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Mon tigre

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Il se déchaîne sans prévenir, sort d’un coup, sans aucun contrôle, et saccage tout. Il prend les rênes, utilise mon corps, ma voix, mes gestes… de façon si violente. Il attend sagement sans bruit et sans prévenir : il explose. Il fait du mal à ceux que j’aime, il est destructeur. Il fait partie de moi. Il est en moi. Il est moi.

J’essaie de le dompter, vainement. J’essaie de l’épuiser, vainement. Il est tellement en colère. Incontrôlable.

Et d’une certaine façon, il est aussi mon moteur, mon énergie, ma passion, celui qui m’aide à me surpasser, à atteindre des sommets, à faire des exploits que je ne me soupçonnais pas être capable de faire.

Je l’appelle mon tigre. J’en ai besoin, mais il me déchire. Il a toujours été là. Aussi loin que je me souvienne, il était là. Il surgissait comme ça, sautait au visage des autres, les agressait, m’enlevant le peu d’estime de moi que je m’efforçais d’avoir.
J’ai même essayé de le détruire, de me détruire… mais il est trop puissant et il ne m’a pas laissée faire. Il a une rage de vie incroyable, bien plus forte que les maux que je lui infligeais.

Quand la vie a poussé en moi, il s’est un peu tassé, mais il était toujours là, aux aguets, prêt à surgir n’importe quand.

Il n’a pas de pitié : il détruit. J’essaie de le calmer, de l’amadouer, de le fatiguer, mais il reste tellement sauvage !

J’ai même essayé de l’accepter, de le regarder en face, de le remercier. Mais il est traître et n’a aucune reconnaissance.

Il fait peur. Jusqu’où est-il capable d’aller? Qu’est-il capable de faire? Dois-je avoir recours à la médecine pour l’endormir pour toujours, au risque de perdre une partie de moi? Avant que les dégâts soient irréparables… L’amour et le pardon sont-ils plus forts que lui? Avons-nous tous une bête féroce en nous qui nous surprend? Est-ce cela qui fait de nous des meurtriers, des agresseurs, des violeurs? Est-ce dans la nature humaine d’avoir du fauve en soi?

Mon tigre est bien là, j’ai beau essayer de l’oublier, il refait surface et ravage tout sur son passage. Je me montre calme et forte, mais en dedans, c’est tumultueux.

Est-ce pour cela que l’humain tombe dans la drogue ou l’alcool? Pour essayer de geler son tigre? Quelles sont mes options pour le contrôler, l’utiliser sans le laisser déborder ni prendre le contrôle? La sagesse de l’âge finira-t-elle par m’apporter ces réponses?

Chaque jour, il sommeille en moi… Il me fait terriblement peur, mais je ne peux m’empêcher de l’aimer. Chaque jour, je le défoule ; il en a besoin, sinon il surgit. Chaque jour, il me donne l’énergie de me surpasser. Je réalise que de plus en plus souvent, je suis capable de le laisser sortir quand je le décide, et sûrement qu’à ce moment-là, les gens autour pensent que je suis folle. Nous le sommes tous, non? Je lui donne un peu de liberté, et je le renferme en moi. Chaque soir, je le remercie de ne pas être sorti sans mon accord. Il sommeille… Il est mon essence et ma flamme. Je l’attise en essayant qu’il ne brûle pas. Chaque soir, je prie pour qu’il ne s’enflamme pas…

Si vous regardez mes yeux, de tout près, regardez bien… Vous verrez cette lumière intense qui s’embrase en moi. Il est là, puissant, fort et fier.

 

Elle se suicidait

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Depuis quelque temps, nous parlons beaucoup de maladies mentales. Quand j’étais enfant, j’aurais tellement aimé que l’on m’explique, qu’on arrête de me cacher la vérité et de me dire que tout allait bien. Car non, tout n’allait pas bien. Maman se suicidait…

Je me souviens de l’avoir trouvée si pâle, la respiration si rapide, les lèvres si bleues, les yeux si vides. Je me souviens d’avoir crié : «Maman! Maman!» Je me souviens de l’avoir secouée si fort.


─ Ma maman est morte.
J’avais sept ans.
Mon petit frère de quatre ans pleurait.
─ Ma maman est morte et je ne sais pas quoi faire.
La voix rassurante dans le téléphone me disait de ne pas m’en faire, que les secours étaient en route.
Quand ils sont arrivés, ils l’ont branchée à plein de fils. Puis ils l’ont emmenée.
Maman est partie.

Je me souviens de ce soir-là, quand mon père est venu m’embrasser.
─ Qu’est-ce qu’elle a, maman?
─ Elle est juste un peu fatiguée, ce n’est rien du tout, ça va aller.
Il a refermé la porte de ma chambre.
J’avais envie de hurler.
Ça ne va pas du tout! Menteur! Menteur! Maman veut mourir! Et ce n’est pas la première fois! Menteur!

Je me suis promis, ce soir-là, de ne plus jamais croire les grands. Jamais. Et je me suis promis de ne jamais mentir à mes enfants.
Car un enfant imagine le pire… Dans ma tête à moi, ma maman ne voulait plus vivre à cause de moi.

─ Je ne suis pas assez gentille. Je pense que je ne l’intéresse pas. Je ne suis pas assez bien pour que maman ait envie de vivre. Elle n’aime pas la vie avec moi.

Je me sentais abandonnée. Sans savoir poser des mots sur ces sentiments-là. J’ai grandi tout croche à cause de ces non-dits.
L’angoisse d’abandon ne m’a plus jamais quittée.

Ma maman souffrait d’une sévère dépression. Un sujet tabou. Alors. On n’en parlait pas. Alors, enfant, j’ai avancé avec ce vide. J’ai toujours pensé qu’elle pleurait par ma faute. J’ai longtemps eu une image de moi catastrophique.

La maladie mentale est terriblement difficile pour les proches (je sais combien mon papa s’est inquiété si souvent). Elle est dévastatrice pour les enfants.

J’ai eu longtemps très peu de compassion pour les gens qui tentaient de mettre fin à leur jour. Je les trouvais égoïstes. J’en ai longtemps voulu à ma maman.

Si quelqu’un, juste une personne, s’était assis à côté de moi et m’avait expliqué. Si on avait pris le temps de m’en parler, de parler… J’aurai eu de la peine, mais j’aurais compris. Que son mal-être était si grand et que je n’en étais aucunement responsable…

Parlez à vos enfants. Expliquez-leur. Pleurez avec eux s’il le faut. Mettez les vrais mots sur les maux. Soyez honnêtes. Ils en seront plus forts et plus sereins.

 

Eva Staire

L’angoisse, ce mal inutile

L'angoisse: ce sentiment qui n’est pas du tout réel, mais qui nou

L’angoisse: ce sentiment qui n’est pas du tout réel, mais qui nous fait peur à tous. C’est comme une sorte de manifestation profonde d’inquiétude. Cette grande anxiété qui monte au cerveau en quelques secondes, à son plus haut niveau, et qui nous inflige plein de situations des plus négatives. Nous ne captons plus tout à fait le moment présent, nos pensées sont transportées à un moment futur où toutes les possibilités nous sont projetées très rapidement. Cette peur qui nous envahit sans trop savoir pourquoi et qui nous enveloppe dans le noir.

La peur de tout. La peur de manquer d’argent, de voir nos petits tomber et se blesser avant même que ça se produise. La peur d’être malade ou de savoir qu’un proche est malade. La peur d’avoir peur, souvent.

Mais elle ne s’arrête pas là! L’angoisse nous guette et nous enveloppe. Elle dirige notre esprit comme si elle voulait que l’on perde le contrôle, qu’on ne sache plus quoi faire, quoi dire.

Ce qui peut impliquer par la suite plusieurs maux comme des serrements au niveau de l’estomac, des palpitations, la transpiration, des nausées, des évanouissements, des troubles du sommeil, des frissons, de la fatigue et même des pleurs.

Aussi, sans nous en rendre compte, nous transmettons cette angoisse à notre entourage, et plus sérieusement à nos enfants. Demandez-moi pas pourquoi, ils sont les premiers touchés par cet état de nervosité. Ils le ressentent du premier coup!

Que ce soit la peur, la maladie ou même la mort… il faut se concentrer sur soi et ne pas paniquer. L’angoisse ne devrait jamais prendre le contrôle sur nous et nous déséquilibrer mentalement.

Et combien de fois on a angoissé pour rien! Combien de fois on s’est dit à soi-même :

« Ahhh ! J’m’en faisais pour rien finalement! »

Alors c’est vraiment pas le moment d’une over-reaction!

Je me souviens des moments où j’ai passé trois nuits à m’en faire pour l’achat d’une nouvelle maison, les journées de soucis parce que mon petit-fils commençait la maternelle. La pilule contraceptive que j’avais oublié de prendre ou le manque d’argent pour des factures en souffrance. Il y a aussi la fois où mon conjoint a perdu sa job, que ma mère était transportée à l’hôpital ou tout simplement, quand mon chien saignait du nez sans raison. Seulement la pensée que je me faisais du souci pour tout et pour tout le monde… il y a bien fallu que je lâche prise à un moment donné et que je me calme un peu.

Alors il faut apprendre à contrôler sa pensée et ses émotions. C’est quelque chose qui commence par une très grande respiration. Ouais, aussi simple que ça! Se calmer… Respirer profondément et chasser toute cette nervosité qui monte à la surface pour nous sortir de notre réalité. Je ne dis pas qu’on s’énerve pour rien! Je dis que le fait de respirer nous fait voir plus clair et détruit ces arrière-pensées négatives.

Les mauvais jours, ça arrive à tout le monde. Mais cela ne sert vraiment à rien de s’énerver d’avance.

Si c’est pour arriver, ça va arriver de toute façon, on n’y peut rien… alors, pourquoi ne pas se calmer et prendre le taureau par les cornes avec toute sa tête et ses sens, quand le temps l’exigera.

Quant aux enfants, il est préférable de rester calme et d’avoir toutes ses idées claires pour pouvoir les rassurer. Ils comptent sur nous et nous devons montrer l’exemple et garder notre sang-froid.

N’oubliez jamais les gens autour de vous, qui vivent la même situation que vous. Il faut rester positif le plus possible et vivre le moment une minute à la fois.

Votre cœur vous en remerciera et votre entourage se sentira en confiance, dans un état positif où la foi vaincra l’angoisse. Croyez-moi, ce sont les moments où il y a plus que des bonnes nouvelles… Souvent, il se produit des miracles!

N’oubliez pas! Respirez un bon coup, calmez votre esprit de toutes ses peurs inutiles et concentrez-vous sur le moment présent. Donnez l’exemple aux gens que vous chérissez et si vraiment c’est grave, vous serez tout de même en contrôle pour passer à travers avec force et courage.

 

 

J’ai peur

J’ai déjà lu quelque part qu’on ne peut connaître véritablem

J’ai déjà lu quelque part qu’on ne peut connaître véritablement ce qu’est la peur… qu’une fois qu’on devient parent. C’est une des choses les plus tristement justes qu’il m’ait été donné de lire dans ma vie.

J’ai peur.

J’ai peur des ballons qui s’échappent dans la rue. Du conducteur possiblement ivre dans la voiture qui arrive dans la voie opposée. Des plaques de glace qui bousillent des vies.

J’ai peur de l’intimidation, dans chacune des formes qu’elle peut prendre.

J’ai peur des catastrophes naturelles. Des super bactéries résistantes aux antibiotiques.

J’ai peur des fous de dieux qui ne trouvent rien de mieux à faire que de décharger leur haine à grands coups d’arme automatique au milieu de foules terrorisées.

J’ai peur des grands maux soudains qui viennent te faucher en quelques semaines. Ou moins. Peur de ne plus être là. Peur qu’eux ne le soient plus.

J’ai peur des mégalomanes narcissiques qui ont les clés du monde dans une main et le bouton rouge de la prochaine Guerre mondiale dans l’autre.

J’ai peur des esprits dérangés qui pourraient poser leurs mains sales sur mon petit monde à moi. Qui pourraient m’enlever mes bébés pour toujours. Ou me les retourner, brisés à tout jamais.

J’ai peur de la culpabilité de ne rien avoir pu faire. Peur de la culpabilité de l’avoir fait, pour le pire.

Peur de ça, peur de bien plus encore.

J’ai peur de tout, tout le temps.

Mais je suis une maman.

Alors je lève la tête.

Je garde le menton haut et j’avance en me répétant que tout ira bien, même quand la peur vient me chatouiller le ventre de ses longs doigts glacés.

Pour que mes enfants grandissent, les yeux confiants.

Pour que chaque jour, ils voient le beau et fassent le bien.

Et pour que le monde fasse un peu moins peur quand ils seront à leur tour parents.

Mais certains jours, c’est plus facile à dire qu’à faire.

J’en ai bien peur.

Zabethe Boucher

Grandir

Texte de Mathilde Godde, 15 ans

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Texte de Mathilde Godde, 15 ans

 

L’eau martelait mon corps, ruisselait sur ma peau rougie et venait diluer l’encre de mes pensées noires. Brûlante, elle m’embuait l’esprit et s’évaporait contre les parois translucides de la douche. Assise sur le sol détrempé, les genoux repliés contre la poitrine, je fermai les yeux et laissais l’eau parcourir les plis de mon visage, creuser mes traits, adoucis par la chaleur de la pièce. J’entendais le piano jouer, les notes s’envoler et venir s’échouer sur mon cœur.

J’étais comme une enfant qui, repliée sur elle-même, se murait dans l’attente plutôt que d’affronter le monstre qu’est la vie. Une enfant qui refusait de grandir, car cela fait trop mal, car une fois qu’on a commencé, on ne peut revenir en arrière.

Lorsqu’on grandit, on aime. On s’affronte du regard jusqu’à se noyer dans les yeux de l’autre. On s’aime à en mourir, on s’aime trop, on se quitte, le cœur à vif, l’âme sanguinolente. On se brise, puis on tente de recoller les morceaux, mais chaque fois, on finit par tout balayer du revers de la main, les yeux bouffis de peine. Et on recommence.

Lorsqu’on grandit, on recommence. Encore et encore. On tombe et on s’accroche à la première main tendue pour se relever, cette même main qui nous avait poussés hier et qui tentera de nous achever demain. On voudrait apprendre de nos erreurs sur lesquelles on gît, mais on oublie trop vite.

Lorsqu’on grandit, on oublie. On promet, on ne tarde pas à ne plus se rappeler et on déçoit. Alors, on est déçu à notre tour, on pardonne, mais on n’oublie point. On joue au jeu de la vie. On joue pour gagner et la défaite nous lasse vite, mais comme pour tout, il suffit de persister pour réussir un jour.

Lorsqu’on grandit, on n’a pas peur. On frôle les dangers, on les laisse nous enivrer. On laisse les mensonges caresser nos lèvres et se répandre dans nos mots. On ne distingue plus le bien du mal, le vrai du faux. On se perd et on tente en vain de se retrouver.

Grandir, c’est mourir un peu, mais c’est aussi vivre plus.

 

Ma peau était toute froissée désormais, ravagée par ces longues minutes passées sous l’eau brûlante. Mes lèvres me faisaient mal, tant elles étaient gorgées d’eau et je sentais mes muscles endoloris. Je tendis la main pour fermer le robinet et entrepris de me relever, la tête haute, le menton en l’air.

 

Peut-être n’est-ce que cela, grandir ?

Être capable de se relever et plonger tête première dans ce qui nous fait peur.

La peur, cette mauvaise conseillère…

Du plus loin que je me souvienne, <span style="color: #80008

Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours voulu être parfaite. Fille modèle, amie merveilleuse, élève brillante, petite sœur gentille, amoureuse de rêve…ça toujours été MOI !! Vient alors un moment où je suis confrontée à une situation qui me sort de ma zone de confort et BANG ! La peur s’est invitée en moi et elle n’est plus jamais repartie…

Elle s’installe tout en douceur, tu la crois bonne pour toi. Lorsqu’on te propose une activité que tu ne connais pas, dans laquelle tu risques de ne pas performer et de te sentir “pas bonne”. La peur te conseille de refuser poliment et de proposer une activité dans laquelle tu es sûre de bien paraître. Tu l’écoutes et ça fonctionne…tu es encore une super amie et en plus tu es la meilleure!! La peur t’empêche de vivre des échecs et préserve du même coup ton image de perfection. Alors à chaque fois qu’une nouvelle opportunité s’offre à toi, tu trouves une excuse et tu te faufiles. N’est-ce pas une façon de faire tout simplement merveilleuse??

Peut-être pas tant que ça finalement, mais je m’en suis rendue compte ben ben tard. J’ai passé mon enfance, mon adolescence et ma vie d’adulte à écouter et à nourrir mes peurs. Je suis restée dans le chemin qu’elles me dictaient. La vie est une question de choix; les miens servaient à m’éviter les difficultés et les conflits. J’ai donc fait que des activités, des jeux et des études pour lesquelles j’avais la conviction que j’excellerais. Vous me direz : « Il y a pire que ça dans la vie. De quoi tu te plains? » À vous, je réponds : « Vous avez parfaitement raison! » Oui, beaucoup de gens vivent des situations VRAIMENT plus difficiles que les miennes. Par contre, je sais que plusieurs personnes peuvent se reconnaître dans mon histoire et juste pour cela elle vaut la peine d’être racontée.

J’étais paralysée par mes peurs

 La peur d’échouer, la peur de me tromper, la peur de faire rire de moi, la peur de ne pas être bonne et la peur de ne pas être aimée. Elles dirigeaient complètement ma vie. J’étais incapable de prendre des décisions (tsé je suis balance en +), d’essayer des nouvelles choses ni d’exprimer mes opinions, mes sentiments, mes besoins et mes désirs. J’ai donc grandit en étant incapable de commander au resto, de téléphoner pour des rdv, de décider ce que j’aimerais faire, de dire non, etc. Je pourrais énumérer bien d’autres exemples mais ce n’est pas nécessaire, je suis sûre que vous comprenez très bien quelle genre de personne j’étais. J’utilisais le «miroir» abusivement dès que je devais prendre une décision : «Toi, tu as le goût de faire quoi? Tu veux faire quoi? Qu’est-ce qui te ferait plaisir?»

Quand j’étais plus jeune (disons jusqu’à 20 ans) je ne souffrais pas encore de ce mode de vie. Une brique à la fois, j’ai construit un muret puis un mur pour me protéger de mes peurs. J’étais persuadée que tout allait bien, que je deviendrais une femme épanouie (ha mon Dieu que j’étais dans les patates !!!). Lors de mes études universitaires en toxicomanies, intervention jeunesse et psychologie, j’ai fait beaucoup de travaux qui m’ont amené à réfléchir sur moi. C’est là que j’ai frappé un mur, tsé celui-là même que j’avais construit. J’ai réalisé que j’avais fait fausse route toutes ces années. Mes peurs ne m’avaient pas protégée, elles m’avaient plutôt tranquillement éloigné de MON chemin. Je me suis retrouvée complètement déconnectée de MOI.

J’étais dans la vingtaine et je n’avais aucune idée de qui j’étais.

Zéro, niet, nada…

Vient alors le sentiment de culpabilité. Des phrases comme «J’ai scrapé ma vie ! Je suis ben conne!» sont arrivées dans ma tête en quantité industrielle. Pas besoin de vous dire que j’avais l’estime de soi à -10000000. Ce qui me choquait le plus c’est que j’avais en stock tous les outils pour corriger la situation (faut ben que ça servent ces belles études-là) mais que j’étais incapable de m’en servir. Je me suis rabaissée 2x fois plus pendant presque 20 ans. Cordonnier mal chaussé. Fais ce que je dis, pas ce que je fais.

Depuis les dernières années, je travaille très fort pour démolir mon mur de brique (un merci spécial à mon amoureux qui me botte le cul). Ce n’est pas facile, parfois je remets des briques. Je réalise que je n’ai jamais eu confiance en moi, je n’ai jamais cru en mon potentiel et c’est pour ça que j’ai laissé les peurs prendre le contrôle. Moi, la fille qui aime tout le monde, je me suis aperçue que la seule personne que je n’ai jamais aimée ni respectée ben c’est moi… Ouf ça fesse de le verbaliser !!!

Dernièrement, j’essaie de retrouver mon chemin, mon essence, ma couleur. Je m’autorise à avoir des projets et à croire que ceux-ci peuvent se réaliser. Cette nouvelle façon de penser et de faire est ultra angoissante mais je sais que c’est le chemin de la guérison pour moi. Alors préparez-vous, j’ai la tête pleine d’idées (sacré TDAH) et j’ai l’intention d’aller au bout de mes rêves J

Mes peurs étaient de bien mauvaises conseillères…je les emmerde !!

Mymi xxx

La peur qui m’a empêchée de conduire pendant 13 ans

Lorsque j’étais petite, j’ai été victime d’un accident impl

Lorsque j’étais petite, j’ai été victime d’un accident impliquant un homme, quelques bouteilles et une voiture. S’en sont suivies de bonnes blessures, dont je vous épargnerai les détails scabreux.

Chez moi, mes parents ne conduisaient pas. Du coup, durant mon enfance, je n’ai pas pris place bien souvent dans une voiture. Rendue adulte, j’ai voyagé parfois comme passagère. Mais je dois vous l’avouer, j’étais morte de trouille à chaque fois! Pire, le traumatisme le plus profond de mon accident aura été une peur panique, quasi viscérale, de conduire à mon tour.

En 2003, j’ai pris mon courage à deux mains, je suis allée faire mon examen théorique et je l’ai réussi du premier coup.

Oui, je suis suffisamment vieille pour avoir eu la « chance » de ne pas devoir suivre de cours « obligatoires » comme c’est le cas aujourd’hui…

Par la suite, chaque année, je renouvelais mon permis « d’apprenti ».  Je devais prendre mon temps, j’avais peur.  Cela aura duré treize ans!

Treize années où j’ai été incapable de conduire. Je savais le faire, mais mon corps entier se braquait. J’avais soudainement le Nil qui coulait dans mon dos!  Les dents me grinçaient et le cou me barrait! J’avais tellement peur! Les jointures blanchies à serrer le volant si fort. J’étais incapable de détacher ne serait-ce que mon petit doigt pour mettre mon clignotant!  Mon corps entier me disait qu’il était terrifié et tétanisé!

Durant ces treize années, je suis devenue mère, trois fois.  Comblée.  Mon époux étant sur la route, être piétonne n’était pas toujours aisé.  Alors, j’essayais de passer par-dessus mon traumatisme, sans succès.

Un jour, mon fils ainé m’a demandé pourquoi je ne conduisais pas. Je lui ai raconté. Il m’a écouté, empathique, comme il sait si bien l’être.  Il m’a même fait un gros câlin! Puis, me regardant droit dans les yeux, il me lança :

– Maman, tu as peur. Mais tu nous dis toujours qu’on doit passer par-dessus nos peurs! Pourquoi tu ne le fais pas ?

Dans ses yeux bleus, l’interrogation était complète et il avait bien raison! Alors, je lui ai répondu tout bonnement :

– Tu as raison mon chaton, on peut toujours combattre nos peurs, alors je vais conduire! Ça va me prendre du temps, mais je vais le faire! Je te le promets!

À partir de là,  je me suis forcée à conduire. Chaque fois que je prenais le volant, mon époux à mes côtés, les enfants restaient calmes. Puis, de temps en temps, une des trois petites voix chuchotait: « Bravo maman té bonne! »

À quelques reprises, en arrivant à destination, je suis sortie de la voiture, en laissant mon homme s’occuper des enfants, me sauvant toute tremblante. Je me sauvais pour pleurer. J’avais si peur! Chaque fois,  je revenais et mes trois amours m’entouraient de leurs beaux mots. Les mêmes mots que je leur répétais depuis leur naissance: « Bravo, je suis fière de toi, continue!  N’abandonne pas! »

Le 25 juillet dernier, je l’ai fait! Après treize ans et bien des pleurs, JE L’AI FAIT !  Mes enfants m’ont aidée, plus que quiconque, à passer cette peur. Aujourd’hui, je conduis, encore nerveuse, mais en contrôle.

Ce matin, mes deux ainés étaient à l’école. Nous étions, mon plus jeune et moi, en route pour faire quelques achats. Tout en conduisant, j’ai appuyé sur le bouton de la radio. Cela n’a l’air de rien, mais je n’ai jamais réussi à conduire avec la radio ouverte! Une seconde plus tard, mon petit homme de quatre ans me lance tout bonnement :

– Hey maman, tu as ton permis de radio ?!?

– Bha oui chéri d’amour, maman continue sa route.

Je n’arrive pas encore à sortir de ma ville, mais ça viendra…  Promis !

Avoir confiance en soi, plus facile à dire qu’à faire

        [embed]https://youtu.be/a0ugwQCKQeQ[/embed] Est-ce que de

 

 

 

 

Est-ce que devenir une mère nous change complètement ? C’est une question que je me suis posée aujourd’hui au rayon des cosmétiques. Je regardais ce beau rouge à lèvres d’un rouge éclatant, vous savez style Marilyn Monroe. Et c’est à ce moment que je me suis dit: ‹‹ Ouin, mais c’est trop “flash” pour une maman ››.
J’ai aussi réalisé que la mode était devenue, pour moi, une espèce de hantise… La hantise du regard des gens et de leur vision de cette mère délurée qu’on remarque par son allure trop bien arrangée.
Depuis que j’ai des enfants, je ne prends plus le temps de me sentir belle pour moi. Je m’étire les cheveux, je mets un peu de cache-cernes, un eye liner et du mascara. Point.
Rien de flash, parce que j’ai peur d’être jugée.
Et ce n’est nullement la faute de mes enfants. Ils ne jouent aucun rôle dans cette manière de me sentir qui, je le réalise, est totalement idiote… mais tout de même présente.
Suis-je la seule à avoir changé depuis que je suis maman ? Pas à cause de mes enfants, mais par peur du regard des autres ?
À vous toutes mamans fashions qui êtes restées femme, en assumant votre côté “séduisante”, eh bien bravo!
Mais dites-moi: ‹‹ Comment faites-vous ? ››

 

Les cours “prépapa” : le cri du coeur d’un papa 2.0

Laissez-moi vous raconter mon premier cours prépapa. Comme L’héritier a maintenant cinq ans, c

Laissez-moi vous raconter mon premier cours prépapa. Comme L’héritier a maintenant cinq ans, c’était il y a… laissez-moi calculer… cinq ans. Moi, futur père de famille, angoissé de ce nouveau rôle, ne sachant pas du tout c’que ça implique et n’ayant jamais pris un bébé dans mes bras de toute mon existence… me v’là dans un cours prépapa pour me faire expliquer la vie. En fait, SA vie; celle du p’tit qui s’en vient. J’avais besoin d’être rassuré et « coaché ».

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, mon plus gros choc n’a pas été lorsqu’on m’a parlé de tous les fluides impliqués dans un accouchement ni quand j’ai réalisé que l’idée de couper le cordon moi-même me levait le cœur; le moment où j’ai vraiment avalé ma gomme, c’est au moment où la madame du CLSC qui se prenait pour une monitrice de camp de vacances a séparé les gars des filles. J’avais déjà l’impression de m’en aller dans une thérapie de groupe, pas besoin d’en rajouter. Je venais de perdre tous mes repères… qui m’aidaient à repérer que bien peu de choses.

À partir du moment où l’on se retrouve entre gars, je remarque que ceux qui s’adressent à nous le font plus len-te-ment et utilisant des mots sim-ples pour ne pas dire sim-plets. Et tout d’un coup, c’est l’apothéose : on nous parle avec des termes de sports (!). J’avais l’impression d’avoir Michel Bergeron dans’ face. « Toi pis ta blonde vous formez une équipe et là, c’est vos séries éliminatoires. » « Si vous voulez gagner la coupe, faut travailler ensemble pis suivre le plan de match ».

Ce que j’ai éprouvé est dur à expliquer; un hybride entre la peur et l’euphorie. D’un côté, j’comprenais pas c’qui m’arrivait et de l’autre, j’pouvais pas croire qu’aucun de mes amis ne vivait ça avec moi. C’était complètement absurde. Un peu plus pis on nous fournissait un « cass’ » qui tient deux canettes de bière reliées à notre bouche par de longues pailles.

C’est à ce moment-là qu’on nous a demandé de parler au groupe de nos craintes, nos peurs par rapport à la paternité. C’est quand on pense avoir tout entendu que le vrai contenu arrive. « Moi, y’est pas question que je me lève la nuit. » « Moi, non plus; qu’à s’en occupe, moi j’travaille. » J’en croyais pas mes oreilles, mais en même temps, ça me rassurait beaucoup sur ma condition; L’héritier est bien tombé. Quand on compare, on se console. Et dans ce cas-ci, j’pourrais dire : quand on se compare, on s’isole. Parce que j’avais pus le goût de participer; j’me suis refermé comme un coquillage qui se fait tâter la palourde.

L’intervenant a alors pris la parole pour nous enfoncer encore plus dans l’irréel en nous expliquant (lentement et dans un langage de professeur de maternelle) que notre blonde allait avoir une montée d’hormones qui allait venir « fucker » un peu son système. « Les gars, ça va être très important de comprendre votre coéquipière et d’être plus patient avec elle pour pas faire de gaffe sur le terrain, pour pas la bousculer. Si vous sentez que la pression monte trop, allez prendre une longue marche dehors pour laisser retomber la poussière et éviter de faire une niaiserie » J’avais l’impression de me retrouver en pleine intervention dans un groupe d’hommes agressifs. J’étais autant à ma place qu’un fédéraliste à la St-Jean-Baptiste.

Heureusement pour moi, mon clavaire s’est terminé et j’ai retrouvé L’amoureuse pour la suite du cours. On allait enfin parler des vraies choses; j’allais apprendre et être rassuré. Ben croyez-le ou non, nous avons très rapidement passé par-dessus tout ce qui est accouchement, allaitement… pour se rendre à l’essentiel : comment donner le bain et comment fabriquer soi-même des jouets à son bébé à l’aide de quelques accessoires que nous avons déjà tous à la maison. On aurait dit une vieille chronique des saisons de Clodine…

J’ai longuement réfléchi après cette première séance qui fut la seule, soit dit en passant- parce que, comme vous à la lecture ceci, j’ai trouvé ça absurde, ridicule et autres synonymes. J’étais fâché d’avoir perdu mon temps comme ça. Le cours prépapa qu’on m’avait promis ne m’avait pas été livré. J’avais absolument rien appris d’utile.

Et puis, j’ai eu peur. Peur parce que si on nous a expliqué comment fabriquer des mobiles avec des cintres en métal pis des bas, c’est clairement que la misère est plus présente que je pensais. Et y’en a donc pour qui ces trucs se sont avérés très utiles. Et j’ai eu peur pour une autre raison tout aussi préoccupante : si le CLSC d’Hochelaga-Maisonneuve a senti la nécessité de s’adresser aux gars en choisissant des termes sportifs pour qu’ils saisissent l’importance de contrôler leur pulsion, de s’occuper davantage de leur blonde et d’être plus compréhensifs… c’est probablement parce qu’il y en a qui ont besoin de se faire dire ça dans des mots simples, des hommes qui sont encore des Ovila Pronovost dans l’âme. Triste constat.

On pense qu’on est rendu au Papa 2.0, mais le sommes-nous tous? Si oui, qu’est-ce qui explique que plusieurs gars ont peur de prendre leur bébé de peur de lui faire mal et vont attendre qu’il ait au moins deux ans pour véritablement jouer avec? Si oui, qu’est-ce qui explique que c’est rarement des mères qui oublient leur enfant dans l’char? Si oui, qu’est-ce qui explique que certains papas de ma génération me voient comme un demi-Dieu pour m’être occupé seul pendant douze jours de L’héritier quand il avait deux ans afin de permettre à L’amoureuse d’accepter un contrat loin de la maison? Pourtant, j’ai rien accompli de spécial; j’ai juste été un papa.

À tous ceux qui se considèrent 2.0, soyez fiers de l’être, expliquez aux autres ce que c’est, racontez-leur vos bonheurs, vos craintes, vos réussites. Plus on va en parler, plus on va en faire la promotion, plus les hommes vont s’impliquer et plus les enfants vont en bénéficier. À ceux qui se considèrent de la première génération, ben embarquez dans le mouvement avec nous. C’est plus excitant d’embarquer à bord du bateau plutôt que de rester sur le quai. Laissez tomber vos vieux principes et vos vieilles mentalités. Vous allez voir; c’est pas toujours facile, ça nous remet souvent en question, mais nous sortons de ça de meilleures personnes, un meilleur chum, un meilleur papa. Pis c’est en faisant ça, les boys, qu’on va gagner la coupe! Na-na-na-na, na-na-na-na, hey-hey-hey, goodbye!

Je vais être père et je freak

Un soir, alors que je venais à peine d’avoir 24 ans,

Un soir, alors que je venais à peine d’avoir 24 ans, ma blonde m’a réveillé à 3h du matin pour m’annoncer la plus grande des nouvelles: “Tu vas être père!”.

Comme un peu tout le monde, j’aurais aimé réagir en chanson avec un numéro digne de Glee, puis passer tout le reste de la nuit à préparer la chambre du petit en construisant moi-même les meubles avec du bois éco-responsable. Ce que j’ai appris à ce moment-là, c’est que la réalité n’est pas toujours aussi cute que dans les films de Disney.

J’allais être père. Ma réaction ?

Je crois avoir marmonné un “merci” pis un “on verra ça demain ok?”. Non non, n’applaudissez pas tout de suite! Je sais ce que vous pensez: “Il est génial cet homme”, “où puis-je trouver un père comme lui pour mon enfant?”. Get in line ! 😉

Un mois ou deux plus tard, on allait rejoindre des amis pour souper. Nous avions un plan secret de leur annoncer la nouvelle. Quand est venu le moment de sortir de l’auto, rien. Je suis resté figé. Ma blonde a questionné mon immobilisme et j’ai répondu en balbutiant quelque chose comme: “… merfiterm derf…”. J’étais complètement paralysé et incapable de parler. Ma blonde croyait y reconnaître mon humour parfois douteux et me rappella qu’on était en retard. J’avais la tête qui spinnait, le coeur qui voulait me sortir de la poitrine et la gorge grosse comme une aiguille. En me regardant, elle finit par comprendre.

Nous étions déjà un couple depuis 5 ans et moi ben, j’étais moi depuis 24 ans. Mais ni elle ni moi n’avions eu à faire à ce genre de réaction de ma part. Grâce aux effets de l’alcool ce soir-là, la soirée s’est quand même bien déroulée.

En rétrospective, je me rends compte que l’angoisse ne m’a jamais vraiment quitté pendant toute la grossesse. Une sorte d’anxiété étrange, latente et omniprésente. Un feeling que je n’avais jamais connu auparavant. À la naissance de mon fils, lorsque je l’ai tenu pour la première fois, mes genoux ont flanché et la pièce s’est mise à tourner. Cette fois, ce n’était pas la peur (ni l’alcool haha). C’est là que j’ai compris, ça venait de me frapper comme une tonne de brique… j’étais devenu père.

Vous vous demandez pourquoi je vous raconte tout ça? Parce que quand ça m’est arrivé, j’aurais vraiment aimé entendre une voix honnête, pas celle d’une hippie idéaliste qui écrit des livres sur les merveilles d’être parent. Une voix qui m’aurait dit que c’est correct et normal de freaker un peu, car c’est cette peur qui va t’aider à devenir un meilleur père.

Un amour sans limite

On dit que le battement d'un papillon au Brésil peut provoquer une tornade au Texas, qu'un engrenag

On dit que le battement d’un papillon au Brésil peut provoquer une tornade au Texas, qu’un engrenage subtil d’infimes causes entraîne d’incroyables conséquences. J’ai parfois l’impression qu’il m’a fallu traverser un Univers de noir, de gris et de triste, pour pouvoir enfin vous serrer contre moi, et que si je n’étais pas tombée enceinte à 17 ans, je ne serais pas en train d’écrire ces mots, le dos appuyé sur votre bassinette. Je me souviens avoir lu voilà de cela quelques années, un article sur l’instinct maternel. L’auteur tentait d’y démontrer que l’instinct maternel n’existe pas, puisqu’une femme qui ne veut pas d’enfant sera incapable d’aimer le sien, tandis qu’une femme qui veut un enfant à tout prix, aimera n’importe quel enfant comme si c’était le sien. Je me souviens m’être interrogée, et en avoir conclu que ce que l’auteur tentait de dire, était que l’instinct maternel n’était pas en fait un lien exclusif entre une femme et son enfant biologique. Si je n’étais pas tombée enceinte à 17 ans, Mika n’aurait pas comblé une famille, qui attendait depuis 15 ans, de bonheur. 15 ans. C’est la différence d’âge qu’il y a entre vous et votre frère ainé. J’aurai donc moi aussi attendu durant 15 longues années avant de vous serrer contre moi. Le battement d’aile du papillon, ça devait être la naissance de votre frère, qui m’a conduite dans une dépression profonde dont je ne pensais jamais me sortir. Des années à me répéter que j’avais fait le bon choix, que je n’étais pas une mère horrible et qu’il est heureux. Des années, c’est long. C’est long et c’est lourd de conséquences, la lourdeur.
Vous savez moi, j’ai toujours voulu une grosse famille, avec une table désordonnée et pleine d’enfants qui sourient et qui crient. J’ai toujours eu ça en moi, cet appel incessant, ce vide à combler que rien ni personne n’arrivait à remplir. Quelques temps après la naissance de votre grand frère, je suis tombée amoureuse du mauvais garçon et puis, je vous passe les détails, je me suis retrouvée dans le bureau du médecin, à me faire gronder comme une fillette de 4 ans parce que j’aurais dû prendre mes précautions, et que le dommage que la ITS avait fait, avait des chances de me rendre stérile. J’ai eu beau prier, crier, souhaiter, supplier, c’était déjà trop tard. Lorsque votre papa et moi avons entrepris le long chemin qui nous a mené jusqu’à vous, il nous fallait inéluctablement passer par la fécondation In Vitro. L’endométriose s’en est mêlé, puis la trompe qui a survécu à l’opération que j’ai du subir il y a de cela 6 ans pour soulager mon mal, s’est retrouvée entremêlée comme prise dans une toile d’araignée géante qui me pourrit les entrailles. Lorsque le médecin nous a dit qu’il nous faudrait probablement plus d’un essais, et nous a demandé si nous avions considéré l’adoption, je suis sortie du bureau en larmes. Jamais, je n’avais même une seconde imaginé adopter. Je voulais sentir en moi un être grandir, lui parler, l’apprivoiser, l’aimer durant 9 mois. Je voulais pousser avec toute la force que j’ai pour le sortir de moi et l’accueillir à bras ouvert. Je voulais qu’il ressemble à mon amoureux, je voulais que mon sang coule dans ses veines. Je me répétais que je n’étais femme qu’en surface et qu’à l’intérieur, j’étais creuse, vide et incapable. Puis, je ne savais pas du tout comment j’allais faire pour expliquer à Mika pourquoi je n’avais pas été en mesure de le garder près de moi, alors que j’avais choisi un enfant que je n’avais pas mis au monde pour accompagner mes journées. J’avais l’impression dans mon cœur, qu’il verrait ça comme un acte de trahison, en plus de l’abandon. Les mois qui ont suivi ont été difficiles pour nous. ‘Essayer’ de faire un bébé, ça sonne toujours bien, sauf lorsque l’on sait que nos efforts seront vains. On a tout essayé. Les jambes en l’air, l’acupuncture, les suppléments, le régime. Rien. Toujours vide.

Puis, le papillon a battu des ailes à nouveau. La sœur d’une amie était enceinte, de jumeaux. La sœur d’une amie avait des problèmes de drogues dures et était sans domicile fixe. La sœur d’une amie allait confier ses enfants en adoption. La sœur d’une amie allait accoucher deux mois plus tard. En confiant ce drame à votre père, parce que tout ce qui touche de près ou de loin l’adoption me bouleverse énormément, je me suis entendue lui dire ‘veux-tu qu’on les adopte’? Je me souviens du regard qu’il a posé sur moi. Amoureux, attendri, comme s’il était soulagé que je le propose avant lui. Il a dit oui d’un seul souffle. Positif, excité. Puis tout a été très vite. Lorsqu’on lui a offert de vous accueillir, de vous adopter, de vous aimer, elle aussi elle a dit oui toute suite. J’avais tellement peur ! Peur de ne pas être capable de ressentir la même chose que ce que j’avais ressenti pour Mika, peur de ne pas être prête, peur de perdre à jamais l’amour que mon fils aîné aurait pu avoir pour moi. Peur de le décevoir. Peur de tout. Peur dans mon cœur et dans mon âme, dans chaque recoin de tout mon être, peur. Et puis, comme une tornade au Texas, vous êtes arrivés deux mois plus tôt que prévu, avec tambours et trompettes et puis, toute la peur, l’appréhension, l’anxiété a fait place à un amour si grand et si inconditionnel que j’ai pleuré pendant toute votre première semaine de vie. Lorsqu’après 6 jours en incubateur, le personnel infirmier m’a demandé de m’assoir dans un des gros fauteuil d’allaitement et qu’ils m’ont dit qu’ils allaient vous déposer contre ma poitrine, mon cœur s’est mis à battre très fort et la tête s’est mise à me tourner. Je répétais dans ma tête ‘faites qu’ils m’aiment, faites qu’ils m’aiment’.
Comme un beau grand rêve doux, on vous a déposé ensemble sur ma poitrine dénudée et vos yeux se sont agrippés aux miens. J’ai caressé votre tête le plus doucement possible, du bout des doigts, pour ne pas vous faire de mal. J’ai touché vos mains et caressé votre dos durant deux heures. Vous m’avez apporté plus de bonheur durant ces deux heures que n’importe qui avant vous. Toute ma vie. Toute ma vie je vous ai portés dans mon cœur. Une longue grossesse, une grossesse difficile mais qui m’a menée jusqu’à vous. J’ai compté et recompté vos doigts et vos orteils, émerveillée. Toutes les infirmières pleuraient, nous disaient félicitations. Votre père a pris place dans le grand fauteuil à mes côtés et il vous a promis la lune. Il vous aimait déjà, lui aussi. Il disait ‘mes garçons’ avant même votre naissance et a appris le refrain du” Petit bonheur ” de Félix Leclerc, en français, juste pour pouvoir vous le chanter. Ce jour là, j’ai décidé que je ne pouvais pas laisser ma peur de décevoir Mika me guider. J’ai trois enfants. Trois beaux grands garçons et puis, vous êtes des frères. J’ai compris ce jour là, que mes vœux avaient été exaucés à travers votre adoption, et que j’étais la seule qui ne le voyait pas. Vous allez ressembler à votre père, parce qu’il vous aime, parce qu’il prend soin de vous et parce que vous avez déjà son caractère de cochon. Je vous ai portés. Je vous ai portés de par mon désir de vous toucher, de vous voir, de sentir votre odeur. Je vous ai portés longtemps, mes garçons. Je vous ai portés dans la manière que j’ai de toujours vouloir être près des enfants, peu importe ou on va. Je vous ai portés chaque fois que j’ai regardé les vêtements pour enfants, dans les grands magasins. Je vous ai portés en achetant une maison avec cinq chambres, bien avant votre venue. Je vous ai portés et mes proches le savaient, que je vous portais dans mon cœur et dans ma tête, et c’est pour ça que votre tante m’a parlé de vous, parce qu’elle savait que nous étions fait pour être ensemble.

Le soir, lorsque je vous lis votre histoire, je pense à tout le chemin que nous avons dû faire pour nous trouver et je me surprends à sourire, en vous voyant tomber endormis blottis l’un contre l’autre dans mes bras. Je n’aurais jamais pu être plus heureuse qu’avec vous, jamais, et je ne peux imaginer mon existence sans vos yeux accrochés aux miens et vos mains dans les miennes. Je vous aime d’un amour profond, pur et sans secret. Je vous aime de la même façon que j’aime votre frère, avec les mêmes mots et sur le même ton. Je vous aime comme une mère aime ses enfants et toute ma vie, je vous dirai merci lorsque vous vous endormez contre moi. Merci, de nous avoir fait confiance. Merci, de vous être accrochés. Merci, de nous avoir choisis.