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Ce soir d’angoisse posttraumatique — Texte : Jessica Thériault

Ce soir, c’est un soir difficile. Un soir d’angoisse épouvantable, un soir où je n’ai pas en

Ce soir, c’est un soir difficile. Un soir d’angoisse épouvantable, un soir où je n’ai pas envie de dormir sachant que demain arrivera trop rapidement.

Je m’explique, demain est le jour que papa et moi nous repoussons depuis tant de temps, par peur, par angoisse. Demain, notre garçon doit ENCORE passer un test pour son avenir.

Il y a 5 ans, notre superhéros a dû subir une chirurgie qui s’est passée plutôt drôlement. Il a fait un arrêt respiratoire de 7 minutes devant nos yeux de parents qui ne savaient comment réagir sauf par l’hystérie et l’incompréhension.

Ce petit bout d’homme va mieux aujourd’hui, je vous l’assure. Il réussit à être détestable à ses heures, oui, oui ! Mais il y a 2 ans, son ophtalmo nous a dit qu’il devait être opéré à nouveau. (Je vous laisse imaginer le sentiment).

Je vous épargne les crises de larmes, les incompréhensions, les paniques, les remises en question.

Nous allons dans un hôpital de la Montérégie pour ne pas la nommer, notre enfant fait le préopératoire… Trois rendez-vous pour qu’au final, on nous retourne au Children’s Hospital de Montréal.

« Dossier trop compliqué », « Pas évident à évaluer », ce qui voulait dire au fond : « On ne veut pas être responsable de son état trop complexe ».

Vive la covid, je crois être une des seules à le vénérer, parce qu’elle m’a donné un peu plus de temps pour me faire à la situation.

Après consultation avec son ORL au Children’s, ils obligent d’avoir un test d’apnée avant opération. T’sais, le test que lorsqu’il a fait quand il avait 3 semaines et qu’on nous a dit qu’il devrait rester à l’hôpital avec toutes ces maudites machines « pluguées » pour le bien-être de notre enfant jusqu’à ce qu’on l’opère puisque c’était dangereux pour sa vie.

Demain soir, c’est ce nouveau rendez-vous préop. Ce rendez-vous qui me rappelle que mon fils a failli mourir dans mes bras, ce même rendez-vous qui pourrait me dire que mon fils ne doit plus être opéré, mais qui pourrait lui causer des problèmes ophtalmiques.

J’angoisse avec le fait de revivre tous ces évènements, ceux qui me repassent en tête jour après jour.

À quel point l’angoisse devrait être présente ?

Aucune idée. Ce que je sais, c’est que l’angoisse, ce n’est pas une partie de plaisir, et que l’on devrait focaliser sur le présent et non sur le passé et l’avenir.

Demain, je passerai cette soirée par obligation, mais pas sans angoisse ni appréhension. L’angoisse sera là, mais une angoisse positive.

D’une maman qui essaie de ne pas trop y penser, mais pour qui, malheureusement, le choc posttraumatique est trop grand.

Jessica Thériault

Mon fils

Ça y est, c’est fait ! Mon fils a fait un pas de plus pour que

Ça y est, c’est fait ! Mon fils a fait un pas de plus pour que son corps soit compatible avec qui il est vraiment. Mon fils est transgenre. Sa transition sociale est faite et sa transition physique est commencée depuis 3 ½ ans. Son prénom a été changé et la mention du sexe aussi. Il est en couple avec une belle jeune femme depuis 2 ans et ils sont heureux d’être ensemble.

Dernièrement, il a eu l’opération qu’il souhaitait tant. Faire disparaître ses seins. L’opération devait avoir lieu en mai, mais avec la COVID, la mastectomie a été remise au mois d’octobre.

Ça m’a laissé un peu plus de temps pour m’y faire, un peu plus de temps pour stresser aussi. Mais bon ! J’ai quand même réussi à me gérer.

Nous sommes allés le reconduire en famille à la clinique GRS de Montréal, en plein trafic un mercredi matin d’octobre. Dès qu’il est descendu de l’auto, j’ai pleuré pour la première fois depuis des mois. Je le regardais marcher seul vers la clinique, un jour gris, un jour de pluie, et le flot de larmes s’est déversé.

Je ne pouvais pas l’accompagner. Je ne pouvais même pas être présente avant et après l’opération. Je sais que c’est maintenant un adulte, un homme de 20 ans, mais c’est toujours mon bébé. J’avais le cœur en miettes et la morve au nez.

Mon chum et ma fille se sont demandé pourquoi je pleurais ainsi. Pour eux, c’était enfin une affaire de faite ! Et on allait tous pouvoir passer à autre chose. Mathis serait encore plus heureux. C’est ce que je souhaitais moi aussi !

Mais il allait vivre cette expérience tout seul sans moi. Je voulais être près de lui, lui donner la main, le rassurer au besoin, mais non ! Mausus de COVID ! J’avais l’impression d’abandonner mon enfant. Mon cœur de mère se sentait encore une fois coupable.

Il est sorti le jour même, c’est son père qui est allé le chercher, j’en étais incapable. Lorsqu’il a passé la porte, il avait le teint gris, encore un peu sous l’effet de la médication, mais heureux que ce soit fini.

J’ai pris congé pour être auprès de lui. Au CLSC de ma région, on m’a dit que nous devions enlever les bandages nous‑mêmes. Je me suis donc pointée à ma pharmacie et j’ai demandé un rendez-vous avec l’infirmière. Je ne voulais pas du tout enlever les bandages. Oh ! Que non ! J’avais trop peur de me remettre à brailler comme une Madeleine. J’avais besoin du soutien de quelqu’un, d’être accompagnée, juste au cas où !

Un choc ! Mais plus petit que ce que je croyais. C’est comme si ça devait être comme ça depuis longtemps. On a ri, on a eu les yeux pleins d’eau. L’infirmière était remplie d’empathie et de bienveillance envers nous deux.

Maintenant, Mathis se promène en chest au sortir de la douche, fier comme un paon.

Line Ferraro

Déploie tes ailes, mon grand!

Mathis aura droit à un très beau cadeau de Noël cette année. Il

Mathis aura droit à un très beau cadeau de Noël cette année. Il pourra enfin se départir d’une partie de son corps dont il n’a jamais voulu. Il va pouvoir continuer sa transition. Mon enfant est transgenre.

Cela fait maintenant deux ans que Mathis a commencé sa transition physique. Deux ans qu’il prend de la testostérone. Deux ans à le regarder se transformer physiquement. Deux ans à chercher le moindre signe qui me permettrait de croire qu’il changerait d’idée, qu’il garderait ses tout petits seins. Mais non! Il est prêt! Il le désire depuis si lonnnnngtemmmmmps!

Bientôt, la chirurgie pour faire disparaître ses petits tetons aura lieu. Pour lui, la période d’attente a été une éternité. Pour moi, c’est beaucoup trop rapide. Une autre étape à vivre dans la transition de ma doudoune. Une autre étape à vivre dans mon deuil.

Nous avons rencontré la chirurgienne en septembre dernier. Elle est spécialisée dans ce type de chirurgie. Dans la salle d’attente, quelques parents accompagnent leurs enfants. Par curiosité, je les observe. Je voulais voir leurs yeux. Je voulais essayer de voir leurs émotions, je voulais voir si l’on ressentait la même chose. Mais chacun semblait dans sa bulle. Un peu malaisé. La peur du jugement? L’inconnu? Je ne sais pas!

J’ai peur! Peur de m’effondrer devant lui. J’ai peur pour lui. J’ai peur des autres. J’ai peur de sa réaction après la chirurgie. J’ai peur de MA réaction. Est-il vraiment prêt à subir une mastectomie? Est-il conscient de tout ce que ça implique? Qui va faire un suivi avec lui par la suite? Sera-t-il plus heureux? Plus libre? Plus ancré dans la vie? Dans sa vie? Aura-t-il besoin d’un soutien psychologique?

Il était tout heureux de m’appeler au travail pour m’annoncer la grande nouvelle. Pour me dire qu’il avait reçu un appel pour son premier rendez-vous. Moi je lui ai dit que j’étais très occupée et que je ne pouvais pas lui parler… j’en étais incapable! J’avais trop le motton… je me suis trouvée vraiment poche!

À qui puis-je parler de cette situation? Qui peut me comprendre? Qui peut consoler ma peine? Il y a très peu de ressources pour les parents d’enfants transgenres. Cette étape est la plus difficile à vivre pour moi. C’est certain qu’il y a la famille, les amis. Mais personne n’a vécu cette situation.

Mathis attend impatiemment de pouvoir se promener le torse nu en sortant de la douche, de ne plus porter son chest binder, de pouvoir se baigner sans porter de chandail. Il veut être fier de porter ses poils sur son chest et de les montrer.

Depuis qu’il sait que l’opération est proche, il y a quelque chose de nouveau qui se dégage de lui. Il semble avoir déployé ses ailes, il semble plus léger. C’est drôle, car dans le bureau du médecin, il y avait une toile d’un beau papillon…

Vas-y mon grand! Déploie enfin tes ailes! Je serai toujours là pour t’accompagner et te soutenir, même si parfois mon cœur chavire encore et toujours. Je t’aime mon grand!

Line Ferraro

 

Notre vasectomie

Le rendez-vous pour la vasectomie est prévu le mois prochain.

Le rendez-vous pour la vasectomie est prévu le mois prochain.

On a décidé d’avoir nos enfants quand nous étions encore très jeunes, pour pouvoir profiter d’eux encore plus longtemps. Nous avons eu plusieurs enfants et formé une belle grande famille. Malgré tout, on n’a jamais eu le déclic qui nous confirmait que c’était fini pour nous.

Vous savez, LE déclic… Quand on demandait à nos amis s’ils désiraient d’autres enfants, peu importe qu’ils soient parents de 1, 2, ou 3 enfants, ils nous répondaient sur un ton ferme et assumé : « Ho non! On en a assez, c’est fini les bébés pour nous! ». Et nous, on n’a jamais ressenti ce déclic-là, ce sentiment que nous étions rendus ailleurs…

Mais le temps a passé et l’eau a coulé sous les ponts. Les enfants ont grandi et nous, on a vieilli. Notre aînée aura neuf ans… La plus jeune entre à l’école… et la raison a commencé à prendre le dessus tranquillement…

Le rendez-vous pour la vasectomie est prévu dans deux semaines.

Les enfants sont grands, c’est fini la poussette, la coquille dans l’auto, les couches et les nuits blanches. Les enfants sont de plus en plus autonomes et les matinées de plus en plus tardives. On profite d’une nouvelle liberté. On peut faire des sorties amusantes, des voyages plus longs et plus éloignés…

On prépare les repas en amoureux pendant que les enfants jouent dehors, seuls. On n’a plus besoin de garder un œil constant sur eux, de peur que l’un d’eux déboule les escaliers, avale un raisin-pas-coupé ou décide de tester les prises de courant…

Je vous l’avais dit, la raison prend le dessus… Mon corps ne tolère plus les hormones et les pilules contraceptives, on a donc besoin d’un moyen plus définitif pour assumer notre décision. Je dis ça comme si on avait vraiment pris une décision, et comme si on l’assumait… Ce n’est pas vraiment le cas pourtant. On se range du côté de la raison tranquillement et on fait taire nos cœurs de parents.

Le rendez-vous pour la vasectomie est prévu dans une semaine.

Parce que pour nous, les couches, les nuits blanches, les sorties, la poussette et tout-le-tralala, ce ne sont pas des enjeux réels… Mon cœur de maman rêve encore secrètement d’allaiter, de bercer, de border et de prendre soin d’un petit nous… Mon cœur de maman sonne l’alerte bien fort, mais c’est encore la raison qui prend le dessus…

La société québécoise actuelle n’est pas conçue pour les familles nombreuses… Les enfants ont grandi et nous, on a vieilli. J’ai arrêté de prendre la pilule il y a huit mois et je ne suis pas tombée enceinte depuis… Je pense que la vie se range aussi du côté de la raison. La vie veut peut-être nous faire comprendre que c’est bel et bien fini, pour nous aussi. Et nous, on a toujours fait confiance à la vie. Si quelque chose doit arriver, ça arrivera. Sinon, c’est que ça ne devait pas se produire.

Le rendez-vous pour la vasectomie est prévu demain.

Nos cœurs de parents crient à l’unisson ce soir. Mais la raison a pris le dessus. Il faut qu’on apprenne à faire notre deuil. Je dois faire mon deuil de la grossesse, de l’allaitement, du portage, des berceuses… Ce soir, on laisse nos corps s’unir et la vie décider.

Je suis au travail. L’amour de ma vie est allé à son rendez-vous seul. Il me texte. L’intervention s’est bien déroulée. Il est déjà de retour à la maison. C’est vrai cette fois… C’est fini pour nous aussi. Je le réalise tranquillement et mon cœur fait un gros bond. Je sais que je vais appréhender ce deuil en douceur. Le soir venu, il me prend dans ses bras et je sais que nos cœurs raisonnent encore à l’unisson.

Les jours passent, son corps cicatrise et le deuil commence à se faire… Dans quelques semaines, le spermogramme nous confirmera que tout est bel et bien fini. C’est l’une des décisions les plus difficiles que nous ayons eu à prendre dans nos vies. Une décision où la raison a pris toute la place et où les sentiments ont été mis de côté. Parfois, c’est juste la bonne chose à faire. Ma tête comprend, mais mon cœur est encore en apprentissage…

 

Joanie Fournier

 

Le don d’organes : signez donc!

En écoutant Deux filles le matin ce matin au garage, l’i

En écoutant Deux filles le matin ce matin au garage, l’inspiration et les souvenirs me sont revenus. Je ne parle pas souvent de ces souvenirs douloureux pour la famille de mon défunt conjoint, mais ce matin, j’avais le goût de vous dire : SIGNEZ! Signez votre carte pour le don d’organes, c’est tellement important!

Il y a déjà 14 ans, mon beau-père a été greffé. Eh oui, mon défunt conjoint a eu un cœur artificiel, mais mon beau-père aussi! Beau-papa a vécu avec un cœur mécanique pendant presque deux ans. Deux années difficiles à vivre avec une batterie… deux années à traîner le poids de son cœur à sa ceinture. Pendant ces deux années, il y a eu de grosses épreuves.

Presque un an après l’implantation du cœur mécanique, celui‑ci a fait défaut! Imaginez ça, votre cœur mécanique qui lâche. Le son infernal de la batterie qui vous avertit que plus rien ne fonctionne. Premiers répondants, ambulanciers. Et le voisin qui pompe manuellement cette batterie qui le maintient en vie.

Ils ont dû changer le cœur mécanique, car aucun cœur n’était disponible pour lui. Et si tout le monde signait se carte, aurait-il eu à subir cette intervention qui l’a laissé dans un coma pendant un bon deux semaines?

C’est en novembre 2004 aux petites heures du matin que l’appel est entré. On avait enfin un cœur pour beau-papa. Un mois et demi avant, j’avais appris que j’étais enceinte. Notre bébé aurait un grand-papa qui pourrait jouer avec elle, la prendre. Mais tout ne s’est pas passé comme ça aurait dû. Suite à la greffe, quelques heures après sa sortie de la salle d’opération, beau-papa nous a quittés. Le cœur n’a pas résisté à la greffe.

Tout ce que mon beau-père voulait, c’était la greffe. Il a milité, est allé en entrevue à la télé, a participé à des événements pour le don d’organes. Il l’a eu son cœur, il en a fait du chemin pour se rendre là. Malheureusement pour nous, il n’a pas pu en profiter. Il n’est pas là pour profiter de ses cinq magnifiques petits-enfants, mais il l’a eue, sa greffe!

Quand on a annoncé à mon défunt conjoint que la seule solution pour lui était un cœur artificiel, un pont pour une greffe future le temps que ses organes internes se rétablissent, ce fut tout un choc. Lui qui avait toujours dit que JAMAIS, il n’aurait de cœur artificiel. Il a accepté de vivre cette épreuve pour nos enfants, pour moi, pour sa mère et sa sœur!

Il a eu son cœur artificiel 17 jours et oui, ses organes se rétablissaient, mais son foie était trop malade déjà. Il n’y avait plus rien à faire.

Aujourd’hui, quand je repense à toutes ces épreuves, je dis OUI! Il faut signer vos cartes, car on ne sait jamais si un ou deux membres de notre famille en auront besoin.

Annie Corriveau

Ma fille… Mon fils

Ma doudoune n’est plus! Je ne la vois plus! J’ai beau la cherche

Ma doudoune n’est plus! Je ne la vois plus! J’ai beau la chercher, elle s’est volatilisée. Il n’y a que ses yeux qui me confirment qu’elle a bien existé. Le regard lui ne change pas. Par contre, il y a une belle lumière qui n’existait pas auparavant.

Depuis plus d’un an, la testostérone a transformé son corps. Sa voix aussi. Je dois porter plus d’attention lorsqu’il parle, je le confonds souvent avec son frère. Ils ont le même timbre de voix. Et ça lui fait un p’tit velours lorsque je me trompe.

Je ne reconnais plus mon bébé et c’est parfois difficile. Je la cherche dans mes souvenirs, je regarde souvent des photos de son enfance pour me faire du bien, car mon cœur chavire encore à l’occasion.

Je l’aime de tout mon être, mais c’est parfois difficile de le suivre dans ses états d’âme, dans ses réactions dans tout ce que cela comporte comme changement. C’est tellement l’inconnu autant pour lui que pour moi.

Devant moi, physiquement, c’est un garçon. Mais qu’en est-il au niveau psychologique? J’aimerais être dans sa tête pour comprendre tout ce qu’il ressent, ce qu’il pense, ce qu’il vit. Mais comme plusieurs garçons de 18 ans, il ne s’exprime pas beaucoup, du moins pas avec moi.

Les changements ne se font pas assez vite pour lui. Pourtant son cou est plus large, ses épaules aussi. Ses mains, ses pieds, tout est différent. De petits poils se sont installés sous son nez et sur son menton. Il est fier d’avoir une moustache molle comme son frère.

Son tour de taille s’est épaissi. Il a engraissé et il a grandi un peu. Il revit une puberté, mais cette fois‑ci, c’est beaucoup plus fort, beaucoup plus épuisant. Il est impatient, frustré et boutonneux. Une chance qu’il n’a plus de menstruations. Il traverse cette étape une deuxième fois et c’est cent fois plus intense.

Ce n’est déjà pas facile de soutenir un adolescent et de l’accompagner dans tous les changements qu’il peut vivre, alors imaginez avec un jeune de 18 ans transgenre. Ouf! Pas toujours évident.

Les papiers pour qu’il puisse subir une mastectomie sont maintenant envoyés. Il connaît le nom de la chirurgienne qui l’opérera. Mais pas encore la date. Il est prêt. Il n’en peut plus d’attendre. Mon chum s’est occupé de faxer tous les papiers. J’en étais incapable!

C’est mon enfant et je souhaite qu’il soit bien dans son corps. Mais cette ablation des seins me bouleverse, me vrille le cœur, me rentre dedans comme un truck. La panique me pogne et la peur m’envahit.

À cette étape, c’est comme si cette opération confirmait que mon enfant a réellement une dysphorie de genre. Que c’est un fait observable, qu’il n’y aura plus de retour en arrière. Que Leane n’existera plus… J’ai de la peine dans mon cœur. Je me dois de faire mon deuil. Faire le deuil de ma fille. Dans mon ventre, il y avait deux filles… des jumelles pas pareilles!

Je dois passer par plusieurs étapes du deuil et ce n’est pas toujours évident. Par contre, je sais et je comprends la chance que nous avons qu’il soit toujours en vie et plus heureux.

C’est une grande partie de sa féminité qu’il veut voir disparaître à tout prix. Il n’en a jamais voulu de toute façon.

Cette étape est pour moi la plus déchirante. Et pour lui, c’est l’une des plus importantes.

En attendant, il fait du taping pour cacher ses seins. Il utilise un chest binder pour camoufler sa poitrine. Cette partie de son corps qu’il ne voulait pas voir se développer est si intensément compressée qu’il a subi une inflammation intercostale (muscles des côtes). Cette situation devait être très douloureuse, car il m’a appelée au travail en me disant « Viens maman! Je souffre! »   Mon bébé avait besoin de moi. Direction urgence. Deux heures plus tard, anti-inflammatoires et médicament pour l’aider à dormir.

Je sais que je serai là pour l’accompagner lors de son opération, je sais que je prendrai soin de lui.

Mon enfant laisse partir des morceaux de son corps pour mieux se reconstruire. Mais cette étape à franchir me fait mal à mon cœur de maman.

Line Ferraro

Deux petits tubes qui changent une vie…

Le jour de la chirurgie arrive. Notre fille, du haut de ses trois an

Le jour de la chirurgie arrive. Notre fille, du haut de ses trois ans, entre au bloc, souriante. Aujourd’hui, on lui pose des tubes et on retire les adénoïdes. C’est une chirurgie anodine, fréquente, voire banale. Tellement d’enfants se font poser des tubes ! Mais ça reste une anesthésie générale, et ce n’est pas une mince affaire. Après la chirurgie, les infirmières la transportent, encore inconsciente, jusque dans la salle de réveil.

Assise dans le corridor, j’ai regardé mon si petit bébé passer sur sa civière. Sans aucun signe de vie. Mon cœur n’a fait qu’un bond pour tenter de la rejoindre. Il a cessé de battre en la voyant inconsciente. Je ne pensais pas que cette image allait me hanter à ce point. Ma tête savait qu’elle n’était qu’endormie, mais j’avais l’impression qu’on m’arrachait le cœur.

Dans la salle de réveil, le chirurgien vient nous voir. Tout s’est bien passé. Elle va bientôt se réveiller. Il veut quand même nous expliquer que le liquide derrière son tympan était exceptionnellement épais. Il s’étonne que ça ne se soit jamais infecté. Il nous dit : « Cette intervention‑là va changer sa vie. » Je ne mesurais pas l’ampleur de ces mots sur le coup… J’avais trop hâte de serrer ma fille dans mes bras…

Quelques heures plus tard, elle obtenait son congé de l’hôpital… et sa vie avait changé. Je l’ai compris dès que je l’ai posée sur le sol, dehors. Elle regardait ses pieds, en tapotant le sol avec. Elle marchait solidement, d’un aplomb qu’elle n’avait jamais eu. Elle ne titubait pas et ne trébuchait plus sur ses propres pieds. « Cette intervention‑là va changer sa vie. » Maintenant, je comprenais ce que le chirurgien tentait de m’expliquer, alors que je ne pensais qu’au réveil de ma fille. Notre petite fille, depuis trois ans, n’entendait pas. Elle percevait certains sons, surtout les plus forts. Elle n’avait aucun équilibre non plus. Aucun spécialiste ne comprenait d’où ça venait.

Et là, tout bonnement, les mots du médecin prennent un tout nouveau sens. « Cette intervention‑là va changer sa vie. » La voix du chirurgien résonne encore dans ma tête. Ma fille me regarde, debout dans le stationnement. Elle fige sur place, les yeux grands ouverts, et me dit : « Maman ? C’est quoi ça ? » Je m’arrête sec. Tout d’abord parce qu’elle ne m’avait jamais posé une question, même aussi simple soit ‑elle. Mais surtout, je m’arrête parce que je veux prendre le temps de redécouvrir ce nouveau monde avec elle. Je m’agenouille à sa hauteur et tends l’oreille. Au loin, on entendait un seul son : le croassement d’un corbeau. Et je lui dis : « C’est un corbeau, Mélina. » Et tout naturellement, elle répète en prenant ma main : « Un corbeau, maman. » « Cette intervention‑là va changer sa vie… »

Ce jour‑là, on a roulé en silence jusqu’à la maison. Pas de radio dans l’auto. Juste les fenêtres baissées. Le vrombissement du moteur. Un chien qui aboie au loin. Une sirène de police. Un bébé qui pleure. Une nouvelle vie, remplie de sons qu’elle n’avait jamais entendus… Cette intervention‑là a changé sa vie.

Dans sa nouvelle vie, elle entend ses sœurs rire. Elle entend sa chanson préférée. Elle chante et danse sans arrêt. Et surtout, elle m’entend lui dire que je l’aime quand je la couche dans son lit le soir…

« Bonne nuit mon cœur, je t’aime. »

Joanie Fournier

Au petit trot…

S’en va le cheval avec ses grelots! Il frappe une bosse, je me

S’en va le cheval avec ses grelots! Il frappe une bosse, je me pète les deux gosses su’l bord du traîneau…

Vous aurez compris que j’ai eu l’intervention. Vous savez, celle à laquelle il faut parfois songer. Lorsque votre amoureuse est beaucoup trop jeune pour vous. Quand, à deux, vous avez déjà cinq enfants. Quand les alternatives de contraception sont limitées.

Couper le Canal famille.

Au départ, vous vous dites, c’est plutôt son choix. Qu’il n’y a jamais de « garantie » sur une relation amoureuse. Surtout quand elle est consommée si sporadiquement. Surtout quand un ami s’en mêle. Mais je suis de ces hommes qui croient que la femme en fait déjà trop. Qu’il faut démontrer son amour, pas juste le dire. À coup d’émoticônes.

Vous entrez à l’usine, la queue entre les jambes.

Brève description du processus. Un examen physique sommaire. Le docteur qui vous tâte le sac. S’il n’y avait rien à couper? Apprendre alors subtilement que vos enfants, ce ne sont pas les vôtres. Ensuite, l’attente de la date de l’intervention. Il est très en demande, ça ira à plus de sept semaines. Seul mon hamster se réjouit…

Vient le jour V. Le rasage, comme pour les danseurs du 281. La rencontre préparatoire. À sept. L’usine fonctionne à plein. Je serai le dernier de mon lot. Il y a eu un groupe avant, un autre suivra. Comme souligne l’infirmière : « Vous êtes mieux de sourire en sortant, pensez à ceux qui attendent! »

Étendu sur le dos, le paquet à l’air. On prépare le champ opératoire, c’est froid. Rien pour les détendre. Je ne suis définitivement pas un exhibitionniste. J’attends. Il est à faire l’intervention dans une autre pièce. Une chaîne de montage bien huilée.

Il entre, ça ira vite. En plus, il parle sans arrêt de tout et de rien. Scusez, ça ne vous tente pas de vous concentrer un peu? Ce sont mes bijoux de famille après tout. Sans doute un des moments les plus désagréables de ma vie. Ça tire beaucoup, trois injections seront nécessaires…

Retour à la maison. Comme un bon patient, je suis le protocole. De la glace, à trois reprises avant le coucher. Analgésiques. Qui seront mes amis pendant quelques jours. Moi qui n’en prends jamais.

Comment décrire le feeling depuis. Tiens, cette image. Un bébé écureuil pendu après. Craintif. Tout le temps. J’en connais au moins un que ceci fera rire. Moi, au moins, je la fais jouir…

Vous comprendrez ce que cet inconfort fait sur le moral des troupes. Le doute s’installe. Le hamster s’emballe. Son cousin suspendu à vos parties intimes. Vous arrivez, difficilement, à trouver une position pour dormir. Du matin au soir, cette « blessure au bas du corps ».

Des moments que je vais vivre seul. Je suis comme ça. Quand je ne suis pas d’humeur agréable, je préfère m’isoler. Les enfants sont prévenus, la mèche sera courte. Arrêtez de sourire…

Songez à la pression que ça met aussi sur ma relation. Déjà fragile.

Pour me changer un peu les idées, vivement les stupidités de la Bible Belt. Une loi a été déposée récemment. Pour limiter l’usage de la pilule bleue. Aux couples mariés et avec le consentement écrit de madame. Désormais, est‑ce que je serai interdit de séjour dans certains États? Après tout, ma décision est tout ce qu’il y a d’anti pro‑vie.

Je devrais trouver ça drôle, mais je suis trop occupé à douter…

michel

Le retour qui fait mal

Ce fameux matin-là, nous mettions fin à une attente d’un an pour

Ce fameux matin-là, nous mettions fin à une attente d’un an pour le suivi cardiaque de notre cocotte. Déjà deux ans depuis son opération à cœur ouvert! Le temps passe à une trop grande vitesse de croisière, je n’en reviens toujours pas. Du haut de ses quatre ans, elle a passé à travers cette tempête avec brio. Physiquement du moins…

Ce qui n’est pas mon cas.

Je ne suis pas encore remise de mes émotions. J’y réfléchis très, non trop, souvent. Dans ma tête, je retourne au moment de la quitter pour l’intervention chirurgicale et je revis ma détresse et mon impuissance. La boule dans mon ventre se reforme, ma respiration accélère et le sentiment de perdre le contrôle m’envahit. Je n’avais jamais pensé consulter de psychologue à ce sujet. Par contre, un jour, mon corps à tout simplement lâché. Il a décidé qu’il en pouvait plus. Il m’a tout bonnement dit : « Il est temps de te faire soigner, la grande! » Comment l’ai-je compris? J’ai fait une attaque de panique.

Je pensais mourir

À ce moment précis, je croyais sincèrement que j’allais mourir. Je n’avais jamais rien vécu de tel! Mais sérieux, quessé ça! Tu ne sens plus ton corps tellement il est engourdi et tu trembles au point d’en être étourdie. Bref, j’ai fini mon spectacle en ambulance, direction l’hôpital le plus proche (je ne peux pas faire ça comme tout le monde, chez nous… ben non! C’est bien mieux à la pharmacie entourée de plein de curieux!) C’est le médecin de l’urgence qui m’a annoncé que je venais de faire une solide crise de panique. Et qu’à m’écouter, cette crise était due à un choc post-traumatique. Ben voyons… J’ai pas fait la guerre en Afghanistan! T’sais, quand tu penses que ça arrive juste aux autres…

J’ai fait ce qu’il faut

J’ai dû trouver de l’aide pour passer à travers ce malaise qui me hantait régulièrement. J’ai dû aussi accepter de prendre des antidépresseurs. Que veux-tu? Si c’est pour le mieux. Lorsque tu dis à ton doc que tu n’as presque pas dormi depuis quatre ans, il ne s’étonne pas que tu en sois rendue là. Je commence à aller mieux depuis maintenant quatre mois…

Je suis plus réaliste que positive

En général, je suis plus négative et réaliste que positive. Je ne vis pas dans un village de licornes roses. J’appelle un chat un chat. Mais ce matin-là, j’étais beaucoup plus détendue que d’ordinaire. J’avais la conviction que les résultats seraient numéro 1. Que la cardiologue féliciterait ma fillette et lui dirait : « Beauté, on se voit l’année prochaine. » Ce matin-là, j’étais dans mon univers de poupées. Lorsque le médecin m’a détaillé le résultat des examens, j’ai senti le plancher se dérober sous mes pieds… Les oreilles me bourdonnaient… Tout ce que j’ai entendu clairement, c’est : « Malheureusement, le cœur de votre fille coule encore et une membrane s’est formée autour de l’aorte. Si dans quatre mois, il y a évolution, nous la remettrons sur la liste pour une nouvelle opération. »

Depuis ce jour, je revis mon cauchemar. Les nuits sont redevenues difficiles et ma fatigue me lasse. Je sais que je passerai au travers, car je le dois. Je le lui dois à elle. Je suis sa maman. Je suis son enclume. Elle pourra toujours compter sur moi. Mais honnêtement, je ne sais pas l’air que j’aurai lorsque je sortirai du bateau après la deuxième tempête. Je suis fière d’avoir fait les démarches d’aide pendant qu’il était encore temps. Cette fois-ci, j’ai décidé de le vivre autrement. Et en attendant la prochaine visite, je profite de chaque minute que la vie me donne pour dire à ma fille à quel point je l’aime.

Alexandra Loiselle-Goulet

Ma fille est maintenant mon fils

Ma doudoune, oups! Mathis va avoir dix-sept ans. Il sait maintenant

Ma doudoune, oups! Mathis va avoir dix-sept ans. Il sait maintenant ce qui se passe en lui. Il s’est informé sur ce qui se passait dans sa tête et dans son corps. Il peut mettre des mots sur ce qu’il ressent. Il a pris contact avec un jeune qui vit la même chose que lui. Il communique avec lui, lui pose des questions. Il ne se sent plus seul. Il peut enfin affirmer, confirmer qu’il est bien un garçon dans un corps de fille.

C’est pour cela qu’il m’a envoyé un texto pour me dire qu’il n’était pas bien dans son corps, qu’il n’était pas dans le bon corps. Biologiquement, mon enfant est né fille, mais son cerveau lui dit le contraire. Maintenant, je comprends tellement de choses! Mon fils a une dysphorie de genre, qu’on appelait autrefois un trouble de l’identité.

Après le choc de son coming out, j’ai versé beaucoup de larmes, je pleure encore cachée dans ma chambre. J’ai été en colère, car je me sentais coupable. Qu’est-ce que j’avais fait pour qu’il se sente ainsi? J’ai cherché de l’information sur le net, il n’y en a pas beaucoup. J’en ai parlé avec mon chum, mais il garde tout pour lui. Avec la jumelle de Mathis, qui est tout à fait à l’aise avec la décision de Mathis. Pour mon fils le plus vieux, c’est une autre histoire, mais comme il me l’a déjà dit : « Je comprends pas, mais je vais toujours l’aimer. »

Ce n’est pas toujours facile, l’angoisse me monte souvent à la gorge et m’empêche de respirer, mais je ne peux que l’aimer, le soutenir, l’accompagner dans sa transition.

Maintenant qu’il se sent de mieux en mieux dans son corps et dans sa tête, il est beaucoup plus calme, agréable, souriant, drôle, joyeux, moqueur, disponible pour ses études et ses apprentissages. Il ne fait presque plus de grosses colères, il est beaucoup moins impulsif et il me permet maintenant de l’embrasser, de lui faire des massages aux pieds, de gratter son dos, il veut parfois que j’aille le border, on fait des blagues ensemble. Cela faisait tellement d’années que je n’avais plus de contact affectueux avec lui. Il ne me laissait plus l’approcher.

N’ayez crainte, il est comme tous les autres adolescents que je connais, il passe par sa crise d’adolescence lui aussi! Et ce n’est pas toujours une partie de plaisir!

J’ai dû contacter le CLSC pour avoir une personne ressource pour aider Mathis à prendre la bonne décision. Une sexologue clinicienne a pris Mathis en charge et elle le voit régulièrement à l’école depuis le mois d’octobre.

Mon fils a fait sa transition sociale. Il se fait appeler Mathis par sa famille et ses amis. Nous utilisons le pronom « il », il nous parle de lui au masculin. Je le trouve fort et courageux. Je le découvre, j’apprends à le connaître.

Il s’habillait déjà avec des vêtements de jeune homme, donc pas si nouveau comme changement, et facile d’adaptation pour sa famille et ses amis.

Il en a parlé à deux de ses professeurs en qui il a confiance. La directrice, l’éducatrice spécialisée, le médecin de famille, la coiffeuse sont maintenant au courant.

Il s’est fait pousser le poil sur les jambes et sous les aisselles, un p’tit choc pour maman!

Il avait les cheveux longs jusqu’aux fesses, maintenant ils sont très courts. Il a perdu tout le blond doré de ses belles bouclettes… Un autre choc pour maman!

L’autre changement qu’il voulait faire le plus rapidement possible, c’était de cacher ses seins. Sa sœur jumelle, Mathis et moi sommes partis à Montréal, dans une ressource pour personnes trans pour qu’il puisse faire l’acquisition d’un chest binder (camisole d’un tissu extrêmement rigide qui permet de cacher ses seins) Nous étions tous les trois dans la salle de bain lors de l’essayage. On a eu quelques fous rires, ça nous a fait du bien.

Mais ça ne s’arrêtera pas là! Mathis veut se faire enlever les seins à dix-huit ans! Un ostie de gros choc pour Maman!

Je trouve ça pénible de savoir que mon enfant va souffrir physiquement lors de cette intervention. Même si je sais que présentement et depuis quelques années, il souffre psychologiquement. C’est comme un point de non-retour!

La sexologue nous a donné le numéro de la clinique du Dr Gosh. Il est le seul pédiatre au Québec spécialisé en la matière. L’attente fut longue pour Mathis. Il s’est mis en colère à plusieurs reprises, car ça n’allait pas assez vite pour avoir un rendez-vous, et c’est moi qui payais pour cela. Il devenait agressif envers moi. Une chance que j’avais du soutien moi aussi de la part de la sexologue et qu’elle m’aidait dans tout ce cheminement.

J’avais aussi besoin de m’exprimer sur ce que j’étais en train de vivre comme maman. J’avais besoin de comprendre, j’avais besoin de pleurer, j’avais besoin de dire tout haut ce que j’avais sur le cœur, sans jugement, sans taire ce qui me blessait au plus profond de mon être.

Mon bébé a choisi de vivre une vie différente de celle que je lui ai offerte.

Mon bébé a choisi un chemin de vie difficile. Et j’ai peur pour lui.

Peur qu’il souffre des commentaires et des jugements des autres. Peur qu’il ne trouve personne pour l’aimer comme il le mérite, peur qu’il vive de l’intimidation, peur qu’un jour il regrette…

Nous avons posé nos questions, Mathis aussi! Nous sommes repartis avec une requête pour des prises de sang et une prescription pour des bloqueurs d’hormones (transition médicale). Mathis a encore le temps et le droit de changer d’idée à cette étape. Mais je ne crois pas qu’il le fera. Mais pour moi, c’est rassurant! Il est très heureux de savoir qu’il n’aura plus à subir de cycle menstruel.

Prochaine étape, ce sera la thérapie hormonale qui va commencer autour du mois de juin.

Je m’arrête ici, car j’essaie de vivre une étape à la fois. Le « ici et maintenant »! Le moment présent!

Ha oui! Mathis est un jeune homme qui pogne avec les filles. Merci aux parents qui vont peut-être croiser le chemin de mon fils. Merci d’être ouverts d’esprit, merci de l’accepter, de ne pas porter de jugement. Merci de respecter le choix de vie de votre fille, de respecter mon enfant. Nous les adultes avons souvent peur des différences, peur de ce que nous ne connaissons pas, peur des qu’en dira-t-on. Mais donnez-vous la chance de connaître mon enfant, il est et il sera un homme d’une belle droiture.

Line Ferraro

Sa vasectomie

Chéri mari a bien passé presque deux ans avec son fameux papier. C

Chéri mari a bien passé presque deux ans avec son fameux papier. Celui qui le conduisait vers l’abattoir de la preuve absolue de la masculinité. Vous avez bien compris, la fameuse requête pour une vasectomie. Couper le canal famille, cut the balls, passer au bistouri bref, voilà que chéri a fini par appeler….

Certains hommes courent vers cette contraception en courant dès que la cloche sonne intérieurement que là, c’est terminé la famille. Moi, mon amoureux aurait eu une équipe de soccer si j’avais eu le four qui tournait rond. Pendant des années, il a patiemment attendu que je ressente l’envie de nous replonger dans l’aventure. Mais malgré mon désir d’enfanter présent, celui de ne pas avoir la capacité psychologique de perdre un autre petit ange, lui, était plus fort. Mais après plusieurs années, il a accompli son deuil.

Nous étions assis dans le bureau du médecin pour la première consultation. Le docteur a demandé : « Et si un de vos enfants décédait, est-ce que votre décision d’aujourd’hui serait différente? » Et mon tendre époux de répondre : « Rien ni aucun autre enfant ne pourra remplacer une ou l’autre… » La date fatidique fut fixée.

Ce matin-là, j’étais probablement plus nerveuse que lui. Quand je suis fébrile, j’ai tendance à ne pas être la meilleure version de moi-même. Comprenez, j’étais là pour le soutenir, lui tenir la main et tout. Mais je n’avais pas le sourire facile et j’étais à l’intérieur de moi. Oui, car voyez, ce matin-là, j’avais peur qu’il regrette. Peur qu’il ne le fasse que pour moi. Que cela le change à jamais, qu’il finisse par m’en vouloir. Alors dans le stationnement, je lui ai demandé à nouveau s’il était en paix avec ce qu’il s’apprêtait à vivre. Lui, son évolution était bien complète et il m’a confirmé sa motivation d’aller jusqu’au bout.

Assis dans cette salle d’attente remplie d’hommes qui s’en vont volontairement mettre un terme à leur capacité d’enfanter, je regardais celui qui m’avait choisie. Un gars si bon qui, par amour pour moi, pour nous, faisait ce choix. J’étais émerveillée par sa résilience et sa capacité d’aimer. Il m’a expliqué à nouveau comment cela se passerait et à quoi m’attendre à sa sortie. L’infirmière l’a nommé…

Le temps est alors devenu mon pire ennemi. Je suis un peu beaucoup control freak avec ceux que j’aime. J’ai comme le feeling que je dois être près d’eux, de lui quand ils vivent des trucs inconfortables. Alors les dix minutes où il m’a parlé sont devenues quinze, puis vingt minutes. Dans ma tête, il y avait des flammèches. Enfin, après un temps interminable, l’infirmière m’a convoquée.

Je suis entrée dans la cabine, il était couché, mes yeux ont croisé les siens. Il allait bien. Il souffrait un peu, mais tout s’était bien passé. Nous avons respecté le temps d’attente sécuritaire, puis nous sommes partis.

Bien sûr, mon Superman m’a offert de conduire… Euh… non, mon homme! Tu es copilote! Retour à la maison sans problèmes. Petit roupillon, bonne bouffe, jusqu’à présent mon patient était coopératif. Jusqu’à ce que les enfants arrivent.

Mes beaux-parents ont pris soin de notre marmaille et venaient nous les ramener. Mais il faisait chaud (nous étions en juillet). Chéri a donc décidé qu’il voulait aller souper chez ses parents. À bout d’arguments (et en même temps, c’était son corps!), nous sommes partis. On n’avait pas fait la moitié du chemin que là, il réalisait que ce n’était pas une bonne idée. La douleur devenait vive. Arrivé chez ses parents, il ne souhaitait plus qu’être dans son lit, glace incluse. On ne s’est pas éternisés, je vous le garantis! Il a compris que les consignes n’étaient pas faites pour rien.

Bref, les jours qui suivirent ont été un peu plus calmes et il s’est calmé le pompon. Les mois passent et là, il faut bien aller passer le spermogramme qui prouvera que la procédure est un succès. Mais ça, ça veut dire que c’est pour vrai…

 

Martine Wilky