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Notre premier Noël à nous

D’aussi loin que je puisse m’en souvenir, Noël a toujours été

D’aussi loin que je puisse m’en souvenir, Noël a toujours été simple chez moi.

Le 24, c’était chez mes parents en famille.

Les cadeaux, la grosse bouffe à maman, le toast à papa. Un Noël important et sans prétention.

Mais les années ont passé et je ne suis plus enfant. J’ai ma propre famille maintenant. Et je suis maintenant la maman de ma famille à moi.

Mais reste que dans mon petit cœur d’enfant, j’aimerais qu’en ce retour du mois de décembre, la magie et la nostalgie s’unissent.

J’aimerais que la maison de papa et maman existe encore et que le 24 décembre existe encore à nouveau comme avant, comme quand c’était simple.

Mais papa est parti et il a volé la magie des fêtes. Il nous a quittés et nous a enlevé notre Noël sans prétention.

Maintenant, maman a son nouvel amoureux que j’adore, mais qui a lui aussi son Noël…

Et ma sœur, elle, a également son copain qui a son Noël. Tous deux le 24 décembre.

Alors me voilà, face à mon premier Noël en tant qu’adulte. Je ne le fuirai pas cette fois.

J’ai toujours tendance à accepter la première invitation ou à inviter tous les orphelins des fêtes pour fuir ma peine durant cette période, ou bien à remplir la maison soir après soir devant de belles tablées pour occuper ma tête et mon cœur un peu toujours tristes à ce temps de l’année.

Mais je me suis dit que cette année, les deux pieds dans ma première année de trentaine, il était temps que je crée nos traditions à nous,

Que l’on se fasse notre 24.

Mon chum est très traditionnel et adore tout ce qui est intime, juste nous quatre.

Je vais préparer une belle table, on va rester en pyjama… ouvrir nos petits cadeaux et ce qu’on mangera et fera durant cette soirée deviendra une coutume réconfortante pour mes enfants…

Ces petits détails qui nous paraîtront anodins sur le moment deviendront terriblement importants pour eux et aussi pour nous.

Un chocolat chaud près d’un feu d’hiver dans la cour deviendra irremplaçable pour les années qui se succèderont.

J’aime penser que notre Noël à nous arrive… même s’il me fait de la peine à la fois, parce qu’il m’éloigne de mon Noël d’enfant.

Et vous, vos traditions ont‑elles changé au fil des ans pour faire place à de nouvelles?

Lisa-Marie Saint-Pierre

Je ne peux m’empêcher de penser à toi…

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Alors que les familles se réunissent et que les éclats de rire des enfants éclatent dans la pièce, je ne peux m’empêcher de penser à toi.

Je regarde ce beau sapin rempli de milliers de lumières et je me dis qu’il aurait mis de la magie dans ta vie. Comme tellement de parents, j’ai perdu un enfant. Et peu importe les circonstances, c’est une perte dont on ne se remet jamais vraiment…

Parfois, nos petits anges nous quittent pour de funestes raisons. Que ce soit à quelques semaines de grossesse ou à quelques mois de vie, ça reste une peine qui ne guérira jamais entièrement.

Mon histoire n’est pas plus spéciale que les autres. Mon petit bébé aurait mené une vie emprisonné dans un corps handicapé où les murs de l’hôpital auraient été le seul décor qu’il puisse voir… Nous avons fait consciemment le choix de le laisser partir.

Je me suis promis que je ne regretterais jamais ce choix… mais… mais quand je vis des moments magiques, ceux où le temps semble s’arrêter, je ne peux m’empêcher de penser à toi, mon bébé.

Je pense à ton quatrième anniversaire, que l’on aurait fêté cet automne. Je pense à ton inscription à la maternelle, que j’aurais faite en février prochain. Je regarde tes sœurs ouvrir leurs cadeaux du père Noël, avec leurs yeux remplis de magie, et je t’imagine secrètement parmi nous…

Je sais aussi que bien des familles ont perdu des êtres chers, et pas seulement des enfants. Un père, une mère, une tante, un frère, un grand-père… et ça me réconforte en fait de penser que je ne suis sûrement pas la seule à vivre la nostalgie des fêtes…

La mort, ça reste un grand tabou. Plus les années passent et moins on se donne le droit d’en parler. Pourtant, même si on refait nos vies, même si on est très heureux dans le présent, on ne peut s’empêcher d’y penser.

Je me surprends encore à m’imaginer au bord de la rivière où on a dispersé ses cendres… Ça me fait du bien. Ce n’est pas de la tristesse que je ressens, pas uniquement… Je ne suis pas dépressive, et j’ai fait le deuil de ce petit être. Cela ne m’empêche pas toutefois de penser à tout ce que serait notre vie s’il en faisait encore partie.

Ce soir, je salue avec tendresse les parents qui ont perdu une partie d’eux‑mêmes. Je salue les enfants qui ont perdu ceux qui les ont mis au monde. Je salue tous ceux qui ont perdu quelqu’un qui faisait battre leur cœur plus fort. Je salue toutes les personnes qui regardent leur sapin illuminé cette année, en pensant à la personne qui manque à la fête.

Je vous envoie des milliers de câlins. Je lève les yeux au ciel et je regarde chacune des étoiles. Je me dis que si mon bébé est là‑haut, il semble bien entouré. Alors je lève mon verre ce soir, à vous, nos étoiles. Je vous souhaite d’être heureux où que vous soyez. Continuez de veiller sur nous. Et embrassez mon bébé pour moi…


Joyeuses fêtes à tous!


Joanie Fournier

Mes beaux sapins

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La première année d’un deuil, ce n’est pas jojo. Chaque fête, chaque anniversaire, chaque occasion de célébrer, en est une de se rappeler. Se rappeler ce qu’on a perdu, pleurer ce qu’on regrette. Imaginer la liste des « si » : et si ce n’était pas arrivé? Si je n’étais pas partie? Si la vie avait été différente?

La deuxième année d’un deuil, ce n’est pas tout le temps jojo non plus : une plaie qui se referme, ça gratte, ça pique, ça pétille, ça démange. Mais tout ça, c’est bon signe : ça guérit. Chaque fête, chaque anniversaire, chaque occasion de célébrer devient, petit train va loin, une occasion de célébrer nos progrès. Une larme en moins, un rire en plus, un souvenir plus serein, une étincelle dans le regard.

Novembre 2017 : moi, fraîchement déménagée après une séparation. Quatre enfants éplorés, déchirés entre deux maisons. Le chat un peu perdu au milieu des boîtes éventrées et de l’odeur du félin de l’ancienne propriétaire. Et Noël qui s’annonce… comment dire… pas très festif.

« Je suis vraiment désolée, les enfants. Cette année, je ne me sens pas la force de monter le sapin, de décorer pour Noël. On sera chez grand-maman le 24 de toute façon… »

Leur tristesse même pas dissimulée, mais exprimée doucement, sans reproches. Être si petits, et exprimer autant de compassion. L’écrire m’émeut autant que le vivre.

« Mais l’année prochaine, je vous le promets, ce sera différent. J’ai besoin de temps. Je suis tellement désolée… »

***

« Les enfants, je dois sortir ce soir, réunion de parents. Soyez sages! »

Ce soir-là, quand je suis revenue, ils avaient été très sages. Et très complices. Et très aimants.

J’ai ouvert la porte, doucement. La fée du sommeil était passée. Soulagement : je n’osais jamais les quitter depuis le déménagement. Je me trouvais déjà tellement dépouillée de mon temps avec eux…

J’ai ouvert la porte, doucement. J’ai entendu le silence. Et j’ai vu.

J’ai vu, au milieu du salon et des boîtes éventrées, un sapin. Tout monté, tout décoré. Magnifique. Rempli d’amour et de joie. La joie pure d’enfants et d’adolescents qui tenaient à vivre un Noël joyeux et « presque » comme d’habitude.

Le lendemain, ils m’ont raconté : à la seconde où ma voiture avait tourné le coin, ils s’étaient dépêchés de trouver les gigantesques boîtes contenant le sapin et les décorations. Ils avaient tout monté au rez-de-chaussée (ah! le travail d’équipe et la débrouillardise!). Ils avaient tout démêlé. Tout installé, en ordre de grandeur de branches et de couleurs de guirlandes. Ils avaient tout créé. Et ils avaient rangé tout le reste, « pour que maman n’en ait pas plus à faire ». Et ils s’étaient couchés en paix, heureux d’avoir respecté ma fatigue et leur désir d’être des enfants.

***

Alors cette année, j’ai attendu que le jour du Souvenir soit passé (par respect pour ceux qui se sacrifient pour préserver notre paix) et j’ai proposé :

« Gang! Ça vous tente? On met de la musique de Noël dans le piton et on décore le sapin! »

Ce à quoi ma plus vieille, qui avait tout orchestré l’an dernier, a répondu : « Ok, mais est-ce qu’on va pouvoir mettre la chanson ˝Noël, j’ai mal au cœur˝? » Et voilà, c’était parti : cinq enfants (je m’inclus là-dedans!) qui chantent à tue-tête en riant et en décorant le sapin.

Mon beau sapin, cette année, a une beauté tout aussi grande que celui de 2017, mais différente. Ces deux sapins trôneront dans mes souvenirs pour toujours, symboles du chemin parcouru et de l’amour partagé.

 

Nathalie Courcy

Le p’tit gâteau au caramel

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Il y a de ces images qui sont parfois si fortes et qui évoquent en nous tant de souvenirs…

 

Pour moi, c’est ce fameux p’tit gâteau au caramel Vachon. Celui dont tu raffolais, maman.

 

Savais-tu qu’à ton départ, j’avais conservé précieusement un plat dans lequel tu avais placé un de ces gâteaux? Ils viennent en paquet de deux et tu as toujours trouvé ça trop sucré. Ce gâteau, tu avais pris une bouchée dedans; le nombre de fois que je l’ai observé… La marque de tes dents sur cet objet, signe tangible qu’il n’y avait pas si longtemps, tu avais bel et bien croqué dedans.

 

J’ai mis du temps à le jeter. Beaucoup.

 

Quelques semaines avant ton décès, tu m’avais cuisiné ta recette de boulettes. J’avais congelé ce repas pour en profiter lors de ma rentrée universitaire.

 

À cet instant, j’ignorais que je la ferais sans toi.

 

Que tu ne me connaîtrais jamais en tant qu’enseignante.

 

Que jamais tu ne mettrais les pieds dans ma classe.

 

Que tu n’assisterais pas à mon mariage.

 

Que je ne voyagerais jamais avec toi.

 

Que tu ne connaîtrais jamais mes enfants.

 

Ton plat de boulettes, je l’ai déménagé plusieurs fois, tu sais. Mon p’tit trésor, au fond de ma glacière. Celui-là, j’ai mis des années à m’en départir.

 

Il suffit de si peu, d’un simple objet pour faire le pont entre nos âmes.

 

Le p’tit gâteau au caramel, quatorze ans plus tard, je le mange encore en pensant à toi, maman. Et tu sais quoi? Moi aussi, je n’en mange qu’un morceau à la fois! 💜

 

Karine Lamarche

Te savoir mourir

Ce soir mon amie, tu as annoncé ton décès imminent. Un message si

Ce soir mon amie, tu as annoncé ton décès imminent. Un message simple sur ta page Facebook. De nos jours, la fin passe par les médias sociaux.

Ton corps est épuisé, amaigri. Envahi par des cellules que tu n’as pas invitées. Tu choisis de passer la douane vers l’autre vie pendant que ton œil étincelle encore, pendant que ta tête est encore lucide, avant que la maladie t’effrite encore plus. Tu prends la décision de revêtir tes ailes d’ange pendant que tu en as encore la force.

Laisse-moi te dire, mon amie, que tu as changé ma vie. Je ne sais pas si c’est le hasard ou le destin qui a provoqué notre rencontre, mais ce qui est certain, c’est que je devais croiser ta route à ce moment. Tes paroles et ta lumière contagieuse ont répondu à des questions que je me posais depuis longtemps. Tu m’as accompagnée dans un projet de vie qui m’interpelait depuis si longtemps, mais pour lequel il me manquait des outils et la confiance de quelqu’un qui sait. Tu m’as permis de mettre au monde des livres, des mots, des rêves. Et tu l’as fait pour tant d’autres avec autant de foi et de sourire.

Mon amie, lorsque les derniers flocons tombaient au sol, tu me parlais encore de nouveaux projets, de passions, de bibliodiversité et de créativité. Je t’avais trouvée amaigrie, mais ton air joyeux et enjoué a masqué ce cancer qui ne s’était pas encore révélé. Il avait pourtant déjà fait ses ravages. Le diagnostic t’a probablement encore plus surprise que nous qui t’aimons tant. Qui aurait pu croire…

J’ai le goût de te dire que tu avais encore tant à faire et à vivre! Que tu es si jeune, si toi, que c’est injuste! Mais tu as vécu à fond. Tu as porté ton message jusqu’au cœur de ceux qui avaient besoin de l’entendre. Tu continueras de vivre en tous ceux que tu as inspirés, à qui tu as donné l’élan pour se réaliser.

Lorsque l’aube se lèvera au bout de la nuit, tes yeux se fermeront. Tu diras un dernier au revoir à tes enfants, à tes petits-enfants, à ceux qui te tiendront la main dans cette maison de soins palliatifs qui a accueilli tes derniers moments. Te connaissant, tu remercieras le médecin qui te soulagera de ta souffrance. Qui te permettra de laisser dans l’esprit de ceux qui t’aiment l’image d’une femme souriante, énergique, lumineuse, belle. Tu remercieras la vie de t’avoir donné du temps et de l’amour. Et tu entameras cet autre voyage, souriante, toujours. Aucune trace de désespoir dans ton geste légal, seulement un réalisme qui sait qu’il n’y a aucun retour possible.

Mon amie, tu n’as probablement pas reçu la carte postale que je t’ai envoyée la semaine dernière. Je me sentais sereine au milieu d’une nature paisible, et j’ai voulu te communiquer mon dernier adieu sans déranger tes derniers moments de vie. Tes enfants la liront un jour et ils sauront que tu étais aimée, admirée. Ils le savent déjà.

Prends ton élan. Je te retrouverai quand ce sera mon tour. Mais pas tout de suite. Avant, je veux continuer de me laisser inspirer par toi. Je vais vivre pour deux, je vais vivre pour mille.

 

Nathalie Courcy

Bonne fête des Pères à vous, solo parents!

Bonne fête des Pères à vous tous, papas présents, papas à temps

Bonne fête des Pères à vous tous, papas présents, papas à temps partiel, beaux-papas, mais surtout bonne fête des Pères à toi, papa et maman solo parentaux !

Bien sûr, j’aurais pu écrire ce texte aussi à la fête des Mères, mais la fête des Pères est toujours pour moi une journée très émotive, surtout depuis que j’ai perdu le mien.

Alors à toi, le papa unique, le papa solo qui se tape la routine du matin avec le réveil, le déjeuner, les lunchs, l’habillage, la coiffure (oui, toi, le papa qui doit faire de mini tresses dans de mini cheveux avec tes gros doigts), le départ pour l’école et le travail. Qui se tape seul le retour à la maison, le souper, les devoirs, la routine du soir. Qui se tape seul le lavage (papa, as-tu lavé tel chandail, tel pantalon ?), le ménage, les courses, l’entretien de la maison. Je te souhaite bonne fête des Pères.

Aussi, bonne fête des Pères à toi, la maman solo parentale qui doit se taper seule la routine du matin, la journée de travail, la routine du soir, le lavage, le ménage, sortir les vidanges, débloquer la toilette qui est encore bouchée, faire de petites réparations, passer la tondeuse et le coupe-bordure.

Alors à vous tous et toutes, papas et mamans qui donnez le meilleur de vous‑mêmes pour que vos enfants ne manquent de rien. À vous tous et toutes qui faites en sorte que le parent disparu reste bien vivant dans la mémoire de ses enfants. À vous tous et toutes qui ressentez le manque de cette personne extraordinaire qui vous a fait confiance en vous confiant le meilleur de lui ou d’elle‑même, je vous souhaite bonne fête des Pères.

Et à vous tous et toutes qui avez le privilège d’avoir un autre parent extraordinaire qui vous aide avec votre marmaille, bonne fête des Pères. N’oubliez jamais la chance que vous avez d’avoir à vos côtés ce parent avec qui partager les bons et les moins bons moments. Un parent restera toujours un parent, qu’il soit parfait selon vos critères ou non.

Et pour terminer, à tous ces papas disparus qui veillent sur leurs trésors de là-haut, je vous souhaite bonne fête des Pères !

Annie Corriveau

Ses premières angoisses d’ado

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Avant le départ du père de mes enfants, nous avons eu plusieurs discussions sur l’avenir. Ses demandes à lui étaient simples et claires : « Je veux que tu refasses ta vie, que tu sois heureuse. » C’est deux ans après son départ que j’ai commencé à ressentir l’envie de voir d’autres hommes. Mon but à ce moment n’était pas de trouver l’âme sœur une deuxième fois, mais bien d’avoir quelqu’un avec qui sortir, avec qui partager de bons moments, sans pour autant que ce soit sérieux. En fait, je ne suis pas certaine que même aujourd’hui, je suis prête pour une relation de couple sérieuse et engagée.


Il y a plus de quatre ans maintenant, j’ai rencontré un homme qui me permet de vivre ce genre de relation stable mais à temps partiel. On se voit une ou deux fois par semaine, parfois tard le soir; on fait une activité une fois par mois, on passe du bon temps ensemble, pour nous. J’ai bien expliqué aux enfants quand ils l’ont rencontré qu’il n’est pas dans nos vies pour prendre la place de papa, mais bien pour accompagner maman.


Cette relation avait toujours été bien acceptée des enfants, mais depuis un certain temps, quand je leur mentionnais qu’il venait souper ou faire un tour, ma fille roulait des yeux, paraissait irritée et fâchée. Elle n’avait jamais fait ça auparavant. Avant, quand je mentionnais son nom, elle était contente et avait hâte de le voir. Elle disait se sentir en sécurité lorsqu’il était dans la maison.

 

Ma grande a eu treize ans il y a quelques jours et je voyais bien qu’il y avait quelque chose qui la tracassait. Comme nous étions seules toutes les deux parce que son frère jouait avec un ami, je lui ai posé la question. Je lui ai demandé pourquoi elle avait ce comportement ces derniers temps. Sa réponse fut celle‑ci : « Maman, j’ai peur qu’il prenne la place de papa! »

 

Et voilà… comme toute jeune fille, je savais bien qu’il se passait quelque chose dans son petit coco. Les dernières années de vie de leur père, ma fille a passé beaucoup de temps seule avec lui. Ils avaient développé une belle relation père-fille. Je comprenais donc maintenant pourquoi j’avais droit à ce comportement quand je parlais d’un autre homme. Pourtant, en sa présence, elle ne laissait rien paraître, discutait avec lui, faisait des farces.


J’ai donc bien expliqué à ma grande que jamais personne ne remplacerait son père. Que son père est dans son cœur pour toujours et que ce qu’il désire plus que tout au monde, c’est qu’elle soit heureuse même s’il lui manque au plus haut point. Je lui ai fait comprendre que dans la vie, il n’y a personne qui peut remplacer une personne qu’on aime. Que les gens qui croisent notre chemin sont là pour nous apporter quelque chose, mais non pour en remplacer d’autres.


Ce soir‑là, c’est le cœur rassuré et la tête légère que ma belle grande fille est allée se coucher en prenant bien soin de me dire : « Merci d’être une maman aussi merveilleuse, ma belle maman! »


Ça fait tellement de bien…

 

Annie Corriveau

Toutes ces choses que j’aimerais te dire…

Les années ont passé depuis ton départ, maman. Depuis, je suis de

Les années ont passé depuis ton départ, maman. Depuis, je suis devenue mère à mon tour.

À mon tour, je fais de mon mieux. J’explique, je demande, je souhaite de tout mon cœur que mes filles, un jour, deviendront des adultes respectueuses et empathiques.

Maman, je me souviens de nos disputes de ces moments où, du haut de mes 12-15-17 ans, je croyais tout connaître de la vie.

Maman, souvent, j’aimerais que tu sois encore ici pour que je puisse te dire que ces valeurs que tu m’as transmises, non sans efforts, elles sont bien ancrées en moi.

J’aimerais te dire que je comprends tous les sacrifices que tu as pu faire, que maintenant, je comprends.

J’ai le sentiment que je n’ai pas eu le temps de te témoigner toute ma reconnaissance. J’aimerais te parler de mes filles, de leurs réussites. J’aimerais partager avec toi cette fierté.

Certains jours, j’aimerais te demander comment tu es parvenue à si bien nous éduquer, à faire de nous de bons humains, ma sœur et moi. Dis-moi que mes efforts ne seront pas vains, que c’est possible.

Parfois, je voudrais simplement rire avec toi.

Souvent, je voudrais juste te dire que tu me manques.

Karine Lamarche

 

Triste anniversaire

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Il y a 5 ans, dans la nuit du 16 au 17 avril, mon père est décédé. Une histoire de fou qui me semble encore invraisemblable aujourd’hui. En voici les grandes lignes.

2 janvier : Mon père et sa blonde partent pour un voyage de trois mois au Mexique.

Début avril : Retour au pays. Mon père a mal dans le cou, il croit avoir une hernie (il était physiothérapeute). Il a tellement mal qu’il ne dort plus. Durant la semaine, il s’aperçoit qu’il a beaucoup d’ecchymoses… il décide donc de consulter. Hépatite virale. Son foie est très enflé. Il n’y a pas de traitement, le foie va se rétablir avec le temps. Il passe une semaine à l’hôpital, il est de plus en plus confus, car son foie ne fait plus son travail.

Le vendredi, il passe une radiographie pour déterminer la cause de sa douleur au cou. C’est à ce moment que le ciel m’est tombé sur la tête. On apprend que la douleur est due à une vertèbre cassée… cassée par des métastases. Cancer du poumon, avec environ trois mois à vivre. Nous sommes le vendredi soir. Mon père n’est presque plus lucide. À partir de la nuit du dimanche au lundi, on ne peut plus le laisser seul. Il souffre énormément, mais il n’est plus vraiment éveillé. Le mardi, je passe toute la journée avec lui. J’ai à peine le temps de retourner à la maison que le téléphone sonne déjà pour m’apprendre que les médecins n’allaient plus tenter de désintoxiquer le foie de mon père. Ils allaient seulement soulager la douleur. C’est le cœur gros que j’ai bordé mes enfants et que je suis repartie en direction de l’hôpital pour accompagner mon père dans ses derniers moments. Je lui ai tenu la main jusqu’à son dernier souffle.

C’est de cette façon qu’en l’espace de quatre jours, j’ai perdu mon papa que j’aimais tant. Il était bien trop jeune, il avait 65 ans et moi 35. Je n’étais pas prête… pas du tout. La vie m’a volé mon père.

J’ai la tête et le cœur pleins de souvenirs ; tous les dimanches matin passés ensemble à faire des mots croisés, tous les matchs de hockey et de football regardés, toutes les fois où je l’accompagnais à l’aréna, notre amour de la forêt, on a même suivi des cours à l’université en même temps. Je me considère chanceuse, car dans les quinze dernières années de sa vie, il a pu être présent dans les moments forts de ma vie. Il a eu le temps de me conduire dans l’allée le jour de mes noces, j’en garde un souvenir impérissable. Il a eu le temps de connaître mes trois enfants : ils avaient sept ans, quatre ans et demi et un an et demi lors de son décès. Il les trouvait extraordinaires, il en était si fier.

Malgré tous ces beaux souvenirs, je ne peux m’empêcher d’être envahie par la tristesse. Papa, chaque anniversaire ou journée spéciale sans toi est difficile. J’aurais tellement voulu que tu voies mes enfants grandir, que tu puisses les encourager dans leurs études, dans leurs sports, dans leurs activités… que tu sois présent dans leur quotidien, dans leurs joies, leurs peines et leurs difficultés. Tu serais épaté de les voir aujourd’hui ; ce n’est pas toujours facile, mais tes petits-enfants sont ma plus grande réussite. Ton absence me brise le cœur. Je regrette de ne pas avoir passé assez de temps à tes côtés. Ta présence chaleureuse, tes conseils, notre complicité et ton grand sens de l’humour me manquent horriblement. J’aurais voulu avoir du temps en tête‑à‑tête avec toi pour te dire un vrai « au revoir » et boucler la boucle.

Et plus que tout, j’aurais souhaité te dire « je t’aime » tellement plus souvent que je l’ai fait et avoir la chance de te le dire encore un million de fois…

 

Myriam S-F

 

Les saisons d’une orpheline

Mon papa. Il est mort quand j’avais sept ans. La même année que

Mon papa. Il est mort quand j’avais sept ans. La même année que mon cousin. Et que ma grand-mère. Ça fait trente-trois ans de ça. Oh my God! Je viens de révéler mon âge vénérable! (Ben non, je l’ai déjà écrit et je le dis ouvertement…)

Revenons à nos défunts.

Donc, mon papa. Il était tout jeune, trente-trois ans. Un beau pétard aux yeux et aux cheveux noirs. Policier, père de trois enfants, époux, frère, fils, ami. Il croyait en Dieu et en l’humain. Il écrivait un livre, Prière pour la vie. Il avait des projets. Il aimait la vie. Et il souffrait d’un cancer du cerveau depuis plus de deux ans.

C’est long, deux ans, avec un crabe dans la tête. À la fin, il ne parlait plus, il déparlait à peine. Les neurones étaient en bouillie. Les fonctions vitales le lâchaient au fur et à mesure que la maladie se répandait dans son corps amaigri. Il ne bougeait plus. Il ne souriait plus.

Pendant cette période, j’ai peu vu mon papa. Les heures de visites des enfants étaient limitées, on était trop fatigants pour les malades. De toute façon, c’était pénible aussi pour les enfants bouleversés que nous étions. J’avais beau adorer mon père, je trouvais ça plate, aller à l’hôpital. C’était long. Il ne fallait pas faire de bruit. Et moi, ce que je voulais, c’était jouer des percussions sur les tuyaux de chauffage. Pour me désennuyer, une amie de la famille m’avait offert une bouteille d’eau gazeuse. Trois décennies plus tard, je déteste toujours autant l’eau gazeuse. Mauvais souvenirs associés.

Mais quand même, mon papa me manquait. Maman nous avait expliqué « les vraies affaires » : il ne s’en sortirait pas. Il est arrivé que des infirmières à l’âme empathique m’aient donné une permission spéciale : rendre visite à mon père un soir où les enfants n’étaient pas admis. J’ai dû jouer au ninja pour passer par l’escalier de secours sans me faire remarquer… C’était rassurant de savoir que je pouvais aimer mon papa malgré les règlements, malgré la maladie, malgré tout.

Mon dernier souvenir « normal » de lui, c’est une soirée avec la parenté, dans notre salon. J’étais assise sur ses genoux pendant qu’il buvait sa 50 entouré de ses frères et sœurs. L’hôpital (lire : ce qui était devenu sa résidence principale) lui avait accordé un congé spécial. La fois suivante où toute sa famille a été présente autour de lui, c’était aux soins palliatifs alors qu’il pleurait ses dernières larmes et expirait pour la dernière fois. Je n’y étais pas. J’étais trop petite.

J’avais sept ans. J’ai manqué une semaine d’école. Ma professeure a amené tous mes copains aux funérailles. Quand je les ai revus, c’était à notre Première Communion. Sur la photo de groupe, je ne souriais pas. J’étais trop stressée : je n’avais pas pu pratiquer avant la cérémonie. Et la messe avait lieu dans la même église que les funérailles.

Quinze ans plus tard, je me suis retrouvée dans une autre chapelle, cette fois pour me marier. J’avais demandé au prêtre la permission de lire une prière aux défunts dès le début de la cérémonie. C’était bizarre, mais essentiel pour moi. C’était ma façon de dire à mon papa, ma grand-maman, mon cousin, mon oncle décédé quelques mois plus tôt, et aussi à toutes les personnes aimées qui nous avaient quittés, qu’on les invitait eux aussi. Qu’on leur avait gardé une place dans nos pensées.

Cette journée-là, c’est mon frère et ma mère qui m’ont accompagnée dans l’allée jusqu’à mon futur mari. Vous dire la fébrilité qui m’habitait quand je suis entrée dans cette chapelle pleine à craquer! La veille, on avait déplacé chaque banc de quelques millimètres pour ajouter quelques places assises. Certains de mes amis étaient même debout à l’arrière. Quand on dit « bondé de monde », c’est l’image qu’on a en tête. On ne devait même pas être légaux en termes de sécurité tellement il y avait de l’humain au pouce carré.

Quand je suis arrivée à l’avant et que je me suis tournée vers l’assemblée, j’ai vu un vide bouleversant. Dans cette marée de monde cordé comme des sardines en conserve, il y avait un banc complètement vide, dans la première rangée, du côté de ma famille. Ce banc n’était pas réservé, mais personne n’avait osé s’y asseoir. Tout de suite, j’ai su que c’était la place que mon papa avait choisie pour assister à mon mariage. Il voulait être aux premières loges pour accompagner sa fille dans ce grand saut. Je sais qu’il y était, avec mon cousin, ma grand-mère, mon oncle…

La prière aux défunts a été très émouvante. Pour moi et pour les personnes présentes. Un silence de mort, pourrait-on dire. Mais je dirais plus « un silence de vie ». Ils étaient là. Ils étaient parmi nous. L’orpheline en moi s’est sentie un peu moins orpheline.

 

P.S.: Le lendemain de l’écriture de ce texte, j’ai regardé avec beaucoup de larmes et de «c’est tellement ça!» la vidéo de la chanson «La saison des pluies» de Patrice Michaud, scénarisée par Yan England. Maman, je te la dédie. Tu as été mon papa, toi aussi. https://www.youtube.com/watch?v=FovZ7AefAmo

 

Nathalie Courcy

On répare et on avance!

Depuis la séparation, quand on me demandait comment j’allais, je

Depuis la séparation, quand on me demandait comment j’allais, je répondais : « Des hauts, des bas. Je prends le temps de me reconstruire. » C’était honnête. Je refuse d’être une victime, mais aussi de jouer la femme forte.

Puis, j’ai eu un down. Un bout rough. La gastro des enfants et le manque de clarté extérieure n’aidant pas, j’ai commencé à tout voir en noir. Comme dans broyer du noir. Prendre la noirceur que je percevais partout en moi et autour de moi, la passer dans le blender de mes dialogues intérieurs et me badigeonner l’âme avec la glue goudronnée que ça faisait. Il ne manquait que les plumes des Dalton.

Je me connais, des passes de même, ce n’est pas bon signe. Je devais me ressaisir rapido presto pour ne pas m’enfoncer.

Et c’est là que j’ai compris que j’avais peut-être sauté des étapes.

Je suis une fille très axée sur l’action. Problème = solution. Cette équation m’évite de patauger trop longtemps dans les situations difficiles. Une fois que la décision de la séparation a été prise et annoncée, je me suis pitchée dans le processus du déménagement et de la médiation. Rencontres avec la notaire, visites de maisons, discussions avec ma banque, répartition des biens. Vous le voyez, hein, le problème que ma solutionnite aigüe a créé? Le vieux principe des sables mouvants : plus tu t’énerves, plus tu t’enfonces.

J’étais dans l’action-réaction, mais peu dans l’émotion. Pas que j’aie refusé complètement de m’y plonger, mais disons que je me suis contentée de faire de la plongée en apnée au lieu d’aller en profondeur. On ne peut pas tout faire en même temps, me direz-vous. C’est ce que je me disais aussi, et je ne regrette pas d’avoir respecté l’ordre de la pyramide de Maslow (les besoins de survie et de sécurité ont priorité sur les besoins plus « sentimentaux »). M’assurer d’avoir un matelas pour dormir et une maison pour accueillir mes enfants était plus urgent que de sortir la pelle pour creuser mes émotions.

Mais voilà, une fois que le camion de déménagement est reparti et que les boîtes ont été à peu près défaites, ça faisait de la place pour le deuil. Le temps de me reconstruire était venu, pensais-je…

« Mes blues passent pu dans porte », chantait Offenbach dans mes jeunes années. Quand je voulais faire sortir le méchant, je mettais cette toune-là sur Repeat et je braillais tant que je voulais. Là, c’était le temps de faire sortir le méchant et de le regarder dans le noir des yeux. Avancer dans le deuil au lieu de m’y enfoncer.

Et pour le faire, je ne pouvais pas commencer la reconstruction tout de suite. Pour reconstruire, il faut que les fondations soient solides, et les miennes étaient ébranlées. Si vous montez des murs après un tremblement de terre sans avoir solidifié le sous-sol et réparé les fissures du béton, les risques sont grands que ça ne tienne pas longtemps. À la moindre brise, ça va sacrer le camp.

J’ai décidé de faire un pas de recul. De reprendre mon coffre d’outils accumulés au fil des années et des débarques. De sortir ma masse et de défaire ma carapace peu à peu, à mon rythme, pour voir ce qu’il y a en dessous, bien enfoui. Je vais garder les morceaux qui sont encore bons et me départir des parties pourries, clouer avec des clous plus durables, mettre plus de vis. Travailler sur la structure plutôt que sur la tapisserie.

Ce qui ne m’empêchera pas de planter des fleurs autour de la maison et de faire jouer des tounes disco dans la baraque pour sourire et danser. Faire des rénovations, c’est plus le fun avec de la musique!

Nathalie Courcy