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Journée mondiale des soins palliatifs : Bon voyage à New York, madame Dubé – Texte : Marie-Ève Massé

Il est 5 h du matin. Je passe de chambre en chambre comme une petite abeille. Chaque résident doit

Il est 5 h du matin. Je passe de chambre en chambre comme une petite abeille. Chaque résident doit être changé et positionné en prévision du déjeuner qui sonnera la première étape de l’équipe de jour.

J’entre dans la chambre de madame Dubé.

— Bonjour !

— Hahaha ! Bonjour !!!

— Et que j’aime venir vous voir, vous ! Un vrai rayon de soleil !

— Ah oui ? Haha !

— Oh que oui, j’aimerais tellement ça me réveiller de bonne humeur chaque matin comme vous. Moi, je suis tellement grognonne quand je me réveille !

Elle prend ma main doucement.

— On choisit pas hein ? Fais-toi z’en donc pas avec ça, c’est pas de ta faute !

— Vous avez bien raison. Comment a été votre nuit ? Bien dormi ?

— Oh oui, j’ai fait de beaux rêves !

— Génial ça !

Je saisis la crème et lui enrobe doucement les pieds.

— Oh madame ! Que ça fait du bien ça ! Mmmmmm ! Ça fait du bien !

Je rigole doucement.

— Vous devez être la personne la plus démonstrative qui montre le plus d’appréciation de la crème hydratante au monde.

Elle rigole. Elle réagit toujours comme ça, c’est presque décevant de ne pas prendre le temps d’hydrater sa peau asséchée par le temps.

— Pis ? Votre voyage à New York ?

Je l’agace souvent avec ce genre de question. Une fois, je lui parle d’aller danser, une autre de voyage. Ça la fait généralement rigoler. Parfois, elle est trop confuse pour comprendre le gag, mais souvent, elle embarque et l’espace d’un instant, on « fait semblant » qu’elle a des projets plutôt qu’une autre longue journée dans son lit à sommeiller.

Mais aujourd’hui, elle ne semble pas saisir où je m’en vais avec ça. Elle me fait de gros yeux confus.

— Heeeiiinnnn ?????

— Vous alliez pas à New York bientôt, vous ?

Je m’essaye, au pire elle va juste m’ignorer ou je vais passer pour celle dans les patates.

— À New York ? Moi ça ?

— Oh, je me trompe de personne ?

— Ah !!! Non ! C’est remis à lundi !!

Et son rire clair transperce les murs pendant quelques secondes, le mien aussi.

— Passez une belle journée, madame Dubé.

— Toi aussi, ma petite fille !

— Et bon voyage là !

Je sors de la chambre obscure en l’écoutant rigoler doucement.

Quelques heures plus tard, pendant que la préposée de jour l’enduisait à nouveau de crème, madame Dubé s’est doucement éteinte.

J’espère vraiment qu’elle aura l’occasion de voler jusqu’à New York lundi. Qui sait, elle visitera peut-être Central Park sur ses deux pieds ?

Marie-Ève Massé

Le jour où le monde a changé

C’était un après-midi du mois de mars. Je l’avais senti. Dans

C’était un après-midi du mois de mars. Je l’avais senti. Dans ma classe, je remplissais des bacs de livres, de matériel pédagogique, d’albums jeunesse… Ça flottait dans l’air ; les écoles allaient fermer.

Et c’est ce qu’on a annoncé.

Et tout a basculé, petit à petit.

Je me souviens d’avoir trouvé ça intense, m’être demandé si tout cela était réellement justifié. En quelques jours, j’ai compris. J’ai vu des frontières se fermer. J’ai craint pour des amis coincés à l’étranger. J’ai eu peur pour ma sœur, infirmière aux urgences.

Je me souviens d’avoir hésité avant d’acheter mon premier masque, avant de le porter, surtout. J’aurais souhaité porter une étiquette sur laquelle j’aurais inscrit : « Je ne suis pas hypocondriaque, je le fais pour toi qui as peut-être une santé fragile. » J’étais gênée !

Petit à petit, les mesures se sont resserrées. On a fait la file. On a appris à se distancer.

Je me souviens d’avoir compris que le masque n’était désormais plus une option.

Et il y a eu ce confinement. On a redécouvert les jeux de société. On a nettoyé la maison. On s’est collés.

Le printemps est finalement arrivé.

Puis, il y a eu le retour en classe. J’ai eu peur, j’ai eu hâte, j’ai dû redoubler de créativité pour rendre ce retour doux et agréable. J’ai dû rassurer des parents anxieux, sans avoir de « bonne réponse » à leur offrir. Garder son enfant ou le retourner en classe ?

On s’y est fait. On a apprécié les petits groupes. On a vu rayonner des enfants qui sont habituellement dans l’ombre.🌟 C’est ce que j’ai vu de plus beau !

Il y a eu l’été. J’ai espéré très fort des vacances normales… Elles ne sont jamais arrivées. Il y a toujours un symbole, un distributeur de Purell, un masque pour nous rappeler que la pandémie bat son plein.

Et il y a eu tous ces décès. Trop. Toutes ces familles qui ont perdu un être aimé.

J’ai une pensée pour toutes ces familles. J’espère sincèrement que toi qui voyages en ce moment, toi qui n’as pas su patienter quelques mois encore… J’espère que tu auras la décence de respecter la quarantaine qui te sera imposée, et ce, pour toutes les personnes suivantes…

Les gens de la santé

Les concierges

Les gens du milieu de l’éducation

Les restaurateurs

Les employés de l’hôtellerie

Les petits commerçants

Les endeuillés qui n’ont pas pu vivre une cérémonie à laquelle ils auraient eu droit, privés d’accolades réconfortantes

Les grands-parents

Les petits-enfants privés de leurs grands-parents et de leurs cousins/cousines

Les étudiants

De grâce, respecte cette quarantaine. J’ai tellement hâte de repartir, moi aussi. J’en rêve tous les jours !

Toi qui as plié bagage pour refaire le plein, j’essaie très fort de ne pas te juger, je t’assure. Tu as tes raisons, j’en suis convaincue.

Maintenant que tu auras pensé beaucoup à TOI, je t’en implore, pense aussi à NOUS…

💝

Karine Lamarche

T’aurais pu me le demander

J’ai remarqué chez les couples que je côtoie qu’il semble y av

J’ai remarqué chez les couples que je côtoie qu’il semble y avoir une des deux personnes qui fatigue plus vite à voir la vaisselle s’empiler dans l’évier ou les boules de poussière s’accumuler sous le divan, ou qui remarque avant l’autre qu’il manque de pain pour préparer les sandwichs pour les lunchs scolaires des enfants. « T’aurais pu me le demander » devient alors l’hymne répété par le partenaire qui, aux yeux de l’autre, ne fait pas sa part de tâches ménagères.

Lorsque mes amies se confient au sujet de leurs querelles maritales, c’est souvent ces irritants qui érodent leur quotidien. Et je dois avouer d’emblée que ma situation est particulière parce, bien qu’ayant passé trente ans de ma vie au Québec, je vis aux États‑Unis depuis près d’une décennie. On a beau penser que la réalité de nos voisins du Sud est similaire à celle du Québec en raison de la proximité géographique, je vous assure toutefois que, sur le plan de l’égalité domestique (et du travail en général), ils ont du chemin à faire. Ce n’est pas rare ici de voir la femme s’occuper encore de la vaste majorité des tâches en lien avec le ménage.

D’abord, évidemment, la religion joue un rôle important dans la perception des responsabilités dans le couple. Surtout dans les États du sud où l’on prône des valeurs « traditionnelles ». Même sur le marché du travail, le sexisme est légion, et mon expérience personnelle est parsemée de plusieurs exemples.

Ensuite, la réalité socio-économique est différente, surtout pour les familles avec des enfants. Ici, pas de garderies à 5 $ ni de soins de santé universels. Les services de garde et de la petite enfance sont plus près de 50 $ par enfant par jour et il en coûte 200 $ pour une visite chez le pédiatre (avec des assurances). Sans compter les coûts associés au prix démesuré des médicaments et les autres responsabilités financières liées à la maternité et à la famille. Demandez‑moi si j’ai été surprise de recevoir une facture de 35 000 $ après avoir accouché de mon premier enfant dans un hôpital américain…

Les familles font aussi des sacrifices afin d’économiser des dizaines de milliers de dollars pour faciliter l’accès à un enseignement supérieur pour leurs enfants. Même avec le soutien de leurs parents, les étudiants universitaires reçoivent leur diplôme criblés de dettes et se lancent dans un marché où les contrats de travail sont rares. Ici, on travaille de gré à gré (donc sans contrat) et dans plusieurs États, un(e) employé(e) peut être remercié(e) sans raison et sans préavis.

Il est donc surprenant de constater que pour plusieurs familles avec de jeunes enfants, c’est tout de même parfois moins avantageux d’avoir deux parents travailleurs que d’en avoir un qui reste à la maison. Si l’on tient compte des frais associés avec la garde d’enfants, les horaires d’école, les conditions de travail précaires et les pressions trop souvent injustement exercées sur la mère par l’employeur (la maternity tax), les conditions favorables à un retour au travail après une grossesse ne sont pas souvent pas au rendez-vous.

Dans un marché professionnel sexiste où le congé parental est encore un rêve inaccessible pour la majorité et où monsieur gagne en moyenne 25 % de plus que madame pour le même poste, c’est plus souvent plus qu’autrement maman qui reste à la maison.

Alors au pays de l’oncle Sam, en 2020, c’est encore maman la reine du foyer.

Mais pas trop vite. Reine, pas sûre. Boss des bécosses… peut-être.

J’ai des amies qui vivent dans une situation familiale que l’on qualifierait ailleurs d’abusive. Puisque monsieur travaille à l’extérieur de la maison, il contrôle les finances. L’épouse qui « ne travaille pas » passe ses journées à s’occuper des enfants et des aînés, organise des activités éducatives, fait le taxi, gère l’agenda de la famille, fait l’épicerie et les courses, prépare les repas, passe l’aspirateur, lave la vaisselle, fait le lavage, range les vêtements des enfants et (oui oui) ceux de monsieur. C’est important qu’il réussisse et ait de belles chemises propres et repassées. Juste pas assez important pour qu’il prenne le temps de s’en occuper lui-même. Parce qu’il s’entraîne la fin de semaine. T’sais.

Est-ce louable de soutenir son conjoint? Bien sûr. La réciprocité du geste promeut une relation saine. Malheureusement dans ces situations, on est souvent loin du travail gratifiant. Et des Real Housewives. Être maman à la maison, ce n’est tellement pas boire du rosé toute la journée en se prélassant au soleil!

Je vais à contre-courant de la culture locale, car je crois que l’égalité entre les sexes commence à la maison. Je souhaite offrir un exemple différent à mes deux garçons qui, je l’espère, seront féministes. Pour ces raisons, quand il est question de tâches domestiques, je ne demande pas d’aide à mon mari. Pas plus qu’il ne me demande d’assumer le rôle de la femme de ménage. Comment ça marche? Nous avons divisé les tâches ménagères ensemble et nous revisitons le sujet régulièrement afin de nous assurer que le fardeau est équitable. Entre les années où j’étais à la maison avec les enfants en passant par d’autres où je travaillais à temps plein hors de la maison, mes responsabilités ont changé. Les siennes aussi.

Cette approche me vaut souvent des remarques sournoises voulant que j’aurais domestiqué mon conjoint et que je suis chanceuse d’être dans une union moderne. La vérité est que je ne serais pas en couple avec une personne aux attentes irréalistes, misogynes et ridicules envers moi. Je suis tout à fait d’accord avec Melinda Gates et Warren Buffet qui ont dit que la décision la plus importante d’une vie, c’est le choix de notre partenaire. Ceci dit, j’en ai choisi un bon et le mérite lui revient.

Mais c’est loin d’être parfait. Il m’a récemment vu bardasser en lavant la vaisselle qui s’accumulait (encore) dans l’évier et m’a dit « J’allais la faire. T’aurais pu me le demander ».

[Insérer ici un soupir exaspéré]

Je lui ai dit…

J’aurais pu te le demander, mais pourquoi ne l’as-tu pas faite de ton propre chef? Je ne suis pas ta mère ni la gestionnaire des tâches ménagères. C’est m’en mettre trop sur les épaules que d’attendre que je te demande de l’aide. Cette attitude est injuste et irresponsable parce qu’elle sous-entend que c’est ma responsabilité de m’assurer que les tâches, incluant les tiennes, sont faites. C’est un mauvais exemple pour nos enfants.

Nous sommes deux adultes dans cette maison et nous avons une entente de répartition des tâches. Tu as accepté la responsabilité de faire la vaisselle après le souper (parce tu détestes cuisiner et préfères la vaisselle à la cuisine), alors c’est à toi de t’en souvenir. Tu as des yeux et tu peux voir que la vaisselle s’est accumulée ces derniers jours.

Tu n’as pas eu à me rappeler, toi, que nous allions avoir faim pour le souper ce soir et qu’un repas devait être sur la table pour les enfants, non? Que l’épicerie devait être faite? Que nous allions avoir besoin d’acheter un cadeau pour la fête d’enfants d’Untel ce weekend? Moi aussi, j’ai mieux à faire que de te rappeler d’effectuer ce dont tu es responsable. Et puisque ça fait quelques jours maintenant que tu faillis à la tâche, je m’en suis occupée moi-même. Tu n’as pas respecté notre entente alors je suis fâchée. Normal, non? Pas de vaisselle, pas de cuisine. Demain tu t’occuperas du souper pour faire changement.

Pour avoir déjà eu cette conversation (il me faut toutefois l’admettre, il y a bien longtemps), il sait que ce ne sont pas des paroles en l’air et qu’il n’y aura pas de repas sur la table demain soir. Et puisqu’il préférerait recevoir un traitement de canal plutôt que de passer une demi-heure dans la cuisine, mon petit doigt me dit que le menu pour le souper demain sera celui de McDonald’s.

Et pourquoi pas? Comme ça, je n’aurai pas de vaisselle à faire. 😉

Geneviève Brown

Cette chance…

Me plonger dans la culture mexicaine, me donner un avant-goût de ce

Me plonger dans la culture mexicaine, me donner un avant-goût de ce que cela peut être que de s’abandonner dans l’inconnu… Partir avec un filet de sécurité😉, en terrain (un peu) connu.

Réaliser que des êtres humains, ça finit toujours par se comprendre, peu importe leur langue. Apprécier chaque moment de ce temps prêté, savourer ce qui s’offre à nous!

Faire des rencontres touchantes, écouter l’autre et saisir cette chance, ce moment parfait.

Voir, à travers les yeux de ses enfants, l’humanité à sa plus simple expression! Comprendre que les barrières, elles n’existent que dans notre tête. Ouvrir notre cœur et accueillir les confidences de cet étranger qui prend le temps de s’offrir à nous.

En discutant dans cette langue qui n’est pas la nôtre, en faisant chacun son bout de chemin, constater nos différences, mais s’étonner de ce qui nous unit. Réaliser combien un humain, ça peut être beau et simple.

Rentrer à la maison, la tête remplie d’images, de souvenirs, d’odeurs et de moments plus que parfaits.

Être conscient de cette chance et espérer que nos enfants le soient tout autant.

Avoir déjà hâte au prochain départ. Être prêt à plonger davantage…

🌟

Karine Lamarche

 

Tu es toujours là!

Le mois de septembre a toujours été un mois très spécial chez no

Le mois de septembre a toujours été un mois très spécial chez nous. Le mois de septembre est non seulement le mois des changements mais chez nous, c’est le mois de l’anniversaire de mon défunt conjoint. Ça va faire bientôt huit ans qu’il nous a quittés, mais il est toujours bien présent dans ma tête et dans mon cœur. Pour Martin, son anniversaire était très important. Pour lui, nous n’avions pas une journée de fête mais une semaine de fête. J’imagine que quand on grandit avec une maladie, chaque fête devient une célébration de la vie!

2019 est une année extraordinaire pour nous. Cette année, une occasion d’affaires incroyable s’est présentée à moi. Mon garçon, mon bébé, a commencé le secondaire, nous avons beaucoup voyagé et ma fille, ma belle ballerine adorée, a enfin ses pointes en ballet classique.

J’ai toujours cru aux signes. Il y a quelques mois, on m’a proposé de faire un voyage en France pour participer à un Bootcamp avec les dirigeants de la compagnie que je représente ici au Québec. Étant seule avec deux cocos, un travail à temps plein, l’organisation est de mise.

La France a toujours été un pays que Martin aimait énormément. D’ailleurs, pour ses quarante ans, je lui avais offert un week-end à Paris. Malgré la maladie et les longues promenades que Paris exigeait, nous avons fait un magnifique séjour qui restera à tout jamais gravé dans ma mémoire. Ses yeux quand il voyait tous ces lieux extraordinaires valaient tout l’or du monde. Il a exploré tous les endroits qu’il avait toujours rêvé de voir.

Malgré la complexité de planifier un voyage comme celui‑là, tout s’est mis en place naturellement. J’ai dû annuler les congés que je prends chaque année, soit pour sa fête le 18 septembre et pour l’anniversaire de son décès le 27 novembre, afin de prendre congé pour ce voyage. Curieusement, comme s’il me disait de foncer dans cette aventure, tout s’est arrangé. J’ai trouvé une jeune fille extraordinaire qui viendra dormir à la maison pendant mon absence et grand-maman sera aussi là quelques jours.

Grâce à la technologie, je pourrai voir ma fille essayer ses premières pointes de ballet et je pourrai rester près d’eux.

Et comme un signe qu’il est toujours là, en courant près de chez moi un matin, un beau papillon blanc est venu se coller à ma joue! Tu nous manques toujours autant…

Annie Corriveau

Ah les vacances…

Hourra, les vacances sont réservées, toute la famille est excitée

Hourra, les vacances sont réservées, toute la famille est excitée à l’idée de partir vers une destination lointaine. À nous le soleil, la mer et les cocktails! Mais voilà que je déchante un peu, car voyager avec des enfants, c’est comme monter le Kilimandjaro : même avec beaucoup d’entraînement quotidien, je me dis que je vais être encore plus fatiguée qu’au départ…

Premièrement, le défi des valises. Qu’est‑ce qu’on amène?! A priori, je me dis maillot de bain et la panoplie d’été, chapeaux, sandales, jupes… Mais si jamais il fait froid? Avec tous ces changements climatiques, la nature est capricieuse. Donc, je ne prends mes précautions : gros chandails, pantalons longs et même imperméable en cas de pluie. Pour les souliers, si on marche, je prends les souliers de randonnées, pour la plage, les sandales… J’apporte la pharmacie au grand complet. Voilà, je ferme de peine la valise, sans avoir oublié d’apporter le contenu du coffre à jouets, les crayons de couleur et les livres pour le soir.

Deuxièmement, le départ. Avion ou voiture, je prévois les grignotines, les jeux, les films, les vêtements de rechange. J’ai l’impression de faire une deuxième valise. À peine partis, ça crie, ça se plaint, sans parler du mal des transports et des arrêts pipi. La route va être longue, sans compter les travaux, les mauvais itinéraires du GPS.

Troisièmement, l’arrivée. Notre hôtel, la chambre, les lieux. Et là, catastrophe : la piscine est en rénovations, les lits sont trop durs ou trop mous pour les uns et les autres… Il y a toujours quelque chose qui cloche. Bon, ce n’est pas si grave, soyons positifs. Les vacances peuvent enfin commencer! Mais c’est sans compter le jus de raisin renversé sur mon livre, les lunettes cassées ou le méga coup de soleil. Et puis les repas, les files d’attente, le trafic, les algues, les piqûres de mouches… et quoi d’autre!?

Finalement, même si ce n’est pas parfait, et surtout très loin des photos des brochures publicitaires, je m’en fous. L’important, c’est de partager des moments ensemble, en famille. C’est ça les souvenirs de vacances! Sur ce, bonnes vacances à tous!

Gabie Demers

Rentrer au Canada, déjà?

Le bonheur n’est ni dans l’être ni dans l’avoir. Il est dans l’action, dans le plaisir

Le bonheur n’est ni dans l’être ni dans l’avoir. Il est dans l’action, dans le plaisir et dans l’amour.

(André Comte-Sponville)

 

Les vibrations de mon cellulaire me tirent de ma rêverie sous l’oranger…

 

C’est mon amoureux au téléphone : « Eli, es-tu bien assise? J’ai une grosse nouvelle à t’annoncer. »

Moi : « Oui, bien sûr, je t’écoute. »

Mon amoureux : « L’Armée veut nous ramener au Canada un an plus tôt que prévu. »

 

Aux côtés d’un(e) militaire qui se dévoue pour sa patrie, il y a généralement un(e) conjoint(e) et des enfants qui le soutiennent. Ceci est particulièrement vrai lorsqu’une famille s’expatrie pour le travail.

 

La nouvelle me fait l’effet d’une grande bourrasque. J’ai le souffle coupé. Trop d’air tout d’un coup. Le vent m’entraîne vers le haut. Je monte… monte… monte… sur la crête d’une vague immense. Et pendant l’ascension, mon cœur se gonfle… gonfle… gonfle… Se gonfle de quoi? Se gonfle de joie! Oh que oui!

 

Je suis presque aussi excitée d’apprendre notre retour au Canada que je l’étais d’apprendre notre départ en Italie! Contente de partir à l’aventure, mais tellement heureuse d’en revenir!

 

Je n’ai aucun regret d’être venue vivre trois ans (oups, deux ans!) en Italie. Mais c’est fou à quel point une expérience peut être dure et fabuleuse tout à la fois… En tant que parent, vous arriverez sûrement à me comprendre facilement parce qu’avoir des enfants entre définitivement dans la même catégorie insensée.

 

Oui, je le ferais encore. Je serrerais les dents à travers les instants plus éprouvants et je savourerais les beaux moments. Comme le philosophe André Comte-Sponville nous le rappelle si bien, ce n’est sûrement pas dans l’avoir que l’on trouve le bonheur ni même dans l’être (il suffit de passer vingt-quatre heures en tête-à-tête avec soi-même pour vite le réaliser), mais bien dans l’agir. C’est tout ce qu’on a fait en Italie qui nous a permis d’en ressortir plus forts. Les voyages à travers l’Europe, l’école à la maison, le bénévolat dans un refuge canin, notre implication auprès de la communauté canadienne, les cours d’italien, les sorties en bateau avec nos voisins, les amitiés développées… et même : l’écriture de billets pour les lecteurs de Ma Famille Mon Chaos!

 

Nous rentrons à la maison mûris et plus solides. Peut-être juste un peu plus fragiles pour affronter les prochains hivers canadiens… Je crois que j’aurais préféré ne jamais réaliser à quel point les Québécois se font rouler! Dame Nature est si clémente à Naples avec ses printemps verts, ses étés ensoleillés, ses automnes et ses hivers doux. Comment arriverai-je à supporter maintenant, les printemps gris : synonymes de sloche, de bouette et de pluie? Les étés inconstants et les hivers si frettes que la batterie de notre téléphone rend l’âme dès qu’on le sort de notre poche? C’est sûr que ce sera dur de renoncer au climat méditerranéen après y avoir goûté. Même si nous sommes heureux de rentrer au Canada, nous ne serons plus jamais tout à fait les mêmes Canadiens.

 

Elizabeth Gobeil Tremblay

Comment survivre au voyage scolaire?

Je ne sais pas si tu es le genre de mère comme moi mais…   Voir partir ma progéniture

Je ne sais pas si tu es le genre de mère comme moi mais…

 

Voir partir ma progéniture à vingt-sept heures de chez nous, je te dirais que ce n’est pas mon plaisir extrême.

 

En même temps, je lui souhaite tellement qu’elle vive plein d’aventures! Donc tu comprends bien que nous avons dit « oui ».

 

Ma fille est bilingue, alors pas de stress côté langue. Tu veux savoir mon plus grand stress? Ma fille oublie tout!

 

Pas un souper chez des amis sans message qui indique ce que grande fille a oublié.

 

Hors de question de laisser grande fille faire sa valise seule!

 

Sauf que de mon côté, je suis la psychopathe de l’organisation. Un peu plus et on m’enferme!

 

Je crée des listes à cocher, j’ai tout ensaché ses vêtements par jour dans des sacs en plastique.

 

C’est beau tout cela, mais comment s’est passé son voyage?

 

Super bien!

 

Le samedi, nous l’avons amenée à l’autobus. J’ai tellement bien fait cela, je te le dis! Aucune larme n’a dépassé de mes lunettes de soleil! Elle nous textait souvent, envoyait même des photos et des vidéos.

 

Le dimanche, nous avons eu droit à l’exposition d’Elvis presque en temps réel, en plus de recevoir des photos… de ses amis. Je les aime ses amis, mais c’est elle que je veux voir en photo!

 

Le lundi, son besoin de liberté a pris de la place : on n’a presque rien reçu. Je me gérais toujours, j’honore son besoin de distance.

 

Le mardi, surprise, elle m’a fait un FaceTime de quinze minutes. La joie que je vivais! Ses amies et elle me racontaient leurs péripéties et le plaisir qu’elles avaient. Ensuite, trois ou quatre photos seulement.

 

Le mercredi, elle nous a envoyé quelques photos ici et là, mais je savais que le détachement s’était fait. J’ai dû me calmer, me parler, car je savais que c’était un cheminement. Que si je tentais de la retenir, cela lui donnerait juste le goût de fuir. Je respirais.

 

Le jeudi a un peu été la répétition du mercredi, sauf qu’elle nous a fait un FaceTime en soirée pour son papa et moi. Nous étions comblés par ces dix minutes qui semblaient n’en être que deux.

 

Le vendredi, elle a entamé son retour et allait être assise dans un bus de nouveau pendant vingt-sept heures. Presque pas de nouvelles, encore moins de photos, mais on savait qu’elle s’en venait.

 

Le samedi, je me suis levée avec excitation : je savais que mon bébé revenait.

Quelques messages d’une ado fatiguée et qui avait hâte de manger de la « bouffe » à sa mère. C’est presque incroyable de penser que mon ado en avait marre de la malbouffe!

 

Je ne savais pas à quoi m’attendre à son arrivée. Est-ce que son désir de liberté aurait coupé notre cordon? Est-ce qu’elle deviendrait distante?

 

L’autobus est arrivé, les instants semblaient se figer. Les secondes me paraissaient des heures, mais enfin, elle a mis les pieds hors du véhicule.

 

Ses yeux nous cherchaient.

Nos regards se sont rencontrés et j’ai su immédiatement que notre cordon n’avait pas été coupé. Aucune distance ne peut être à l’épreuve de notre lien.

 

Elle m’a sauté dans les bras en pleurs, a embrassé son père, et même sa petite sœur lui a offert un câlin. Je me sentais complète.

 

Le retour à la maison a été pour moi comme un cadeau. Ma famille était de nouveau réunie. Il était vingt-trois heures, mais elle était excitée de nous offrir des présents et quémandait à manger. Elle était « down » pour nous faire défiler ses sept cents photos et tout nous raconter.

 

Pour nous, la pression retombait, je restais à la regarder manger et à me raconter ses moments. Je la trouvais magnifique, indépendante et curieuse. J’étais comblée, j’avais survécu au voyage scolaire.

 

Ah oui, tu veux sans doute savoir si ma fille a perdu quelque chose? NON.

 

Comme quoi il faut leur faire confiance et les laisser voler de leurs propres ailes pour qu’ils retrouvent le chemin de leur nid.

 

Martine Wilky

 

C’est la relâche : à go, on se compare!

À quoi ressemblera votre semaine de relâche? Des plans de voyage?<

À quoi ressemblera votre semaine de relâche? Des plans de voyage?

Selon les dires de mes enfants, TOUS les élèves de leurs classes partent en voyage chaque année à la semaine de relâche (et encore à Noël, à Pâques et pendant les vacances d’été). Nous sommes apparemment les seuls qui ne font pas le tour du monde dès qu’il y a une fin de semaine de quatre jours.

– Mon amie Ariel a passé la semaine à Disney avec ses grands-parents!

– Mon voisin Christophe est allé visiter l’Italie l’été dernier!

– Le cousin de la fille de mon enseignante revient de Los Angeles, elle a rencontré plein d’acteurs.

Tant mieux pour eux.

– Oui, mais, maman! Pourquoi nous, on ne voyage pas? On est les seuls qui restent ici.

– Vraiment?

Chaque année, nous avons la même discussion en famille.

Mes chéris, je comprends que vous aimeriez voyager et découvrir le monde. C’est vrai qu’ils sont chanceux, vos amis. Si leurs histoires de voyages sont vraies, évidemment (se pourrait-il, par hasard, que certains « inventent » des aventures vraiment cool pour bien paraître en classe? Et que dans la vraie vie, ils soient restés sur leur divan toute la semaine?)

Quand vous étiez plus jeunes, on a beaucoup voyagé avec vous. Avant d’entrer en maternelle, vous aviez déjà visité quelques états des États-Unis, la France, Monaco, Hawaii et l’Alberta. Votre terrain de jeux, c’était les Rocheuses de la Colombie-Britannique. On a visité une bonne partie de l’Ontario et du Québec avec vous. Pas si mal, quand même! Mais c’est vrai, on n’est jamais allés à Disney. Et c’est vrai, dans les dernières années, nos expéditions ne nous ont pas amenés aussi loin.

Pourquoi, donc?

Entre autres parce que par bout, vous avez des comportements tout à fait inadéquats en voyage. Je ne parle pas juste des petites chicanes de frères et sœurs ou d’un refus de dire merci à un serveur au restaurant. Non. Je parle de crises monumentales dans l’avion ou dans un musée. Je parle de pétages de coche destructeurs déclenchés par l’heure de dormir ou par un « les enfants, c’est le temps de rentrer ». Je parle de comportements qui effritent les relations familiales, qui dérangent les autres voyageurs et qui m’épuisent. Énormément.

Aussi parce que voyager avec quatre enfants peut coûter un bras, une jambe et une hanche. Juste prendre l’avion, pensez-y! 5 000 $ de billets d’avion, plus les repas, l’hôtel, les activités… disons que ça fait un pas pire trou dans un budget! Je sais, je sais, il y a des façons moins dispendieuses de voyager, et c’est là-dessus que je mise. Mais je me vois mal m’embarquer dans une semaine de camping dans le bois, seule avec deux ados et deux p’tits pets. Le défi me semble juste trop disproportionné par rapport à mes capacités actuelles. Ça changera sûrement dans les prochaines années, quand vous aurez grandi et que j’aurai repris confiance en moi.

Une des raisons pour lesquelles on ne voyage pas à l’étranger pour l’instant, c’est que je choisis de prendre le temps libre qu’on a en famille pour visiter les gens qu’on aime et de qui on habite loin, et aussi pour vous faire connaître des coins de notre monde. Les parcs, les plages et les musées de notre coin de pays sont diversifiés et valent la peine de les découvrir.

Je choisis aussi, une fois de temps en temps, de prendre ce temps pour nous tous seuls. Pour se coller en regardant un film dans la maison que j’ai choisie pour nous, pour que nous y soyons bien et que nous vivions de beaux moments. Si nous sommes toujours partis, à quoi ça sert d’avoir un nid qu’on aime?

Et même, mère effrontée que je suis, je choisis parfois d’avoir du temps pour moi, de ne pas être épuisée le soir après une journée de déplacements et d’activités à l’extérieur de la maison. Je choisis d’avoir le temps d’organiser notre espace de vie, de jardiner, de peindre vos chambres ou tout simplement de regarder nos plantes pousser. Ça aussi, ça donne des souvenirs mémorables, et ça permet de rendre la routine un peu moins folle le reste de l’année.

Disney existera encore dans dix ans (j’y suis allée pour la première fois pour célébrer mes quarante ans). Les avions continueront de voler. Et checkez ben ça le fun qu’on aura cette année encore à la relâche! C’est peut-être vous que les autres élèves envieront.

Nathalie Courcy

Voyage en couple ou en famille?

Salut mon amour,

Il y a mainten

Salut mon amour,

Il y a maintenant un bon moment qu’on ne s’est pas retrouvés juste tous les deux.

Avec l’arrivée du petit dernier et ta compagnie qui ne cesse de grandir, mon retour au travail et les devoirs du plus vieux qui sont de plus en plus exigeants…

Il y a longtemps qu’on n’a pas « flirté » devant une bonne bouffe… devant une soirée qui nous appartient.

Devant une semaine dans le sud juste à nous!

Souvent, je me dis « Là, ce soir, je couche les p’tits de bonne heure pis je donne la claque à mon chum, à notre couple! »

Une fois les dents brossées, les histoires lues, les 10 000 gratouilles dans le dos effectuées… Une fois qu’ils dorment enfin là… ben j’ai juste une envie : m’écraser dans ma doudou et ne plus dire un mot.

Pas parce que je ne t’aime pas ou parce que je n’en ai pas envie, mais je me sens brûlée, heureuse de tout mon être, promis, mais vidée de toute mon énergie aussi.

Notre dernier voyage en amoureux remonte à notre lune de miel, il y a cinq ans déjà. C’était fou. C’était parfait.

Dans mon top 5 des plus belles semaines de ma vie.

J’étais légère, j’ai fait des siestes chaque jour. Je te crémais sans que tu me le demandes. T’allais chercher mes verres et tu me massais chaque soir. On a plus fait l’amour en une semaine que dans la dernière année à peu près! Et surtout, on a jasé, on s’est confiés. Seigneur que tu m’as manqué en tant que mari, en tant que BF.

Ça m’a confirmé à quel point je t’aimais et combien j’étais chanceuse de t’avoir, qu’on s’ait.

J’entends tout le monde nous dire : « Ça prend un voyage ensemble et un en famille pour un équilibre parfait. »

Mais là, la saison des voyages se prépare et je suis incapable de partir juste avec toi, juste nous.

Parce que pour l’instant, je ne suis pas là; je suis incapable de me détacher d’eux.

J’imagine bébé avec ses petits flotteurs, les cuisses qui frottent, courir contre les vagues, heureux comme pas possible! Et notre kiki qui se bourre la face dans les nachos… les yeux brillants de gratitude. Je te vois disponible pour les deux toute la journée. Les lancer dans l’eau et jouer au volley. J’ai besoin de les entendre crier « Encore ppapaaaa» et que tu me regardes en souriant! Parce qu’eux aussi, ils courent et sont fatigués de la routine, ils partagent leurs parents avec plein de monde et s’ennuient de ne rien faire avec nous, de pouvoir jaser et qu’on ait juste eux à écouter… De passer une semaine dans une chambre d’hôtel et manger des pancakes pendant sept jours!

Et de voir leurs parents amoureux.

Patients et ressourcés.

On attendra qu’ils dorment et on fera l’amour ben vite dans les toilettes. Ça ne sera pas la semaine aussi torride et reposante que l’on a déjà connue, mais ce sera autre chose, ce sera notre réalité, notre vie. C’est sûr qu’à un moment (ou à plusieurs) dans la semaine, on se regardera en se demandant bien certainement pourquoi on n’a pas accepté l’offre de ma mère de les garder?

Mais t’sais.

Je sais pas, je me sens comme ça. Je me sens maman ourse cette année, mon amour…

Je m’ennuie de nous, mais je me sens égoïste de les laisser.

Égoïste de penser à nous quand eux aussi font partie de nous. Peut-être encore pour bon nombre d’années, mais nos voyages à quatre sont quand même comptés… Bientôt, ils voudront voyager avec leur monde, leur famille, et nous, on n’aura plus le choix que de se choisir à nouveau. Pis maudit que j’ai hâte à ça. Mais là, choisissons‑les!

Tu comprends mon amour?

Lisa-Marie Saint-Pierre

 

Veuillez laisser un message ou revenir plus tard… nous sommes partis à la chasse au volcan!

Jeudi matin 23 août 2018

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Jeudi matin 23 août 2018

La fin des vacances approche… Je profite d’un dernier matin tranquille avant de reprendre la routine d’école à la maison avec les enfants. Mon amoureux, lui, est déjà rentré au travail. Je regarde distraitement mon fil d’actualité lorsqu’une nouvelle capte mon attention : « Hé! On dirait que l’Etna est entré en éruption. » Mon plus vieux réagit encore plus intensément que je l’anticipais : « Quoi? On fonce! » Moi : « Voyons, c’est impossible. » Et lui (armé de ses dix ans et de ses yeux pétillants) : « Oui maman, on peut le faire. Tu sais que je rêve de voir de la lave! »

Mmm… Il n’a pas complètement tort. C’est faisable. Nous habitons la région de Campi Flegrei près de Naples. Notre quotidien se déroule donc sur un énorme volcan qui pourrait exploser n’importe quand sans crier gare (mais si ça arrivait, nous ne serions plus en vie pour admirer le spectacle…) Nous avons aussi une splendide vue sur le Vésuve, définitivement (et heureusement) très tranquille. En une heure d’avion, nous pourrions nous rendre en Sicile, l’île où se trouve l’Etna. Nous avons du temps et des sous en banque, en prévision de nos trois prochains voyages (la mythique route des vins de Toscane, un opéra à la célèbre Scala de Milan et les superbes villages de pêcheurs de Cinque Terre). Je sais qu’aucun de ces voyages ne fera briller les yeux de mes enfants comme le fait d’embarquer dans une chasse au volcan spontanée. On pourrait peut-être remplacer un des voyages inscrits au calendrier par cette aventure imprévue…

OK, on va appeler Papa…

Moi : Bonjour mon amour, bon dixième anniversaire de mariage.

Mon amour : Bon anniversaire. Je t’aime…

Moi : Moi aussi je t’aime. Je te passe ton fils.

Mon amour : ?

Fils : Bonjour, l’Etna est entré en éruption strombolienne. Tu voudrais prendre congé demain? J’ai vérifié sur Internet et on pourrait partir à sept heures trente ce soir pour la voir.

Papa : OK, je vérifie ce que je peux faire.

Mon grand est optimiste. Il a détecté de l’ouverture dans la voix de Papa. Je commence déjà à penser à la logistique… Il faudra contacter nos amis qui font l’éducation à domicile en Sicile. Peut-être qu’on pourra les voir… Zut! Je me rappelle juste à ce moment qu’on annonce du mauvais temps là-bas. Une tempête pourrait gâcher les plans qui commencent à peine à prendre forme… Si nous n’avons qu’une soirée pour observer un volcan, un ciel dégagé est définitivement un élément essentiel à la réalisation du projet. La déception remplace rapidement la fébrilité. Nous venons de perdre l’espoir de voir les feux de l’Etna aujourd’hui…

Les trois jours qui suivent sont une vraie montagne russe d’émotions. L’anxiété m’envahit lentement comme ma propre marée de lave rampante bien à moi… Si j’avais pris l’avion le jour même, j’aurais probablement continué à rouler sur l’excitation. Mais, à tête refroidie, les questionnements prennent le plancher et instillent le doute. J’ai peur de faire une erreur. L’adrénaline a-t-elle été bonne conseillère? J’ai l’habitude des décisions réfléchies, raisonnables et responsables. Ce volcan m’a branchée sur l’impulsivité, le courage et la démesure.

Comment les enfants réagiront-ils si nous ne voyons rien? Il suffirait d’un gros nuage accroché au sommet de la montagne pour nous empêcher de voir ce phénomène exceptionnel. Un phénomène qui peut s’interrompre à tout moment…

Les enfants sont zen et je fais de mon mieux pour les rejoindre dans leur philosophie Pas de voyages sans aventures. Ils en ont fait du chemin, mes cocos, depuis leur premier voyage en Europe. Ils considèrent maintenant que l’imprévisibilité fait partie de l’expérience et sont prêts à assumer le risque. Je ne peux que les admirer et m’inspirer de mes petits bouddhas.

Dimanche matin 26 août 2018

Nous débarquons finalement à l’aéroport de Catania, trois jours plus tard. À notre arrivée, nous entendons dire que l’Etna a cessé de cracher son feu dans la nuit de samedi. Nous l’avons peut-être manqué de peu… Mais pas question de se laisser démonter tout de suite! Nous aurons notre réponse à la tombée du jour…

Chez nos amis, vers 20 h, nous commençons par apercevoir de petits nuages de fumée émis par le cratère étouffant. On se croirait dans une BD de Lucky Luke et les Indiens devant cette montagne qui nous toussote un message… À l’aide de jumelles, nous ne tardons pas à repérer quelques jets de magma en fusion propulsés en colonne bien droite dans les airs. Notre joie explose! L’Etna est réveillé! S’ensuit une folle excursion nocturne en voiture autour de la montagne qui gronde. Nous zigzaguons à travers les villages animés (à 21 h, les Italiens commencent à peine à sortir pour souper) jusqu’à Sant’Alfio, où enfin, nous avons la chance d’observer à l’œil nu une grande coulée de lave s’écoulant dans la Valle del Bove. Mission réussie!

Le volcan n’était qu’un prétexte pour créer un moment de famille mémorable. Une occasion de mordre dans la vie à pleines dents avec nos deux enfants! C’était impressionnant, je l’avoue, mais peut-être que ce ne sera même pas un moment qui restera gravé dans leur mémoire. Peut-être que ce sera la nuit des perséides, où nous avons réveillé notre sept ans pour qu’il réalise son souhait de voir une étoile filante. Ou cette chaude soirée de juillet, quand nous leur avons proposé un bain de minuit dans la piscine. Peut-être même qu’ils se rappelleront longtemps notre défi d’écouter tous les films de Marvel pendant les vacances.

Une chose est sûre, personne n’a besoin d’un volcan pour créer un souvenir magique. Il suffit de remarquer la petite étincelle qui s’allume dans les yeux de ceux qu’on aime et d’avoir le cœur de répondre « Oui, j’embarque avec toi! »

Elizabeth Gobeil Tremblay