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« Congé de lecture »

Mes deux plus grandes filles vont maintenant à l’école primaire.

Mes deux plus grandes filles vont maintenant à l’école primaire. Nous avons vu passer près d’une dizaine d’enseignantes dans leurs vies scolaires depuis le tout début. Nous avons rencontré des femmes passionnées qui leur ont donné envie de lire, d’écrire et d’apprendre… Et personnellement, c’est ce que je trouvais le plus important. Moi aussi, j’enseigne. Moi aussi, j’essaie d’user de pédagogie pour transmettre des savoirs. Mais ce n’est pas l’enseignante ici qui vous écrit. C’est la maman.

Parce qu’en tant que maman, je vais peut-être vous choquer, mais je m’en fou un peu de ce que mes filles apprennent à l’école. Ce qui m’importe, c’est bien plus « comment » ça leur est transmis. Je pense qu’elles ont encore beaucoup de temps devant elles pour apprendre des notions de mathématiques ou des accords de français. Mais il y a une chose qui doit leur être transmise tous les jours : L’envie d’apprendre. Cette soif d’apprendre, de découvrir, d’être curieuses et de remettre les choses en question, ça, c’est le plus important. Les amener à réfléchir, à penser par elles-mêmes, à philosopher… À avoir envie d’en apprendre encore plus tous les jours. Pour moi, c’est ça le plus important à l’école. Parce que quand on apprend dans le plaisir, tout est mémorisé beaucoup plus rapidement et efficacement.

J’ai une grande fille de 9 ans qui lit à une vitesse impressionnante et qui a un vocabulaire vraiment riche. Mais par-dessus tout, elle aime lire. Que dis-je? Elle adore lire. Elle lit tous les jours en arrivant de l’école, pas parce que je lui demande, mais juste parce que ça l’aide à se détendre. Ça calme son anxiété. Ça l’aide à gérer ses émotions. La lecture lui permet de s’évader le temps d’un roman. Et des romans, elle en lit des tonnes ! Cet amour de la lecture évidemment est encouragé chez nous et transmis également aux plus jeunes. Parce qu’en tant que maman, je pense que la lecture ouvre tout un monde d’apprentissages et de réflexions.

Mais cette année, les méthodes utilisées par l’enseignante de ma fille viennent heurter mes valeurs… Elle a une enseignante qui a beaucoup d’expérience. Elle utilise ses bonnes vieilles méthodes depuis des décennies. Mais ce n’est pas parce qu’on a l’habitude de faire quelque chose que c’est forcément la bonne chose à faire… Pour la première fois depuis cinq ans, ma fille doit s’asseoir pour faire plus de trente minutes de devoirs tous les soirs. Il y a 20 minutes de lecture obligatoire tous les soirs. Sauf le vendredi, où c’est écrit dans son agenda : « Congé de lecture. »

Ma fille adorait faire des exercices en devoirs. Parce qu’il n’y avait aucune obligation. L’été, elle me suppliait d’aller lui acheter des cahiers d’exercices et de lui imprimer des mots croisés sur Internet. Elle lisait aussi tous les soirs parce qu’elle adorait ça. Ça ne fait qu’un mois que ma fille est avec sa nouvelle enseignante et ça fait déjà des ravages sur son envie d’apprendre… Elle a bien retenue ce que son enseignante lui enseigne : La lecture est un devoir, une corvée. Maintenant, elle fait ses devoirs en pleurant et en rageant de fatigue. Elle refuse de lire du vendredi au lundi, parce que tsé, c’est pas obligatoire. La lecture qui était pour elle une grande passion est devenue une corvée.

« Congé de lecture. » Ces petits mots ont marqué son esprit. Parce qu’un congé, c’est forcément une pause de quelque chose de désagréable. Congé de travail. Congé de devoirs. Congé de tâches ménagères… Pourquoi ne pas écrire « Lecture pour le plaisir » ? Ces petits mots ont tellement de pouvoir…

La semaine dernière, ma fille a fait une dictée sans faute. Qu’elle était fière d’elle ! Parce qu’elle adore écrire. Parce qu’elle sait qu’elle est bonne là-dedans et que ça lui fait du bien. Et bien vous savez ce que son enseignante lui a donné comme récompense ? Oui, vous l’aurez deviné… « Congé de dictée. » La dictée que ma fille aimait tant. La dictée, qui pour elle, n’avait jamais représenté un examen où il faut se stresser. Ce n’était pour elle qu’un autre exercice pour le plaisir. Ma fille m’a demandé pourquoi elle était punie d’avoir eu 100% à sa dictée… Pourquoi elle n’avait pas le droit de faire la dictée la semaine prochaine… Et elle avait vraiment de la peine. Encore une fois, ce simple « congé de dictée » lui apprend que la dictée doit être vue comme une tâche, un devoir, un fardeau.

Mon cœur de maman trouve le début de l’année bien difficile… Parce que ma fille ne se plaindra pas à l’école. Elle va encaisser sans rien dire et continuer de sourire à son enseignante parce qu’elle veut lui plaire. Mais moi tout ce que je vois, c’est la petite graine que cette enseignante a planté dans son esprit fertile… Cette petite graine qui germera trop vite… Et dans quelques années, quand ma fille aura une boule d’anxiété dans le ventre devant chaque examen, quand elle lira à reculons les livres obligatoires en français et que je devrai tenter de la soudoyer pour qu’elle accepte de faire ses devoirs, et bien je saurai où tout ça a commencé. Parce que quand on plante des petites graines dans les esprits de demain, il faut savoir qu’on a énormément de pouvoir sur leurs avenirs. Et les petits mots sont si puissants…

Je veux être optimiste. Je continue de dire à ma fille qu’elle passera une belle année avec son enseignante. Je lui parle des projets qui s’en viennent dans sa classe. Je mets l’accent sur le positif. Parce que j’essaie à mon tour de planter quelques graines… Je sais qu’être enseignante est exigeant et que ces femmes ne comptent plus leurs heures depuis des années. Je sais qu’elles sont sous-payées et qu’elles méritent tellement plus de reconnaissance. Je sais que c’est une profession vraiment difficile et que plus les années avancent, plus le système scolaire est fragile. Mais ma fille ne vivra cette année qu’une seule fois dans sa vie… Et les idées qu’on lui transmet resteront à jamais… Je fais le choix de faire confiance à son enseignante. Ce n’est peut-être qu’un début d’année difficile… Ses méthodes vont peut-être changer… J’espère seulement qu’elle réalise tout le pouvoir qu’elle a entre les mains, chaque jour. Et avec des grands pouvoirs, viennent de grandes responsabilités…

Eva Staire

À tous les « s » muets de la terre…

18 h 25. De grosses larmes de vraie tristesse coulent sur les joue

18 h 25. De grosses larmes de vraie tristesse coulent sur les joues de ma fille. Son petit doigt pointe le « ai » de maison dans son livre de lecture. La jointure de son index blanchi tant elle appuie fort sur la page. Ce soir, comme presque tous les soirs, elle ne trouve pas le son des lettres et elle pleure. Elle a six ans.

Son dos est rond et sa tête est lourde. Malgré la peine, elle reste immobile sur sa chaise. Machinalement, elle cligne des yeux comme pour ravaler ses larmes. Je lui tends un mouchoir et je lui demande de souffler fort. Je lui dis de prendre son temps, de se faire confiance, mais ce soir, elle n’y arrivera pas. Dans ma tête, je lui souffle la réponse : a et i, ça fait « ai », mon amour. Aiii. Évidemment, elle ne m’entend pas. Elle ne bouge pas. Si l’apprentissage des sons tarde à venir, elle maîtrise le courage depuis bien longtemps déjà.

Au moment où elle se lance, le « ai » s’embrouille et sous l’anxiété, il se transforme en « en » « an ». Plus elle se trompe, plus elle cligne des yeux et mâchouille le bout de ses doigts. Je comprends pourquoi elle fait ça et même si je ne cligne pas des yeux, moi aussi, je ravale ma tristesse. Égoïstement, ce soir, j’aurais moi aussi besoin qu’on m’aide à détendre mon petit cœur qui faiblit à la vue de sa détresse.

Je ferme le livre et j’assois ma fille sur moi. Je me sens impuissante. Contrairement à la fée de son livre d’histoire, je n’ai pas de baguette magique pour l’aider. Le soir, au moment de faire les devoirs, il n’y a que nous deux et chaque fois qu’elle pleure, je pleure aussi. Jamais devant elle, mais souvent dans mon lit.

Je pleure parce que j’aimerais que tout soit facile pour elle. Je pleure d’impuissance parce que rien de ce que j’essaie fonctionne. Je pleure, mais je me révolte aussi. Contre le système scolaire qui produit des enfants à la chaîne. Un système d’heures ouvrables qui laisse peu de place aux véritables éducateurs et qui, dans certains cas, en laisse trop à ceux qui ne le méritent pas.

Je me révolte contre les grilles d’évaluation, contre les structures rigides, contre la lourdeur d’exécution, contre la mauvaise gestion financière et les ressources offertes au compte-goutte. Je me révolte contre les trop, mais là crissement trop nombreux administrateurs qui punchent in and out, plus soucieux de leur qualité de vie et de leur sécurité d’emploi que de l’enseignement qu’ils dédient à nos enfants.

Donnez-leur de l’oxygène.

Donnez-leur du temps de plus.

Donnez-leur de la folie, de l’oisiveté, de la latitude.

Offrez-leur un milieu de vie.

Donnez-leur les outils pour s’épanouir et entretenez leur désir de créer.

Ne les forgez pas comme on vous a forgés.

Faites mieux.

Faites intelligemment.

Faites avec bienveillance.

En désespoir de cause et parce que j’ai besoin de me fâcher, je me fâche aussi contre une langue que j’aime infiniment. Quel besoin a‑t‑on de la rendre si compliquée? La richesse d’une langue ne vient pas de sa complexité, mais de la façon dont elle nous permet de nous exprimer.

D’ici à ce que ma fille grandisse, d’ici à ce qu’on découvre toutes les deux comment son cerveau apprend, d’ici à ce que nos larmes se transforment en souvenirs et d’ici à ce que notre système et nos décideurs commencent à faire ce qu’il faut pour véritablement aider nos enfants, je focalise sur ce que l’école a de beau. Je remercie les enseignants, les éducateurs qui veulent faire une véritable différence et je me recentre sur ma fille. Que j’admire jour après jour pour sa persévérance, son courage et l’incroyable agilité et la curiosité dont elle fait preuve depuis bientôt sept ans.

Pis quand je me décentre, me « défocalise », quand les « ai » se change en « an », je me permets aussi de lancer un gros fuck you à tous les « s » muets de l’univers, à tous les « c » doux qui auraient si facilement pu être des « s » et aux « om » qui font « on ».

Liza Harkiolakis

Les devoirs et la leçon du boyau d’arrosage

Ah! Cette période de la journée. Celle où heureusement, mon cerve

Ah! Cette période de la journée. Celle où heureusement, mon cerveau est en pleine effervescence. Celle où je suis à mon top du multitâche. Celle‑là même où je serai à mon meilleur pour gérer une entreprise. Je gère le repas, les lunchs du lendemain, la logistique de l’horaire de la semaine, le lavage et… l’aide aux devoirs. Du moins, l’aide que je peux offrir.

À cette époque‑là, mes filles avaient besoin d’une présence à leurs côtés pour se sécuriser dans l’étape des devoirs. J’étais là, physiquement, mais mentalement, j’étais plutôt dans le temps qu’il me restait pour que l’heure du repas arrive avant le départ pour reconduire l’une d’elles à son cours de danse qui lui, ne coïncidait pas du tout avec l’heure qu’indiquait mon horloge. Bref, ce soir‑là, j’étais en retard.

Je courais d’un bout à l’autre de ma cuisine et faisais des allées et venues entre celle‑ci et la salle à manger où se trouvaient mes trois filles, leurs montagnes de cahiers et de cartables et leur manque flagrant de confiance en elles. (Lire ici, leur manque de motivation!)

Dans mon cerveau « ailleurs », je me suis rendu compte que j’étais loin d’être présente. En fait, ça devait faire plus de dix fois que je répétais les mêmes choses : « C’est quoi que tu ne comprends pas!? Je ne comprends pas moi‑même ce que tu ne comprends pas! As‑tu fait des démarches? Comme ça, je vais pouvoir comprendre ce que tu ne comprends pas! Ce n’est pas compliqué à comprendre, me semble! Je veux JUSTE savoir ce que tu ne comprends pas! »

Pendant mes répétitions incessantes, je les voyais flétrir devant la charge de leurs questionnements. Plus on s’obstinait sur le niveau d’incompréhension, plus elles se couchaient le nez dans leurs cahiers et plus mon ton montait. Incapable de voir autant de mollesse devant moi.

À force de répéter et répéter, et de sentir que ça bouillait tranquillement pas vite en moi, que le presto allait évidemment sauter sous peu, je me suis arrêtée. Au beau milieu de ma cuisine, j’avais arrêté. Seule ma respiration rapide meublait mon cerveau. Sous ce tempo, je me suis mise à les regarder, les trois. Dans la salle à manger, mes trois étudiantes couchées sur leurs cahiers. Lasses de travailler. Pu de jus dans leur corps et encore moins dans leur cerveau.

J’ai dû rester plantée là un bon cinq minutes, incapable de dévier mon regard d’elles. Je perdais cinq minutes de mon précieux temps. Mais ce qui se tramait dans ma tête allait probablement me permettre d’en sauver mille par la suite.

Au diable le souper, on mangera cramé, mais c’est dehors qu’on allait régler la situation une fois pour toutes! Un peu déstabilisées, elles ont descendu l’escalier du balcon à ma demande pour se retrouver sur le côté de la maison avec une mère qui semblait semi‑éreintée, semi‑heureuse. Un mélange qui aboutissait sûrement, pour elles, à la folie passagère.

Pieds nus sur le ciment du patio, l’air hébété, leurs paires d’yeux qui se croisent, les haussements d’épaules pour se dire qu’elles ne comprennent pas ce qui se passe, et le silence. Je leur ai demandé de respirer. Respirer un bon coup. Ce que j’allais leur démontrer méritait d’être compris une fois pour toutes.

Et j’ai sorti le boyau d’arrosage. J’ai bien cru voir trois petits pas de recul de peur. Comme si elles pensaient que j’allais les arroser. Mais bon. L’idée de rafraichir leur esprit n’était pas loin, mais loin de mon objectif de leur apprendre la leçon du boyau d’arrosage.

Je suis comme ça, moi. Pour apprendre, j’ai parfois besoin de visuel. Besoin de faire des liens pour assimiler les informations. Ce n’est pas par manque d’intelligence. Seulement que j’apprends différemment. Mon cerveau combine les associations et ça se range plus aisément dans les petits tiroirs de mon cerveau. J’ose, à ce moment, m’imaginer que les trois êtres en avant de moi apprennent de la même façon, sinon, ma leçon allait certainement déraper. Au pire, elles auraient pris l’air qui semblait leur manquer dans le cerveau pour poursuivre leurs tâches.

Me voilà donc, boyau en main, à ouvrir le robinet pour laisser jaillir l’eau fraîche. Rien de palpitant. De l’eau qui sort du boyau. Je plie le boyau et, là encore, rien de palpitant. Pu d’eau qui sort du boyau. Je ne dis rien en manipulant ce que j’ai entre les mains. Je les regarde. Je m’exécute indéfiniment à exercer le même mouvement jusqu’à ce que l’une d’entre elles me demande ce que je fais.

Et c’est à ce moment‑là que mon discours entre en scène…

« Le boyau, c’est votre corps. Votre colonne vertébrale. Ce à quoi est rattaché votre cerveau. L’eau qui sort du boyau, c’est votre énergie. Votre connaissance. Lorsque le boyau est droit, l’eau en sort abondamment. Avec puissance. C’est rafraîchissant! Lorsque je plie le boyau, tout cesse. Un mince filet parvient à peine à couler. »

J’ai repris le mouvement avec le boyau. Laissant jaillir l’eau abondamment.

« Le boyau, c’est toujours votre corps. Bien assise à la table, vous permettez aux connaissances de se rendre à votre cerveau. L’énergie est fluide. Vous respirez profondément. »

Je pliai net le boyau pour que l’écoulement cesse.

« Le boyau, c’est encore et toujours votre corps. Couchées sur la table, vous empêchez l’énergie, les connaissances de se rendre à votre cerveau. Votre respiration est coupée. »

J’ai refait le mouvement sans mots. J’ai fermé le robinet et rangé le boyau.

Mes trois élèves devant moi. Toujours incertaines et sans bruit. J’ai fait volteface et je suis retournée à mes chaudrons. Mes élèves me suivant. Elles ont repris leurs tâches, le corps droit et en respirant en silence.

Je ne sais pas si c’est le fait d’avoir respiré dehors ou ma leçon du boyau qui a fait son effet, mais les jours suivants, je n’avais qu’à énoncer le mot « boyau » et les petits corps se redressaient en prenant une grande respiration, yeux clos, pour reprendre l’énergie manquante. On venait d’établir une règle : « Je ne peux pas t’aider à comprendre et à faire entrer tes connaissances, si tu ne permets pas à ton corps d’accueillir ce qui s’en vient. »

Mylène Groleau

L’école de la vie

Quand on allait à l’école, on redoublait d’efforts pour excell

Quand on allait à l’école, on redoublait d’efforts pour exceller partout. On nous bourrait le crâne de matière grise en nous disant que tout était tellement important. On en a passé, des nuits blanches à étudier et des veilles d’examens à stresser… On a dû prouver qu’on connaissait des centaines de dates, de données et de noms par cœur. On nous a aussi mis à l’épreuve avec des travaux pratiques… Puis un jour, on nous a mis un diplôme entre les mains en nous disant qu’on avait réussi.

Puis, les années ont passé. On a réalisé avec elles que le plus important, en fait, on ne l’avait pas encore appris. Parce que la vie aussi vient avec son lot de tests, d’examens et de travaux pratiques…

Des petits tests, par-ci, par-là, pour nous apprendre des petites leçons… La première toilette qui se bouche, les premiers impôts à envoyer, le premier accrochage en voiture, etc. De petites épreuves, pour nous montrer de petites choses…

Puis des examens, pas mal plus importants, pour nous aider à comprendre que de grandes responsabilités viennent avec de grandes décisions… Avoir un enfant, choisir son ou sa partenaire de vie, payer une hypothèque, etc.

Sans oublier les travaux pratiques… Parce que oui, la vie vient aussi avec des travaux pratiques, juste pour voir si on a bien assimilé les leçons… Des chutes, des pertes, des deuils… Des moments difficiles desquels il faut apprendre à se relever. Juste pour passer l’examen.

Et pendant qu’on passe quarante heures par semaine à travailler, pendant qu’on court entre le gym et les rendez-vous, on oublie encore de retenir le plus important…

Et tout comme notre parcours scolaire, l’école de la vie se terminera un jour aussi. On nous annoncera que c’est terminé, sans qu’on ait pu voir la fin arriver. Et tout comme à l’école, on réalisera qu’en fait, on n’a pas eu le temps d’apprendre le plus important…

Parce qu’on était trop occupés à courir à gauche et à droite. Parce qu’on en a vécu, des hauts et des bas. Et parce qu’on ne sera jamais allé aussi loin qu’on aurait voulu… et que pendant ce temps-là, la vie, elle, continuait aussi de se presser pour arriver à temps.

On aura oublié de s’arrêter. On aura oublié d’apprécier. On aura oublié de s’aimer…

Et si on écoutait les professeurs de la vie? T’sais, ceux et celles qui ont déjà vécu la leur et qui ont tellement à raconter… Il serait peut-être temps de les croire, quand ils nous répètent que « ça passe trop vite et qu’il faut en profiter ».

Et si on choisissait de les entendre, au lieu d’attendre que notre vie passe pour réaliser qu’on a oublié d’apprendre la plus grande des leçons… Et si au lieu de donner notre 110 % chaque jour au travail, on essayait d’obtenir une meilleure note avant la fin de notre existence…?

Lorsque la cloche sonnera, quelle note voulez-vous sur le bulletin final de votre vie?

 

Joanie Fournier

Fini, les devoirs et les leçons

Les devoirs obligatoires à la maison, c'est F.I.N.I.

Les devoirs obligatoires à la maison, c’est F.I.N.I.

Non! Ce n’est pas le cas partout. C’est pourtant ce qui se vit dans les familles de la classe de Madane Julie Chamberland, enseignante de cinquième année en classe iPad à l’école St-Louis-de-France de la Commission scolaire des Navigateurs. Elle fait partie du groupe des 100 crinqués qui conseillent le ministre de l’Éducation. Oui, en septembre de l’année dernière, j’avais vu ce reportage de TVA «Fini les devoirs à l’école».

En moi-même, j’avais adoré l’idée. Je trouvais si loin de moi la possibilité de vivre ce répit dans notre vie familiale chargée. Cette vie qui nous passe sous le nez à la vitesse Grand V. Et voilà qu’un jour, la vie m’amène à rencontrer cette enseignante lumineuse, allumée et si dynamique. Elle parle de ses élèves comme des êtres uniques à qui elle accorde un précieux temps pour les aider à comprendre ce qu’ils peuvent améliorer, tout en leur montrant différentes méthodes de travail pour y arriver. Une enseignante qui parle de ses élèves au-delà de leurs notes. Ces fameuses notes qui sont si valorisées et qui, pourtant, ne prouvent rien selon moi quant à la réelle valeur de nos enfants, rien quant à la véritable grandeur de leur cœur. Oui, oui, ça fait cliché, mais plus la vie avance et plus je vois la vie avec les yeux du cœur, les yeux du cœur comme nous le chantait Gerry Boulet.

Ça fait six ans que j’ai des enfants à l’école et j’ai toujours été mitigée face à la question des devoirs. Croyez-moi, j’ai commencé la première année de mon fils avec un gros coup de coeur, un vrai crush pour les mots-étiquettes. J’étais certaine que j’allais passer du bon temps avec lui à les colorier et à les lui demander d’un millier de façons différentes tout en nous amusant. T’sais, un vrai beau moment de complicité mère-fils. J’ai désanchanté assez vite. J’ai reçu zéro intérêt de sa part pour nos moments ensemble devant son bureau de travail IKEA tout neuf. Nous n’avons ni colorié, ni récité quoi que ce soit dans la joie et l’harmonie. Il voulait faire comme son enseignante lui avait demandé de faire. Il voulait le faire au plus vite pour en finir au plus vite. Donc, j’ai fini par le laisser faire. Pourquoi vouloir lui imposer ma façon de faire même si elle était vraiment cool… dans ma tête.

Il est attentif en classe, allumé et il réussit bien. Qu’est-ce que je pourrais demander de plus. Dans mes moments de doute, mon mari avait toujours le don de me rassurer. Je me demandais quand même si je ne devais pas insister un peu plus pour qu’il fasse tout «comme il faut» ou plutôt «comme je pensais que c’était comme il faut». C’est là que mon mari me disait: «Tant qu’il aime l’école et que ses résultats sont satisfaisants, ne cherchons pas à lui faire détester l’école ou les études en insistant plus qu’il n’en fallait.» J’ai donc lâché prise et j’ai laissé mon fils suivre sa feuille de route comme il le souhaitait. C’est-à-dire: «Faire vite vite ses devoirs et en finir». Bon!

Puis ma fille est arrivée en première année. Ouf! Deux enfants si différents. Deux enfants à accompagner à la fois. Le tout avec un troisième enfant qui a besoin qu’on s’occupe de lui. J’ai aimé les installer confortablement à la table, apporter de la pâte à modeler pour mon dernier de quatre ans et me trouver donc ben cool de gérer ça comme une Pro. Mais ça tient pas la route dans le temps. Ils finissent par me poser des questions en même temps. L’un dérange l’autre. Mon grand trouve ça donc ridicule que sa sœur ne sache pas encore tel mot alors qu’elle le voit pour la première ou deuxième fois seulement. C’est pas super pour son estime d’elle-même. J’étais chaque fois irritée par ses remarques. Et mon dernier… qui veut aussi que je le regarde en même temps.

Et vous me demanderez peut-être, son mari dans tout ça? Il cuisine, il s’implique ou il me remplace quand moi, j’en peux plus. J’ai bien aimé cette citation dont l’auteur m’échappe: On peut apporter un cheval à l’abreuvoir, mais on ne peut pas le forcer à boire. Je peux bien asseoir mes enfants devant leurs devoirs, mais je peux toujours ben pas les faire pour eux. Faire l’essentiel, c’est ce que j’avais réussi à faire de mieux. J’ai aussi toujours réussi à doser en fonction de leur état de fatigue, qu’elle soit physique, mentale ou émotionnelle. Ça marchait bien, mais c’était beaucoup de temps, d’ajustement et d’efforts.  

Les devoirs: une torture?

Puis, j’ai commencé à parler avec des parents autour de moi. Je me faisais demander comment je m’en sortais avec toutes ces études. On avait «touttes», je dis bien «touttteees» la broue dans le toupet. Et cette période de devoirs et de leçons étaient souvent synonyme de tensions dans nos maisons.

J’ai des petites victoires par-ci, par-là pour éviter que ce soit toujours de la torture. J’ai réussi à leur trouver une source de motivation. Je nous ai fait un plan familial. Oui, un plan familial! Vous allez rire :-), mais c’est la façon la plus efficace que j’ai trouvée pour guider toute la famille dans la même direction. C’est en réfléchissant à la motivation pour solliciter la collaboration de nos enfants que j’ai établi une règle qui marche assez bien chez nous. Ils doivent s’acquitter de leurs responsabilités avant d’avoir droit à leurs privilèges. Puisque les devoirs font encore partie de notre vie, c’est leur responsabilité de les faire. Ensuite, ils peuvent sortir avec des amis, jouer dehors ou faire ce qu’ils veulent ou presque.

On veut que nos enfants bougent, qu’ils soient bons à l’école, qu’ils soient heureux, mais ils ont finalement peu de temps à eux ou pour ne rien faire. Non, non et re-non! J’ai passé un an à revoir nos façons de faire et à organiser notre vie familiale pour diminuer le stress et pour laisser du temps libre aux enfants. Je ne vais pas nous stresser le soir avec des devoirs à faire ou pire à sacrifier mes samedis matins?!

Pourtant, c’est ce que nous sommes si nombreux à faire. Un samedi matin, j’ai même passé quarante-cinq minutes aux côtés de ma fille à la laisser lire, réfléchir, à lui poser des questions pour l’aider sans lui donner les réponses, à la laisser faire à son rythme dans la joie, à rester calme et… à boire mon café. Quand on termine enfin… je constate qu’il est déjà 10h15. C’est juste non! J’ai aussi besoin de relaxer, de prendre l’air, de les voir jouer, de lire, de lire avec eux et surtout de ne rien faire. De ne rien faire et de me laisser inspirer par ce que nous avons le goût de faire ensemble. La spontanéité me manque terriblement. C’est devenu à un certain moment donné une torture de faire ce sacrifice au nom des devoirs.

Et c’est alors que la question suivante se pose: Est-ce vraiment nécessaire, des devoirs… au primaire?

C’est ce qui était au coeur de mon entretien avec Mme Julie Chamberland. J’ai réalisé cette entrevue pour vous: Rendez-vous avec Julie Chamberland

Et puis, la conclusion de ses recherches sur la question qui l’a menée à prendre cette décision est la suivante : les devoirs au primaire n’ont pas d’effet significatif sur la réussite des élèves (voir à cet effet la p. 2 d’un avis du Conseil supérieur de l’éducation).

Juste ça, c’est assez pour me convaincre! Surtout que mes soirées en famille sont si précieuses.

Mais si vous êtes comme moi et que vous devez accompagner vos enfants dans leurs devoirs: Voici des trucs que Julie et moi vous partageons pour faciliter les devoirs et leçons à la maison

 

Stéphanie Dionne

 

Les devoirs : Une enseignante vous en parle

Oui je le sais, quand un enfant commence ou recommence l’école, l

Oui je le sais, quand un enfant commence ou recommence l’école, les premières inquiétudes des parents sont les devoirs. Quand, où, quoi, comment et surtout pourquoi! Et c’est la même chose du côté des enseignants. On doit s’adapter à notre milieu, à notre clientèle, au groupe. Certaines années, les cohortes d’élèves sont très fortes et on peut se permettre beaucoup, alors que d’autres années, les élèves sont très faibles et nous devons en faire moins, pour ne pas nuire à leurs apprentissages. Trop c’est comme pas assez, comme le dit le dicton.

Tout d’abord, il faut comprendre que votre enfant « travaille » cinq jours par semaine, plus ou moins huit heures par jour. Il ne faut surtout pas le surcharger.

Le quand : Je vous conseille donc, pour une conciliation travail/famille efficace de choisir convenablement les moments où les devoirs seront faits, selon votre rythme de vie, qui diffère d’un ménage à l’autre. Vous avez le choix entre faire les devoirs (et les leçons) les soirs de semaine OU la fin de semaine. Les enfants ont aussi droit à des périodes de repos, ils en ont autant besoin que nous, les adultes. Il y a aussi le fameux débat : tout de suite après l’école, ou après le souper? Choisissez avec votre enfant. Il sait mieux ce qui est bon pour lui. Il faut lui faire confiance, le responsabiliser. Faites un horaire qui sera affiché à la vue de tous les membres de la famille et RESPECTEZ-LE.

Le où : Les devoirs doivent être fait dans un endroit calme, où il y a peu de circulation des autres membres de la famille et peu de sources de distraction (télévision, animaux, téléphone cellulaire, etc.)

Le quoi : On doit alterner les devoirs (travaux écrits) et les leçons (études) dans une même séance. Faites un choix avec votre enfant. Aime-t-il mieux faire que des mathématiques ou veut-il toucher à plusieurs matières? On essaie aussi de terminer avec quelque chose qu’il aime : une matière en particulier, un projet spécial, etc.

Le comment : On travaille 15 minutes, puis on prend une petite pause, que j’appelle « les pauses santé mentale »; on prend une petite collation et on fait 2-3 exercices de yoga. Bref, on s’inspire de ce qu’il aime. Il faut comprendre que de l’écouter est la meilleure manière de le motiver et de lui faire aimer la période de devoirs et leçons. Et surtout, s’il ne veut pas collaborer lors d’une séance, ne le forcez pas, ça sera pire. Si cela persiste, parlez-en à son enseignante, après en avoir parlé avec lui, évidemment. Il est le premier à pouvoir vous aider à comprendre.

Ne corrigez pas les devoirs de vos enfants. Questionnez-les, donnez-leur des pistes, mais jamais la bonne réponse. Les devoirs, ce sont des pratiques. Les erreurs doivent se faire à ce moment, car ce n’est pas évalué!

Vers la 4e année, certains élèves veulent voler de leurs propres ailes. C’est parfait! Mais on ne doit pas tenir le tout pour acquis. Vous devez continuer à regarder ce qu’il fait, le superviser (au pire en cachette si nécessaire 😉 ).

Le pourquoi : Bon, ça, c’est la question à cent piasses. Certains enseignants choisissent de ne pas faire de devoirs. D’autres veulent en faire. C’est un choix pédagogique et surtout personnel de notre part. Les devoirs sont d’abord une façon pour nous de s’assurer que les parents voient ce qui est fait à l’école. Et on va se le dire, la plupart du temps, c’est pour faire des pages qui n’ont pas été faites en classe. Oui, ça peut paraitre plate, mais ce n’est pas facile de passer toute la matière avec les 26 élèves de la classe, très hétérogène (TDAH, TED, TC, DGA etc.), tout en essayant de maintenir une gestion de classe adéquate, croyez-moi.

Bref, soyez collaboratif, questionnez votre enfant, et son enseignant au besoin. Nous savons que certains parents ne sont pas « équipés » pour expliquer l’addition de fraction ou encore, l’accord du participe passé avec avoir, parce qu’on va se le dire, ça fait un petit bout qu’on a vu cela, donc ne vous gênez pas. Et surtout, je dis bien surtout, ne dénigrez JAMAIS les devoirs devant vos progénitures. N’oubliez pas que vous êtes leur modèle numéro un : si vous commencez à douter des devoirs devant eux, ils feront la même chose et perdront toutes sources de motivation.

Voici le nombre de minutes à consacrer, à votre enfant, lors des séances de devoirs et de leçons, considérant son âge, sa maturité et sa capacité d’attention. Il faut comprendre que ce n’est qu’un modèle et que certains doivent en faire moins ou peuvent en faire plus. C’est à vous de voir, vous connaissez bien votre enfant!

Première année : 15 minutes
Deuxième année: 20 minutes
Troisième année : 25 minutes
Quatrième année : 30 minutes
Cinquième année : 45 minutes
Sixième année : 60 minutes