais maintenant, elle aurait été une mère autrement. Et peut-être pas. 

Chose certaine, j’ai agi avec les meilleures intentions du monde. J’ai réagi du mieux que je pouvais avec mon bagage, avec ma fatigue de maman, avec ce que la science nous disait, aussi! On ne parlait pas encore de neuroplasticité, on s’obstinait encore sur l’introduction des céréales… bref, comme à chaque époque, on faisait notre gros possible avec ce qu’on avait. C’est aussi ce que j’ai fait. J’ai agi au feeling, avec mon cœur. Avec tout l’amour que je contiens.  

Je ne suis plus la même dix ans plus tard. J’ai ralenti. Même si beaucoup me trouvent encore speedy. J’ai changé d’emploi deux fois. J’ai réinventé mon modèle familial. Je ne me lève plus dès que les enfants gazouillent dans leur lit. Bon, ils ne gazouillent plus dans leur lit. Et ils n’ont plus besoin de G.O. dès leur réveil. Je cuisine moins, eux cuisinent plus. Je marche moins (j’en ai pris, des marches avec un bébé dans la poussette et un autre dans le porte-bébé!) mais j’aime encore ça. Je ne parle plus à tous les voisins (eux non plus…). C’est vrai qu’un bébé, c’est un sujet de conversation assez passe-partout. Je pleure encore quand je vois des petits pyjamas de bébé. Je ne sens plus le régurgit de bébé (yé!). Je prends mon bain seule. Je fais encore des massages à mes enfants, mais juste quand ils le demandent. 

Je joue moins que quand mes enfants étaient bébés, mais plus que quand ils étaient enfants. Je plante des graines de ludique dans ma vie pour retrouver cette joie de vivre et cette légèreté qu’ils m’ont enseignée. J’ai remplacé certaines responsabilités de parents par des projets de grands. Je lis des livres pour moi, et non pour mes enfants, mais je suis toujours heureuse de lire en famille, tous entassés sur le divan.

Je gère mes émotions autrement, moins intensément, peut-être même que je les gère trop, au lieu de les vivre. C’est ce qui est beau quand on vieillit: on continue d’apprendre. Je suis moins dans l’appréhension de la prochaine crise de terrible two, et quand même pas dans la gestion des crises d’adolescence. J’ai moins d’énergie, mais je dors mieux. Mon niveau d’anxiété fait le chemin inverse, tranquillement pas vite. Mes articulations sont rouillées, je me verrais mal me promener à quatre pattes pour faire le cheval avec un bébé sur le dos. J’ai appris à respirer, mais c’est un work in progress. J’ai moins d’amis. Ceux que j’ai sont là depuis longtemps. Je voyage moins, et je prévois recommencer bientôt puisque ma présence physique n’est plus aussi intensément requise à la maison. Je deviens indépendante au même rythme qu’eux.

Je me connais plus. Je connais moins mes enfants sous toutes leurs coutures même si je les ai tricotés; ils ne sont plus scotchés à moi en tout temps, ils se développent de leur côté tout en revenant s’abreuver de câlins à la source tous les jours. Je les aime autant qu’avant, pour des raisons différentes. 

Avant, je les aimais parce que c’étaient mes enfants. Maintenant, je les aime parce que ce sont des humains magnifiques. Et aussi parce que ce sont mes enfants. 

Je ne suis plus la même qu’il y a dix ans. Je crois que je suis une version améliorée qui continue de cheminer. Watch out dans un autre dix ans!

Nathalie Courcy

L’humanicide continue. Texte: Nathalie Courcy

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Geneviève.

Nathalie.

Anne-Marie.

Maryse.

Anne-Marie.

Michèle.

Annie.

Hélène.

Barbara. 

Maud.

Maryse.

Sonia.

Annie.

Barbara.

 

À ces 14 lumières forcées de s’éteindre le 6 décembre 1989, se sont ajoutées cette année Jasmine, Anne-Marie, Monique, Patricia, Madeleine, Cynthia, Mary… et tant d’autres. Des femmes tuées dans le silence. Parfois dans l’anonymat. Parfois dans la masse. Tant de femmes mortes pour rien. Juste parce que. Mortes sans. Mortes seules. Assassinées par des malsains. Tuées parce qu’elles avaient des seins? Tuées pour leur enlever tout le sens qu’elles donnaient au monde. 

 

Au Canada, une femme ou une fille est tuée tous les deux jours. 

Dans le monde, c’est une femme ou une fille qui est tuée par sa famille toutes les 11 minutes. 

Le temps d’écrire ce court texte, au moins deux humaines de sexe féminin ont été tuées par leur père, leur mère, leur frère, leur conjoint. 

Sans compter toutes les autres, tuées en dehors de leur famille. 

L’humanité peut-elle encore se permettre de perdre toutes ces âmes, toutes ces forces?

Poser la question c’est y répondre… en sachant que la solution n’est pas trouvée.

 

Les féminicides pleuvent. 

Les femmes pleurent. 

 

Chaque fois qu’on tue une femme, une fille, un enfant, un homme, aussi, on tue l’humanité. 

Et l’humanicide continue…

 

Nathalie Courcy

 

Du aïkido sur un tapis roulant, mes amours — Texte : Catherine Lapointe

Parfois des événements s’alignent pour mieux réfléchir, pour m

Parfois des événements s’alignent pour mieux réfléchir, pour mettre en pratique les incontournables de mon cours de philo de 1997. Monsieur Dufour serait sûrement fier de moi. Parce que c’est nécessaire. Parce qu’il faut cette réflexion. Pour moi. Pour mes filles. Pour nous. 

Sur mon mur, j’ai accroché avec de la gommette cheap des portraits de femmes de tous les horizons, d’époques lointaines ou de notre ère contemporaine. Frida Kahlo, Simone de Beauvoir, Joséphine Bacon, Amelia Earhart, Gabrielle Bouliane-Tremblay, Fifi Brindacier, Colombe Saint-Pierre, Vivian Maier, Joyce Echaquan, Rosa Park, Mariana Mazza, Gabrielle Roy et Mahsa Amini… Leur force m’appelle. Leur histoire me ramène à une puissance. Elles nous écoutent peut-être au souper, mes filles et moi. Parfois, je les regarde et je ne veux pas les décevoir. Ce qu’elles portent est immense. Ce qu’elles ont laissé pour plusieurs ne se limite pas à la trace, mais s’inscrit dans le mouvement. Comment honorer tout ça. Pas avec de la gommette qui colle pas certain. 

Et dans mon téléphone, à travers les notifications qui se multiplient, cette question à mille piasses. La place des femmes aujourd’hui. Une notification à l’index pour moi. Tinder, tu peux aller te rhabiller, mon coco. 

C’est dans le dialogue avec mes filles que j’essaie de comprendre. 

Mes femmes fortes de 10 et 12 ans, quelle est notre place ? Que retenez-vous du monde qui se fracture, se déchire, se recolle, crie ou abdique ? Que voulez-vous pour la suite du monde ? Que comprenez-vous des évidences et des possibles ? Qu’en ferez-vous ? Quelle place prenons-nous ou voulons-nous ? Nous ne sommes pas toutes assises dans le même bus. Partagerons-nous nos sièges de privilégiées avec les plus pockées ? J’espère que oui, les filles. Sinon, qu’est-ce que je vous aurai laissé… 

Parce que l’on peut faire comme les licornes qui glow in the dark et se dire que tout va bien pour les femmes, que l’on galope dans les prairies faciles de la modernité. On possède des laveuses maintenant… On peut aussi accrocher le débat avec nos griffes de ratel, l’animal le plus féroce selon Google, celui qui ne lâche pas ses proies. On peut se battre sans réfléchir, souhaiter la mort et boire des venins. 

Je me sens une équilibriste de la pensée pendant que je brasse mon chili en pleine heure de pointe des devoirs. La place. Les femmes. Aujourd’hui. 

Et vous mes filles, vous en pensez quoi ? Comparer les époques, les continents, est-ce que ça nous aidera à nous rassurer ? J’en doute. Bien évidemment, la route a été tapée par des pionnières aux talons affirmés, aux souliers piétinés. Je m’incline devant les luttes passées et présentes. On a avancé. Farah était tout de même aux commandes de Perseverance. Elle maîtrise ses stationnements en parallèle sur Mars, la belle génie. Mais l’actualité nous prouve tristement des reculs. On faisait parfois du surplace sur le tapis roulant de l’avancement des conditions des femmes, mais on a pris une méchante débarque collective quand la Cour suprême américaine a invalidé l’arrêt Roe c. Wade. Recul. Quand les femmes trans ont été exclues des compétitions féminines internationales. Recul pour certains. Justice pour d’autres. Quand une mère d’un bébé de 4 mois s’est vu interdire d’allaiter en public par une agente de sécurité. Recul. Et prises de conscience. Quand un agresseur sexuel a obtenu une absolution pour préserver sa carrière. Recul. Et impunité. Quand j’ai lu qu’il y avait eu 26 féminicides au Québec seulement en 2021. Recul. Tristesse. Et colère. 

Qu’allons-nous faire de cette colère, les filles ? Martine Delvaux parle des filles en feu dans Pompières et pyromanes. De la nécessité de leur colère, de leur résistance, de leur survie et de leur flamme.

« Je veux nous imaginer, jeunes filles et vieilles femmes, comme des revenantes futuristes debout et droites devant l’avenir. Je veux nous voir mélancoliques, anxieuses, furieuses, amoureuses, rabat-joie, désobéissantes et féministes, liées les unes aux autres et avançant d’un même pas avec l’énergie férocement créatrice du désespoir. Je veux penser, toi et moi, comme faisant partie d’une communauté dansante de lucioles qui se disent oui en clignotant dans la nuit. Parce qu’il faut continuer de résister. Parce qu’il faut, à tout prix, continuer à aimer. » (Martine Delvaux, Pompières et pyromanes, Montréal, Héliotrope, 2021.)

Et si cette colère était utilisée pour jogger, puis courir sur le grand tapis roulant ? De manière grandiose. En utilisant la beauté du collectif. On pourrait faire un aïkido en gang et utiliser la force du recul pour se donner un élan digne des acrobates du Cirque du Soleil. On pourrait faire revoler une partie de discrimination peut-être, de précarité, de violences faite encore aux femmes. Du moins s’arrêter pour dénoncer. On pourrait observer que c’est encore nécessaire d’accrocher à des bus de RTC des pubs pour sensibiliser la population à l’équité salariale entre les hommes et les femmes en 2022. Et puis que des filles de 17 ans s’inscrivent encore à des cours d’autodéfense pour se sentir en sécurité dans leur quartier le soir. Nécessaire ou désolant ? Lorrie Jean-Louis a écrit « être une femme est un programme à réviser constamment. » (Lorrie Jean-Louis, La femme cent couleurs, Montréal, Mémoire d’encrier, 2020.) 

Mes filles, mes amis, les gars, les hommes, je nous crois capables, présent.e.s, avisé.e.s et ardent.e.s. 

Laissez-moi glower un peu dans le noir dans cette journée en fin de course. Tout ce multitasking en repartageant une demande d’amie monoparentale pour se trouver une garderie pour qu’elle puisse retourner travailler, se mettre en action, apporter dans la matière ses mains et son cœur dans une école qui a tant besoin d’elle. L’humanité a besoin d’enseignement, de livres, de dextérité intellectuelle, de motricité lucide. Des antidotes au mansplaining, à la grossophobie, cissexisme (transphobie), misogynie, homophobie et sous-alimentation de l’ouverture d’esprit. Le téléjournal de 22 h sert pas assez de leçons, il faut croire. 

Il faut croire. 

Je m’interdis de consulter les autres notifications de mon téléphone. Des petits mensonges qui m’aspirent parfois dans leur illusion à la saveur de biais dans un emballage de bonbons qui pétillent. Ou de jus vert à la promesse de sauveur du monde dans une belle coupe dorée de ce que l’on attend d’une femme en canne ou d’une mère programmée. On se pète collectivement les palettes. On avale alors des pilules magiques en pensant que ça repousse, des dents d’adultes. 

Laissez-moi donc jeter un œil furtif admiratif aux femmes de mon mur de cuisine et de retrouver les deux miennes. Ne rien gaspiller du temps et de la force. J’ai le goût de faire du aïkido sur un tapis roulant pour elles. J’ai la volonté de bouleverser le monde avec mon cœur de rocker de mère ourse. J’ai l’élan de continuer de courir de petites révolutions même pieds nus s’il le faut. Avec humilité et vulnérabilité. Avec intelligence et détermination. Avec l’énergie des autres, l’équilibre est plus solide encore. Pour moi. Pour nous. Avec vous. Pour les filles qui ont une place sur un mur de cuisine, celles qui tiennent à bout de bras ou de gommette. Encore debout dans le marathon.

Catherine Lapointe

Quand la fertilité devient un cauchemar sans fin… et qu’on t’enlève ta liberté de choix – Texte : Marie-Élisabeth Ménard

En juillet 2019, tout juste avant mes 25 ans, j’ai mis au monde mon quatrième enfant. Belle, ple

En juillet 2019, tout juste avant mes 25 ans, j’ai mis au monde mon quatrième enfant. Belle, pleine de vie, de santé, de curiosité. Avec un papa si attentionné, si aimant ! Le bonheur !

L’accouchement a été parfait. Facile, sans problème ni blessure. La maman va bien et le bébé aussi. Tout va pour le mieux. Mon conjoint et moi avions décidé depuis longtemps que ce serait la petite dernière, que plus jamais je ne porterais d’enfant dans mon ventre. C’était notre décision pour la famille, MA décision pour moi-même. Je n’en pouvais plus. La grossesse avait été pénible physiquement, et surtout mentalement.

Je venais de terminer ma première année de technique et je commençais mes stages en août, lorsque mon bébé allait avoir tout juste deux mois. Le gynécologue m’a demandé quelle contraception je voulais pour la suite. Je lui ai répondu (dossier à l’appui) que les contraceptifs ne fonctionnaient pas. Je suis tombée enceinte deux fois sous contraception, après plusieurs rejets violents de toutes sortes avec ou sans hormones. Sans faire de détour, j’ai demandé la ligature des trompes, qui me semblait adéquate. Il m’a dit non, sans me laisser m’expliquer sur mes motivations. Il m’a dit non, sans connaître ma vie ni mes sentiments dans la situation. Il m’a simplement dit non. Voici ses arguments, et les réponses que j’ai eues à lui donner :

Tu es trop jeune : WHAT ?!? Quatre enfants à 25 ans, et je suis aux études, ce n’est pas assez pour toi ? Il m’en faut combien, ou quel âge devrai-je avoir pour arrêter d’être enceinte ? … Je suis tombée enceinte à 17 ans, et on me disait déjà trop jeune pour AVOIR un enfant ; 8 ans plus tard, je suis trop jeune pour arrêter d’en faire… Humm.

Si jamais tu regrettes et que tu en veux d’autres : JA-MAIS. Je suis épileptique, c’est risqué chaque fois que je tombe enceinte, chaque fois que je ne fais pas mes nuits (et Dieu sait à quel point on ne dort pas avec des enfants…). Les grossesses sont de plus en plus difficiles et épuisantes, en plus de l’école, des autres enfants, de la vie et des imprévus… JA-MAIS.

Et ton chum lui, s’il en veut d’autres : On peut adopter, devenir famille d’accueil, avoir une mère porteuse, peu importe… Je ne veux plus en avoir en moi. Mon corps doit me revenir et m’appartenir un moment donné… C’est aujourd’hui ce moment. Je n’en veux simplement plus. À la limite, il ira voir ailleurs, JE M’EN FOUS. Ce n’est pas sa décision, plus après quatre…

Le médecin m’a même gentiment proposé l’abstinence. (J’ai bien failli lui sauter à la gorge !)

Vous auriez dû me voir à cet instant. Déconfite, déconstruite, en pleurs, inconsolable. De mes 17 ans à mes 25 ans, je n’ai connu que ça, les grossesses, les accouchements et les nuits blanches. J’ai quatre enfants ; imaginez les maladies, les nuits à l’urgence, les imprévus de garderie, d’école, de rendez-vous, de blessures, et j’en passe. Le coût de la vie qui ne fait qu’augmenter, les cours de sport, le parascolaire, les fêtes et autres… Je ne pouvais pas imaginer qu’une personne ne se fie QU’À mon âge pour déterminer si j’étais prête ou non à mettre fin à ma fertilité incontrôlable. Moi qui me suis battue pour ma liberté et mon indépendance jusque-là, c’est toi, l’homme gynécologue de 60 ans, qui vas décider de l’avenir de mon corps ? Je ne pouvais y croire. Je suis sortie du bureau hors de moi et en pleurs. Mon chum ne savait pas quoi me dire ni quoi faire pour apaiser ma souffrance. Parce que oui, c’était une souffrance terrible, que je ressens encore aujourd’hui. J’avais envie de crier à l’injustice. Mais je suis sortie, la tête basse et le cœur en miettes.

…

Quatre mois plus tard, en novembre ou en décembre, j’ai un drôle de feeling, que je ne connais que trop bien. Le test est positif. Je suis de nouveau enceinte. Lorsque j’appelle mon conjoint pour le lui dire, ma voix est bloquée dans ma gorge. Rien ne sort. Je suis paralysée par la colère, la rancune, l’amertume, la peur. J’ai peur. On n’en veut pas, de cette grossesse-là. On suit donc la procédure pour une IVG. Je ne suis ni pour ni contre l’avortement. Je pense que ça doit exister, pour le choix de la femme qui s’inflige cette opération. Parce que ce n’est pas qu’un sujet ni un jeu. C’est une opération où on nous enlève la vie du ventre. C’est un choix que l’on s’impose pour diverses raisons, mais la première et la plus importante, c’est quand c’est pour soi-même que l’on prend cette décision. Dans tous les cas, ça fait mal. Mal au corps, mal au cœur et mal à l’âme. (Encore en écrivant ces lignes, je pleure, parce que le mal est encore là malgré le soulagement.)

Dans le processus, j’apprends que j’attends des jumeaux cette fois. Je ris jaune, parce que c’est du délire. Le destin est parfois chiant, mais là, je le trouve incompréhensible. Je redemande aussitôt la ligature. La gynécologue, une femme cette fois, n’argumente pas et fait tout en son pouvoir pour me l’obtenir. Et elle réussit. C’est un soulagement de me faire soutenir, entendre, comprendre par quelqu’un. Enfin.

Lorsque je rencontre les professionnels dans le cadre du processus, je largue ma colère envers le système et envers celui qui m’a causé tout ce que je vis juste parce qu’il me trouvait « trop jeune » ou qu’il a pensé à mon chum avant moi. Les personnes présentes me comprennent, m’écoutent patiemment et soulagent comme elles le peuvent ma douleur à l’âme. Elles sont extraordinaires. L’opération a lieu. J’en sors, soulagée, mais vide. J’ai un deuil à faire. Celui de mon IVG, mais aussi celui de ma fertilité. Un deuil officiel de grossesse, de recommencement, de renouveau. Et ça me va. J’étais prête pour ce deuil depuis longtemps, et il me convient.

Neuf mois plus tard, je me sens toujours mal. Depuis mon opération, j’ai des douleurs au bas-ventre. Je me sens bizarre, je sais que quelque chose ne va pas. Après les prises de sang, une nouvelle grossesse est confirmée. Oui, oui, neuf mois après ma ligature, je suis de nouveau enceinte. (Moins de 1 % de chances, qu’ils disent… fallait que ça me tombe dessus !) Et elle est viable, donc pas ectopique. Quelle chance ou quel malheur ? … J’en ris. J’en pleure. Je fais tout ce que je peux pour ne pas devenir folle. Je ne comprends plus rien. Je n’en peux plus. Je veux disparaître. Je veux démolir quelque chose, plusieurs choses. Je ne sais plus. À quel point la vie voulait que je sois enceinte pour me faire ça ? Devais-je le garder ? Parce que rendu là, croyez-moi, c’est un miracle. De mauvais goût, mais tout de même un miracle.

Je me suis questionnée à ne plus savoir comment réfléchir. Si vous saviez comment j’ai pleuré ! Je n’avais plus de larmes, et à la fin, je riais comme une personne qui a perdu l’esprit. Je n’étais plus personne. Je me sentais simplement comme une machine à bébés. Avec ou sans mon consentement, la vie et la médecine s’en foutaient, tant que je faisais des bébés. Je me suis fait opérer à nouveau. Deuxième IVG et deuxième ligature en neuf mois en plus d’un accouchement, tout ça dans la même année.

Tout ça parce que le gynécologue a dit non à MON choix, qu’il a eu cette emprise sur MON corps et sur MA vie.

Tout ça parce que le système de santé, SUR CETTE QUESTION, ne prend pas en compte la vie de la femme ni son avis.

Tout ça parce que, finalement, je n’ai jamais eu le pouvoir sur moi-même.

Tout ça parce que c’est injuste.

Tout ça parce que j’avais envie de vivre ma vie et qu’on ne m’a jamais donné le choix de le faire comme je le voulais et QUAND je le voulais.

Tout ça parce qu’on ne m’a pas écoutée au départ, lorsque j’ai dit non.

N’est-ce pas une des premières bases du consentement ? Sur le plan médical, n’ai-je pas le droit de profiter de mon corps comme bon me semble ? N’est-ce pas mon droit fondamental de décider si, oui ou non, je veux porter des enfants ? Peu importe mon âge, que j’aie ou non des enfants, que je fasse quoi que ce soit de la vie… n’est-ce pas mon droit fondamental de femme, d’humain de décider de ce que je fais de mon corps ?

Le système doit changer. Le système doit écouter ses patients, et non les détruire. J’ai vécu l’enfer, je ne suis pas la seule ni la pire.

Je veux que ça change, pour les autres qui vivent encore ou qui vivront un cauchemar comme le mien, par manque de choix, par manque d’écoute et par manque d’humanité.

Je veux que le droit des femmes et le consentement soient pris en compte dans le système de santé. Ce n’est pas normal qu’on se batte de tous les côtés pour ces aspects et que, lorsqu’on demande d’avoir le pouvoir sur notre corps, un médecin, un système, décident à notre place.

C’est injuste.

Soyez fortes. Soyez confiantes. Battez-vous pour la liberté de votre propre corps.

 

Marie-Élisabeth

Une histoire de violence envers les femmes… Texte : Stéphanie Dumas

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Ce matin, mon âme de femme a mal, ce matin je me sens écœurée, fâchée et outrée face aux événements arrivés cette nuit-là près de chez moi. Les événements racontés ici sont réels. Toutefois, par respect, je ne donnerai pas de nom de personne ni de ville. Néanmoins, ils témoignent de la violence encore vécue par les femmes. Ils justifient la peur encore vécue par les femmes de nos jours.

C’était le 11 décembre, durant une soirée de grands vents. Tout a débuté par une étrange situation durant laquelle une femme inconnue tentait de forcer une porte pour pénétrer dans un logement qui n’était pas le sien. Après de longues minutes et de multiples tentatives accompagnées de cris, la police a été appelée sur place. La femme était alors retournée dans son logement. Jugeant la situation sous contrôle, la police a quitté les lieux en avisant les résidents que l’alcool serait la cause du comportement. C’est à ce moment que les choses ont dérapé. Des cris de femmes se sont mis à résonner dans l’édifice à logements. Les cris semblaient être des cris de détresse.

Encore une fois, la police fut appelée, mais cette fois-ci, la réponse fut toute autre. La réponse de l’agent répartiteur fut froide et sans écoute. Les mots prononcés furent les suivants : « Est-elle en danger ? Si elle est juste dérangeante, faudra vivre avec, on est débordés par ce vent. » Ce à quoi la personne ayant contacté le service du 911 répondit qu’elle ignorait si la femme était en danger, mais que les cris duraient depuis de longues minutes. La deuxième réponse fut tout aussi troublante, car l’agent répondit que « les policiers sont repartis suite à la tentative d’effraction par la femme, car ils jugeaient que c’était correct. On gère présentement des abris Tempo qui partent au vent, on n’a pas le temps… ». Faut-il donc comprendre que des abris Tempo sont jugés prioritaires face à une femme en possible détresse qui se fait battre par un homme imbibé d’alcool dans notre société ?

Les cris se sont calmés après plus d’une heure. Le lendemain matin, la nouvelle circula dans le bâtiment locatif selon laquelle la femme avait été transportée à l’hôpital au milieu de la nuit, le visage ensanglanté. Une personne ayant alors entendu de nouveau des cris s’était déplacée jusqu’au logement et avait constaté par elle-même que la femme était en détresse. Elle avait ainsi obtenu une réponse rapide des services d’urgence. Il est désolant de penser que cette triste fin aurait pu être évitée si le répartiteur ayant pris l’appel un peu plus tôt avait réagi autrement. Pire encore, c’est l’idée que la femme aurait pu être la victime d’un féminicide de plus en 2021.

La personne ayant pris des risques en allant vérifier elle-même si la femme était en détresse a reçu des menaces de mort. Nous ne savons pas si la victime a porté plainte contre son agresseur. Si aucune plainte n’est déposée, l’homme ne sera pas accusé et il n’aura pas de trace à son dossier. Il n’y aura donc eu que la douleur de cette femme.

Aujourd’hui, mon cœur de femme a mal…

 

Stéphanie Dumas

La fille du gym, elle ne te jugera JAMAIS ! Texte : Audrey Léger

Peu importe ton poids, ta force, ton cardio, elle sera toujours là derrière toi pour t’encourage

Peu importe ton poids, ta force, ton cardio, elle sera toujours là derrière toi pour t’encourager, te supporter, te motiver. Arrête de la juger autant. C’est ta première LIMITE. Et c’est toi qui la crées. Parce que tu la juges ouvertement depuis si longtemps, tu ne peux pas te mettre en action. Parce que tu as peur qu’on te juge inévitablement. Tu te mets toi-même des bâtons dans les roues.

La fille du gym, elle t’admire, parce qu’elle aussi, elle a trouvé ça difficile au début. Elle aussi elle jugeait… avant.

Ces filles qui s’entraînent, apprends à les connaître. Arrête de juger ce qui est différent de toi et de ton mode de vie. Arrête de les trouver « trop ci » ou « pas assez ça ». Arrête de dire « Ce n’est pas MON GENRE ! » avec autant de mépris.

La fille du gym, tu as besoin d’elle autant qu’elle a besoin de toi. Parce que dans une TEAM de filles, il n’y a plus rien d’impossible. Parce que les progrès arrivent tellement vite que tu ne pourras plus t’en passer. Parce que la fille du gym, c’est ta première SUPPORTER. Parce que plus c’est difficile, plus elle va t’aider et plus tu seras fière. N’oublie pas que ta première limite, c’est uniquement TOI ! Tu peux la franchir !

Audrey Léger

Audrey. sans. artifice IG

#gym #motivation #peptalk #strongerthanyouthink

 

Puis, un jour, tu te choisis… Texte : Audrey Léger

Tu remarques les plis près de tes yeux, tu te souviens des larmes que tu as versées, du pouvoir qu

Tu remarques les plis près de tes yeux, tu te souviens des larmes que tu as versées, du pouvoir que tu as laissé aux autres sur ta vie. Puis, ce jour-là, tu te choisis. Tu veux montrer que tu es une bonne personne, que tu mérites le bonheur… Puis, tu les entends encore, ces petites voix qui résonnent.

Si tu t’aimes, tu t’aimes trop. Si tu ris, tu ris trop fort. Si tu es fière, tu te penses bonne. Si tu te gâtes, tu dépenses trop…

I. JUST. DON’T. GIVE. A. FUCK.

Je suis qui je suis. J’aspire à beaucoup de belles choses. Je sais ce que je veux et ce que je vaux. Ce n’est que le début. J’ai envie de soutenir les autres et qu’ensemble, on puisse s’élever plus haut et briller de plein feu. Parce qu’on a LE DROIT !

Petite et belle communauté, de filles, de femmes, de mères, de belles personnes : partageons notre soutien, notre ouverture. Moi, j’nous trouve ben ben hot !

Audrey sans artifice

UN CALACS, MAIS QU’OSSÉ ÇA ? Texte : Cindy LB

Agression sexuelle, violence physique ou verbale, harcèlement psychologique… malheureusement, nou

Agression sexuelle, violence physique ou verbale, harcèlement psychologique… malheureusement, nous connaissons tous une personne qui a vécu une de ces situations. Nous connaissons certains organismes, les refuges pour les femmes vivant avec de la violence conjugale, mais qu’en est-il des femmes victimes d’agressions sexuelles ? Il n’y a pas beaucoup d’informations qui circulent à ce sujet, que ce soit pour avoir un soutien ou pour une personne avec qui parler. Ce que nous entendons, c’est : « Va porter plainte à la police. » Connaissant notre système de justice actuel (il y a présentement une tentative de changement, à suivre), les victimes, dont je fais partie, sont complètement découragées, perdues et se sentent abandonnées.

Première chose, je ne connaissais pas la ligne téléphonique d’aide pour les victimes d’actes sexuels : 1‑888‑933‑9007. Ce sont des intervenants spécialisés dans ce domaine, c’est confidentiel, bilingue, 24/7. J’ai téléphoné à plusieurs reprises et ils sont extraordinaires. En plus de leur écoute, ils conseillent et aident à trouver d’autres ressources d’aide. C’est justement une intervenante qui m’a fortement conseillé d’appeler un CALACS. Un quoi ? J’ai l’honneur de vous les présenter.

CALACS veut dire : Centre d’Aide et de Lutte contre les Agressions à Caractère Sexuel. Ce sont des intervenantes (femmes pour des victimes femmes) qui offrent plusieurs services : groupe de cheminement pour les femmes ayant subi une ou des agressions à caractère sexuel, cheminement individuel, soutiens aux proches, aides et référence téléphoniques, accompagnement auprès des différentes instances, elles font de la formation, de la prévention dans les écoles, de la lutte et défense des droits. Ces centres passent inaperçus, n’ont pas toute la reconnaissance qu’ils méritent. Je vais remédier à ceci maintenant.

Je viens tout juste de terminer le cheminement de groupe, 13 séances qui varient entre 1 et 2 heures, qui survolent plusieurs sujets (émotions, sexualité, intimité, honte, culpabilité, l’agression elle-même, etc.) Aucune femme n’est obligée de parler ou dire ce qu’elle ne se sent pas confortable de partager, c’est fait dans le respect et les limites de chacune. Il y a des règles bien établies dès le début, les intervenantes nous font remplir des formulaires de santé pour connaître les signes ou malaises qui pourraient survenir et être en mesure de donner les soins ou conseils pour nous aider. Par exemple, pour ma part, lorsque je vis des émotions trop intenses, je fais des crises d’angoisse très fortes, je peux perdre conscience, donc mon intervenante savait comment me garder dans le moment présent ou me ramener.

Au début de la thérapie, je ne savais pas à quoi m’attendre, j’avais la culpabilité, la honte et la colère au max. Je souhaitais être capable de vivre avec mon agression et ne plus ressentir autant d’angoisse. J’ai vite réalisé que mes objectifs étaient très hauts. Puis, les séances ont débuté, je ne voyais pas trop où les sujets que nous abordions allaient nous amener, à un point tel que j’avais presque oublié pourquoi j’étais là. Chaque sujet est très intéressant et aide dans la vie de tous les jours ; puis vient « Le récit ». Nous devons raconter notre agression avec les détails que nous sommes à l’aise de dire, et les semaines suivantes, la colère est abordée. Les trucs donnés pour évacuer cette colère peuvent être surprenants et très satisfaisants. C’est fou ce qu’une nouille de piscine peut défouler. À la fin, j’ai compris que les sujets du début étaient pour préparer le terrain pour le gros de la job. La dernière journée, il y a le bilan, où nous célébrons tout le chemin parcouru.

Je souhaitais ne plus ressentir d’angoisse ou de peur en pensant à mon agression. Non seulement j’y suis arrivée, je suis très ouverte à parler de mon agression et je veux m’impliquer pour la cause. J’ai plusieurs projets en tête comme une série de livres pour enfants qui explique le consentement et d’autres sujets relatifs aux agressions. Tous ces beaux projets et ambitions ne viennent pas de nulle part, tout vient de la confiance que mes intervenantes et femmes de mon groupe m’ont transmise. Ces femmes qui travaillent jour après jour avec des femmes brisées, traumatisées et perdues ne baissent jamais les bras. Elles travaillent sans arrêt pour améliorer le processus et trouver de nouvelles méthodes pour nous aider. Elles suivent des formations pour rester à jour ou tout simplement parce qu’elles veulent en apprendre plus pour mieux aider. Ça n’arrête pas là, non, elles font de la sensibilisation auprès des enfants et adolescents, organisent des marches pour continuer à faire avancer les droits des femmes, des victimes. Ah ! Sans oublier qu’elles accompagnent certaines femmes qui décident de confronter leur agresseur ou de porter plainte à la police tout au long du processus. Comme si ce n’était pas assez, elles gardent contact avec certaines femmes qui ont terminé leur thérapie depuis longtemps et continuent de les aider si nécessaire. Est-ce que je suis la seule à être essoufflée ? Elles font tout ça avec le plus beau et le plus sincère des sourires.

Ces centres sont essentiels, ces intervenantes sont essentielles. Les agressions sexuelles sont encore trop taboues et très mal comprises. Énormément de fausses informations et perceptions circulent. « Ben là, as‑tu vu comment elle était habillée ? Elle l’a cherché. » « Un gars, ça ne peut pas contrôler ses pulsions. » « Ouin, mais elle n’a pas dit non, elle n’a rien fait. » « Des fois, non veut dire oui. »

*La fille, ça se peut qu’elle veuille juste se sentir belle. Elle n’a pas une affiche qui dit « agresse-moi ».

*Un gars qui a appris le respect et le consentement va accepter si la fille change d’idée.

*Même si un non n’a pas été prononcé à voix haute, le fait de figer signifie un non.

*Non veut dire non. Point à la ligne.

Un CALACS change une vie, change des vies. Tu reprends le contrôle de ta vie. Tu comprends certaines choses. Ton futur est plus beau. Tu as des outils pour t’aider tout au long de ta vie. Tu peux contacter à nouveau ton intervenante en cas de besoin. Surtout, tu comprends que tu es une VICTIME, que ce n’était PAS de TA faute et que TU N’ES PAS SEULE.

Merci au CALACS L’Ancrage des Laurentides, merci à mes intervenantes.

Cindy LB

 

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Ligne téléphonique Info-Aide violences sexuelles :

1‑888‑933‑9007

 

Regroupement des CALACS du Québec (pour trouver celui le plus près) :

http://www.rqcalacs.qc.ca/

 

CALACS L’Ancrage des Laurentides et pour faire un don :

https://calacslancrage.ca/

https://calacslancrage.ca/faire-un-don/

 

 

La maudite charge mentale – Texte : Joanie Fournier

La charge mentale. La maudite charge mentale. On en entend tellement parler depuis quelques années

La charge mentale. La maudite charge mentale. On en entend tellement parler depuis quelques années que c’est devenu un sujet anodin. Comme si les femmes tenaient pour acquis que cette charge leur revenait automatiquement sur les épaules. Et depuis qu’on en parle, la population se dit sensibilisée à la cause. Les hommes et les pères ont essayé d’équilibrer davantage les tâches ménagères. Et pourtant… la charge mentale continue, encore et encore de se retrouver emprisonnée dans la tête des mères.

Si tu es un homme et que tu lis cette introduction, ça se peut que ça te fâche. Parce que là, tu te dis : « C’est pas vrai ! J’ai changé mes habitudes ! J’aide ma femme à faire la vaisselle, la cuisine et même le lavage des fois ! ». Et il est là le problème. Le vrai problème. Cher homme, t’es pas censé « aider » ta femme. Tu vis dans cette maison, tu manges dans cette cuisine et tu salis tout autant la salle de bain. Alors ce n’est pas de l’aider que de nettoyer avec elle. C’est juste de prendre tes responsabilités, que tu aurais dû prendre dès que tu as quitté la maison de ta mère.

La charge mentale, ça n’a rien à voir avec le partage des tâches à la maison. Et je vais t’en faire la démonstration dans les lignes qui suivent. Parce que si toi, comme père, comme mari, comme homme, tu es persuadé que la charge mentale est répartie équitablement entre ta femme et toi, je t’invite à te poser les 10 questions suivantes :

1- Qui a inscrit les enfants à l’école ? Au CPE ? À la garderie ? Quand je dis « inscrire », je veux dire : commander le fichu certificat de naissance des enfants dans le format requis, remplir les formulaires qui n’en finissent plus chaque année pour faire la mise à jour du dossier sur la place 0‑5 et connaître LA semaine dans l’année où l’inscription doit être renouvelée à l’école…

2- Qui s’occupe des activités sportives chez vous ? L’inscription au soccer, aux cours de danse, au camp de jour, au camp spécialisé d’équitation… ? Savais-tu qu’il existe le plus souvent une seule et unique journée dans l’année où, pour avoir la chance d’espérer avoir une place, tu dois te connecter sur trois écrans à la fois entre 8 h et 8 h 02 pour faire ces inscriptions ? Savais-tu que si tu manques cette fenêtre, tu risques d’être pris à magasiner une petite gardienne pour tout l’été, et ce, juste pour avoir le luxe de pouvoir travailler ?

3- Quand quelque chose brise à la maison (le four, le frigo, le lave-vaisselle, la laveuse, la thermopompe, etc.), qui appelle pour obtenir des soumissions dans quatre compagnies différentes pour trouver la moins chère, la plus compétente et celle qui sera disponible dans un temps raisonnable ?

4- Au moins deux fois par année, qui s’occupe de vider, trier et changer toutes les grandeurs de vêtements dans les tiroirs des enfants ? Qui sait exactement de combien de paires de pantalons, de shorts, de bobettes chaque enfant a besoin pour chacune des saisons ? Qui sait quelle grandeur de souliers portent les enfants ? Quelle est la grandeur de chacun des manteaux d’hiver à acheter pour l’an prochain ?

5- Qui a pensé à acheter des cadeaux pour les enseignants à la fin de l’année scolaire en juin ? Pour les éducatrices en août ? Qui a choisi quoi leur donner, est allé l’acheter, l’emballer et l’a remis à l’enfant à temps ?

6- Qui s’occupe des invitations des fêtes d’anniversaire pour vos enfants ? Des sacs-surprises pour les invités ? Des jeux et des activités pendant la fête ? De la gestion des allergies et intolérances alimentaires de tous les invités ?

7- Quand votre enfant est invité à une fête d’ami, qui s’occupe d’acheter et emballer le cadeau pour l’ami en question ?

8- Qui s’occupe du menu de la semaine pour tout le monde ? Je ne parle pas de cuisiner. Je parle ici de décider de ce qu’on va manger lundi, mardi, mercredi, etc.

9- Qui connaît les dates des derniers rendez-vous familiaux chez le dentiste, chez l’optométriste, chez le médecin de famille… ? Qui connaît la date exacte où il faut les appeler pour reprendre rendez-vous, tout en respectant le calendrier de la clinique, les journées pédagogiques de l’école pour que ça s’emboîte bien, et tout cela en s’assurant d’avoir un rendez-vous dans le délai prescrit par ledit spécialiste ?

10- Qui a lavé les draps des lits des enfants la dernière fois ? Et quand je dis « laver », je veux dire : penser à les laver, défaire les lits, laver et sécher les draps et refaire les lits de tout le monde.

Si tu es un homme et que tu as répondu « Moi » à ces 10 questions, et bien je te lève mon chapeau : la charge mentale est répartie équitablement chez vous. Et si c’est le cas, je te dois de sincères excuses. Parce que si oui, je t’avoue que je ne l’ai pas cru possible. Je sais qu’il existe des hommes qui élèvent leurs enfants seuls. Même si ce sont des cas plus rares. Et je me demande comment ils arrivent à faire tout cela… parce que selon les agissements de beaucoup de pères en couple, leur pénis serait beaucoup trop encombrant pour leur permettre de partager cette charge mentale…

Et si, dans votre couple, c’est le père qui fait ces 10 choses-là… on veut le savoir ! Comment ça se passe chez vous ?

Joanie Fournier

 

Du temps pour soi… Texte : Claudie Castonguay

La première fois où je me suis permis du temps pour moi… Quand tu deviens parent, on te parle

La première fois où je me suis permis du temps pour moi…

Quand tu deviens parent, on te parle de lâcher prise. D’apprendre à séparer la pizza, en 3 et ensuite en 6. 3 pour toi, ta vie professionnelle et ton couple. Et 6, parce que tu divises à nouveau pour le bébé.

Dès la naissance de bébé 1, j’apprenais mon nouveau rôle de mère. Le rôle qu’on apprend au travers de ce qu’on a vu, vécu. Mais sur lequel il n’y avait aucune notion scolaire (aujourd’hui, mes notions de flûte à bec servent ! Oui ! Oui !).

23 mai 2010 : le téléphone sonne, c’est ma grand-mère maternelle. « Ta mère est à l’hôpital. (…) Allô ? »

À partir de ce moment‑là, je ne comprenais plus rien. La notion du mot maman n’était soudainement plus la même. J’avais oublié que le mot maman, c’était non seulement moi qui apprenais à nourrir, à cajoler, à essayer d’endormir. Mais aussi celle qui l’avait fait pour moi.

J’ai donc appris à conjuguer mon rôle de maman, de fille, de conjointe et d’amie. Mais jamais celui de femme.

À travers la vie et les rendez-vous médicaux arrive notre deuxième bébé.

Une nuit, le téléphone sonne et ma mère vient de pousser son dernier soupir.

En moins de 24 mois, on était devenus parents (2x), on avait construit une maison et j’avais accompagné ma mère dans la maladie et dans la mort. Deux concepts de vie tellement opposés.

Après cette tornade et au bout de 18 mois, je me suis permis un temps à moi. 20 jours à l’autre bout du continent. On m’a dit que j’étais égoïste, que j’abandonnais mes enfants. Et certains m’encourageaient.

Ça m’aura pris cette occasion de partir sur un coup de tête, pour décrocher et faire le vide. Me rappeler que la vie est belle malgré les épreuves. Qu’on peut se permettre, un bain, une sortie, un off de ménage sans nécessairement être lâche.

J’ai appris à ce moment‑là que le lâcher-prise à certains moments était une question de survie. Ma pizza est coupée toute croche. Je conjugue maintenant les rôles de femme, conjointe, maman, amie et fille.

Claudie Castonguay

 

Nancy a des couilles

Quand j’ai vu la Présidente de la Chambre des représentants des

Quand j’ai vu la Présidente de la Chambre des représentants des États-Unis debout derrière son lutrin et son masque fleuri alors qu’elle expliquait la mise en accusation de l’homme le plus puissant du monde (jusqu’au 20 janvier 2021, du moins…), ma première réaction a été : « Wow ! Nancy a des couilles ! »

Une deuxième mise en accusation de Trump par cette femme en petite robe noire, sans compter la fois où elle a osé déchirer le discours présidentiel, debout entre le drapeau américain et les caméras, à un mètre à peine derrière le… Président. Ça prend du guts (des intestins, si on se permet de traduire… pas vraiment mieux que les parties en bas de la ceinture…) en titi ! Qu’on soit pour ou contre, on doit admettre qu’elle s’est, littéralement et symboliquement, tenue debout pour tenir son bout. Discours construit, voix calme et ferme dénuée d’émotions (j’imaginais le stress intense qui devait lui tordre les entrailles, les menaces qu’elle doit recevoir… genre la peur avant un exposé oral au primaire × 1 million), colonne droite malgré les tentatives d’intimidation. Un exemple pour tous les parents, pour tous les humains. On recherche toutes les informations pertinentes, on analyse, on utilise les ressources disponibles pour confronter nos idées, on construit notre discours et on s’y tient. Ferme et bienveillant. That’s it. 

Et là, je me suis demandé pourquoi la première expression qui m’était venue à l’esprit parlait de couilles. Une femme ne peut-elle pas être courageuse et solide sans se faire assigner un attribut mâle ? Nancy Pelosi est féminine, élégante, chic. Et puissante. Pas besoin de veston, de cravate et de testicules pour se tenir debout pour ses convictions, même devant le plus grand clown homme de l’histoire américaine.

Nancy n’a pas de couilles. Elle n’en a pas besoin. Elle a un utérus et des idées qu’elle assume. Elle porte un masque à fleurs qui tient tête à l’entêtement de son opposant. Qu’on soit pour ou contre le masque, le président, l’existence de la COVID ou le port du vernis à ongles, inclinons-nous devant cette démonstration de calme déterminé.

Nathalie Courcy

 

Crédit photo : Eric Thayer/The New York Times/Redux