Tag syndrome de stress post-traumatique

Bienvenue dans mon monde

Le début de cette pandémie nous a causé bien des soucis à tous. Certain

Le début de cette pandémie nous a causé bien des soucis à tous. Certains ont même développé de l’anxiété. Beaucoup de gens vivent du stress face au côté financier. Des séparations s’ensuivent, car ce mode de vie exige une adaptation et un contrôle de ses émotions. Les situations problématiques vécues par les gens sont nombreuses.

J’ai dû m’adapter moi aussi. Étant habitué de rester seul à la maison la semaine et de prendre soin de moi tout seul, je devais m’oublier un peu. Mes enfants étaient là et ils ne pouvaient pas passer leur journée devant les écrans. Ma femme fait du télétravail et elle fait sa part aussi. Entendre du bruit et des cris tous les jours est une grosse adaptation aussi pour mon TSPT. Cela a été très dur pour ma femme et moi, et j’ai dû faire d’énormes sacrifices. Mais c’est un combat de tous les jours et j’essaie de m’améliorer.

Quand je devais sortir, j’étais anxieux d’attraper ce virus à cause de tout ce que je voyais à la télévision. J’avais des symptômes physiques graves pendant les trois premières semaines… Normalement, je regarde très rarement les nouvelles car il y a beaucoup de négatif. Souffrant d’un TSPT sévère et de beaucoup d’anxiété, j’ai grandement diminué le nombre de fois où je consultais les nouvelles. Et cela m’aide beaucoup maintenant.

Un autre facteur de stress était que je me demandais qui allait s’occuper de ma petite famille si je tombais malade. Ma femme est immunosupprimée, ce qui veut dire que présentement, je suis le seul qui fait les courses. Aussi, ma chienne d’assistance Théra n’a pas eu de rendez-vous depuis deux mois maintenant. Normalement, elle se fait belle toutes les quatre semaines. Je ne peux pas lui couper ses griffes moi‑même, car je ne vois pas la petite veine à travers ses griffes noires. N’oubliez pas qu’elle est très importante pour moi. Ce n’est pas seulement un animal de compagnie.

Malgré tout, je me suis adapté quand même assez vite. Comme un militaire qui va à l’étranger pendant six mois dans un pays souvent apocalyptique. Sorties au restaurant, cinéma, magasinage, journée à la plage, etc. : ça n’existe pas. Sur un camp, on mange, on dort, on travaille, on s’entraîne et on patrouille. On ne sait jamais si on va revenir vivant dans notre beau pays. Quelques minutes de téléphones sont permises par semaine pour communiquer avec nos proches. Quand même, notre situation de confinement présentement n’est pas si pire !

Est‑ce que j’ai acheté beaucoup d’épicerie ? Non, seulement un petit peu plus que d’habitude, graduellement, pour éviter d’y aller trop souvent. Nous, les militaires, sommes habitués à avoir une liste d’équipement pour nos bagages afin d’avoir un peu de tout. Donc je me suis assuré que ma famille puisse avoir un peu de tout, sans exagérer. Mon expérience militaire me disait que les supermarchés ne pourraient pas fermer.

Pour moi, sortir pour l’essentiel est déjà une réalité depuis un bon bout de temps. Normalement, je sors de la maison seulement pour faire mes courses. La plupart des activités avec les enfants sont effectuées avec ma femme. Donc pour mon mode de vie, rien n’a changé. C’est pour cela que je vous dis : Bienvenue dans mon monde.

Oui, j’aimerais bien souvent aller voir des groupes rock que j’ai aimés pendant ma jeunesse. J’aimerais faire beaucoup de choses, mais les foules et le bruit, pour moi, c’est impossible.

Étrange à dire mais maintenant, je me sens mieux dans cette situation. Les supermarchés sont presque déserts. Une discipline rigoureuse est établie, ce qui vient me rejoindre face à mon expérience militaire. Les gens ont peur et ont probablement plus peur que moi. Donc ils gardent leurs distances. Bien sûr, je choisis les endroits où la plus grande discipline est respectée, peu importe le prix des aliments qui y sont vendus. Je me sens bien dans un supermarché presque désert. Je n’ai pas de flash-back. Je commence à me sentir plus en sécurité alors que d’autres vivent de l’insécurité. Je dois vous avouer que je privilégie la livraison à domicile autant que possible et l’achat local.

Je vois l’anxiété sur le visage des gens. Après tout, je suis devenu un expert dans ce domaine. Depuis deux ans que je consulte et que j’observe mes signes afin d’avoir des outils pour ma blessure. Quand quelqu’un est anxieux, ça devient plus facile pour moi de le découvrir.

Je me sens bien chez moi et je préfère ne pas sortir depuis presque deux ans maintenant. Il faut seulement du temps d’adaptation avec ceux qui ne peuvent pas vivre ainsi. Mais pour moi, c’était déjà ma façon de survivre.

Alors je vous souhaite la meilleure des chances, soyez disciplinés et restez chez vous autant que possible.

Carl Audet

En grandissant, tu comprendras, mon garçon

C’était le début des vacances des fêtes avec les enfants et ma

C’était le début des vacances des fêtes avec les enfants et ma femme. Enfin, fini le stress du matin! Je m’étais dit que nous pourrions respirer un peu pour quelques semaines.

Mon fils de six ans voulait aller dans une boutique pour acheter un objet bien précis avec les sous qu’il avait économisés. Je me suis dit : pourquoi pas? De toute façon, j’avais une petite course à faire.

Arrivé au centre commercial, j’étais étonné de voir autant de voitures dans le stationnement. Ah oui, c’est vrai, j’avais oublié, nous étions le samedi 21 décembre… Mais je me suis rassuré du fait que maintenant, je pouvais faire mon épicerie la fin de semaine. En plus, je n’ai pas eu de sensation de tirage dans le côté droit de mon visage depuis quelques mois. J’étais totalement confiant en moi.

Arrivé dans le centre commercial, il y en avait des gens! Il y en avait du bruit! La première boutique, c’était l’enfer. J’avais de la misère à passer avec mon chien d’assistance.

Mon fils avait trouvé ce qu’il cherchait, alors direction la caisse pour payer.

Maintenant, nous devions aller dans une autre boutique. Il voulait acheter un cadeau de Noël pour sa grande sœur. Est-ce que ça me tentait? Non pas du tout, mais je l’ai fait pour lui malgré la difficulté qui grandissait en moi.

Quand on est arrivés à la boutique, mon champ de vision était déjà réduit depuis quelques minutes. J’avais de la misère à avoir une bonne respiration. La chaleur se faisait ressentir. J’essayais d’aider mon fils à trouver un cadeau malgré ma vision brouillée.

Nous étions dans la file d’attente pour payer. Un gentil monsieur est venu me trouver pour me faire passer à une autre caisse. Je crois qu’il s’est aperçu que je n’allais pas bien. Je l’ai gentiment remercié.

Je savais que j’en avais assez et que je devais retourner vers la voiture. Sur le chemin du retour, je me sentais comme un zombie. Ça me tirait dans le visage. J’avais la sensation d’avoir le visage tout croche. Une sensation qui ne s’était pas produite depuis des mois. J’avais de la misère à marcher. C’était comme si tout le côté droit de mon corps avait envie de paralyser. Ou bien que j’avais de la misère à faire fonctionner la partie droite de mon corps. J’avais de la misère à voir clair. J’avais mal aux oreilles et à la tête à cause du bruit.

Théra, ma chienne d’assistance, sentait ma détresse et tirait sur la laisse pour m’aider à sortir de cet endroit. Elle connaissait le chemin du retour. Je me laissais guider par elle. Je n’avais même pas pensé à prendre mon médicament d’urgence parce que j’avais de la misère à fonctionner.

Pour ceux qui me suivent sur mon blogue et qui me connaissent, vous allez sûrement dire que je me répète au niveau de mes symptômes. Non, car c’était la première fois que la partie droite entière de mon corps était affectée. J’avais besoin de vous en parler au cas où quelqu’un comme moi lirait cet article.

Une fois à l’extérieur, enfin, je pouvais prendre de grandes bouffées d’air. Il n’y avait plus personne.

Toi mon fils, tu me demandais d’aller dans un autre magasin. Ma réponse fut négative, car je n’allais pas bien.

Alors voici en bref notre conversation :

Fils : On ne peut jamais rien faire à cause de ton trouble de stress post-traumatique.

Moi : Tu sais mon garçon, ce n’est pas facile d’aller à la guerre. Parfois, cela peut causer des problèmes.

Fils : Tu avais seulement à dire non et ne pas y aller, à la guerre.

Moi : Quand tu es militaire, tu ne peux pas toujours décider. Tu dois faire ce qui t’est demandé.

Fils : Tu aurais dû travailler dans une pizzéria ou être pâtissier ou quelque chose comme ça.

Moi : C’était mon rêve et mon désir d’être militaire. Parfois dans la vie, on ne sait pas comment les choses peuvent tourner.

Je sais que pour toi mon garçon, c’est difficile de comprendre malgré tes six ans. Ne t’en fais pas, c’est même difficile pour un adulte de comprendre.

Sache que je me suis battu pour vivre et rester à tes côtés.

Sache que je me bats tous les jours contre ces démons.

Sache que j’essaie d’être le meilleur père et le meilleur amoureux pour votre maman.

Un jour mon garçon, peut-être que tu comprendras mieux ma blessure de stress opérationnel.

Il est certain que chaque fois que tu me la reproches, ça me fait mal au cœur. J’aimerais être comme les autres papas.

Mais tu sais quoi mon garçon? Le plus important est que je t’aime et que je suis là pour toi.

L’amour est la plus belle richesse.

Je sais que tu m’aimes, car tu me le dis souvent.

Je t’aime mon fils.

Carl Audet

 

Cette noirceur qui m’a envahi

Voilà un bon bout de temps que je n’ai pas écrit. Cet été a é

Voilà un bon bout de temps que je n’ai pas écrit. Cet été a été difficile pour moi. J’ai bien réfléchi avant de vous écrire cet article, car au tout début, je ne voulais pas vous en parler.

Pourquoi? Parce que je me croyais fort et je croyais avoir franchi cette étape…

Mais voyez-vous, 159 militaires sont décédés en Afghanistan. En 2013, 161 s’étaient enlevé la vie. Depuis 2013, le décompte des suicides a été ininterrompu et ce nombre ne cesse de grandir malheureusement. Avec le nombre de suicides toujours grandissant ces derniers temps, je devais vous en parler. Non, la plupart d’entre vous ne la savent pas. Les médias n’en parlent pas non plus. Moi je le sais, car je fais partie de plusieurs communautés sur le Web. Et le monde des vétérans et des militaires est une famille qui se soutient. Ce nombre de suicides ne cesse d’augmenter dans l’obscurité.

J’ai failli faire partie du lot pour une troisième fois cet été. Non je ne suis pas fier de moi. J’ai honte! Mais cette fois-là était encore plus forte. Tout était bien planifié dans ma tête afin de rendre ma mission à terme. Pour moi, c’était la seule solution pour arrêter de faire souffrir et de faire subir à ma famille la cause de ma blessure. Cette fois-là, j’étais vraiment déterminé! Je pouvais même me voir mourir dans mes plans sans aucune difficulté. Oui j’avais des remords, bien sûr, mais je me disais que ces remords ne seraient plus là une fois que je serais parti. Que mes enfants qui m’avaient toujours gardé en vie sauraient bien grandir sans moi. Qu’ils auraient la force de passer à travers les épreuves sans leur papa. Que ma femme que j’aime beaucoup aurait la force de passer à travers cette épreuve elle aussi.

Je n’ai même pas pensé à aller chercher de l’aide auprès de mes spécialistes. J’étais dans le noir total. Pour moi, c’était la seule solution pour mettre un terme à cette souffrance qui était revenue plus forte que jamais. J’étais prêt à passer à l’acte!

Je n’avais jamais vu une telle noirceur auparavant. Cette noirceur m’avait envahi. Tout ce que je voyais était de mettre une fin à ma vie, à ma douleur et à ma souffrance.

Même que je profitais mieux des moments avec mon fils de six ans. Tout allait mieux, j’étais davantage proche de lui. Je me disais que je devais passer de meilleurs moments de qualité avec lui, car ce seraient les derniers. Je voulais qu’il puisse avoir de bons souvenirs de son papa. J’étais prêt à le quitter malgré la déchirure, la tristesse et la douleur en moi.

Ma femme ne s’est jamais doutée de rien. Même si je pouvais passer beaucoup de journées d’affilée aux toilettes à avoir la diarrhée en raison de mon anxiété très élevée.

Vous comprendrez que je ne voulais pas la mêler à tout cela. Elle en avait déjà assez souffert selon moi.

Un de mes très bons amis a tout vu dans mon histoire. Il est venu me voir chez moi et par la suite, il m’a contacté très souvent. Si je me déplaçais, je devais lui dire où j’étais et comment je me sentais. Il ne me lâchait pas une seule minute.

Un vrai frère d’armes! Oui j’aurais fait la guerre avec cet ami, car lui, c’est un vrai frère d’armes à qui on peut faire confiance.

Un matin, il m’a amené à la clinique TSO (Trauma et Stress Opérationnel) de Longueuil pour un rendez-vous d’urgence avec une psychologue.

Lors de la séance, je me suis fait brasser, mais pas un petit peu. Durant la séance, j’ai pleuré ma vie et la psychologue a même réussi à me faire voir le visage de mes enfants qui me regardaient dans ma tombe. Et j’en passe…

Cette séance a été très difficile et je ne suis pas près de l’oublier. Ce n’est qu’à la fin que j’ai appris que si je ne voulais pas coopérer, je serais envoyé à l’Hôpital des Anciens Combattants en thérapie.

Après cette séance intense avec la psychologue, il est clair que j’ai décidé de mettre dehors le mauvais chum dans le salon. Celui dont je vous ai parlé dans deux articles auparavant. Maintenant je l’ai mis dehors pour de bon, car pour moi, l’option du suicide n’est plus une option. Lors de ma séance de psychothérapie, j’ai vu le visage de mes enfants qui me regardaient m’enfoncer dans le sol dans ma tombe. Depuis ce moment, ce n’est plus une option. Et j’ai toujours cette image de mes enfants debout sur le gazon qui me regardent m’enfoncer dans le sol dans ma tombe. Je crois que c’est ça qui me tient en vie maintenant. Cette image m’a tellement effrayé…

Maintenant, je peux vous dire que quand la noirceur nous envahit vraiment, il ne semble plus y avoir d’option pour sauver notre vie. Alors je lance ce message à tous : gardez l’œil ouvert et soyez prêts à intervenir pour ceux que vous aimez. Ils vous diront sûrement que tout va bien, mais la plupart du temps, ce ne sera pas le cas.

Soyez vigilants et attentifs!

Carl Audet

Besoin d’aide? 1-866-APPELLE

L’arme à la main

Kabul, Afghanistan, 2004. C’était une journée très chaude ce ma

Kabul, Afghanistan, 2004. C’était une journée très chaude ce matin-là. Je devais partir pour effectuer une patrouille à pied avec tout mon équipement sur mon corps comme d’habitude.

Mais cette fois‑ci, c’était différent, car j’étais avec une nouvelle section d’infanterie pour la première fois. J’étais très content, car je pouvais partir à l’aventure et développer des liens avec de nouveaux frères d’armes.

Ces frères d’armes représentaient tout pour moi. Ils étaient comme ma famille. J’étais à l’autre bout du monde et ce qui était le plus important pour moi, c’était eux.

J’étais fier de faire partie de leur équipe et de patrouiller à leur côté pour la toute première fois.

Après plusieurs kilomètres de marche, nous étions de plus en plus dans la profondeur de la ville de Kabul. On marchait en double rang et chacun surveillait son arc de tir. J’étais le premier en avant du rang gauche.

Soudainement, j’ai aperçu au loin un enfant qui courait à travers la foule avec une arme dans les mains en avant de moi.

La panique m’a envahi.

Je me suis dit : « Est-ce que j’en parle aux autres? Pourquoi il faut que cela arrive à moi? Si je ne fais rien, mes frères d’armes vont peut-être mourir… »

En quelques secondes, beaucoup de questions me sont venues en tête.

Ces secondes ont semblé être des minutes très longues.

Après quelques secondes, j’ai averti mes frères d’armes à travers mon casque d’écoute. J’observais l’enfant courir à travers la foule avec son arme. Je me disais que s’il venait vers nous avec son arme, je n’aurais pas le choix de tirer. J’avais plein de pensées qui me traversaient l’esprit et j’étais perturbé.

Dois‑je mettre en jeu la vie de mes frères d’armes ou celle de l’enfant? Je ne savais plus quoi faire. Non, la vie des frères d’armes est primordiale. J’observais et j’essayais de distinguer si c’était un jouet ou une arme, sachant fort bien que les enfants n’ont pas de jouets, car ils ont de la misère à avoir des souliers.

Ouf! Finalement, j’ai réussi à découvrir que c’était un jouet.

Que serait-il arrivé si j’avais mentionné à un de mes collègues d’ouvrir le feu parce que l’enfant était armé?

J’aurais ordonné de tuer un enfant qui n’était même pas armé?

Que serait-il arrivé si un de mes collègues avait perdu la vie par ma négligence? Dans ce contexte, tout aurait pu se produire. Cet enfant aurait pu être la distraction idéale pour nous tous.

Cette vision, je la vois tous les jours. Tous les jours, elle m’envahit. Même qu’il n’y a pas très longtemps, j’entrais dans une épicerie et une fois arrivé dans le rayon des fruits et légumes, une image de ce vécu s’est superposée à l’image réelle. J’avais un flashback solide et réel de ce que j’avais vécu.

Normalement, mes flashbacks passent tellement vite que je ne peux pas les voir. C’est la supposition de ma psychologue. Et pour moi, cela est logique, car mon TSPT est sévère et mon stress est très intense. Je suis tellement stressé que j’ai de la misère à voir ce qui se passe. Par contre des fois, des images peuvent se superposer une par-dessus l’autre très clairement. C’est comme si je suis à Saint-Jean-sur-Richelieu et que soudainement, je me retrouve à Kabul en Afghanistan.

Pas évident je vous le dis, mais je dois vivre avec cela tous les jours.

Ces transpositions d’images, j’essaie de les éviter du mieux que je peux. Par exemple, quand je conduis, je vais emprunter des chemins moins achalandés. J’essaie toujours de trouver une solution pour diminuer mon stress.

Chaque jour est un combat.

Chaque instant est une victoire pour moi!

Et vous, qu’auriez-vous fait devant un enfant armé?

Carl Audet

Vivre avec une maladie invisible

Dernièrement, lorsque j’effectuais mes courses, une dame a démar

Dernièrement, lorsque j’effectuais mes courses, une dame a démarré une conversation en me posant des questions sur mon chien d’assistance. En découvrant le fait que j’étais un vétéran, elle a été toute surprise, car elle aussi est vétérane. Elle ne savait pas qu’il existait un soutien comme cela pour nous qui sommes atteints du trouble de stress post-traumatique (TSPT).

C’est alors qu’elle m’a demandé quel était mon métier. Sans aucune gêne, je lui ai répondu que j’étais un commis ayant fait trois missions, dont une en Afghanistan. Puis elle m’a mentionné qu’elle avait effectué un métier de support elle aussi pendant vingt ans. Mais elle ne pouvait pas s’empêcher de me dire qu’il y avait des gens qui profitaient du système, etc. Pour finir, elle m’a dit qu’elle était contente pour moi que Théra, ma chienne, me fasse du bien. Je voyais bien avec toutes ses questions qu’elle essayait de peut-être porter un jugement dans sa tête. Son non-verbal me parlait aussi.

J’aurais voulu lui dire à cette dame que le TSPT ne s’attaque pas seulement aux militaires qui font partie des armes de combat. Non plus seulement à ceux qui vivent des situations de combat ou qui sautent sur des mines. Qu’il n’est pas essentiel non plus d’être un militaire pour être atteint de cette blessure. Des policiers, des ambulanciers et monsieur et madame tout le monde peuvent être atteints de cette blessure invisible. J’aurais même pu lui dire qu’elle pourrait vivre un événement traumatisant un jour et être atteinte de cette blessure.

Je n’ai pas voulu commencer à lui expliquer. Pourquoi? Car toutes les semaines, je devrais le faire plusieurs fois du fait que les gens me questionnent. Je dois vous avouer que ça devient épuisant pour moi de toujours répéter la même chose. Mais je vois bien que ce sujet est tabou et que les gens ne sont pas informés. De plus, ceux qui en souffrent la plupart du temps souffrent dans l’ombre en se renfermant sur eux‑mêmes en ayant peur des préjugés. Croyez-moi, je sais que beaucoup souffrent dans l’ombre… Mais moi, je n’ai pas peur d’être jugé. J’ai tellement souffert que je dis aux gens ce qu’est ma blessure quand ils me posent la question.

Nous sommes tellement nombreux à vivre avec une blessure ou une maladie invisible que vous n’avez aucune idée de l’ampleur. Pensez-y un instant. Les gens qui vivent une dépression. Juste là, on vient d’atteindre beaucoup de gens. On va passer aussi toutes les maladies mentales, car là aussi, beaucoup de personnes en sont atteintes, encore plus que vous pensez. La colite ulcéreuse et la maladie de Crohn qui sont toutes les deux des maladies incurables et qui prennent beaucoup d’ampleur au Québec.

Voulez-vous que je vous nomme toutes les blessures et maladies invisibles? Non, oubliez cela, cher public. Ce que je peux vous dire par contre, c’est que beaucoup de gens autour de vous en souffrent et vous ne le savez pas. Beaucoup d’entre eux doivent même faire face à des préjugés et ils n’ont pas la force que je possède. Ils n’ont plus de force pour se défendre, car ils se sentent détruits à l’intérieur par le fardeau de la maladie qu’ils ont à supporter. Beaucoup se forcent à vous faire un sourire pour vous cacher ce qu’ils vivent.

J’ai une proposition à vous faire. Au lieu de leur poser des questions pour qu’ils se sentent inconfortables, pourquoi ne pas leur offrir de l’aide sans être trop indiscret? Je suis certain que donner au suivant pourrait faire la différence. J’ai un ami qui m’a proposé de joindre un groupe l’hiver passé. Cela m’a donné un souffle de vie. Chaque mardi soir, je reviens chez moi de ma rencontre et je suis heureux.

Soyez à l’écoute, créatif et je suis certain que vous trouverez une solution qui changera la vie de quelqu’un que vous appréciez.

Carl Audet

Théra

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Je me rappelle au tout début de l’été passé, on m’avait diagnostiqué un Trouble de Stress post-traumatique. Même si j’avais douté de cette blessure pendant des années, je m’étais quand même informé. J’avais lu beaucoup d’articles à propos des chiens d’assistance et des bénéfices auprès des vétérans.

Ayant eu un chien dans le passé et voulant mettre toutes les chances de mon côté, j’ai adopté une chienne Golden Doodle de deux mois au mois d’octobre 2018. J’étais super content et fier. Mais la première semaine était très difficile, car moi, je dormais quatorze heures par jour et elle pleurait la nuit. Pas besoin de vous dire que je me suis remis en question, sachant que c’était pour un besoin futur.

Finalement après quelques semaines, c’était de moins en moins pire et tout allait de mieux en mieux. Elle était toujours adorable.

Dès les premiers jours où elle était avec moi à la maison, je voyais du positif dans ma vie. J’avais quelqu’un avec moi constamment. Plus les jours passaient, plus elle me suivait et était constamment près de moi. Nous devenions une équipe! Le jour où elle a obtenu sa veste de chien d’assistance, ma vie a changé encore, car elle pouvait maintenant me suivre partout. Dès que je lui présente sa veste, je lui dis : On va travailler Théra! Et déjà, elle se présente la tête pour enfiler sa veste car elle est contente. Puis, elle devient plus sérieuse parce qu’elle sait qu’elle a un travail à faire. Lorsqu’on revient à la maison, je lui enlève sa veste et son comportement change. Le travail est fini pour elle, elle peut enfin courir après les chats et jouer.

Nous étions connectés encore plus ensemble lorsqu’elle me suivait partout. Nous étions davantage connectés lorsque nous avons suivi notre formation avec l’organisme Audeamus. Nous nous sommes métamorphosés. Même moi, je sentais que j’étais un homme meilleur. Je prenais mes responsabilités plus sérieusement face à Théra. On m’avait appris comment vraiment me servir d’elle pour diminuer mon anxiété. Également des façons de faire évoluer la connexion entre nous deux. Cela demande du temps, mais c’est extrêmement bénéfique à long terme.

Cette formation m’a aussi permis de me faire des nouveaux amis qui ont la même blessure que moi. Certains avec des douleurs physiques comme moi. Quoi dire de plus des nouveaux amis que j’ai rencontrés? Ils étaient tous formidables. Je m’ennuie d’eux. Mais on garde contact et on va continuer à se rencontrer afin de garder ces liens. Des liens avec des personnes qui peuvent vraiment me comprendre. Des personnes qui ont tous le même besoin : un chien d’assistance.

Donc nous sommes désormais partenaires Théra et moi, pour la durée de sa vie. Pour ceux qui se questionnent, la durée de l’entraînement, il n’y en a pas. C’est toujours, tout le temps, chaque jour, chaque instant. Une nouvelle situation peut se présenter et il faut être prêt à réagir.

Théra m’aide à sortir de la maison et à diminuer mon anxiété en public. Je me sers d’elle pour faire de la récupération lorsque mon stress est trop élevé. Elle est vitale pour moi, surtout quand mon champ de vision se réduit. Elle me donne tellement et je ne pourrais plus m’en passer. Voilà ce que peut faire mon chien et elle débute. Je ne lui ai pas appris encore tous mes besoins. Mais ça viendra. L’entraînement prend du temps, de la détermination et de la constance.

J’avais choisi son nom Théra parce qu’elle est thérapeutique pour moi. Aujourd’hui, je ne pourrais plus vivre sans elle.

Pour terminer, j’aimerais tout simplement remercier sincèrement Audeamus.

Merci Audeamus d’avoir changé ma vie et de m’aider à avancer.

  

Carl Audet

« Souris, papa »

Le bruit m’affecte. Beaucoup. Et c’est invivable.

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Le bruit m’affecte. Beaucoup. Et c’est invivable.

Pourquoi? Je n’ai pas de réponse précise à cette question, mais je continue à chercher des solutions.

L’été dernier, j’ai découvert un outil qui m’aide grandement : me boucher les oreilles. On était allés à une plage publique sur le bord d’un lac. J’y étais allé un peu à reculons, mais je voulais faire plaisir à mes enfants.

Sur place, j’étouffais. Il y avait plein de gens et la musique était vraiment forte. En bon militaire, je me suis concentré sur ma mission : rendre ma famille heureuse. Je devais trouver un moyen de décompresser à travers cela.

Finalement, je me suis trouvé un espace pas trop achalandé. Je me suis installé là avec ma chaise zéro gravité. Avec des coupe-sons de style industriel sur mes oreilles, mon chapeau et mes lunettes fumées, j’ai fermé les yeux pendant au moins deux heures. Après ce temps, j’ai ouvert les yeux de façon graduelle afin de m’adapter à l’endroit et ça a fonctionné. Depuis ce temps, je porte des bouchons dans mes oreilles. C’est beaucoup plus discret, j’avoue!

Les enfants grandissent et font de plus en plus de bruit le matin. Les petits cris aigus sont assez fréquents. Les chicanes aussi. Les rires sont de plus en plus forts. J’ai eu des crises intenses de rage, de la misère à me contrôler, et ce, pendant des années. Le bruit m’irritait, mais je ne savais pas pourquoi.

Au fil du temps, j’ai commencé à comprendre certaines choses. Ma psychologue m’aide à reconnaître les signes physiques de détresse pour m’aider à trouver des solutions. Maintenant, le matin, lorsque mes enfants parlent fort, crient ou se chicanent, je suis conscient des signes.

En découvrant les signes, j’ai découvert que j’avais des « blackouts ». Ne me demandez pas ce qui se passe pendant mes « blackouts ». Je ne pourrais pas vous le décrire.

Un matin de semaine, l’an dernier, aussitôt arrivé dans la cuisine, le bruit me faisait (physiquement) mal. Je me suis mis à paniquer. Très vite, mon irritabilité a grimpé. Le ton de ma voix a aussi grimpé soudainement. Mon rythme cardiaque s’est emballé. Ma respiration s’est faite plus courte. Mon champ de vision a commencé à rétrécir et ma vision à se brouiller. Une série d’événements s’est produite, mais à ce stade‑là, je ne voyais plus rien. J’avais un « blackout ». Ma femme m’a vu dans un moment de panique totale. J’avais de la misère à coordonner mes mouvements. Je ne savais plus quelle direction prendre. C’était le noir total.

« Souris, Carl. »

« Souris, papa. »

J’étais dans le noir total et j’ai entendu leurs voix.

C’est alors que je me suis « réveillé ». Je suis sorti dehors pour prendre l’air et décompresser.

C’est un exemple parmi tant d’autres. Mais c’est celui dont je me souviens le mieux.

« Souris » est un mot de code dont nous avions convenu ensemble lors d’une rencontre familiale avec la travailleuse sociale de la clinique de Blessure de Stress Opérationnel. Cette rencontre avait pour but d’expliquer aux enfants pourquoi papa avait une blessure et avait des services de réadaptation. Nous nous devions aussi de trouver des solutions pour m’aider à m’en sortir. Il a donc été convenu avec les enfants que lorsque papa aurait une crise, ils pourraient simplement dire : « Souris, papa ».

Et ça fonctionne!

Beaucoup de gens n’osent pas parler, car ils pensent qu’ils sont en train de devenir fous. Et bien moi, je vous en parle. Et je ne suis pas fou.

Les « blackouts » sont un des aspects les plus sévères du TSPT. J’en ai eu souvent. J’ai aussi fréquemment une réduction de mon champ de vision. Ça fait partie de mon quotidien si je m’expose en public.

« Souris, Carl. »

« Souris, papa. »

Je suis confiant que bientôt, « blackouts » et autres symptômes seront chose du passé, grâce aux personnes que j’aime le plus au monde!

Carl Audet

 

Ne pas oublier la règle numéro 4

Ça s’est passé samedi matin. Je m’étais levé tôt, pour fair

Ça s’est passé samedi matin. Je m’étais levé tôt, pour faire changement. Normalement, je n’ai pas beaucoup d’énergie et je dors beaucoup.

Je m’étais dit que j’allais faire un petit spécial pour aller dans un magasin à grande surface, tôt, au lieu d’y aller pendant la semaine.

J’ai commencé à paniquer à mon arrivée dans le stationnement. J’ai eu de la misère à me trouver un espace de stationnement et mon cœur battait à pleine vitesse. J’ai donc pris une pause à l’extérieur avant d’entrer. J’avais peur de faire face à beaucoup de gens une fois à l’intérieur.

Lorsque je me suis senti un peu plus calme, j’ai décidé d’entrer.

Règle numéro 1 : Ne pas trop regarder les gens.

Tout n’allait pas trop mal, mais mon champ de vision avait rétréci. Ma vision s’était embrouillée un peu.

Règle numéro 2 : Me concentrer sur ma mission.

Ma mission était d’acheter seulement ce dont j’avais besoin. J’avais une liste afin de me faciliter la vie.

Règle numéro 3 : Ne pas perdre de temps.

J’avais décidé d’accélérer le pas, même si je boitais un peu et que ma jambe gauche me faisait mal.

Règle numéro 4 : Prendre mon médicament de secours ou sortir.

J’ai toujours mon médicament de secours avec moi, à prendre en cas de perte de contrôle. Je n’en étais pas encore à ce point.

Ça se passait moyen et je tenais le coup. Les allées larges étaient presque vides et pas du tout achalandées. Dans des allées étroites, j’étouffe!

Boom! Attaque d’anxiété dans le coin des fruits et légumes! Dans ce département, il y avait plein de gens et j’avais de la misère à passer. Mon champ de vision a rétréci encore davantage. Mon rythme cardiaque a augmenté. Ma respiration est devenue de plus en plus rapide. J’essayais de prendre de bonnes respirations pour diminuer mon stress, mais soudainement, ça a commencé à me tirer à droite, dans le visage. Là, je le savais, mon visage allait commencer à devenir tout croche.

Alerte! Règle numéro 4. J’ai décidé de sortir. Donc je me suis dirigé vers la caisse avec la file d’attente la plus courte. Je n’avais même pas pris le temps de mettre ma tuque et mes gants pour sortir. Instantanément, une fois dehors, j’ai commencé à mieux respirer. Mon champ de vision s’est élargi et est devenu de plus en plus clair. La tension dans le côté droit de mon visage a diminué tranquillement. Sur le chemin du retour à la maison, tout allait mieux, mais je ressentais beaucoup de fatigue.

Je tenais vraiment à vous expliquer ce symptôme très sévère du TSPT. Il s’agit d’un signe physique à ne pas négliger si l’on souffre de cette blessure.

Carl Audet

 

Crise à la maternelle

C’était un beau matin ensoleillé. Je m’étais levé de bonne h

C’était un beau matin ensoleillé. Je m’étais levé de bonne humeur et tout allait bien. Je m’étais dit en prenant mon café que ce serait une très belle journée. J’étais allé mener ma fille à l’arrêt d’autobus avec le cœur paisible. Par la suite, je m’étais rendu à l’école avec mon fils et ma femme. Mon fils devait aller porter ses effets scolaires ce matin­‑là pour sa rentrée à la maternelle.

Arrivé à l’école, tout allait bien. J’étais un papa extrêmement fier d’aller avec mon garçon à son premier jour de classe à vie. C’est quand même un évènement marquant pour un enfant. Dans la classe, fiston a décidé que c’est papa qui complèterait les papiers. Maman, elle, devait écouter les directives de l’enseignante.

J’avais fini de remplir les formulaires lorsque j’ai commencé à avoir des flashbacks. Le stress s’était mis en place rapidement. Ma respiration était courte et mon rythme cardiaque était plus rapide. Mes pensées étaient embrouillées et je n’étais plus capable d’entendre ce qui se passait. J’avais beaucoup de difficulté à rester là et je voulais juste m’enfuir.

Mais non ! Je ne pouvais pas. C’était une journée importante pour mon fils. J’essayais de prendre de bonnes respirations, discrètement. Inspire, expire… Je ne voulais pas que les autres parents me remarquent. Mon champ de vision avait rétréci.

Les autres enfants étaient chanceux. Ils n’avaient pas un papa ou une maman atteints du TSPT.

Ah oui ! Ma femme revenait de la salle de bain. Elle me l’avait dit et je ne m’en souvenais plus. « Chérie, dis‑moi quoi faire parce que là, ça ne va pas du tout. Je ne sais plus quoi faire. » J’étais vraiment perdu et en détresse. Moi qui avais dirigé du personnel dans des situations exigeantes. Moi qui avais formé des recrues dans les Forces armées canadiennes. Moi qui avais transformé des citoyens en soldats. Moi qui avais effectué des missions à l’étranger. Là, j’étais au pied du mur. Je ne pouvais même pas faire ce que l’enseignante demandait aux enfants de cinq ans. Quelle humiliation pour moi ! Je me sentais tellement inutile et incompétent ! Il n’y a pas de mots pour exprimer la douleur et la honte que j’aie ressenties cette journée‑là.

Heureusement, j’avais rendez-vous avec une personne formidable à la fin de ma journée et tout s’est bien terminé.

Carl Audet

Le mauvais chum dans le salon

2004, j’étais presque à la fin de ma mission en Afghanistan, et

2004, j’étais presque à la fin de ma mission en Afghanistan, et j’avais le pressentiment que cette mission était la dernière de mes trois missions dont deux auparavant en Bosnie-Herzégovine. Car celle‑là, je la trouvais difficile et j’avais de la misère à me comprendre.

À mon retour, l’alcool s’est installé quotidiennement de façon rapide sans que je m’en aperçoive, car ça me faisait du bien. Ça me gelait sans que je m’en aperçoive à la fin de mes journées de travail.

2005, j’ai décidé de m’acheter une maison, car je ne pouvais plus rester dans les maisons militaires en rangées collées les unes sur les autres. Je ne sortais plus dehors. Je restais enfermé dans mon logement parce que j’étouffais avec le monde.

Ce fut l’achat d’une belle maison canadienne en pierre avec vue sur le fleuve St-Laurent, dans le bois et possédant un vaste terrain boisé. Par la suite, j’ai fait l’obtention d’un chien. J’étais heureux, enfin, je pensais que je l’étais. Ma consommation d’alcool avait nettement augmenté à une quantité phénoménale, que j’ai maintenue pendant quatorze ans. Je ne savais pas ce que j’avais. Toujours pendant ce temps, j’avais le pressentiment que quelque m’observait ou était présent avec moi. Mais je ne voulais pas vraiment y porter attention…

En 2007, j’ai connu ma femme, puis en 2008, nous emménagions ensemble. 2009 fut l’année marquante de l’arrivée d’une belle petite fille aux yeux bleus et 2013 fut l’année de l’arrivée d’un beau petit garçon aux yeux bleus lui aussi.

Puis à travers ces années, j’étais devenu un papa heureux et fier d’avoir de beaux enfants en santé. Mais cela impliquait aussi d’avoir une vie sociale que je n’avais pas avant car j’avais une vie isolée, ce que je n’avais pas remarqué.

2012, je n’en pouvais plus de souffrir avec mes douleurs physiques et chroniques. Je commençais finalement à utiliser le mauvais chum dans le salon qui était là tout le temps à m’attendre. Et il m’aidait pour faire des plans pour mettre fin à mes jours. Suite à cela, j’ai discuté avec l’infirmière en santé mentale de la base militaire et j’ai été référé à une psychologue en ville.

Mars 2013, libération médicale des Forces canadiennes pour mes blessures et mes douleurs aux genoux et au dos. Ce fut un soulagement, une pression de moins sur mes épaules. J’ai décidé d’arrêter tous mes médicaments avec l’accord de mon médecin parce que selon moi, l’armée était mon problème.

Automne 2017, quelle erreur de ma part ! J’avais encore pété les plombs un matin comme tant d’autres, jusqu’à faire un black-out. Je me sentais mal, j’avais mal au ventre, je n’avais plus le goût de vivre. J’avais fait du mal à mes enfants, ceux que j’aimais le plus au monde. Le mauvais chum du salon était encore là. J’ai appelé ma femme dans le stationnement du DIX30 à Brossard et je me suis mis à pleurer. Je craquais, je ne voulais plus vivre ainsi, j’avais besoin d’aide !

J’ai pris un rendez‑vous à ma clinique privée et en m’y rendant, je me voyais écrire des lettres d’adieux à mes enfants. Je me suis dit : bon, il est temps que j’arrive, car ce maudit chum de salon n’arrête pas ! Il m’aidait encore à faire des plans pour m’enlever la vie.

J’ai consulté des psychologues pour finalement découvrir que j’étais atteint du trouble de stress post-traumatique (TSPT), alors que j’avais toujours eu des doutes par rapport à cette blessure. Donc, j’ai dû avaler ma pilule et l’accepter ! Car oui ça pouvait exister, j’en étais atteint !

Avec ma thérapie maintenant, je me suis rendu compte que je m’étais développé une vie en accord avec ma blessure sans m’en rendre compte.

Depuis environ quatre mois, ce mauvais chum de salon, je l’ai mis dehors de ma maison avec les conseils de ma psychologue et depuis, ça va beaucoup mieux. Car tant et aussi longtemps que je garde ce mauvais chum près de moi, rien ne pourra m’aider.

Je lui ai dit : Va-t’en dehors, mauvais chum ! Je ne veux plus te revoir !

Carl Audet

Quand le syndrome de stress post-traumatique s’invite

 

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  1. J’ai dix ans. Mon papa militaire revient d’une mission en Bosnie. Il ne le sait pas encore, mais il a développé un syndrome de stress post-traumatique (SSPT). Moi, je sais seulement qu’il a changé. Il a été confronté à la mort de trop près, trop souvent et sans répit. Son cerveau s’est mis à réagir au stress de façon extrême et sans discernement. Maintenant, quand je fais une gaffe, ce n’est plus de la colère que je vois dans ses yeux. C’est comme si je menaçais sa vie. Je n’aime pas voir mon papa dans cet état, alors je me tiens tranquille pour ne pas éveiller le volcan…
  1. J’ai quinze ans. J’ai bien essayé d’éviter de le mettre en colère, mais ça l’a mis encore plus en colère. Mes parents ne croient pas que mon premier amoureux est un bon garçon pour moi, alors ils m’ont obligée à le laisser. Je l’ai fait, mais j’ai repris avec mon chum en cachette. Et là, mon papa vient de le découvrir. Il a pété les plombs. Il se demande même si mon chum va porter plainte pour voie de fait. Moi, je me suis embarrée dans la salle de bain. J’attends que mon père se calme pour sortir. Il me hurle mon hypocrisie à travers la porte. Là, ce que j’ai fait, c’est vraiment grave, je l’avoue, mais j’aurais fait une petite niaiserie de rien du tout et il serait à peu près au même niveau d’intensité. Il n’a plus d’entre‑deux, mon papa. C’est comme si c’était toujours une question de vie ou de mort. Il n’y a pas qu’à moi qu’il a fait peur cette journée‑là, il s’est aussi fait peur à lui‑même. Ça l’a décidé à aller chercher de l’aide. Avouer un syndrome de stress post-traumatique dans l’armée, c’est délicat. Pas seulement parce que la santé mentale c’est tabou. Mais aussi parce que ça remet en question ta capacité à faire ton travail…
  1. J’ai trente‑cinq ans. Dans la dernière année, j’ai rencontré deux militaires hauts gradés qui ont croisé le chemin de mon père pendant sa carrière militaire. Leur carrière militaire s’est poursuivie, la sienne s’est interrompue, à cause du SSPT. Mon père, si tu l’employais pour placer des boîtes de conserve sur les étalages de ton épicerie, il te placerait ça d’une manière tellement efficace et innovante que tu finirais par lui demander de gérer ton commerce. C’est ce genre de gars‑là. Ça fait partie de lui. Il engage en entier son cœur et son ingéniosité dans tout ce qu’il accomplit. Je dis souvent que je suis une perfectionniste qui essaie de dompter son perfectionnisme. Lui, c’est un perfectionniste tout court. Et il ne s’en fait pas de modèle plus courageux. Si ma vie était menacée, j’aurais une confiance absolue envers lui pour venir à ma rescousse. Alors, revenons à ton épicerie… Ce héros-là, inévitablement, finirait par la gérer et tu ne voudrais plus te passer de lui. Mais il atteindrait aussi un niveau de stress qu’il ne pourrait pas supporter. Il finirait inévitablement par claquer la porte. C’est pour ça qu’il n’arrive plus à travailler.

Il est devenu grand-papa il y a dix ans et il remplit ce rôle avec brio. S’il y avait des médailles à décerner aux grands‑pères exceptionnels, il raflerait l’or chaque année. La petite fêlure du SSPT et l’aide qu’il reçoit le rendent encore meilleur qu’avant. Tous les héros ont leurs failles de toute façon… Je comprends bien ce côté de sa personnalité désormais et je navigue avec plus d’aisance autour de lui. Par contre, je n’ai jamais perdu l’habitude de le traiter avec des pincettes et j’ai expliqué la condition de leur grand‑père à mes deux garçons dès leur plus jeune âge.

Il ne s’était jamais emporté devant ses petits‑fils. Jusqu’à hier. Hier, deux petits garçons de sept et dix ans ont compris ce qu’était le SSPT. En fait, pour être bien honnête, ce n’est pas lui qui s’est emporté. Lui a simplement agi sous l’impulsion du stress qui l’envahissait. La fameuse réponse fight or flight (on n’a jamais accès à l’option freeze avec mon père)… C’est moi qui ai fait des éclats dans cette histoire. Parce que cette fois‑ci, je ne pouvais pas accepter la blessure sans broncher.

Mes parents nous conduisaient à l’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau. Après deux semaines de visite, je repartais chez moi avec deux petits‑fils au cœur lourd. Mon père n’a pas l’habitude de conduire à Montréal. Nous étions donc partis très tôt pour disposer d’une marge de manœuvre en cas d’imprévu. Étant donné que tout avait roulé comme sur des roulettes, nous étions arrivés à Montréal avec cinq heures d’avance pour notre vol, ce qui nous laissait amplement le temps de profiter d’un dernier repas ensemble. C’est quand mon père s’est mis à chercher un restaurant que les choses se sont compliquées. En résumé, le stress a monté et il a décidé qu’il nous plantait aux portes de l’aéroport. Évanoui, le repas qu’on avait prévu tous ensemble. Disparu, l’au revoir tout en douceur. Pouf !

Cette fois‑ci, avec mes deux cocos et mes valises, déposée ridiculement en avance sur le trottoir d’un aéroport, j’ai osé faire un peu de vagues. J’ai osé dire à voix haute ma tristesse et ma colère de voir mes enfants ainsi bousculés. Mais le droit de parole, dans ma famille, n’est pas également distribué. Souligner notre difficulté à communiquer et la souffrance que ça peut causer… il n’y a pas de place pour ça. Bref, il semblerait que notre seul problème ait été ma jolie petite tempête d’émotions juste à moi. Bien sûr, j’aurais encore dû étouffer et refouler bien comme il faut… Enterrer ma frustration pour l’éternité.

Pourquoi raconter l’histoire de la femme de trente-cinq ans qui pleurait comme une petite fille en attendant son avion hier ?

Parce que pour mon père, c’était la Bosnie. Et vingt ans plus tard, pour mes amis militaires, c’est l’Afghanistan. Et malheureusement, cette réalité existait aussi dans les générations précédentes, dans d’autres conflits armés. À travers le temps, il y a toujours eu une partie de nos héros qui nous revenaient blessés, physiquement ou mentalement. Mais j’ose espérer mieux pour le futur. Et pour cela, il faut se libérer des non‑dits. Il faut offrir des outils au lieu d’un beau gros paquet de honte.

Ça me touche lorsque je vois un copain partager sur Facebook sa participation à un programme de soutien comme Sans limites https://www.sans-limites.ca ou un autre qui témoigne de ses épreuves dans le livre En terrain miné de Roxanne Bouchard http://www.edvlb.com/en-terrain-mine/roxanne-bouchard/livre/9782896493470. Je pense à leurs petites filles qui ne vivront pas le SSPT en cachette, sans trop comprendre ce qui arrive à leur famille. Un tel syndrome ne se règle pas tout seul. Plus vite on identifie ce qui grince, plus vite on peut recevoir de l’aide et éviter l’autodestruction, l’automédication et le suicide.

Nous devons notre compréhension et notre sollicitude à ceux qui courent au-devant du danger pour nous en protéger. Comme société, il faut leur accorder les honneurs auxquels ils ont droit. Ce sont de vrais vétérans, de vrais héros. Qui font le sacrifice de leur santé physique comme de leur santé mentale.

De la part d’une petite fille de trente‑cinq ans qui essaie encore et toujours de soutenir son papa comme elle le peut. Même si ce n’est pas toujours facile.

Eva Staire