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À toi mon p’tit homme – Texte : Caroline Lortie

  Tu n’avais même pas 24 heures de vie encore que je savais qu’il y avait quelque chos

 

Tu n’avais même pas 24 heures de vie encore que je savais qu’il y avait quelque chose qui « clochait ». Tous les tests auditifs et visuels ont été rapidement faits.

Dès ce moment, un long parcours nous attendait. Dès tes premiers mois, certaines sphères de ton développement prenaient du retard tandis que d’autres évoluaient à la vitesse grand V.  En accord avec ton pédiatre, nous sommes directement allés vers le Bouclier, un centre de réadaptation pour enfants. Tes difficultés langagières étaient lourdes et plusieurs autres petits retards étaient soulevés.

Mais on parlait toujours de retard… donc, tout serait rapidement rattrapé. Plus le temps avançait et plus tes petites fesses n’arrivaient pas à rester sur une chaise et plus les papillons ou les coups de vent tout simplement faisaient qu’il t’était impossible de rester concentré sur une tâche plus de 20 secondes. Avec une équipe formidable, avant ton entrée à la maternelle, nous avons pu pallier tes retards intellectuels, mais deux points restaient à démystifier… ta concentration et ta bougeotte !

Les quatre lettres flottaient déjà dans l’air. T-D-A-H. Tu n’avais même pas encore 5 ans.

La maternelle est arrivée. Tu étais tellement surexcité tout le temps d’apprendre, d’être avec tes amis, de voir madame Gabrielle ! Les journées de pluie durant lesquelles tu devais rester à l’intérieur étaient un vrai calvaire pour toi. Mais on trouvait des moyens de te faire dépenser ton énergie de guépard dans ton petit corps de 5 ans.

L’école primaire est arrivée. Durant ta première année, tes enseignants et nous-mêmes avons vite compris que l’école serait difficile pour toi. Ouf ! Devoir rester en place et écouter un adulte parler durant des heures était mission impossible pour toi. Même avec tout le sport, les trucs, les attentions particulières.

Tu revenais le soir en ayant mal à la tête, en me disant que la souris dans ta tête courait beaucoup trop vite et qu’elle t’empêchait d’écouter en classe…

Te voyant si désespéré, nous avons accepté la médication. Ton médecin, tes profs et les professionnels de l’école étaient tous du même avis. Tu avais besoin d’un petit coup de pouce.

L’entente était celle-ci : le médicament pendant la semaine, et relâche les weekends. Il faut dire que cette petite molécule te coupait totalement l’appétit et te voir ne rien avaler de la journée nous était pénible.

J’ai retrouvé mon p’tit homme tellement heureux et souriant ! Enfin, tu arrêtais de te faire sermonner sans arrêt de te rassoir sur ta chaise. Enfin, tu arrivais à écrire correctement. Enfin, tu réussissais tes dictées…. tes exercices… tes apprentissages !

Et comme l’effet de la fameuse pilule s’estompait le soir, tu retrouvais ton énergie de petite tornade !

C’est pas facile, mon coco. Et nous en sommes tellement conscients. T’as pas toujours envie de la prendre ta torpinouche de pilule le matin parce que tu veux manger tes lunchs… parce que tes amis te parlent de tes médicaments….

C’est pas facile de te voir comme ça non plus. Tout doux, tout calme. Mais, quand tu me dis que ta petite souris arrive enfin à rester en place pour écouter ce qu’on a à te dire et que c’est facile maintenant pour toi de ne pas bouger et rester concentrer, ça console mon cœur de maman.

C’est pas facile de se faire dire qu’on « bourre notre enfant de chimique ». Mais, on sait nous, ce que ta souris est capable de te faire… et on ne veut plus que tu pleures à cause de ça.

Mon beau Gabriel, tu es maintenant un grand garçon de 9 ans. Tu es un futur joueur de soccer vedette. Tu arrives maintenant à te faire des amis. Tu pètes des scores à l’école sans besoin de te forcer à en avoir mal à la tête. Je t’aime tellement, toi, ton TDAH et ta petite souris dans ta tête 😉

Caroline Lortie

 

TDAH : une douce et explosive étoile – Texte : Kim Racicot

J’aurais beau tenter de chercher les meilleurs qualificatifs du mo

J’aurais beau tenter de chercher les meilleurs qualificatifs du monde, c’est toujours ces deux mots, côte à côte, qui me viennent en tête chaque fois : douce et explosive.

Si on m’avait dit un jour que je serais mère d’une étoile, je ne l’aurais pas cru. Parce qu’au bout du compte, c’est exactement ce que tu es. À la fois prête à éclater à chaque instant tout en laissant échapper ta grande et fantastique lumière.

Vivre avec un enfant ayant un trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité, c’est vivre avec une supernova : une étoile pouvant détoner bruyamment à tout moment.

Effectivement, les étoiles explosent, plusieurs le savent, mais de cette onde de choc peuvent naître de magnifiques choses. Notre relation, malgré les effondrements émotionnels, en ressort chaque fois plus forte et plus solide. Maintes fois, j’ai cherché comment faire pour nous garder épanouies et grandies à travers les évènements de nos vies, parce qu’être mère c’est être continuellement dans le doute et l’incompréhension. Mais lorsque les défis s’invitent, on peut avouer que la facilité devient tout sauf une camarade.

Et pourtant…

Mes réflexions et mes observations m’ont amenée à une grande prise de conscience : rien n’est ni tout noir ni tout blanc. Derrière un défi se cache une grande force ; à côté d’une difficulté, il y aura un aspect positif à garder en tête et, même dans l’obscurité, il y aura toujours un scintillement.

Toutes les étoiles, comme toi, ont besoin de produire de l’énergie pour briller. C’est comme ça, je ne l’ai pas inventé. Si je veux te voir luire de ta plus belle lumière, je dois te laisser être celle que tu souhaites devenir, je dois écouter et respecter tes besoins pour mieux intervenir et accepter que tu es désormais en mesure de filer vers tes propres choix et expériences. Mais je vais toujours graviter autour de toi, sans toutefois tenter de te faire disparaître. 

En t’encourageant dans tes réussites, en te soutenant en douceur lorsque tu traversais des cellules orageuses, j’ai bien vu l’effet apaisant que ça te faisait. Je t’ai vue m’éblouir de ton céleste sourire. Le chaos prenait le large, tout doucement, parce que tu n’étais pas seule. On le savait toutes les deux que plus rien n’était à risque de fulminer.

Mais durant ce moment-là, je te jure que même si des explosions s’étaient avérées possibles, elles n’auraient eu aucune importance parce que tout ce qui émergeait, c’était ta confiance à mon égard. 

Ça me rendait si fière que tu sois mon étoile. 

 

Kim Racicot

 

J’en veux pas de ta pilule! Ce trop-plein d’énergie, c’est mon moteur!

Cher pro

Cher professeur,

Cher médecin,

Cher professionnel,

Cher parent à bout…

J’en veux pas de ta pilule ! J’ai trop d’énergie ? J’ai de la misère à me concentrer ? Je n’écoute pas les consignes ? Je fais l’andouille en classe ? Je pars dans tous les sens ? 

Je refuse que tu m’assommes ! Je ne veux pas endormir ce trop‑plein, c’est mon moteur !

C’est moi ! J’ai besoin de bouger beaucoup ! Tout le temps ! Pis je parle ! Tout le temps ! Dans ma tête, ça va vite, vite, vite ! C’est ça qui fait que j’avance, que je crée, que je rêve, que je suis dynamique ! Ne m’enlève pas ça !

J’en veux pas de ta pilule !

J’aimerais mieux que tu me laisses faire une ou deux heures de sport chaque jour. Laisse‑moi courir ! Laisse‑moi défouler ce tigre qui gronde en moi.

J’en veux pas de ta pilule !

J’aimerais mieux que tu m’écoutes. Parce que tu sais, souvent, je n’ai pas confiance en moi et j’ai peur de trop de choses. Souvent, je me perds. Souvent, c’est trop compliqué à expliquer.

Et toi, tu manques de temps. Tu manques de ressources.

Ta pilule, j’en veux pas !

Elle étouffe mon moteur. Elle éteint mon étincelle. Elle vole une partie de mon âme. 

Lis donc les journaux : même les pédiatres pensent que tu la donnes trop facilement, cette pilule‑là. Il était temps que quelqu’un se lève et le crie haut et fort : « Arrêtons d’endormir nos enfants ! ». Laissons‑les exister !

Moi, ta pilule, j’en veux pas.

 

Gwendoline Duchaine

 

Je lui dirais

Non, ce n’est pas pour être à la mode, et si j’avais besoin dâ

Non, ce n’est pas pour être à la mode, et si j’avais besoin d’attention, j’opterais pour quelque chose d’un peu plus glamour. J’ai été diagnostiquée avec un trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité dès l’enfance. Hé oui, ça existait dans le temps. La petite « pas vite » de la classe, c’était moi. Si je pouvais remonter le temps, je retournerais voir la petite fille que j’étais et je tenterais d’alléger le poids de son petit sac à dos.

Je lui dirais :

Que toutes les roches qui se sont trouvées sur son chemin, elle va en faire une montagne pour atteindre son sommet.

Que l’école va toujours être difficile pour elle, que tout va lui demander plus de temps, qu’elle va se fracasser le nez contre le mur bien des fois, mais qu’elle doit se relever, et ce, c‑h‑a‑q‑u‑e fois.

Que lorsqu’elle a l’impression de constamment échouer, qu’elle doit regarder autour d’elle pour constater toutes les petites réussites. Que les réussites ne se limitent pas aux résultats scolaires.

Qu’un jour, elle va repenser aux adultes qui l’ont malheureusement humiliée et qu’elle va pouvoir leur dire : regardez-moi, j’ai réussi. Peut-être pas de la même façon que tout le monde, mais j’ai réussi.

Que par passion, elle va retourner à l’école à l’âge adulte et qu’elle va réaliser l’ampleur de son trouble et les difficultés qui y sont rattachées. Qu’elle va me pardonner tous ces échecs‑là, parce qu’au fond elle réalise que ce n’est pas plus de ma faute que de la sienne.

Je lui dirais combien je suis désolée…

Qu’on lui ait reproché trop souvent de ne pas être « assez » et qu’elle ait fini par le croire. Pas assez motivée, pas assez concentrée, pas assez disciplinée ou encore pas assez intelligente.

Je lui dirais qu’elle va devenir une femme profondément humaine, avec un sens de l’humour bien à elle, malaisante à souhait, persévérante, qu’elle va se relever dans l’échec et que ça, c’est une réussite.

Pour terminer, je lui dirais que je suis fière d’elle et qu’elle ne doit jamais lâcher.

Peu importe la difficulté, la plus belle chose à offrir à un enfant, c’est de croire en lui, même dans l’échec. Il a besoin qu’on l’aide à s’épanouir, à s’estimer et à croire en lui. Le chemin facile, il l’aurait choisi s’il avait pu.

Merci à ceux qui s’assurent de faire leur différence, vous n’avez aucune idée combien c’est précieux et combien vous allez marquer la vie de ces enfants.

J’en profite pour remercier ceux qui ont cru en moi plus que moi‑même, j’ai pu le faire. Ceux qui m’ont relevée quand je fonçais dans un mur et qui m’ont dit : « Essaie encore, tu peux y arriver ». Merci pour le temps, pour avoir fait ressortir mes forces plutôt que de focaliser sur mes échecs (aussi nombreux soient‑ils) et surtout, merci d’avoir contribué à ma réussite.

Merci à Micheline Beauregard, Madeleine Frenette, Sœur Céline et Sylvie Cloutier.

Merci à Pat Mullen, Gino Jean, Fernande Desroches, Alain Larocque, Serge Leduc, sans oublier ma T.E.S Lucie Duguay et la directrice de l’école secondaire, Michèle Martin.

Et pour terminer, à mes deux meilleurs professeurs au monde : papa, maman, merci d’avoir toujours cru en moi.

« La chute n’est pas un échec, l’échec c’est de rester là où on est tombé. »

 

— Socrate

Marilyne Lepage

Les lettres de sa vie TDAH et l’école

Déjà près d’un mois que la rentrée scolaire a eu lieu. Je dét

Déjà près d’un mois que la rentrée scolaire a eu lieu. Je déteste la rentrée, j’angoisse pour ma fille. J’ai peur. Peur de tomber sur une enseignante qui ne verra que les lettres qui l’accompagnent. Je n’ai jamais autant souhaité pouvoir hacker l’ordi de la secrétaire de l’école, juste pour savoir. La control freak en moi trouve difficile de ne pas pouvoir choisir la prof moi-même.

J’angoisse la veille de la réunion de parents. Je sais que tout se passera à ce moment. Lorsque j’irai la voir pour discuter de ma fille. Comment réagira‑t ‑elle aux lettres qui accompagnent ma fille?

Parce que oui, il y a encore des enseignants mal informés, mal outillés pour aider nos enfants. Parce que le TDAH est encore tabou dans nos écoles. Des enseignants qui voient nos enfants comme des déclencheurs de burnout, comme des causes perdues.

Entendre une amie me dire que la prof de sa fille lui a demandé : « Est-ce qu’elle fait exprès pour être lente de même? », « Pas pour rien que je suis partie en burnout l’an passé, j’avais une classe remplie de TDAH et de tous les Dys possible ». Et j’en passe.

Je comprends que les diagnostics de nos enfants représentent un défi supplémentaire pour vous, chers enseignants. On le sait, on le vit dans nos familles. Mais un défi pour moi implique de me relever les manches et de chercher des solutions. Ça implique de me remettre en question, de revoir ma façon de faire pour le relever, ce fameux défi.

Je n’ai pas envie de ces rencontres où on me rappelle ce que c’est de vivre avec un enfant TDAH. Vous savez, chers enseignants, on connaît le TDAH par cœur. J’ai envie de rencontres où on m’expliquera qu’un tel outil est magique pour elle. Que votre nouvelle façon de faire vient particulièrement la chercher. J’ai envie de voir son nom sur une étoile parce que vous avez réussi à la comprendre. J’ai envie de voir que vous désirez aider ma fille.

Vous avez tant à apprendre de nos enfants! Ce ne sont que des lettres qui les accompagnent. Ça ne les définit en rien. Leur propre alphabet est rempli de belles surprises qu’ils vous demandent de découvrir.

Jusqu’à maintenant, je fais partie des chanceuses. Le chemin de ma fille est parsemé d’excellents professeurs. Mais malheureusement, ce n’est pas le cas de tous les enfants.

Dès leur plus jeune âge, on leur apprend à chanter l’alphabet. Et si nous nous mettions tous ensemble pour chanter les lettres qui les accompagnent?

Mélanie Paradis

Les lettres de ta vie, les lettres de nos vies ! Partie 3 

 

Parents,

 

Parents, donnez-vous le droit…

 

Ma fille, je l’aime et je ne la changerais pour rien au monde. Si elle m’a choisie comme maman, c’est qu’elle savait qu’ensemble, nous saurions trouver les solutions pour qu’elle s’épanouisse pleinement. Que nous transformerions son TDAH/I pour qu’il ne soit plus un obstacle, mais bien une de ses plus grandes forces.

 

Mais ça demande du travail. Chacun de nous qui vit avec un enfant « différent » (que ce soit avec un TDAH, un TSA ou autre différence), ça nous demande un grand investissement. Et je crois que nous ne nous donnons pas assez le droit de ne pas être parfaits. Alors moi, j’ai décidé de me donner cette chance. Je me donne le droit :

 

1.  De pleurer

Parce que mon intervention n’a pas fonctionné. Parce que j’en ai ras le bol de toujours être à 110 % de ma capacité. Parce que je suis triste des fois, et que je me sens seule, très seule.

 

2. D’être dépassée et fatiguée

Ma fille me demande souvent de me renouveler. De trouver de nouvelles façons d’intervenir, de trouver des trucs pour lui faciliter la vie. Mais parfois, je suis à court de ressources. Je suis dépassée, fatiguée et je voudrais que ce soit facile comme avec ma grande.

 

3. De demander de l’aide

Juste d’en parler des fois, ça fait du bien. Demander un break à mamie ou papi ou encore à un ami. Si tu as besoin d’aller plus loin, ton CLSC peut t’aider. Tu as la chance d’avoir de bonnes assurances privées? Lance-toi au privé pour un psy, un psychoéducateur, etc. J’ai la chance d’avoir un bon réseau, mais ça ne suffisait pas. Je me suis entourée de professionnels pour m’aider.

 

4. De perdre patience

Malgré toute ma bonne volonté, je perds patience parfois (souvent). J’ai appris à me pardonner. C’est arrivé et ça arrivera encore. Je m’excuse à ma fille, j’en parle avec elle.

 

5. De faire des erreurs

Je ne suis pas parfaite, personne ne l’est. Ce n’est pas le nombre de fois que l’on tombe qui compte, mais bien le nombre de fois qu’on se relève. Permets-toi de te tromper, ça prouve que tu essaies.

 

6. De souhaiter disparaître

Oui, parfois, c’est difficile, on n’en peut juste plus. Souhaiter disparaître sur une île déserte seule et sans enfants nous paraît la meilleure solution. Ne t’en veux pas de penser ainsi, ça nous arrive tous. Lâche prise, mais le lendemain, relève tes manches et bats-toi plus fort.

 

 

Mélanie Paradis

Les lettres de ta vie (TDAH/I)

Les lettres de ta vie ( TDAH/I) partie 1</a

Les lettres de ta vie ( TDAH/I) partie 1

 

La médication : la suite

 

Il y a une suite à ce matin-là. Tu as avalé la pilule comme une grande, d’un seul coup. Tu étais tellement fière de toi. Moi, j’angoissais, j’avais peur. Deviendrais-tu un zombie? Deviendrais-tu l’ombre de toi-même? Est-ce que je venais de tuer ta spontanéité, ta créativité? J’ai attendu, avec toi. Il y avait de l’école ce jour-là, mais je t’ai gardée avec moi.

 

Ça faisait maintenant une heure que tu avais cette pilule dans le ventre et que moi, j’avais une enclume d’inquiétudes dans le mien. Je te trouvais différente, encore plus impulsive, plus agressive. Je me suis dit que ce n’était peut-être qu’une mauvaise journée. Si seulement ça n’avait été qu’une dure journée…

 

Ce soir-là, je me suis couchée. Je n’arrivais pas à trouver le sommeil. Je ne savais plus trop quoi faire. La médication devait t’aider, pas tout empirer! Le lendemain, matin, je t’ai donné la pilule avec une certaine appréhension. Et c’est là que trente minutes plus tard, tu as explosé.

 

Une crise d’une telle intensité que je ne savais plus quoi faire. Moi, éducatrice spécialisée de formation, j’ai figé. Tu me frappais fort, trop fort. Je suis sortie de ma torpeur. J’essayais de te calmer avec des paroles. Rien n’y faisait. Tout, tout, alimentait ta colère. J’ai eu peur pour tes sÅ“urs, j’ai demandé à ton grand frère de les amener au sous-sol avec lui. Et j’ai fait ce que je ne croyais jamais faire avec mes enfants, de la contention. Je n’avais plus le choix, tu lançais tout ce qu’il y avait à ta portée. Tu te frappais. Je n’en pouvais plus. Je t’ai tenue contre moi… Et j’ai attendu que la crise passe. Tu me vomissais des injures, des insultes, en te débattant férocement. J’encaissais à grands coups de bleus sur le cÅ“ur. Je pleurais. Tu étais devenue Mr. Hyde. Une fois calmée, je t’ai conduite à l’école; nous étions aussi épuisées une que l’autre.

 

Je suis revenue à la maison. Je n’arrivais plus à contenir mes larmes. Je peinais à respirer, je paniquais. Je ne sais pas comment, mais j’ai réussi à appeler la pharmacie. Ils m’ont dit : « Tu arrêtes maintenant et tu appelles ton médecin ». C’est ce que j’ai fait. J’ai raconté notre histoire de façon maladroite à sa secrétaire, mais elle a senti l’urgence. Elle m’a fait patienter quelques minutes au bout de la ligne. Elle m’est revenue en me disant : « Est-ce que tu peux venir maintenant? Le médecin t’attend. » J’ai cette chance-là, d’avoir un médecin super.

 

Il m’a expliqué que nous n’avions pas la bonne molécule, qu’il fallait en essayer une autre. Il m’a dit que malheureusement, avec le TDAH, c’est de cette façon qu’on fonctionne, avec des essais et des erreurs. On a changé la molécule…

 

Cette fois-ci fut la bonne. Je reçois des billets de bons comportements de l’école. Tu es même l’élève du mois. Tu as retrouvé ton sourire. Tu recommences à croire que tu peux y arriver. Tu ne parles plus de vouloir mourir. Tu apprends à être fière de toi.

 

Est-ce que tout est parfait… non. La médication nous aide, mais elle ne règle pas tout. On continue de travailler fort avec toi. On poursuit le suivi en psychoéducation.

 

Et ce matin, en prenant ta pilule, tu m’as dit : « Maman merci! Le monstre dans mon ventre est calme. J’arrive à me concentrer, tout est plus calme dans ma tête. Il n’y a plus de tempêtes. Je t’aime maman! »

 

Mélanie Paradis

 

Les lettres de ta vie (TDAH/I)

La médication

Ce matin-là, le cadran a sonné à 5 h 30, comme

La médication

Ce matin-là, le cadran a sonné à 5 h 30, comme tous les matins. Contrairement à l’habitude, il ne m’a pas réveillée, je l’étais déjà. Je ne pourrais pas dire depuis quand je fixais le plafond. Une heure, deux, peut-être même trois. Je savais que ce matin-là serait différent. Car c’est ce matin-là que je te donnerais pour la première fois ta médication. On a vu le médecin la veille, il a confirmé ce que l’on savait déjà : TDAH/I,  beaucoup trop de lettres de l’alphabet pour une aussi petite fille.

Vers six heures, je vous ai réveillées, les trois merveilles de ma vie. J’étais de bonne humeur, trop, je ne suis pas comme ça le matin. Je rechigne, je bougonne. J’ai besoin de ma tasse de café et ensuite, je commence lentement ma journée. Pourtant, ce matin‑là, je faisais tout pour que tu ne voies pas mon stress. Que tu ne vois pas mon cœur en miettes. Que tu ne voies pas les larmes dans mes yeux ou encore ma main qui tremblait en te donnant la fameuse pilule.

Je ne doutais pas de notre décision. Ton impulsivité t’amenait dans un endroit sombre. Tu t’en voulais, tu regrettais, tu culpabilisais. La tristesse te gagnait à un tel point qu’un jour, tu as dit à ta grande sœur que tu voulais mourir. Ta grande sœur est rentrée en pleurs dans la maison, en me répétant tes mots. Mon cœur a sombré, je me suis écroulée. On ne peut pas vouloir mourir à six ans.

Tous nos efforts, nos rencontres avec la psychoéducatrice, nos interventions, ce n’était pas assez. Nous n’avions pas compris à quel point les lettres de ta vie t’affectaient.

Tu n’avais pas compris quelle petite fille merveilleuse tu es.

Nous devions agir et vite. Ton cerveau avait besoin d’aide, nous allions la lui donner.

Après tout, on ne prive pas un enfant qui voit mal de ses lunettes ou un enfant diabétique de son insuline. Ton cerveau en a besoin, pour trouver les bons chemins.

Il nous reste du travail à faire. Pour que tu te voies, comme nous te voyons. Une petite fille merveilleuse, avec un potentiel sans limites. On trouvera le chemin qui augmentera cette estime de toi.

On trouvera ensemble le chemin du bonheur. Parce ta vie, tu ne le sais peut-être pas, sera exceptionnelle.

 

Mélanie Paradis

 

À toi qui crois que je ne sais pas élever mon enfant!

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Je ne sais pas si tu es prêt à lire ce texte. Tu trouveras sans doute mille et une excuses pour me le remettre sur le nez. Tu me sortiras sans doute des pseudo-études, me disant que le TDAH n’existe pas, que je suis seulement un mauvais parent. Tu me diras sûrement que je me trouve une ou des raisons pour excuser, selon toi, ma ratée de fille…

 

J’aimerais te dire que je suis loin d’être une mauvaise mère, que mon chum est sûrement le meilleur des pères. Je te dirais que des trucs pour aider ma fille, j’en connais tellement que je pourrais en écrire un livre.

 

Tu veux en savoir plus sur la parentalité positive? Ben viens me voir, j’ai tout lu ce que je pouvais trouver sur le sujet. 

 

Est-ce que tu sais qui est Brigitte Racine? Moi oui, elle est devenue ma meilleure amie (même si elle ne le sait pas). Ses livres sont fabuleux, mais pas miraculeux.

 

J’investis tellement de temps avec ma fille que parfois, j’ai l’impression de négliger mes deux autres filles.

 

Et tu sais quoi? On se sent tellement dépassé avec son TDAHI (ben oui, on a une lettre de plus nous, « i » pour impulsivité) qu’on a demandé de l’aide. Chaque semaine, une psychoéducatrice vient à la maison pour nous aider et pour aider ma cocotte. J’applique, chaque jour, les trucs, les conseils qu’elle me donne. Encore une fois, ce n’est pas miraculeux, mais ça nous aide.

 

Et tu vois, malgré tous les efforts, tout ce temps passé, ben, il arrive encore qu’elle pète une solide coche dans un magasin. Qu’elle me crie des insultes, me frappe ou lance quelque chose. 

 

C’est là, à ce moment précis, que tu me juges. Parce que, parfois, je suis dépassée et je n’interviens pas. Tu ne sais pas que c’est la centième crise que je gère aujourd’hui. C’est là que tu décides que je ne sais pas élever mes enfants. Que je sors l’excuse du TDAH pour me déculpabiliser.

 

Alors que toi, tu crois que je ne sais pas élever mes enfants, moi, je te dis ceci : j’élèverai ma fille tellement haut qu’elle découvrira que son TDAHI deviendra sa plus grande force. 

 

La prochaine fois que l’envie te prend de dire que le TDAH n’existe pas, repense à moi et à tout ce que je fais pour ma fille. Tu croiras peut-être qu’il y a une petite chance que ce ne soit pas une invention, parce qu’on travaille fort avec notre fille.

 

Et souviens-toi de ce proverbe amérindien : ne juge aucun homme (tu peux remplacer ici homme par le mot parent) avant d’avoir marché avec ses mocassins pendant deux lunes.

 

Mélanie Paradis

Si j’étais maman avec extras

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Je suis passionnée des défis quotidiens de la vie familiale. Convaincue qu’il est possible de vivre une vie familiale et une vie amoureuse épanouissantes et harmonieuses à travers cette vie tumultueuse. Je dois dire que ça prend une conviction vraiment forte et puissante pour nous aider à reprendre notre envol après ces journées où notre vie est une zone de turbulences. Comme bien des parents, dans ces moments de turbulences, je finis par voir ma vie comme une montagne. Et l’image est encore douce, parce que si la fatigue ou mon ami le SPM sont de la partie, je dirai plutôt que « ma vie, c’est d’la MARDE ». Merci à Lisa Leblanc pour ce bijou de chanson!

Pourtant, ma vie familiale n’a rien de particulier. Je ne connais pas la séparation et je ne connais pas les défis de la vie familiale recomposée. Je n’ai pas vécu de deuil qui touche ma famille immédiate. Je ne connais pas les troubles d’apprentissage, de comportements ou quoi que ce soit d’autre. Je n’ai pas subi de maladies ni d’accidents graves. Malgré tout cela, j’arrive parfois à voir ma vie comme une montagne. Oui, ça m’apparaît comme une montagne d’essayer de créer l’équilibre dans la maison pour faire régner l’harmonie et le plaisir quand mes enfants explosent les uns après les autres, et les uns avec les autres.

Puis, je me demande ce que ce serait si…

… mes enfants avaient un trouble d’apprentissage, un TDAH ou trouble de comportements.  

… mes enfants avaient une maladie grave.

… mes enfants ne pouvaient jamais être complètement autonomes.

C’est le mystère. Pourtant, il y a tant de familles qui vivent avec des problématiques qui demandent une adaptation, un suivi médical régulier et une attention toute particulière au quotidien. Ces mères et ces pères font preuve d’un don de soi incroyable, d’une patience d’ange et d’une compassion extraordinaire pour leurs enfants. C’est aussi d’eux que je m’inspire.

Vous connaissez Julie Philippon? Une maman avec extras que j’ai eu le privilège de rencontrer. Elle m’a raconté ce moment où sa vie de maman zen a foutu le camp pour être remplacée par la vie d’une maman avec extras. Vous pouvez l’entendre me raconter ce moment sur la familledemavie.com. Ce sont ses épreuves qu’elles devaient surmonter avec ses enfants qui l’ont amenée à écrire. L’écriture, c’est un merveilleux processus libérateur et rempli d’apprentissages. C’est devenu pour elle un moyen de mettre son attention sur les succès de ses enfants pendant la journée et de les partager à sa famille, puis c’est devenu une source d’inspiration pour tant d’autres familles qui vivent toutes sortes de difficultés.

Aujourd’hui, elle éduque, elle partage, elle outille, mais elle propage surtout des valeurs rassembleuses autour des différences par ses différents projets #30couleurs. Je suis désormais sensibilisée à la différence et surtout remplie de compassion pour les difficultés invisibles de nombreuses familles. Il y a une phrase qu’elle a dite qui, maintenant, résonne comme ceci dans mon esprit : Pourquoi juger si rapidement et si durement? Dans le fond, tu ne sais rien. Tu ne sais rien de cette personne que tu juges ni de ce qu’elle vit. Retiens tes paroles vaines et ouvre ton cœur en guise de soutien à ceux qui en arrachent parfois, un peu, de temps en temps, tellement, tout le temps, parfois, selon… Parce que tu n’en sais rien, tends la main ou passe ton chemin!

« Ça prend tout un village pour élever un enfant. » — Proverbe sénégalais

Et ce village c’est nous! – Julie Philippon.

Merci, Julie, d’apporter cette lueur d’espoir dont nous avons tous besoin!

 

Stéphanie Dionne

Mon tigre

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Il se déchaîne sans prévenir, sort d’un coup, sans aucun contrôle, et saccage tout. Il prend les rênes, utilise mon corps, ma voix, mes gestes… de façon si violente. Il attend sagement sans bruit et sans prévenir : il explose. Il fait du mal à ceux que j’aime, il est destructeur. Il fait partie de moi. Il est en moi. Il est moi.

J’essaie de le dompter, vainement. J’essaie de l’épuiser, vainement. Il est tellement en colère. Incontrôlable.

Et d’une certaine façon, il est aussi mon moteur, mon énergie, ma passion, celui qui m’aide à me surpasser, à atteindre des sommets, à faire des exploits que je ne me soupçonnais pas être capable de faire.

Je l’appelle mon tigre. J’en ai besoin, mais il me déchire. Il a toujours été là. Aussi loin que je me souvienne, il était là. Il surgissait comme ça, sautait au visage des autres, les agressait, m’enlevant le peu d’estime de moi que je m’efforçais d’avoir.
J’ai même essayé de le détruire, de me détruire… mais il est trop puissant et il ne m’a pas laissée faire. Il a une rage de vie incroyable, bien plus forte que les maux que je lui infligeais.

Quand la vie a poussé en moi, il s’est un peu tassé, mais il était toujours là, aux aguets, prêt à surgir n’importe quand.

Il n’a pas de pitié : il détruit. J’essaie de le calmer, de l’amadouer, de le fatiguer, mais il reste tellement sauvage !

J’ai même essayé de l’accepter, de le regarder en face, de le remercier. Mais il est traître et n’a aucune reconnaissance.

Il fait peur. Jusqu’où est-il capable d’aller? Qu’est-il capable de faire? Dois-je avoir recours à la médecine pour l’endormir pour toujours, au risque de perdre une partie de moi? Avant que les dégâts soient irréparables… L’amour et le pardon sont-ils plus forts que lui? Avons-nous tous une bête féroce en nous qui nous surprend? Est-ce cela qui fait de nous des meurtriers, des agresseurs, des violeurs? Est-ce dans la nature humaine d’avoir du fauve en soi?

Mon tigre est bien là, j’ai beau essayer de l’oublier, il refait surface et ravage tout sur son passage. Je me montre calme et forte, mais en dedans, c’est tumultueux.

Est-ce pour cela que l’humain tombe dans la drogue ou l’alcool? Pour essayer de geler son tigre? Quelles sont mes options pour le contrôler, l’utiliser sans le laisser déborder ni prendre le contrôle? La sagesse de l’âge finira-t-elle par m’apporter ces réponses?

Chaque jour, il sommeille en moi… Il me fait terriblement peur, mais je ne peux m’empêcher de l’aimer. Chaque jour, je le défoule ; il en a besoin, sinon il surgit. Chaque jour, il me donne l’énergie de me surpasser. Je réalise que de plus en plus souvent, je suis capable de le laisser sortir quand je le décide, et sûrement qu’à ce moment-là, les gens autour pensent que je suis folle. Nous le sommes tous, non? Je lui donne un peu de liberté, et je le renferme en moi. Chaque soir, je le remercie de ne pas être sorti sans mon accord. Il sommeille… Il est mon essence et ma flamme. Je l’attise en essayant qu’il ne brûle pas. Chaque soir, je prie pour qu’il ne s’enflamme pas…

Si vous regardez mes yeux, de tout près, regardez bien… Vous verrez cette lumière intense qui s’embrase en moi. Il est là, puissant, fort et fier.

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