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La prématurité, rien ne nous y prépare – Texte : Annick Gosselin

Une grossesse est un événement heureux. Rapidement à son annonce,

Une grossesse est un événement heureux. Rapidement à son annonce, on se met à imaginer le sexe du bébé, les prénoms, la décoration de la chambre, les premiers petits vêtements. On se met à lire tous les livres sur le déroulement de la grossesse, l’accouchement et l’allaitement. On suit des cours prénataux, on prépare un plan de naissance et on rédige une liste de ce qu’on veut apporter à l’hôpital. Bref, dans notre tête, on a un plan A : on accouche, on a un beau bébé à cajoler et on revient à la maison avec notre bébé au bout de deux jours.

Mais qui nous parle des plans B-C-D? Qui nous prépare mentalement à affronter une naissance prématurée et tout ce qui vient avec? Personne! La dure et cruelle réalité te frappe de plein fouet quand tu as les hormones « dans le piton ». 

Personne ne te parle de la césarienne d’urgence, du fait que tu ne pourras ni voir ni toucher ton bébé quand il sortira de ton ventre, que tu seras inquiète de son état plusieurs heures, car les médecins sont rapidement partis avec ton petit trésor, que ton conjoint l’a suivi et que tu restes seule avec la peur au ventre.

Ton ventre, il est maintenant vide et tu as la sensation de t’être fait voler ton bébé. Tu pleures, tu ne comprends pas pourquoi ça t’arrive. Tu te sens coupable, tu te demandes ce que tu as fait de mal pour que ton enfant naisse prématurément. Et tu n’as aucune réponse. 

On te dit rapidement que tu dois tirer ton lait, car ça aidera ton bébé. Mais tu n’as pas envie ; ce que tu voulais, c’était allaiter et surtout avoir le contact si doux avec ton bébé. Tout ton beau plan ne s’est pas réalisé, il te reste seulement des miettes d’inquiétude et de déception. 

Les heures passent et tu ne peux pas prendre ton bébé. Tu le vois, si petit et si fragile dans son incubateur, il est si loin, inaccessible. Tu voudrais le protéger, le tenir contre toi, mais c’est impossible. On essaie de te rassurer, mais ça non plus, ça ne fonctionne pas. 

Tes valises n’étaient pas prêtes, ton bébé n’a pas de vêtements et le peu que tu as sera clairement trop grand. C’est impossible pour toi de gérer cela, tu dois déléguer cette tâche, et encore une fois, ça te brise le cœur, car tu avais envie de magasiner toi-même les premiers vêtements de ton bébé. 

Et vient le temps où tu dois quitter l’hôpital, seule, le ventre et les bras vides. Tu as l’impression que ton cœur a été arraché. Tes prochains jours, semaines et même mois seront les mêmes : faire des allers-retours entre l’hôpital et la maison. Doucement tu te fais à cette routine, mais tu es comme figée dans tes émotions, tu ne réussis qu’à faire ce que tu dois faire, car tu dois le faire. 

Quand enfin vient la première fois où tu peux prendre ton bébé, tu ne peux que pleurer de joie. Ce moment tant espéré et imaginé pendant tes nuits sans lui. Tu voudrais le garder dans tes bras et t’enfuir avec lui à la maison, mais non. Pour son bien, il ne faut pas le prendre trop longtemps, il ne lui faut pas trop de changements à la fois. Donc tu retournes, soir après soir, chez toi avec ce grand vide. Tu te réveilles la nuit en pensant à ton bébé, tu appelles à l’hôpital pour savoir comment il se porte. Le lendemain matin tu cours le voir, il n’y a plus rien qui compte sauf de voir ton bébé aussi souvent que possible. 

Quand enfin on te dit que ton petit trésor peut sortir, étonnamment, c’est très déstabilisant. À la maison, on n’a plus les machines qui sonnent s’il arrête de respirer ou qu’il désature. Finalement, l’hôpital avait quelque chose de rassurant. 

Il faudra maintenant apprendre à vivre avec cette insécurité. Certes, la joie d’avoir enfin ton bébé avec toi en tout temps te remplira de bonheur. Mais tu n’auras pas la légèreté des premiers moments que tu aurais eus avec ton bébé s’il était né à terme. Tu resteras, probablement toute ta vie, avec une certaine amertume de t’être fait voler ton instant qui se devait d’être magique, celui de la naissance de ton enfant. 

Il se peut aussi que ça te prenne plusieurs mois à digérer tout cela. Il est possible que psychologiquement, tu aies besoin d’aide, car avoir un bébé prématuré, ça rime souvent avec un post-partum. Si cela arrive, il ne faut pas te sentir coupable, c’est juste plus que ce que n’importe qui peut tolérer comme douleur psychologique. Assure-toi d’être bien entourée et d’aller te chercher de l’aide. 

Je le répète, personne ne te prépare à vivre cela. Est-ce qu’on devrait davantage parler de cette possibilité dans les livres de grossesse et les rencontres avec les gynécologues? Je pense que oui. Il ne faut pas être alarmiste, mais cela arrive relativement souvent et ce serait bien que les mères puissent se préparer à cette éventualité psychologiquement. Savoir qu’elles peuvent avoir du soutien et que tout finira par bien aller. Tu finiras par aller mieux et ton bébé grandira en santé. 

Mais en attendant, vivre la prématurité sans y être préparée, c’est juste trop. Trop gros et trop difficile. 

 

Annick Gosselin

Quand la fertilité devient un cauchemar sans fin… et qu’on t’enlève ta liberté de choix – Texte : Marie-Élisabeth Ménard

En juillet 2019, tout juste avant mes 25 ans, j’ai mis au monde mon quatrième enfant. Belle, ple

En juillet 2019, tout juste avant mes 25 ans, j’ai mis au monde mon quatrième enfant. Belle, pleine de vie, de santé, de curiosité. Avec un papa si attentionné, si aimant ! Le bonheur !

L’accouchement a été parfait. Facile, sans problème ni blessure. La maman va bien et le bébé aussi. Tout va pour le mieux. Mon conjoint et moi avions décidé depuis longtemps que ce serait la petite dernière, que plus jamais je ne porterais d’enfant dans mon ventre. C’était notre décision pour la famille, MA décision pour moi-même. Je n’en pouvais plus. La grossesse avait été pénible physiquement, et surtout mentalement.

Je venais de terminer ma première année de technique et je commençais mes stages en août, lorsque mon bébé allait avoir tout juste deux mois. Le gynécologue m’a demandé quelle contraception je voulais pour la suite. Je lui ai répondu (dossier à l’appui) que les contraceptifs ne fonctionnaient pas. Je suis tombée enceinte deux fois sous contraception, après plusieurs rejets violents de toutes sortes avec ou sans hormones. Sans faire de détour, j’ai demandé la ligature des trompes, qui me semblait adéquate. Il m’a dit non, sans me laisser m’expliquer sur mes motivations. Il m’a dit non, sans connaître ma vie ni mes sentiments dans la situation. Il m’a simplement dit non. Voici ses arguments, et les réponses que j’ai eues à lui donner :

Tu es trop jeune : WHAT?!? Quatre enfants à 25 ans, et je suis aux études, ce n’est pas assez pour toi ? Il m’en faut combien, ou quel âge devrai-je avoir pour arrêter d’être enceinte ? … Je suis tombée enceinte à 17 ans, et on me disait déjà trop jeune pour AVOIR un enfant ; 8 ans plus tard, je suis trop jeune pour arrêter d’en faire… Humm.

Si jamais tu regrettes et que tu en veux d’autres : JA-MAIS. Je suis épileptique, c’est risqué chaque fois que je tombe enceinte, chaque fois que je ne fais pas mes nuits (et Dieu sait à quel point on ne dort pas avec des enfants…). Les grossesses sont de plus en plus difficiles et épuisantes, en plus de l’école, des autres enfants, de la vie et des imprévus… JA-MAIS.

Et ton chum lui, s’il en veut d’autres : On peut adopter, devenir famille d’accueil, avoir une mère porteuse, peu importe… Je ne veux plus en avoir en moi. Mon corps doit me revenir et m’appartenir un moment donné… C’est aujourd’hui ce moment. Je n’en veux simplement plus. À la limite, il ira voir ailleurs, JE M’EN FOUS. Ce n’est pas sa décision, plus après quatre…

Le médecin m’a même gentiment proposé l’abstinence. (J’ai bien failli lui sauter à la gorge !)

Vous auriez dû me voir à cet instant. Déconfite, déconstruite, en pleurs, inconsolable. De mes 17 ans à mes 25 ans, je n’ai connu que ça, les grossesses, les accouchements et les nuits blanches. J’ai quatre enfants ; imaginez les maladies, les nuits à l’urgence, les imprévus de garderie, d’école, de rendez-vous, de blessures, et j’en passe. Le coût de la vie qui ne fait qu’augmenter, les cours de sport, le parascolaire, les fêtes et autres… Je ne pouvais pas imaginer qu’une personne ne se fie QU’À mon âge pour déterminer si j’étais prête ou non à mettre fin à ma fertilité incontrôlable. Moi qui me suis battue pour ma liberté et mon indépendance jusque-là, c’est toi, l’homme gynécologue de 60 ans, qui vas décider de l’avenir de mon corps ? Je ne pouvais y croire. Je suis sortie du bureau hors de moi et en pleurs. Mon chum ne savait pas quoi me dire ni quoi faire pour apaiser ma souffrance. Parce que oui, c’était une souffrance terrible, que je ressens encore aujourd’hui. J’avais envie de crier à l’injustice. Mais je suis sortie, la tête basse et le cœur en miettes.

Quatre mois plus tard, en novembre ou en décembre, j’ai un drôle de feeling, que je ne connais que trop bien. Le test est positif. Je suis de nouveau enceinte. Lorsque j’appelle mon conjoint pour le lui dire, ma voix est bloquée dans ma gorge. Rien ne sort. Je suis paralysée par la colère, la rancune, l’amertume, la peur. J’ai peur. On n’en veut pas, de cette grossesse-là. On suit donc la procédure pour une IVG. Je ne suis ni pour ni contre l’avortement. Je pense que ça doit exister, pour le choix de la femme qui s’inflige cette opération. Parce que ce n’est pas qu’un sujet ni un jeu. C’est une opération où on nous enlève la vie du ventre. C’est un choix que l’on s’impose pour diverses raisons, mais la première et la plus importante, c’est quand c’est pour soi-même que l’on prend cette décision. Dans tous les cas, ça fait mal. Mal au corps, mal au cœur et mal à l’âme. (Encore en écrivant ces lignes, je pleure, parce que le mal est encore là malgré le soulagement.)

Dans le processus, j’apprends que j’attends des jumeaux cette fois. Je ris jaune, parce que c’est du délire. Le destin est parfois chiant, mais là, je le trouve incompréhensible. Je redemande aussitôt la ligature. La gynécologue, une femme cette fois, n’argumente pas et fait tout en son pouvoir pour me l’obtenir. Et elle réussit. C’est un soulagement de me faire soutenir, entendre, comprendre par quelqu’un. Enfin.

Lorsque je rencontre les professionnels dans le cadre du processus, je largue ma colère envers le système et envers celui qui m’a causé tout ce que je vis juste parce qu’il me trouvait « trop jeune » ou qu’il a pensé à mon chum avant moi. Les personnes présentes me comprennent, m’écoutent patiemment et soulagent comme elles le peuvent ma douleur à l’âme. Elles sont extraordinaires. L’opération a lieu. J’en sors, soulagée, mais vide. J’ai un deuil à faire. Celui de mon IVG, mais aussi celui de ma fertilité. Un deuil officiel de grossesse, de recommencement, de renouveau. Et ça me va. J’étais prête pour ce deuil depuis longtemps, et il me convient.

Neuf mois plus tard, je me sens toujours mal. Depuis mon opération, j’ai des douleurs au bas-ventre. Je me sens bizarre, je sais que quelque chose ne va pas. Après les prises de sang, une nouvelle grossesse est confirmée. Oui, oui, neuf mois après ma ligature, je suis de nouveau enceinte. (Moins de 1 % de chances, qu’ils disent… fallait que ça me tombe dessus !) Et elle est viable, donc pas ectopique. Quelle chance ou quel malheur ? … J’en ris. J’en pleure. Je fais tout ce que je peux pour ne pas devenir folle. Je ne comprends plus rien. Je n’en peux plus. Je veux disparaître. Je veux démolir quelque chose, plusieurs choses. Je ne sais plus. À quel point la vie voulait que je sois enceinte pour me faire ça ? Devais-je le garder ? Parce que rendu là, croyez-moi, c’est un miracle. De mauvais goût, mais tout de même un miracle.

Je me suis questionnée à ne plus savoir comment réfléchir. Si vous saviez comment j’ai pleuré ! Je n’avais plus de larmes, et à la fin, je riais comme une personne qui a perdu l’esprit. Je n’étais plus personne. Je me sentais simplement comme une machine à bébés. Avec ou sans mon consentement, la vie et la médecine s’en foutaient, tant que je faisais des bébés. Je me suis fait opérer à nouveau. Deuxième IVG et deuxième ligature en neuf mois en plus d’un accouchement, tout ça dans la même année.

Tout ça parce que le gynécologue a dit non à MON choix, qu’il a eu cette emprise sur MON corps et sur MA vie.

Tout ça parce que le système de santé, SUR CETTE QUESTION, ne prend pas en compte la vie de la femme ni son avis.

Tout ça parce que, finalement, je n’ai jamais eu le pouvoir sur moi-même.

Tout ça parce que c’est injuste.

Tout ça parce que j’avais envie de vivre ma vie et qu’on ne m’a jamais donné le choix de le faire comme je le voulais et QUAND je le voulais.

Tout ça parce qu’on ne m’a pas écoutée au départ, lorsque j’ai dit non.

N’est-ce pas une des premières bases du consentement ? Sur le plan médical, n’ai-je pas le droit de profiter de mon corps comme bon me semble ? N’est-ce pas mon droit fondamental de décider si, oui ou non, je veux porter des enfants ? Peu importe mon âge, que j’aie ou non des enfants, que je fasse quoi que ce soit de la vie… n’est-ce pas mon droit fondamental de femme, d’humain de décider de ce que je fais de mon corps ?

Le système doit changer. Le système doit écouter ses patients, et non les détruire. J’ai vécu l’enfer, je ne suis pas la seule ni la pire.

Je veux que ça change, pour les autres qui vivent encore ou qui vivront un cauchemar comme le mien, par manque de choix, par manque d’écoute et par manque d’humanité.

Je veux que le droit des femmes et le consentement soient pris en compte dans le système de santé. Ce n’est pas normal qu’on se batte de tous les côtés pour ces aspects et que, lorsqu’on demande d’avoir le pouvoir sur notre corps, un médecin, un système, décident à notre place.

C’est injuste.

Soyez fortes. Soyez confiantes. Battez-vous pour la liberté de votre propre corps.

 

Marie-Élisabeth

Deux mois sans toi, petit ange acrobate – Texte : Valérie Marcoux

12 mars 2021 Aujourd’hui, ça fait deux mois. Deux mois qu’ils m’ont endormie. Pour que mo

12 mars 2021

Aujourd’hui, ça fait deux mois.
Deux mois qu’ils m’ont endormie. Pour que mon cœur souffre moins, pour que je n’ajoute pas un traumatisme de plus à ceux d’avoir porté la mort et d’avoir appris, seule avec l’équipe médicale, que ton petit cœur ne battait plus, la veille. Parce que j’étais quand même « chanceuse » dans les circonstances de devoir avoir une césarienne et de pouvoir être endormie.

Ça fait deux mois.
Deux mois que tu es né sans bruit, sans cris. Dans cette salle d’opération blanche et froide, entourée d’humaines extraordinaires, toutes des femmes, dont plusieurs mamans, qui ont dû t’accoucher les larmes aux yeux et les sanglots dans la voix.

Ça fait deux mois.
Deux mois qu’ils ont apporté dans la chambre d’hôpital ton petit corps tout formé, tout propre avec un petit chapeau tricoté et une doudou d’hôpital.

Ça fait deux mois.
Deux mois que ton papa t’a pris pour te déposer sur moi. Tu semblais dormir, simplement. Deux mois que notre première réaction, lorsqu’on t’a vu, a été de dire que tu ressemblais tellement à tes frères !

Ça fait deux mois.
Deux mois que j’ai demandé à ce qu’on t’emmaillote dans ta doudou, celle que j’avais choisie juste pour toi, et qu’on change ton bonnet pour celui que j’avais apporté. Deux mois que j’ai caressé ta joue, embrassé ton front, que je t’ai collé contre mon cœur.

Ça fait deux mois.
Deux mois que j’ai passé de longues minutes à observer ton beau visage, essayant de m’imprégner de toi. Deux mois que j’ai dormi avec toi dans les bras.

Ça fait deux mois.
Deux mois que j’ai pris ta main dans la mienne pour voir tes longs doigts, que je t’ai déshabillé pour voir tes grands pieds. Deux mois que l’infirmière m’a montré le nœud dans ton cordon, celui qui a causé ton décès. Tu as dû en faire des acrobaties pour réussir à faire un nœud franc, voilà pourquoi nous t’appelons notre ange acrobate.

Ça fait deux mois.
Deux mois que je t’ai serré fort, que je t’ai parlé, que je t’ai fait sourire avec mes doigts. Deux mois où j’ai essayé, du mieux que je pouvais, de te donner une vie d’amour en quelques heures.

Ça fait deux mois.
Deux mois que je t’ai laissé aller, pleurant en silence. Deux mois que je me sens si vide…
Je t’aime mon ange acrobate !

Valérie Marcoux

Ma Nathalie – Texte : Joanie Fournier

J’étais dans la jeune vingtaine quand je l

J’étais dans la jeune vingtaine quand je l’ai rencontrée. J’avais eu la chance incroyable de côtoyer ses enfants, les uns après les autres, en travaillant comme éducatrice. Au fil des mois, une confiance s’est installée et un lien d’amitié s’est créé. Un lien entre deux femmes, l’une mature et expérimentée, l’autre jeune et passionnée. Puis de l’éducatrice, je suis devenue l’amie. Elle m’a ouvert les portes de leur maison et de leur intimité.

Elle m’a impressionnée, dès la première rencontre. Elle jonglait entre les enfants, comme une pieuvre bienveillante. Pourtant, comme éducatrice, je savais bien m’occuper de plusieurs enfants à la fois. Mais ma Nathalie, elle était la master-maman. Chef de file d’une famille nombreuse, elle avait réussi à élever ses enfants avec respect, bienveillance et tellement de douceur. Elle était un modèle pour moi, une inspiration.

La première fois qu’elle nous a invités à souper chez elle, mon amoureux et moi, est un souvenir tellement fort pour moi. Je la revois en train de cuisiner, le fourneau rempli à craquer. Les enfants s’amusaient, tous ensemble. Et quand on s’est mis à table, leur harmonie m’a fait envie. Chacun avait sa place, son rôle à jouer, sa responsabilité. Avant elle, je connaissais seulement des mamans qui se levaient 32 fois de table pendant le repas et qui finissait par manger froid. Pas ma Nathalie. Pendant une heure, nous étions assis à table à parler et tout était tellement paisible… Ça m’avait frappé de plein fouet : moi aussi, je voulais ÇA plus tard ! Les plus grands aidaient à débarrasser à la table, un autre aidait le bébé à ramasser sa fourchette qu’il avait lancée ou échappée. Évidemment, il y avait des petits conflits d’enfants. Mais tout était tellement naturel…

J’étais vraiment impressionnée… et quand je suis sortie de là, j’ai dit à mon amoureux que moi aussi, je voulais une grande famille. Il m’a avoué que si je lui avais demandé cela avant, il aurait fait une petite crise cardiaque… mais plus maintenant. Maintenant qu’il avait vu tout l’amour qui envahissait cette famille, il était tout aussi conquis que moi.

Puis, l’année suivante, je suis tombée enceinte pour la première fois. Les questions se bousculaient dans ma tête, au même rythme que les nouvelles sensations dans mon corps. Et à chaque petite question, ma Nathalie pouvait m’éclairer. Mon médecin me donnait des statistiques, alors qu’elle, elle me parlait de son ressenti, de ses expériences. Et c’est exactement ce dont j’avais besoin. Je ne voulais pas entendre de données scientifiques, je voulais qu’on me dise que c’était normal d’avoir peur.

Puis, elle a partagé avec moi ses histoires d’accouchements, ses récits d’allaitement et tout le bagage d’une mère-veilleuse femme. J’ai pensé à elle en poussant mon bébé, le plus naturellement possible. J’ai pensé à elle quand j’ai mis bébé au sein. J’ai pensé à elle à chaque petite étape de ma nouvelle vie de maman, me demandant souvent ce qu’elle aurait fait. J’espérais tellement fort qu’elle ait réussi à me transmettre son instinct maternel…

J’étais maintenant une maman. C’est comme s’il y avait un fil invisible qui nous liait. Grâce à elle, je voyais la maternité comme un arbre qui prend de la maturité dans une grande forêt. Chaque maman a son arbre et toutes les racines sont liées, parce que certaines épreuves de nos vies de mamans nous lient indéniablement.

Les années ont passé. Ma Nathalie n’était jamais bien loin. Toujours à un coup de fil d’une réponse rassurante… Puis, mes grossesses se sont succédé et ma grande famille m’a comblée. Je suis devenue la maman-d’une-famille-nombreuse, mature et expérimentée.

Et un jour, la jeune éducatrice passionnée de ma fille a commencé à me demander des conseils. Des conseils sur la grossesse, sur l’accouchement, sur l’allaitement… et quand elle est tombée enceinte, je lui ai promis de toujours être là pour répondre à ses questions, peu importe l’heure du jour ou de la nuit.

Elle m’a remerciée le plus sincèrement du monde et m’a avoué que j’étais tellement un modèle pour elle… Moi ? Un modèle de maman ? J’ai réalisé ce jour-là que j’étais devenue sa Nathalie à elle… Quel honneur à mes yeux ! Je veux être pour elle cette maman qui a plein d’histoires à raconter… Cette maman qui sait écouter… Cette maman qui n’est pas parfaite, mais qui est humaine et bienveillante.

Je ne sais pas si je te l’ai déjà dit, ma Nathalie, que tu étais ce modèle-là pour moi. Mais je veux te dire MERCI. Merci d’avoir toujours répondu au téléphone quand je paniquais et que j’avais besoin de toi. Merci pour toutes les fois où tu m’as rassurée. Merci de m’avoir montré que c’était aussi beau d’avoir une famille nombreuse. Je te dois une grande partie de ma belle famille.

Merci, ma Nathalie.

Et vous, avez-vous une mère-veilleuse dans vos vies ?

Joanie Fournier

 

Ai-je le droit ? Texte : Ève

Le 13 mars 2020, la vie telle qu’on la connaissait a cessé d’e

Le 13 mars 2020, la vie telle qu’on la connaissait a cessé d’exister. J’étais enceinte de 33 semaines. On venait de finir la chambre de la plus vieille (16 mois) pour pouvoir transférer la bassinette dans la chambre de bébé. J’en étais au stade d’être emballée pour la suite, de tout préparer pour que mon mini soit des plus confortables lorsqu’il allait arriver. Mais en l’espace d’une annonce du gouvernement, tout a basculé. On entrait dans un confinement. Un confinement qui venait avec un lot incroyable d’émotions vraiment difficiles à gérer pour une maman pleine d’hormones de grossesse. Et un stress inimaginable entourant les circonstances incertaines d’un accouchement prévu début mai. Mais personne ne me comprenait.

« Vous êtes en santé, c’est ce qui compte ».

« Vous n’avez pas perdu vos jobs, ça va bien financièrement comparativement à plein d’autres familles ».

« Vous n’avez pas perdu personne à cause de la Covid ».

Ce sont toutes des affirmations que je ne peux pas nier.

Mais, ai-je le droit d’avoir de la peine parce que je n’ai jamais pu terminer la chambre de mon bébé à cause de la fermeture des garderies et celle des magasins ?

Ai-je le droit d’avoir de la peine parce que je n’ai pas pu recharger mes batteries avec mon mari avant que bébé arrive ?

Ai-je le droit d’avoir de la peine parce que ma fille n’a pas pu rencontrer son frère à l’hôpital ? Tout comme mes parents ou mes beaux-parents ?

Ai-je le droit d’avoir vraiment beaucoup de peine (attention, celui-là c’est mon summum) d’avoir présenté mon nouveau-né À TRAVERS UNE FENÊTRE à mes parents et de voir les larmes couler sur leurs joues parce qu’ils ne pouvaient pas le prendre dans leurs bras ? Et parce que je ne pouvais tout simplement pas le leur laisser.

Ai-je le droit d’avoir de la peine parce qu’encore aujourd’hui, un an plus tard, j’ai l’impression que mon bébé Covid n’a rien vécu autre qu’être à la maison ? Pas d’épicerie, pas de magasinage, pas de zoo, rien.

Est-ce que j’ai le droit d’avoir ce sentiment d’amertume envers toute cette situation ? Ce sentiment qui me gruge par en dedans parce que plus les jours avancent, plus on se fait voler des moments précieux qui ne reviendront jamais.

Oui, on est en santé. Oui, on a encore nos jobs. Non, je ne suis pas décédée seule dans un CHSLD. J’en suis vraiment reconnaissante. Je suis aussi contente pour les familles à qui le premier confinement a permis de se rapprocher et d’avoir du temps de qualité. Mais est-ce que je dois vraiment me sentir mal si pour nous, ça a été un des moments les plus difficiles de nos vies ?

Ça ne change absolument rien au fait que j’adore mes enfants et je ne regrette absolument pas l’arrivée de mon deuxième, je veux être claire sur ce point. C’est juste que « ça prend un village pour élever des enfants » qu’ils disent. Ben, on est seuls depuis un an. À se démener comme des fous pour protéger nos minis, nos parents et les personnes à risque. À piger dans l’énergie qu’on n’a plus pour protéger la santé de tout le monde.

Donc, ai-je le droit de dire à voix haute, pour la première fois, que j’ai de la peine ?

Ève

Le jour où je t’ai mis au monde

Mon bébé,

Je crois qu’il es

Mon bébé,

Je crois qu’il est impossible que tu te doutes du nombre de fois que je peux rejouer les scènes dans mon esprit. Je les revis encore et encore, peu importent les années qui passent.

La première contraction, je la sens encore.

La perte des eaux, je la vois encore.

Le regard ému entre papa et moi lorsqu’on a compris qu’enfin tu arrivais.

Le trajet pour l’hôpital où l’on se tient la main.

Chacune des contractions, je peux les ressentir juste en fermant mes yeux.

Les cris qui symbolisent la puissance de ce que je suis en train d’accomplir, je les entends encore.

Ton petit corps chaud blotti contre le mien m’apaise toujours autant.

Je raconte ta naissance avec tant de fierté et j’y songe si souvent.

Dans le brouillard de la souffrance, s’est imprégné dans mon esprit chaque petit détail. La musique qui jouait, la noirceur de la pièce et les gens autour de nous. S’il m’était possible de remonter le temps, ne serait‑ce qu’un instant, afin de te rencontrer pour la première fois à nouveau, je le ferais. Simplement pour revivre le moment où, au bout de mon souffle, tu as pris le tien.

Il m’est tellement apaisant de songer à ce regard que ton papa avait lorsqu’il t’a vu faire ton entrée dans le monde, j’ai tout de suite su qu’il était le tien.

Ce fut l’un des moments les plus difficiles de ma vie, mais l’un des plus beaux.

Lorsque tu me demandes de te raconter, si tu savais combien tu me fais plaisir. Cette histoire, c’est ma préférée, parce que c’est la nôtre.

Le temps passe, mais les souvenirs ne s’effacent pas.

Même si je maudissais la terre entière à cet instant précis, j’étais en train d’écrire les premières lignes de ton premier chapitre. Le jour où je t’ai mis au monde est l’un des plus beaux qu’il m’aura été donné de vivre de toute mon existence.

Ce jour est mon préféré, puisque c’est le jour où je t’ai mis au monde.

Marilyne Lepage

Quand le bonheur est plus grand que le mal de vagin. TEXTE : Kim Boisvert

On ne se le cachera pas, même si on oublie, enfanter, c’est pas c

On ne se le cachera pas, même si on oublie, enfanter, c’est pas comme dans les films.

Je me souviens quand une ancienne amie à moi a accouché d’une belle pitoune de 7,4 lb. Un peu plus de 20 pouces de bonheur. Une petite miraculée. Cette petite-là, je l’ai aimée comme si c’était ma nièce. J’ai aucune idée pourquoi, mais ça s’est fait comme ça, tout seul, comme si elle venait de mon propre ventre. Et dans ce temps-là, j’étais en processus de fertilité pour avoir mes jumelles. Imaginez mes hormones quand je l’ai vue.

La journée de la venue au monde de Chouchoune, j’ai fait partie du Club Élite à qui on permet les visites. Je ne tenais plus en place et après avoir donné de la chnoute à mon chum du temps parce que j’étais trop nerveuse, je suis rentrée dans la chambre comme on entre probablement dans la caverne d’Ali Baba : un peu trop vite, mais le pas hésitant. Mixed emotions. Oh, ceux qui me connaissent savent déjà que j’ai pleuré. C’était clairement la plus belle chose que j’ai vue au monde. Ce n’est pas une chose, c’est un être. Et ça, c’était un couple d’amis qui l’avaient fait. Après des tentatives et des échecs en fertilité, le + s’était transformé en chair et en os mous.

On parle souvent de la maman, de la beauté de la maman enceinte, des premiers contacts, etc. Mais moi, même si cette amie a CLAIREMENT fait tout le travail, j’ai envie de vous parler de ce que j’ai vécu à travers l’émotion du papa.

Le papa. Un homme extraordinaire, doté d’un cœur immense. Un homme, un vrai. Des mains couvertes de corne bien travaillée, des ongles taillés courts, croches et le bord des doigts rude. Un papa qui passe ses journées à construire des maisons, et ses soirées à s’occuper de sa famille.

Il nous racontait quand il a vu sa petite pour la première fois, la première seconde. Il cherchait ses mots, perdus dans des souvenirs encore trop frais, pour nous expliquer son expérience. Si vous aviez vu ses yeux, ses traits, son émotion ! Il y a quelque chose d’extrêmement surprenant à voir combien un homme vit différemment les choses. Lui, la naissance de sa fille, il l’a vécue avec une émotion si complète que son corps entier transpirait le bonheur. Ses cernes de j’ai-passé-la-nuit-debout n’étaient que la preuve de sa création. Une fierté de paon. C’était magnifique. On était dans le corridor et il mimait même les premiers gestes qu’il a faits : sa petite sur le chest, une main en haut, l’autre en bas. Il nous le racontait avec tellement d’intensité que j’avais envie de crier : POUSSE POUSSE RESPIRE RESPIRE ! J’y étais clairement, je sentais l’odeur de placenta.

Ce soir-là, il y avait un autre papa dans la salle (on dirait qu’il y avait foule mais c’est vrai, on était plusieurs aux côtés de ma chum en jaquette laite, et c’était avant la COVID) et lui aussi nous racontait l’arrivée de sa petite. Mononcle Frank, qui s’appelle. Et Mononcle Frank aussi parlait de sa petite princesse avec tellement d’amour que j’en ai été bouleversée. C’était trop pour moi, mes yeux se sont mouillés.

On oublie souvent les papas, je trouve. Mais j’aimerais dire que ce que j’ai vu dans les yeux de ces deux papas‑là a fendu mon cœur. C’est beau, un papa. Et ce n’est pas vrai que c’est toujours les mamans qui sont présentes, touchées, émotives et bouleversées.

Je me souviendrai toujours du bonheur que j’ai vu dans les yeux des parents. Et de ma chum qui m’a achalée aux cinq minutes pendant neuf mois parce qu’elle avait mal au vagin. Eh bien croyez-moi que leur bonheur est clairement plus grand que son mal de vagin.

Kim Boisvert

Le coup de foudre n’est pas garanti

Depuis que le test de grossesse a affiché un positif, on a hâte de

Depuis que le test de grossesse a affiché un positif, on a hâte de voir ce petit être qui va faire de nous une famille. On attend ce moment avec impatience et on se fait plein de scénarios. Tout le monde nous parle du coup de foudre qu’on va avoir en lui voyant la face et à quel point ça va être le plus beau moment de notre vie. Pourtant, personne ne nous explique que parfois, ça ne se passe pas comme ça.

Avant d’accoucher, j’aurais aimé qu’on me dise que le coup de foudre n’est pas garanti. Qu’on me dise que c’est correct d’avoir peur. Que ce n’est pas parce que ce bébé a grandi 40 semaines dans mon ventre que je vais l’aimer au premier regard. Surtout, j’aurais aimé qu’on me dise que ça ne fait pas de moi une mauvaise mère.

C’est normal, un nouvel être débarque dans nos vies, on ne connaît rien de lui encore. C’est correct d’avoir besoin de temps pour le découvrir, le connaître. C’est ce qui est arrivé pour moi. L’accouchement s’est mal terminé et mon corps s’est mis en mode survie. J’ai ressenti beaucoup de culpabilité du fait que je ressentais une résistance envers ma fille.

Ne pas tomber en amour sur le champ ne veut pas dire que tu ne prendras pas soin de ton enfant ou que tu ne tiens pas à lui. Ça veut simplement dire que tu as besoin de temps.

J’ai appris à connaître ma fille, j’ai appris à l’aimer et je nous ai laissé du temps. Maintenant je peux dire que je l’aime plus que tout au monde.

Avec bébé no 2 qui arrive en février, je ne sais pas comment ça va se passer, mais je sais que peu importe ce qui va arriver dans cette salle d’accouchement et comment je vais me sentir, c’est valable, normal et ça m’appartient. Ça fait partie de notre histoire d’amour à nous. Nous réagissons toutes différemment à l’arrivée d’un bébé et ça ne fait pas de nous de moins bonnes mères.

À toi qui vas accoucher, tu vas peut-être avoir un coup de foudre, peut-être pas, et c’est bien correct comme ça. Parfois, l’amour nous explose au visage et parfois, il se développe et grandit avec le temps. Dans tous les cas, ce que tu vas ressentir est valable et légitime. C’est le début de la plus belle et grande histoire d’amour de ta vie.

Anouk Carmel-Pelosse

Chère madame Catherine

Quand je suis tombée enceinte de ma fille, j’

Quand je suis tombée enceinte de ma fille, j’étais tellement excitée à l’idée de mettre au monde un petit humain. Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours rêvé d’être une maman. La grossesse s’est déroulée normalement et facilement. Un peu de nausées au premier trimestre et le reste était parfait. Oui j’étais stressée, j’avais fait une fausse couche affreuse avant ma grossesse, mais j’avais espoir que ce petit trésor s’accrocherait.

L’accouchement ne s’est pas déroulé exactement comme je l’avais espérée, j’ai dû subir une césarienne d’urgence et j’ai été endormie. Donc les 24 premières heures de vie de ma fille sont très floues dans ma mémoire. J’ai vécu un deuil de ne pas avoir été capable d’accoucher naturellement. En plus d’avoir été endormie, mon conjoint et moi avons manqué le premier pleure de notre fille. Ce fut traumatisant pour nous. Lorsqu’elle est revenue dans notre chambre après 24 heures à la pouponnière, j’ai réalisé que j’étais incapable de dormir sans qu’elle soit sur moi ou si mon conjoint n’était pas réveillé pour la surveiller. J’ai longtemps eu de la difficulté à dormir lorsqu’elle était bébé. Au moindre bruit, je me réveillais et vérifiais si elle respirait.

Je ne sais pas si c’est relié à l’accouchement où nos vies ont failli être chamboulées à jamais, car ma vie et celle de ma fille étaient en danger, mais je suis devenue hyper angoissée. Dès qu’elle était malade, et même encore aujourd’hui six ans et demi plus tard, je stresse à mort. Si quelque chose me semblait anormal, je m’inquiétais vraiment beaucoup. C’était malsain.

Quand elle a eu un mois et demi, nous avons trouvé une garderie formidable, mais nous devions payer pour sa place à partir de septembre à ses six mois. Nous avons conclu qu’elle débuterait à temps partiel, deux ou trois avant-midis par semaine et qu’on augmenterait graduellement. Heureusement que nous avons fait ça, parce que deux mois avant septembre, je faisais des crises de panique. À mon retour au travail un an plus tard, je pleurais tous les matins. La veille de mon retour, j’ai pleuré pendant des heures.

À chaque étape importante de sa vie, ma grossesse avec son frère lorsqu’elle avait 13 mois, à mon accouchement quand elle avait 21 mois, quand elle a commencé à se traîner, à marcher, j’imaginais toujours les pires scénarios. Évidemment, la rentrée scolaire de la maternelle en 2019 était pour moi une étape méga angoissante, mais j’ai réussi à le cacher à ma fille, car elle était la petite fille la plus heureuse et fière de la Terre. Elle parlait de l’école depuis qu’elle avait trois ans.

À la rencontre de sa professeure, j’étais stressée au max. J’avais l’impression que j’allais éclater en larmes à tout moment. Mon conjoint et moi étions en file pour entrer dans sa classe, j’avais si hâte de rencontrer son enseignante. Quand j’ai entendu la petite voix douce et calme de madame Catherine, ça m’a un peu rassurée. Puis, j’ai vu cette jeune femme remplie de joie, débordante d’énergie, stressée, mais heureuse. Quand je lui ai serré la main, une petite voix m’a dit : « Ça va bien aller avec elle ». Puis, je me suis assise au bureau de ma fille, j’ai commencé à éplucher les feuilles devant moi. J’ai lu une petite lettre de la professeure à ma fille ; tous les élèves avaient la même lettre. Nous devions la lui lire la veille de sa rentrée. Dans la lettre, on pouvait lire comment son enseignante avait préparé la classe et combien elle avait hâte de les rencontrer. Les larmes ont envahi mes yeux, mais j’ai réussi à les contenir. La rencontre n’avait même pas commencé encore et j’étais déjà prête à pleurer.

Madame Catherine s’est présentée et ce fut le coup de foudre. Plus la rencontre avançait, plus je me sentais rassurée et confiante. Ma petite fille serait bien encadrée par cette jeune enseignante passionnée. Elle nous a invités à venir passer des avant-midis avec elle et ses renards dans sa classe. Nous, les parents, mais aussi les grands-parents, marraine et parrain étions les bienvenues en tout temps à venir partager leur quotidien. Pas besoin de dire que j’y suis allée quelques fois. À chacune de mes visites, j’étais impressionnée de voir l’évolution des autres élèves, mais surtout de voir l’amour qui régnait entre les élèves et madame Catherine. Spontanément, un élève se levait et allait la serrer dans ses bras et lui dire un gros « Je t’aime ».

Ma fille nous parlait tout le temps de son enseignante et nous disait combien elle était gentille et qu’elle l’aimait beaucoup. Elle voulait et veut toujours être une « professeure comme madame Catherine ». Nous avions beaucoup de communication avec elle ; elle était très facile à rejoindre et toujours prête pour une nouvelle idée.

Quand la COVID-19 est arrivée, l’enseignante a envoyé un message à ses élèves pour expliquer la situation et qu’elle était très triste de ne plus les voir. Elle a rapidement commencé à faire des appels vidéos. Ma fille n’a jamais manqué un appel. Même chez le dentiste, elle tenait à y assister. Puis, les appels éducatifs sont arrivés. Elle était si heureuse de parler toutes les semaines avec sa madame Catherine. Durant la quarantaine, notre fille a recommencé à faire des crises de colère. Nous lui avons demandé ce qui pourrait l’aider à mieux gérer ses crises. Elle nous a parlé d’un personnage de l’école qui explique les émotions. J’ai contacté son enseignante ; elle nous a envoyé un fichier et elle a proposé de parler en privé avec notre fille pour mieux lui expliquer. Ça a beaucoup aidé notre princesse. Ses colères ont diminué énormément. Encore une fois, madame Catherine m’impressionnait avec sa disponibilité et son aide. Elle allait plus loin que son rôle d’enseignante. Puis, à la fin de l’année scolaire, elle est venue porter un cadeau et passer du temps avec chacun de ses élèves. Elle est restée environ deux heures à parler avec ma fille et mon fils.

Tout l’été, dès que ma fille réussissait quelque chose, elle disait : « Madame Catherine serait contente, tu peux lui écrire pour lui dire ? ». Nous avons communiqué avec elle durant l’été et chaque fois que je lisais la réponse de madame Catherine à ma fille, un sourire immense illuminait son visage. Cette jeune enseignante a réussi à se graver une place spéciale dans le cœur de ma fille. Grâce à elle, elle a encore plus confiance en elle. Elle a appris à être plus indépendante et à mieux gérer ses émotions.

En tant que maman, je n’aurais pas pu souhaiter une meilleure enseignante pour ma fille. Je suis extrêmement déçue qu’elle ne puisse pas enseigner à mon fils, car elle a eu sa permanence dans une autre école. Je suis heureuse pour elle, car je sais comment cela peut être difficile d’avoir une permanence en milieu scolaire. Mais la maman en moi se dit qu’elle aurait sûrement eu un impact aussi grand dans la vie de mon fils. Elle aura peut-être un impact sur sa vie, mais différemment. Je me réjouis de la connaître, d’encore lui parler et qu’elle fasse encore partie de nos vies même si une autre année scolaire a débuté. Elle est toujours présente pour ma fille et je suis si heureuse.

Merci madame Catherine de m’avoir appris à faire confiance à la vie et aux gens. Merci d’avoir calmé mes peurs et mes craintes. Vous avez un cœur immense rempli d’amour et de générosité. Chaque élève à qui vous allez enseigner sera un enfant privilégié. Merci d’être toujours là pour mon Éloïse. Merci d’être son modèle, son idole.

Je crois que j’aime madame Catherine autant que ma fille !

Bonne année scolaire aux nouveaux petits renards de madame Catherine de l’école Emmanuel-Chénard à Deux-Montagnes.

Cindy LB

1 maman, 3 accouchements !

Lorsqu’on apprend que l’on deviendra parents, nous avons tous un

Lorsqu’on apprend que l’on deviendra parents, nous avons tous un certain nombre d’idées préconçues quant à la parentalité. Comment nous allons traverser les différentes étapes de la grossesse, quel genre de parents nous serons, comment nous allons gérer notre nouvelle vie de famille, comment nous allons éduquer nos enfants… et pour les mamans plus précisément, comment vont se dérouler nos accouchements.

Pour ma part, je ne m’étais pas réellement attardée à me faire des scénarios précis, mais j’imaginais tout de même que ça allait ressembler aux classiques que l’on peut voir au cinéma : perdre les eaux au centre d’achat, arriver à l’hôpital, avoir son beau bébé tout rose qui a déjà l’air d’avoir trois semaines, partir à la maison en chantant parce que tout a trop bien été… Vous le voyez, le cliché ? Mais non, ce n’est pas ça. De surcroît, ce n’est trois fois pas ça. Je vous partage donc mes expériences…

Notre première fille est née de façon naturelle, à 40 semaines et 2 jours. J’ai rompu mes eaux à la maison et mon travail s’est étendu tout au long de la journée. J’ai poussé durant environ 1 h 30, ce qui est assez normal pour un premier bébé. Par contre, lors de sa sortie (ou plutôt de son entrée) vers le monde extérieur, elle a malencontreusement pris une grande gorgée de liquide amniotique qui lui, avait cru bon de s’infecter durant les heures précédentes.

On a donc eu droit à trente secondes d’eye contact avec elle avant qu’une troupe d’infirmières ne l’emmènent dans une autre pièce en l’intubant. J’avoue que là, c’était assez déstabilisant comme tournure d’événement. En fin de compte, nous avons pu la voir quatre heures plus tard à travers son incubateur, puis nous sommes rentrés à la maison 8 jours plus tard puisqu’elle avait des antibiotiques intraveineux.

Notre deuxième fille, quant à elle, a décidé de nous jouer un petit tour et de ne pas se retourner la tête en bas. J’ai tenté une version à 37 semaines, mais en vain. D’ailleurs, c’est probablement l’un des pires moments que j’ai vécus, lorsque j’y repense. Enfin bref, la version n’avait pas fonctionné et je n’étais pas tout à fait game de tenter d’accoucher un siège, j’ai alors choisi la césarienne. La naissance de ma fille était donc planifiée à 39 semaines et 4 jours, un beau mercredi matin.

Entrer dans la salle d’opération toute blanche et stérile, avec de grosses lumières qui permettent presque de voir à travers ta peau, c’était un peu bizarre et angoissant. Se faire faire une rachi-anesthésie (contrairement à la péridurale, l’anesthésiant est injecté directement dans l’enveloppe du système nerveux central) et instantanément, ne plus sentir son corps ou du moins, tout ce qui se situe sous la poitrine, c’était déstabilisant pas à peu près ! Néanmoins, la naissance s’est super bien déroulée. J’ai pu avoir mon bébé sur moi pendant quelques minutes avant qu’elle ne monte à l’étage, bien au chaud dans les bras de papa, pendant que moi, j’allais « dégeler » pendant deux heures dans la salle de réveil…

Enfin, notre troisième fille a pour sa part fait la grève de fin de grossesse, car j’ai dû me faire provoquer à 41 semaines et 2 jours… après trois strippings infructueux. Clairement, elle n’était pas pressée de sortir de là et n’avait pas compris que son bail était expiré. En passant, pour celles qui ne le savent pas, cet accouchement s’appelle un AVAC, diminutif d’Accouchement Vaginal Après Césarienne. Pas très émoustillant comme titre, je l’avoue. Mais sachez que c’est tout à fait possible d’avoir un accouchement naturel après une césarienne.

Cette fois-ci, tout s’est déroulé hyper rapidement, tellement que mon chum est passé près de rater la naissance en partant 5 minutes chercher un café ! Notre fille est sortie après deux poussées et avec l’aide du médecin, je l’ai moi-même mise sur moi. Elle, j’ai pu la garder, plus que quelques secondes ou minutes. C’est comme si, pour boucler la boucle, la vie m’offrait cette petite douceur, ce moment qui avait été un peu précipité pour la naissance de mes deux autres filles.

Cette rétrospective de mes expériences d’accouchement démontre assez bien, je crois, que peu importe quels sont nos attentes, nos souhaits ou nos appréhensions en matière d’accouchement, on n’a pas vraiment de contrôle sur ce qui se passera réellement, le jour venu. La vie est bien faite et je me dis que rien n’arrive pour rien.

Pour ma part, même si on me donnait une baguette magique, je ne changerais pour rien au monde ces trois expériences merveilleuses et uniques. Mon long séjour à l’hôpital pour ma première fille m’a permis de m’adapter tout en douceur à mon nouveau rôle de maman, ce qui me sécurisait puisque je savais que si des inquiétudes ou des interrogations (qui sont fréquentes avec un premier enfant !) survenaient, j’avais un soutien immédiat. Ma césarienne a permis à papa de faire du peau à peau avec notre deuxième fille durant des heures, moment qui fut magique pour les deux. Et ma grossesse in-ter -mi-nable m’a réellement permis de vivre cette dernière expérience à fond et de clore ce chapitre de ma vie comme il se doit !

Et vous, quelles sont vos expériences uniques ?

Andrée-Anne Courchesne

Ma dépression post-partum majeure qui a failli me coûter la vie : Texte : Cindy LB

En 2002, j’ai été abusée sexuellement par un copain. En 2005, m

En 2002, j’ai été abusée sexuellement par un copain. En 2005, mon père est décédé du cœur à 45 ans et c’est moi qui ai téléphoné au 911, tout s’est déroulé devant moi. En 2013, j’ai fait une fausse couche horriblement traumatisante. En 2014, j’ai accouché de ma fille et ce fut tout aussi traumatisant. Ça s’est terminé en césarienne d’urgence, j’étais endormie. Ma fille et moi avons failli mourir. En 2015, j’ai fait une seconde fausse couche. Je suis tombée enceinte de mon fils plus tard dans l’année. Cette grossesse fut extrêmement difficile, j’ai été malade tout le long et j’ai subi du harcèlement psychologique au travail. J’ai été arrêtée pendant toute ma grossesse, car j’en pouvais plus d’être malade et d’avoir une ambiance toxique au travail. Heureusement, ma césarienne avec mon fils s’est déroulée paisiblement et dans le bonheur.

Les premières semaines après la naissance de mon fils, tout se déroulait merveilleusement bien. Puis, mon fils est tombé malade à un mois et demi (bronchiolite) et il a été hospitalisé 4 jours. Ensuite, ce fut mon tour d’être malade. Les médecins ont découvert des pierres à la vésicule biliaire. Après plusieurs visites à l’urgence, je me suis enfin fait opérer pour la retirer. La convalescence fut difficile, je me remettais tout juste de celle de ma césarienne et je retombais en convalescence, à être incapable de soulever quoi que ce soit. Difficile avec 2 enfants, une de 2 ans et un de 4 mois.

Mon humeur avait commencé à changer après l’hospitalisation de mon fils, j’étais facilement frustrée, mais après ma chirurgie, c’est devenu pire. J’avais de très grosses sautes d’humeur, toujours en colère contre mon conjoint, incapable de rien faire, toujours fatiguée, jamais envie de sortir ou de voir des amis. Les disputes avec mon conjoint étaient intenses. Je n’ai jamais été une personne colérique ni agressive, mais à ce moment, j’aurais pu le devenir. Je ne sais pas pourquoi, mais c’était toujours contre mon conjoint.

Quand mon fils a eu 9 mois, mon conjoint nous a payé un séjour en amoureux à l’Esterel. J’étais tellement heureuse et soulagée. Le séjour s’est déroulé à merveille, je n’avais même pas envie de retourner à la maison. J’avais l’impression de ne pas m’ennuyer de mes enfants et c’est là que j’ai commencé à penser que je faisais peut-être une dépression post-partum. À notre retour à la maison, la situation est revenue comme avant le séjour.

Un soir où nous nous étions disputés vraiment fort, mon amoureux m’a dit : « Sérieusement, tu n’es plus pareille. Tu as changé. Peut-être que tu devrais prendre un rendez-vous avec ton médecin. » Le fait que lui me le dise m’a insulté ; pourtant je le savais que quelque chose clochait. J’ai pris le téléphone et j’ai appelé à la clinique, un soir de semaine à 17 h 45. Quelles étaient les chances que quelqu’un réponde ? Eh bien, une secrétaire a répondu. Je lui ai expliqué la situation et elle m’a dit qu’elle allait en parler avec mon médecin et me rappeler. À 19 h 30, la secrétaire me rappelait pour me donner un rendez-vous le surlendemain. J’étais sous le choc.

Quand je suis arrivée à la clinique, j’étais convaincue que c’était seulement de la fatigue. J’allaitais mon fils de 9 mois et demi aux deux heures jour et nuit. Mais lorsque je suis entrée dans le bureau et qu’elle m’a demandé comment j’allais, j’ai éclaté en sanglots. Elle m’a regardée et m’a dit : « Je n’ai même pas besoin de te passer le questionnaire, tu es en dépression post-partum modérée. » Elle m’a obligée à arrêter l’allaitement, j’ai débuté la médication et je devais trouver une psychologue.

Je suis sortie de la clinique et j’ai téléphoné à mon conjoint pour lui dire la bombe. Il a été rassurant, même si je savais qu’il ne croyait pas tant à la dépression, mais il devait admettre que je n’allais pas bien. Pendant le chemin du retour, je me rappelais que plusieurs personnes m’avaient dit que d’avoir 30 ans les avait affectées énormément. Et là, me voilà à 2 jours de ma fête de 30 ans, nouvellement diagnostiquée avec une dépression post-partum modérée. Je me disais que ça ne pouvait pas me rentrer dedans plus que ça. Hum… j’avais tout faux.

J’ai rapidement trouvé une psychologue en qui j’avais confiance et à qui je me suis livrée comme jamais. Je savais que j’avais une chance en or de pouvoir me payer une psychologue au privé et d’en avoir trouvé une qui fit avec moi. Mais malgré la thérapie, la médication et le repos, je m’enfonçais dans un gouffre sans fin. La noirceur était partout. J’ai donc décidé de me lancer dans mille projets et d’aider n’importe qui dans le besoin. Mais 9 mois après mon diagnostic et avec une thérapie qui avançait très bien, ça n’allait pas du tout. Mes amies s’éloignaient de moi, je me sentais plus seule de jour en jour. Puis, mes idées suicidaires sont devenues de plus en plus convaincantes.

Un matin, je suis allée porter mes enfants à la garderie. J’avais décidé que c’était cette journée-là que ça se passerait. Que j’allais passer à l’acte. J’étais convaincue que mes enfants et mon conjoint seraient mieux sans moi, que je les ferais moins souffrir si je n’étais plus là à traîner ma noirceur. Je ne me sentais pas à la hauteur comme mère, j’avais l’impression d’avoir échoué, car mes enfants voyaient une maman triste, en colère et qui ne jouait pas avec eux, qui n’avait pas d’énergie. J’avais une séance avec ma psychologue en matinée, je n’avais pas envie d’y aller, mais une force ou une petite voix m’a poussée à y aller.

Lorsque je suis entrée dans son bureau, elle m’a regardée et l’expression sur son visage a changé. Je me suis installée sur le divan en face d’elle. Elle me posait des questions et je répondais le minimum. Puis, elle a commencé à me piquer, à me chercher, à me faire sortir de mon état de silence. Et ça marchait, elle me gossait royalement. Elle s’est mise à me répéter une question : « Qu’est‑ce que tu veux ? » Je ne répondais pas. Mais elle répétait sans arrêt, de plus en plus fort, de plus en plus comme un ordre. Et d’un coup, j’ai explosé. « JE VEUX MOURIR, JE VEUX DISPARAÎTRE, JE VEUX PLUS ÊTRE UN FARDEAU, JE VEUX M’OUVRIR LES VEINES AVEC TON OUVRE-ENVELOPPE, JE VEUX SAUTER EN BAS DE TA FENÊTRE, JE VAIS ALLER M’ÉCRASER CONTRE UN MUR DE BÉTON AVEC MON AUTO. » Et là, je tremblais, je me berçais, je criais des sons ou des mots incompréhensibles. Elle m’a demandé si elle pouvait contacter mon conjoint, j’ai dit non, d’appeler ma mère. Puis c’est flou. Ma mère est venue me chercher au bureau de ma psychologue et elle m’a amenée à l’hôpital. Je n’ai aucun souvenir du chemin, je ne faisais que pleurer. Ma mère me parlait, mais aucun souvenir de ce qu’elle m’a dit.

Arrivée à l’hôpital, on m’a prise en charge très rapidement, en moins de 30 minutes, j’étais assise dans le bureau du psychiatre et un plan était établi. Thérapie plus intensive alternée entre ma psychologue et lui. Il ne prenait plus de patients, mais il a décidé de me suivre en externe. Puis, changement dans ma médication et suivi avec une travailleuse sociale. Je ne faisais plus une dépression post-partum modérée, mais une majeure.

Si ma psychologue, en qui j’avais totalement confiance, n’avait pas remarqué mon changement d’attitude, je ne serais probablement pas là à vous écrire. Mes enfants n’auraient plus de maman et mon conjoint n’aurait plus sa petite femme.

Cindy LB