Tag culpabilité

Je suis « La parfaite victime », et je m’en excuse. Sincèrement.

En juin dernier sortait en salle le documentaire La parfaite victime, un film de Monic Nér

En juin dernier sortait en salle le documentaire La parfaite victime, un film de Monic Néron et Émilie Perreault produit par Denise Robert. Ayant été victime de plusieurs agressions sexuelles dans ma vie, dont la première à quinze ans, j’ai pris plusieurs mois avant de l’écouter. J’étais moi‑même « dans le système » pour un événement datant de plus de deux ans. Va savoir si j’avais suffisamment cheminé pour être solide et ne pas décompenser.

En l’écoutant, j’ai pleuré. Fort. Des vraies larmes. J’ai supplié mon cœur de rester dans mon corps. Entendre et voir ces victimes sur mon écran m’était quasi insupportable. Je les comprenais trop bien, toutefois je ne comprenais pas la narration choisie. Le choix de ton. J’en suis encore bouleversée.

J’ai lu tous les commentaires publics à propos de ce film. Pour la majorité, des victimes envenimées, des menaces, des horreurs contre le système et contre les professionnels ayant accepté de faire ce film qui trouble, qui dérange. Mais peu osaient dire que le système les avait soutenus. Probablement par peur. Par honte. Je comprends, j’ai aussi souvent questionné mon cheminement, et le choix parfois douteux de têtes retenues pour l’écran, et je n’ai pas porté plainte pour mes agressions passées dans mon jeune temps, par honte, peur et découragement également. Mais je me sentais mal d’écouter ce documentaire qui me peignait alors comme la « parfaite victime », puisque le système avait été de mon côté. Mal d’avoir gagné ma cause. Mal d’être allée jusqu’au bout. Comme si ça avait été facile, comme processus, vu que j’avais gagné. Je me souviens, lors de la huitième écoute, m’être dit que je n’avais pas ma place aux côtés de ces hommes et femmes. J’aurais voulu les prendre dans mes bras et leur donner mon « coupable ». Du genre « prends mon verdict, j’vais garder la leucémie ».

Sous une publication de la page principale du film, une femme énonçait que si un jour ça lui arrivait, jamais elle n’irait porter plainte. C’était bien clair, elle était découragée des propos tenus, des statistiques. Ça aussi, je comprends. Parce qu’avoir visionné le film AVANT ma plainte, jamais je n’y serais allée.

Mais comme humain, mon devoir est de rester ouverte à ce que la vie m’amène. D’accepter ce qui est et de changer ce que je peux changer. C’est mon choix d’avancer dans la direction que je crois être juste. J’avoue que ce n’est pas toujours évident.

Dans mon histoire, j’ai vécu les deux côtés du système ; j’ai abandonné une plainte de viol parce que je trouvais injustes les répercussions sur mon amie (#pasbesoindamiecommeca) du temps, qui aurait pu empêcher mon viol, mais qui préférait commettre l’adultère dans la pièce d’à côté. Puis j’ai connu le processus traditionnel avec une enquêteuse et un procureur doux, attentionnés, compréhensifs mais surtout, humains. De le voir apparaître sur mon écran et de lire des commentaires haineux disant que le DPCP ne fait rien pour les victimes… j’pensais crever. La tête me tournait, j’avais la chair de poule. Parce qu’en grande, grande, grande partie sans mon procureur, je ne serais pas ici. Mes enfants n’auraient pu de mère.

Je me souviens exactement de la journée où j’ai dû aller au Palais de justice de Québec afin de remplir la déclaration sur les effets subis suite à cet événement. La fin approchait enfin. Je devais coucher sur papier tout ce que ça m’avait enlevé, coûté. Je l’ai fait en pleurant. Du début au point final, plusieurs pages plus tard.

Dans un élan de détermination et de courage, j’avais demandé à voir la salle où il avait plaidé coupable. Oui, après s’être présenté à mon domicile malgré le jugement qui l’en empêchait, il plaidait coupable, enfin.

J’avais besoin de voir où ça avait été « réglé ». Je l’ai vue dans les jours suivants, après avoir noirci tellement de feuilles avec des mots réfléchis et puissants sur lesquelles je lui souhaitais avec bienveillance de se réhabiliter. Mais que de mon côté, je devais avancer et lui laisser ça. Ça lui appartenait maintenant.

Je me souviens de la vague de violence qui m’avait transpercée au moment où j’ai su que ça ne leur avait pris que quatre minutes.

De quoi ?

Quatre minutes de comparution seulement. J’ai demandé l’enregistrement pour entendre de mes oreilles ces quatre minutes où il plaidait Coupable au chef d’accusation d’agression sexuelle.

Pour plusieurs victimes, juste l’idée de réentendre la voix de son agresseur est insupportable. Mais pour moi, il était fondamentalement crucial que je l’entende prononcer son aveu de culpabilité. C’était viscéral. Les tripes serrées et le cœur en morceaux, j’avais écouté le fichier audio, payé de ma poche, en boucle pendant des heures. En fait, je l’écoute encore, et j’ai le message de mon procureur dans ma boîte vocale.

Si ça prend ça pour avancer ? Je sais pas. Mais d’entendre de sa bouche que ça ne m’appartenait pas, ça valait de l’or. Je partagerai un jour avec vous la lettre lue en cour lors de la sentence. Je viens d’aller chercher l’audio, merci Bureau en gros de faire des transferts CD vers des clés USB. #presqueunedisquette.

J’ai fait un malaise avant de sortir du Palais de justice. Le constable m’a dit qu’il était là, que j’avais rien à craindre.

J’ai fait une crise d’angoisse dans le stationnement.

J’ai dû m’arrêter sur le chemin du retour pour vomir.

Je suis arrivée à la maison en ne voulant qu’une chose : une famille.

Toute la soirée, seule, j’ai essayé de ramasser les bouts de mon cœur brisé. Ce dont j’avais besoin ?

Qu’on me laisse pleurer en me flattant les cheveux.

Qu’on me dise que ce que j’ai vécu, c’est horrible.

Qu’on me laisse crier, ce que j’ai fait, habillée dans le bain, la rage au cœur.

Quatre minutes.

Ça en avait duré dix, y’a deux ans.

Dix minutes.

Deux ans.

Quatre minutes.

Mais j’ai gagné. Parce que j’ai choisi de faire confiance au système. Parce que j’ai dénoncé cet agresseur. J’ai entendu le « Oui, coupable » que je devais entendre et qui a résonné jusque dans mon âme. Si ça a été facile ? Non, c’est vrai que c’est long comme processus. Mais se guérir aussi. Tellement.

Si tu es victime d’agression sexuelle, reste pas dans le silence. Je suis là. Tu m’écris. Je vais te tenir la main pour aller porter plainte. Je vais te flatter les cheveux pendant que tu pleures et j’vais même ramasser ton vomi.

Mais reste pas seule. T’as le droit de te faire entendre, si tu le souhaites. Y’a des gens qui passent leur vie à le défier, le doute raisonnable. Y’a des gens qui sont là pour dire que ce que t’as vécu, c’est horrible. Et certains le font en toge.

Fais-toi le cadeau de la bienveillance. D’y croire. Parce que juste de porter plainte, c’est déjà se libérer de ce qui ne nous appartient pas.

K.

 

Si tu as été victime d’agression sexuelle, je partage avec toi quelques ressources à ta disposition. Je te rappelle que tu peux m’écrire, slide dans mes DM anytime, ok ?

https://www.quebec.ca/famille-et-soutien-aux-personnes/violences/agression-sexuelle-aide-ressources/organismes-d-aide-aux-victimes

 

 

 

 

 

Culpabilité, mon amie

J’ai réalisé une capsule en direct sur la page Facebook de M

J’ai réalisé une capsule en direct sur la page Facebook de Ma Famille Mon Chaos parce que je commençais à lire plusieurs commentaires de parents qui ressentent de la pression sociale à être le parent parfait en temps de crise #Covid-19. Plusieurs parlent de leur sentiment de culpabilité d’être à demi présent à la maison avec les enfants parce qu’ils sont en télétravail. La situation actuelle implique qu’on se donne le temps de s’ajuster et de revenir à l’essentiel. Je n’ai pas la vérité. Je suis aussi mère de trois enfants et j’ai moi aussi reçu un coup de pelle en plein front comme Dre Pascale Brillon nous le disait à Tout le monde en parle. Et j’organise tranquillement de mieux en mieux ma vie désorganisée. Lors de ce direct, je vous ai promis un article sur la culpabilité et les apprentissages qu’on peut en tirer. Le voici !

La culpabilité, c’est un sentiment universel. Un sentiment avec lequel on fait fatalement connaissance au moment où on devient parent. La culpabilité, selon Wikipédia, est une émotion causée par la transgression d’une norme morale. Ouin, t’sais, quand t’n’as pas eu le comportement du parent idéal selon ta Bible du parent 101, celle composée de tes valeurs parentales. Devenir parent, ça rend fort, qu’on se le dise, que ce soit en situation inhabituelle comme en ce moment ou en temps normal.

Oui, on affronte des situations inimaginables tous les jours. On est testé, oui testé ! Et la fatalité quand on est parent, c’est de devoir se l’avouer. S’avouer que tôt ou tard dans la journée, il y en aura un qui va « péter sa coche ». Oui, ça va arriver ; une chicane, un accident, un NON ! Et ça va complètement envoyer le plan de ta journée en l’air parce que tu vas intervenir. Ces scènes de chaos qui interpellent le meilleur de toi pour intervenir avec bienveillance vont peut-être plutôt réveiller le pire de toi et inévitablement, te faire sentir COUPABLE ! Et ça fait mal, mal à ton cœur de mère, mal à ton cœur de père.

Le problème avec la culpabilité, c’est le chemin vers lequel elle t’appelle. T’sais, le chemin sombre de la colère, de la violence qu’on se fait à soi‑même et qui développe malgré nous une bien mauvaise estime de nous en tant que parent, une bien mauvaise image de nous comme mère, ou comme père et qui nous fait parfois baisser les bras parce que de toute évidence, nous n’y arriverons juste pas. Ça fait mal de voir qu’on n’est pas aussi patient qu’on le voudrait, pas aussi calme qu’on le pourrait et qu’au final, on finit même par percevoir notre enfant négativement.

On finit à tort par penser qu’il est le seul problème dans l’équation, alors qu’il n’y a que nous à blâmer de ne pas avoir remué bienveillance et patience en nous. Ça devient un cercle sans fin qui remue culpabilité, colère et impuissance. NONONONNON ! Je n’ai pas choisi de fonder une famille pour être frustrée et pour me sentir coupable le reste de ma vie. Qu’on se le dise, actuellement, notre niveau de stress plus élevé qu’à l’habitude peut nous amener à être encore plus réactif qu’à l’habitude. C’est pourquoi nous avons besoin de respirer, de nous accueillir et de nous donner du temps pour nous ajuster et tisser des liens encore plus forts avec nos enfants.

Comment on se sort de cette culpabilité sans fin ?

On est humain. J’ai l’impression que je vais toujours naviguer entre fierté et déception. Que je vais traverser des tempêtes et naviguer en me laissant porter par le courant. La vie, c’est un cycle avec ses hauts et ses bas. Plus j’apprends à me connaître, plus je peux réagir différemment. Je sais que je vivrai encore de la culpabilité et je ne la vois pas comme une ennemie. Je m’en fais tranquillement une amie. Et avec cette amie la Culpabilité, je jase. On fait ensemble certaines réflexions. Là, tu me trouves bizarre. Je te comprends. La vie pour moi, c’est une chaîne sans fin d’apprentissages et l’utilité de mon amie la Culpabilité, c’est certainement de découvrir ce qu’elle veut me dire.

Admettons que je prends un exemple de la vie courante. Une fois, ma fille est partie en pleurant parce qu’elle ne voulait pas faire son lit et que j’ai insisté. Elle m’a trouvée dure et je me suis remise en question parce que je me sentais coupable de l’avoir fait pleurer. À ce moment, je peux plonger dans les remords, l’inquiétude de la voir partir triste et fâchée contre moi. Je peux avoir le goût de changer mes règles de la maison pour ne plus la faire pleurer, mais j’irais contre mes valeurs. C’est déchirant et je pourrais me tourmenter longtemps.

Je pourrais aussi me demander ce que mon amie la Culpabilité voulait me dire. Quelle était son intention positive pour moi ? Et si ma Culpabilité voulait me dire que j’avais raison de tenir mon bout même si c’est difficile pour ma fille ? Que je n’aime pas voir ma fille pleurer même quand c’est pour son bien et que c’est correct. Peut-être que ça me donnerait le goût de lui expliquer pourquoi c’est important pour moi qu’elle fasse son lit le matin. Et si ma Culpabilité voulait me signifier que ma fille était fatiguée ? Peut‑être que sur le coup, je lui aurais promis un moment de détente ce soir pour la féliciter de faire son lit quand même ou que je l’aurais aidé un peu en le faisant avec elle.

Reconnaître la Culpabilité comme une amie qui veut me dire quelque chose plutôt que de plonger dans les tourments, c’est ça qui me fait avancer. Être orientée vers les solutions, vers ce que je peux changer : ma réaction, mes pensées, mes paroles, mes gestes. Quand je sens que mon amie la Culpabilité est là, je m’en sers comme d’un repère pour me demander ce que je dois comprendre. Ensuite, je prends position. Dans cette vision, je prends conscience de mes responsabilités et j’apprends à mieux réagir sans tomber dans les remords, les tourments, la dévalorisation parce que je ne suis pas parfaite.

De cette façon, je m’améliore continuellement. Sans pression, sans remords je prends mes responsabilités. Si je sens que j’ai des excuses à demander parce que j’ai mal réagi, je prends le temps de m’excuser et de demander pardon à mes enfants. Je prends le temps de m’expliquer et je prends le temps de dire à mes enfants quelles seront mes attentes envers eux à l’avenir. La Culpabilité est mon amie. Elle m’aide à utiliser le meilleur de moi‑même. Si je sens qu’elle devient mon ennemie parce qu’elle m’entraîne dans mes coins sombres, je me demande ce que je dois tirer comme leçon. Et la vie continue ! J’ai rédigé un exercice si tu as le goût de t’y référer pour apprendre d’une situation qui a généré de la culpabilité chez toi.

J’apprends constamment et j’évolue avec mes enfants. Ce que je souhaite le plus sincèrement, c’est que le temps que je passe avec mes enfants en ce moment me permette de tisser mes liens avec eux. Un jour, j’aimerais qu’on s’en reparle en se disant : on a fait plein de choses ensemble et ça nous a rapprochés ! Et vous, qu’est‑ce que vous aimeriez vous dire quand ce sera fini et que la vie aura repris son cours ? De quoi serez‑vous le plus fier ?

Stéphanie Dionne

 

Et si on pensait aux enfants ?

Ma profession est malade. En cette semaine des enseignants, la pénu

Ma profession est malade. En cette semaine des enseignants, la pénurie n’a jamais été si intense. On se retrousse les manches, on se remplace entre nous, mais voilà, ça ne suffit plus…

Des collègues d’éducation physique se retrouvent titulaires de classe, des éducateurs enseignent l’anglais ; le manque de suppléants est criant. Je ne dénigre en rien mes collègues. J’ignore comment j’enseignerais les techniques de basket ou les stratégies de volleyball ! 😉 Je prendrais encore moins la place des éducateurs qui, chaque jour, prennent le relai et déploient des efforts inimaginables pour réaliser de grandes activités avec peu de moyens. Seulement, ces gens n’ont pas reçu la formation nécessaire pour assurer le suivi des enfants dans une classe. Ils font ce qu’ils peuvent et surtout, soyez assurés qu’ils font de leur mieux. Vraiment.

Sincèrement, jamais je n’aurais cru me sentir à ce point embarrassée d’être malade. Culpabiliser avec la gastro ou l’influenza, c’est assez plate merci. Ressentir un profond malaise lorsque notre enfant est malade, c’est désormais coutume. On passe notre journée à se confondre en excuses auprès de nos collègues qui nous ont gentiment dépannée.

Nous sommes face à un mur.

De béton.

Armé.

On fait quoi ? On continue de pleurer sur notre sort ? Serait‑ce bien utile ? Des solutions, il y en a très peu, mis à part s’entraider et se soutenir.

Pensons aux enfants. Ce sont eux les victimes de cette instabilité. La plupart des élèves traverseront cette tempête aisément. D’autres devront ramer un peu plus fort, perdant quelques plumes au passage. Certains, malheureusement, seront plus échaudés, n’ayant plus leur repère, leur point d’ancrage.

Pensons à ces enfants la prochaine fois que nous devrons prêter main-forte à un collègue. Unissons-nous en nous rappelant que notre correction peut bien nous attendre un peu et surtout, qu’on apprécierait que quelqu’un fasse de même pour nous.

Pensons à ces enfants qui n’ont pas demandé à être victimes de cette pénurie. Rendons le moment passé auprès d’eux constructif et agréable.❤️

Je crois encore un peu au père Noël et je suis convaincue que Mary Poppins existe quelque part… Si quelqu’un veut proposer une solution miracle, je vous écoute.😉

Eva Staire

Tu viendras faire un tour…

J’aime recevoir, j’aime être entourée des gens que j’aime. E

J’aime recevoir, j’aime être entourée des gens que j’aime. Et j’aime beaucoup de gens! Je tiens ça de mes parents. On était très souvent ceux qui rassemblaient famille et amis.

C’est encore le cas aujourd’hui. Je trouve important de rester en contact. Mon père est décédé, mais on continue de voir sa famille. Moins souvent c’est vrai, mais on les aime encore tellement! Une fois par année, on essaie d’organiser quelque chose avec les frères et sœurs de ma grand-mère, même si elle ne reçoit plus vraiment. Il en va de même avec la famille de mon père, au moins une fois par année. Deux, ce serait encore mieux.

90 % du temps, l’invitation vient de nous et presque chaque fois, c’est chez nous que ça se passe. C’est correct. On aime sincèrement recevoir. Et on se dit que tant que les gens répondent à l’appel, c’est que ça leur fait aussi plaisir de nous voir, les autres invités et nous.

Ce qui me dérange, ce n’est pas d’être l’instigatrice des rassemblements ou d’en être l’hôte, ce sont les petits commentaires culpabilisateurs : « Tu viendras me visiter, tu viens pas ben ben », « On se voit pas souvent, hein? C’est plate… », « J’hésite à venir à ton mariage, tu ne m’appelles pas souvent ». Ce genre de commentaires vient TOUJOURS de personnes qui ne font RIEN pour entretenir la relation. Je sais que je n’appelle pas si souvent et n’invite pas toutes les deux semaines, mais au moins, je le fais. Je ne parle pas de la famille immédiate. Je ne parle pas de ma grand-mère. Je ne parle évidemment pas de gens avec des soucis de santé. Je parle de grands-tantes, d’amis de la famille plus éloignée, d’oncles… Je prends la peine de t’appeler. Je trouve important de créer des occasions de se voir, de se rassembler. Je veux que tu partages avec ma famille et moi les moments importants, officiels et moins officiels. Je te fais une place dans ma vie.

Si ces occasions te font plaisir et que tu aimerais en vivre plus, tu peux m’appeler. Tu peux suggérer au lieu de tenter de me faire sentir mal, alors qu’on est justement ensemble parce que j’ai organisé le tout. Si je ne le faisais pas, on ne se côtoierait probablement pas du tout ou seulement aux funérailles.

Je travaille à temps plein, j’ai de jeunes enfants, notre vie est bien remplie. Malgré tout, j’essaie de penser à tous et ça me fait tellement plaisir de voir mon monde et d’en prendre soin. Je ne veux pas de médaille, je n’ai pas besoin d’être félicitée. Je le fais parce que j’en ai envie et personne ne m’y oblige. Mais ça me fait un peu de peine quand la personne retraitée qui a beaucoup de temps et qui est en pleine forme, que j’aime, me fait des reproches à demi mots et tente de me culpabiliser. Elle a plein de temps et ne me fait aucune place volontairement, alors que moi, je lui en fais.

Je sais que certains traits se développent avec l’âge et qu’il y a sûrement plein de raisons logiques à tout cela, mais j’espère me le rappeler quand je serai plus vieille, quand je serai celle qui a du temps. J’espère avoir encore le goût de rassembler les gens. Et si ce n’est pas le cas, j’espère ne pas commencer à culpabiliser ceux qui le font parce qu’ils ne le font pas assez selon mes envies. J’espère que je saurai simplement apprécier ces moments avec ceux que j’aime.

Eva Staire

 

Un matin en congé

Un matin, un seul matin. La semaine dernière, j’avais un petit tr

Un matin, un seul matin. La semaine dernière, j’avais un petit trou dans mon horaire… Toute une matinée en congé. Comme les enfants ont de l’école, eux, la routine reste la même. Le cadran sonne à 6 h 30. Les tâches défilent. Habiller, coiffer, nourrir, cuisiner, crémer, courir. L’autobus passe à 7 h 10. Tout mon petit monde y est monté.

Je referme la porte de la maison. Mon cerveau tourne encore sur l’adrénaline. Je pense au travail en m’assurant que je n’ai rien oublié. Pas de réunion. Pas de correction. Pas de retard à rattraper. Je réalise à peine que je suis vraiment en congé… Je regarde les tâches ménagères. Je pars la laveuse, puis le lave-vaisselle. Pour une fois que ma maison est presque en ordre, moi, ça me suffit.

J’ai tout à coup un petit regard espiègle… Je cours à l’étage, me remets en pyjama-mou-pas-de-brassière. Je m’étends dans mon lit et je me choisis un film. Toute seule. Pas un film animé, pas un film rempli de chansons ou de princesse à sauver, pas un film d’action… Juste un bon vieux film romantique de série B.

Ce matin-là, je me suis autorisée un congé, un vrai congé. Pas juste un congé de travail ou de tâches à faire… un congé de culpabilité! On va se le dire, maudit qu’on est bonnes pour se culpabiliser! On dirait que lorsqu’on a mis au monde nos enfants, on a automatiquement développé cette maladie qui nous ronge, cette culpabilité.

Dès qu’on a un peu de temps libre, on essaie d’en faire le plus possible. Et même quand tout le ménage est fait et qu’on pourrait licher le plancher, on se trouve de nouvelles tâches! On n’arrête jamais d’en rajouter en bas de la liste. Tout le linge est propre? Pourquoi ne pas faire le tri des tiroirs pour ranger ce qui ne fait plus! La vaisselle est faite? Pourquoi ne pas prendre de l’avance sur la préparation des repas ! Les enfants sont absents? Pourquoi ne pas planifier une surprise pour eux !

C’est exactement cette culpabilité-là que j’ai décidé d’ignorer pour une petite matinée. J’ai écouté mon film. Au complet. J’ai déjeuné dans mon lit, avec des cochonneries pis pas de brassière. C’est étonnant, mais quand on met la culpabilité de côté, c’est bien correct de déjeuner au chocolat à 8 h du matin… Et vous savez quoi? Quand le film s’est terminé, j’ai fait une sieste. Ouep.

Et le plus étrange dans tout ça, c’est que je suis bien arrivée au travail à midi, comme prévu, pis personne ne s’est aperçu de ce que j’avais fait… Personne ne m’a trouvée paresseuse, molle ou indigne. Personne ne m’a jugée. Vous savez pourquoi ? Parce que ce jugement que nous sommes persuadés de voir dans le regard des autres, c’est tout simplement le nôtre. Personne ne juge personne, y’a que nous qui nous sentons coupables!

Alors aujourd’hui, j’ai décidé de partager cette liberté avec vous, juste pour qu’on se donne des preuves ensemble que c’est encore possible de ne pas se sentir coupable tout le temps! Alors c’est parti! Dites-moi ce que vous faites quand vous mettez votre culpabilité de côté!

Joanie Fournier

 

Le sentiment de culpabilité d’une maman malade

Ce soir, maman a le cœur gros, elle ressent un sentiment de culpabi

Ce soir, maman a le cœur gros, elle ressent un sentiment de culpabilité intense. Maman a mal et cette douleur fait en sorte qu’elle ne peut s’occuper de toi comme elle le désirerait.

Cette douleur qu’elle ressent qui va du dos et qui s’étend jusqu’à la main l’empêche de te prendre dans ses bras. Elle aimerait tant pouvoir te réconforter quand tu pleures, te prendre dans ton lit la nuit pour te donner ta bouteille et te bercer. Mais cette douleur est tellement vive qu’elle ne peut le faire. Il y a aussi le risque d’aggraver cette blessure qui pour le moment est inconnue.

Les médicaments ne font que diminuer de très peu le mal qu’elle ressent et ils l’endorment profondément la nuit pour lui donner une pause de cette douleur pendant quelques heures. Ton papa prend la relève jour après jour et en se levant nuit après nuit pour répondre à tes besoins de petit gamin.

Le temps passe et la douleur est encore bien présente. Mais maman ne peut s’empêcher de te soulever pour te mettre dans le bain ou t’asseoir dans ta chaise haute. Elle sait que ce n’est pas bon, la douleur le lui rappelle après. Mais son cœur de maman ne peut tolérer ce sentiment de culpabilité qui la ronge. Elle veut donner une pause à papa qui se réveille dix fois par nuit. Alors elle se dit que la douleur s’atténuera avec les médicaments.

Maman a mal, mais son cœur devient plus léger, car elle a pu combler quelques-uns de tes besoins de petit gamin. Et le sentiment de culpabilité diminue au même rythme que la douleur augmente… Pourquoi sommes-nous faits ainsi? Avons-nous besoin de nous sentir coupables de tout pour rien? Suis-je la seule à me sentir coupable de ne pas donner mon 100 % à mes enfants quand je suis malade?

La maman incognito

Deuxième grossesse : quand la culpabilité fait place à l’amour

Mon bébé, mon deuxième petit trésor, je te porte depuis plus de

Mon bébé, mon deuxième petit trésor, je te porte depuis plus de 230 jours. Il nous reste encore quelques semaines à partager l’espace de mon corps et ensuite, tu seras parmi nous. Cette deuxième grossesse, elle est bien différente de la première. Comme lorsque je portais ton frère, je me sens bien, je suis en santé et toi aussi. Par contre, pour ton frère, je devais m’occuper que de ma bedaine.

Je connaissais tout ce qui se passait pour lui et pour moi à chaque semaine de grossesse qui passait. Les ongles qui poussent, l’ouïe qui se développe, la peau qui s’épaissit. Chaque semaine, je lisais religieusement à quel stade ton bébé frère était rendu. Pour toi des fois, on me demande le nombre de semaines de ma grossesse et je dois y réfléchir. Parfois, je me mélange même d’une ou deux semaines avant de me rectifier. Jamais je n’aurais cru cela possible.

Quand ton frère est arrivé au creux de mon ventre, je pensais à sa place dans notre famille. Il avait toute mon attention, toutes mes pensées ou presque. Cette fois, avec toi, j’étais plus inquiète de ne pas arriver à te faire une place, de manquer de temps, de manquer d’énergie. Je me suis sentie coupable de ça, j’espérais que tu ne te sentais pas rejeté.

Puis, un jour, l’une des sages-femmes qui assurent notre suivi m’a dit : « Au fond, cette grossesse‑là est plus normale. » Elle ne le disait pas de manière péjorative, mais me faisait plutôt valoir que c’est peut-être tout le surinvestissement de la première grossesse qui est hors norme. Ça m’a apaisée. C’est vrai, au fond, que la vie continue même si tu es dans mon ventre. Je ne suis pas moins attachée à toi, j’ai simplement d’autres obligations qui seront encore là à ton arrivée.

Le temps ne s’arrêtera pas, ton frère va continuer sa routine et notre famille aussi ; au fond, c’est ce qui est beau. Notre famille, elle existe déjà et tu vas la rejoindre. Ta place y est déjà faite. Je me dis aussi que tu auras droit à une maman beaucoup plus détendue. Avec ton frère, j’ai tout appris, tout remis en question et je me suis tellement donnée à fond dans mon rôle de mère que j’ai failli m’épuiser.

J’avais l’impression que chaque action, chaque décision pouvait marquer sa vie à jamais. Comme si tout devenait plus gros, plus important. Avec toi, je sais le beau chaos qui s’en vient, je sais que tout passe, le bon comme le mauvais, et je sais que je suis une maman suffisamment bonne. Ça, tu vois, c’est un avantage que ton frère n’a pas connu tout de suite. J’ai appris avec lui et tu pourras en bénéficier.

Même chose pour ta venue au monde. Avec ton frère, je ne savais pas si je fabulais, si mes souhaits étaient réalistes ou naïfs. Maintenant, je sais que c’est possible. Je sais que je suis capable d’accoucher chez moi, dans le calme et l’amour. Je sais que je peux faire confiance à mon corps et je connais le chemin que nous aurons à traverser ensemble pour que tu puisses venir au monde. Il reste encore des surprises évidemment! À chaque bébé son histoire, mais je n’ai pas peur et ça aussi, tu dois le sentir.

C’est vrai, j’ai dû me forcer pour avoir des petits rituels avec toi, prendre le temps de prendre le temps, mais je ne me sens pas moins attachée à toi pour autant. J’ai compris qu’une fois de plus, la vie m’enseignait à ralentir, à changer de rythme et à prendre conscience de mes priorités, de mon temps et de ce que j’en fais. Un bel enseignement que tu m’apportes, comme un cadeau.

Mon bébé, j’apprends à te connaître par tes mouvements et tes réactions intra-utérines. Je t’imagine, je t’espère, je te fais confiance. Un petit bébé tout doux et curieux qui s’étire doucement dans mon ventre. Un petit bébé qui interagit déjà beaucoup avec les mains qui le touchent, surtout celles de ton frère et de ton père.

Bref, je te porte avec bonheur tout près de mon cœur en espérant que tu ressens tout l’amour que j’ai pour toi malgré le tourbillon de la vie. Prends toute la place qui te revient, viens bousculer notre routine, nous en apprendre encore plus sur nous. Nous sommes prêts et quand le moment sera venu, nous t’accueillerons avec tout l’amour que tu mérites.

Roxane Larocque

Ça ne se dit pas!

Ce que je vais vous dire là, ça ne se dit pas. Ça s’écrit enco

Ce que je vais vous dire là, ça ne se dit pas. Ça s’écrit encore moins. Mais ça se ressent.

Ça m’a pris des années avant de me l’avouer à moi-même. Des mois avant d’oser le nommer devant ma thérapeute. Et une autre année avant de vous en parler.

Pourquoi oser, ce soir? Parce que je sens, non, je sais, que je ne suis pas seule. Si j’avais entendu quelqu’un me raconter cette histoire, j’aurais pris conscience plus tôt de ce qui me tourmentait. J’aurais laissé moins d’emprise à la culpabilité et à la honte. J’aurais osé me rendre compte de l’absurdité de ce que je m’imposais. Parce que mes mots aideront, peut-être, l’une d’entre vous à défaire un nœud qui entrave le cœur autant que le corps.

Il était là, couché près de moi. Pour la 7000e nuit. Il ronflait un peu. Si j’avais dormi comme j’aurais dû le faire, je ne l’aurais même pas entendu tellement le bruit était subtil. Mais je ne dormais pas. Une autre nuit d’insomnie marquée par les interrogations, les jugements sur moi-même : « Non mais vraiment? Tu as encore dit oui? »

Il s’était endormi après l’acte. Pas un acte manqué comme en psychanalyse, mais un acte raté. Une relation sexuelle qui ne faisait même pas de bien. Ni à lui ni à moi. Du sexe parce que. Par devoir. Parce qu’il le faut bien, une fois de temps en temps. À quel moment était-ce devenu moins bon ? À quel moment la passion des corps était-elle devenue à sens unique ? Depuis quand avais-je son corps en aversion ? Depuis quand la frustration avait-elle élu domicile entre nos draps ?Ça arrive même dans les meilleurs couples, me direz-vous. À moins d’être un fidèle disciple d’Alexandre Jardin, difficile de se renouveler au fil des années de mariage et des enfants qui se multiplient. On avait bien essayé, pourtant. Mais ce n’était pas ça. C’était plus. Plus profond. Plus grave. Une cassure passée et non pansée.

Quand je le regardais, quand je pensais à lui, ma libido s’expulsait de mon corps comme le souffle d’un pauvre moldu à l’approche de Voldemort. L’idée même de me retrouver près de lui me tordait l’utérus jusqu’à me crisper les orteils. Comment en était-on arrivés là…

Il n’y avait pas eu d’agressions. Pas de manque de respect abusif. Pas d’intimidation, de luttes de pouvoir. Il avait même été très tolérant devant mon manque d’intérêt (sans l’accepter, ça va de soi ; le sujet réapparaissait à l’occasion lors des discussions animées). Mais il ne s’est pas battu pour inverser le processus. Il n’a pas essayé de comprendre, d’écouter quand je lui disais mon malaise. Il n’a pas tenté les solutions que je proposais. Il a laissé les choses aller, pourrir, s’envenimer. « C’est comme ça… »

À la longue, j’ai développé des stratégies (malsaines, mais appelons ça des stratégies de survie) : je me couchais au milieu de la nuit, prétextant avoir du travail à faire, ou encore, si je voyais qu’il se coucherait tard, je me dépêchais à rejoindre le lit pour m’endormir le plus vite possible. Quitte à feindre le sommeil profond s’il osait monter à l’étage plus tôt que prévu. Tout pour éviter la caresse, la main sur le sein, le genou qui se glissait entre mes jambes. Tout pour repousser le moment où je devrais choisir entre me respecter et le soulager. Entre dire « non » et vivre avec son silence déçu et frustré, ou consentir passivement et vivre avec mon propre silence déçu et frustré. Éventuellement, j’ai choisi de ne plus offrir mon corps contre du vide. Je me suis choisie.

Ai-je exprimé ma peine, mon désir d’améliorer la situation ? Oui. J’ai très (trop ?) longtemps cru que ça pourrait s’arranger. J’espérais qu’il répondrait à mon besoin de tendresse et de gestes d’attention. C’est ça qui m’allumait. Chacun son langage de l’amour… et on n’avait plus le même dictionnaire.

J’ai souvent essayé de rallumer ma flamme en essayant « quand même ». La libido vient en baisant, c’est ce qu’ils disent. Mais elle vient aussi en la nourrissant. En aimant vraiment.

Au fil des nuits écourtées et de la proximité inconfortable, j’ai mis un mot sur ce que je ressentais. Je me sentais violée. Chaque nuit, chaque jour. Le viol n’était pas réel, juste dans ma tête, dans mes sensations. Je ne me sentais pas respectée ni aimée malgré les « je t’aime » et les « t’es belle », malgré les « prends ton temps, ça va revenir ». Je me sentais envahie dans mon propre corps, dans l’espace d’intimité qu’était ma chambre. Je me sentais coincée dans mon refus, mais sans avoir la force ni la volonté de le dépasser.

Quand on ne se sent plus en sécurité dans sa propre maison et dans les bras de son mari, quel refuge nous reste-t-il ?

Aurais-je dû partir plus tôt ? Peut-être. J’y croyais trop, à la rédemption du couple, à la promesse répétée, à l’amour qui rime avec toujours. Devant l’absence de violence, devant les moments de rire et de complicité qui arrivaient encore à l’occasion, je voulais y croire. Je me sentais injuste et bébête de tourner le dos à un amour « quand même pas si pire ». J’ai étiré la sauce, jusqu’au jour où j’ai compris qu’une femme (ou un homme) ne peut pas vivre ainsi emprisonnée dans sa propre vie.

Je me répare, je prends mon temps, j’analyse le pourquoi du comment pour essayer de m’en tenir loin dans mes prochaines relations. Et j’ose le dire, même si ça ne se dit pas : je me suis sentie violée par celui qui aurait dû le plus m’aimer.

Eva Staire

Culpabilité, quand tu nous tiens!

Rassurez-moi : je ne suis pas seule à être atteinte du syndrome d

Rassurez-moi : je ne suis pas seule à être atteinte du syndrome de la culpabilité maternelle? Que la maman qui n’a jamais vécu ce sentiment amer coincé dans la gorge me lance la première pierre!

J’ai l’impression qu’en devenant mère, mon sentiment de culpabilité s’est exacerbé. On dirait que la maternité vient forcément avec un gros voyage de culpabilité bien enveloppé dans la valise d’accouchement. Et paf! Ça nous saute au visage. Ça nous colle à la peau, comme une mauvaise odeur; ça nous suit partout et empoisonne notre vie. Pourquoi, pourquoi?

Premièrement, parce que la société me renvoie l’image de la mère parfaite (et de l’enfant parfait, dodu et souriant). C’est un véritable malaise ou une quête, on nous vend des tonnes de livres sur l’éducation, le bien‑être… C’est louable de vouloir s’améliorer, d’apprendre, mais tout cela reste de la théorie. On oublie que derrière ces bonnes intentions, il y a nos propres réactions, nos comportements; il y a notre vécu, notre implication, nos sentiments.

Deuxièmement, parce que je me mets tellement la pression! Je veux ce qu’il y a de mieux, de meilleur pour mes enfants. On veut tous le meilleur, mais le meilleur de quoi? Peu importe ce que je fais, je m’autoculpabilise sans cesse. Si je les laisse pleurer, je suis cruelle; si je vais les voir trop rapidement, je suis trop protectrice. Entre bienveillance et punition, où est le juste milieu? Je leur donne trop de sucre, pas assez d’exercices, trop de temps devant les écrans ou à l’inverse, je ne leur laisse pas assez d’indépendance, pas assez de temps libre… C’est comme si je n’étais jamais assez bonne, assez bien. Une petite voix intérieure me souffle que je ne suis pas UNE BONNE MÈRE. Que je pourrais faire encore plus, toujours plus.

Et troisièmement, je suis coupable si je pense à moi. C’est comme si mon moi tout entier leur était dévoué. Je les ai voulus alors maintenant, j’assume. Je me sens coupable de rentrer tard le vendredi soir, d’avoir raté l’histoire, d’avoir privilégié une amie, de m’être acheté un nouveau chandail au lieu de leur offrir une nouvelle paire de chaussures… J’exagère, mais à peine, il y a toujours ce petit sentiment qui surgit, qui plane pour nous rappeler notre condition de mère; pour faire passer les enfants avant tout…

La culpabilité de ne pas être à la hauteur, voilà le problème. Mais qu’est‑ce que ça veut dire, être une bonne mère? Personne n’est parfait, et je le sais très bien. Pourquoi ne pas simplement l’accepter et l’appliquer dans mon quotidien? Oui, en tant que mère, j’ai le droit à mes erreurs. Mais ces erreurs impliquent forcément le futur de mes enfants et c’est pour ça que j’angoisse, que je culpabilise. Et si je commettais une erreur qui amputait à jamais leur avenir?

Mais, est‑ce que mes enfants ont vraiment besoin d’une mère parfaite? Je pense qu’ils ne s’en rendraient même pas compte. Est‑ce que je veux vraiment qu’ils croient que je suis une super parfaite et extra dévouée maman? Non, une mère, ça a le droit de péter sa coche, de brailler pour un rien, de filer un sac de bonbons juste pour faire cesser les caprices, ça punit, pis ça fait des câlins. Oui, une mère, c’est contradictoire, c’est ambivalent et ça fait surtout de son mieux.

Il n’y a pas de manuel d’instructions, de guide d’utilisation. On y va au pif, en tâtant et en essayant. Et peu importe ce que je fais ou ce que je ferai, dans vingt ans, après leurs séances chez le psy, mes filles me reprocheront sûrement mille et une choses. Alors je culpabiliserai encore, jusqu’à mon lit de mort.

Gabie Demers

Lettre d’une mauvaise mère

Je suis certaine que je ne suis pas la seule maman qui a tendance à

Je suis certaine que je ne suis pas la seule maman qui a tendance à s’autoflageller quand il s’agit de l’éducation de ses enfants… Dès qu’on passe une journée plus difficile, j’ai un don incroyable pour remettre en question mes capacités parentales. Les enfants se disputent? Bah, c’est de ma faute : je n’ai sûrement pas assez insisté sur la résolution de conflits… Les enfants refusent de manger un aliment? Bah, c’est aussi de ma faute : je ne le leur ai sûrement pas présenté assez souvent, ou assez jeunes… Les enfants me crient après? Bah, c’est encore de ma faute : j’ai monté le ton en les disputant hier…

Vous vous reconnaissez, n’est‑ce pas? Je pense que cette culpabilité est arrivée le jour où on a mis ces enfants au monde…

On passe notre temps à se remettre en question… à repenser nos façons de parler et d’intervenir avec eux… Mais est-ce qu’on prend le temps de s’arrêter, parfois, juste pour voir qu’on fait une maudite belle job, au fond?

Cette semaine, j’ai fait quelques pas de recul et j’ai observé mes enfants. Au lieu de focaliser sur les fois où mes filles sont venues me voir en chialant que l’autre avait volé son jouet, ou donné un ordre, ou parlé trop fort, ou regardé de travers, ou je-ne-sais-quoi-d’autre-qui-lui-tape-sur-les-nerfs, j’ai choisi de regarder les autres moments… Ce moment où j’entre dans leur chambre et que je les trouve couchées bras dessus, bras dessous, à regarder un livre d’histoire ensemble. Ce moment où je les entends chanter des comptines en voiture. Ce moment où la plus petite apporte sa doudou à la plus grande, pour la consoler. Ce moment où elles se souhaitent bonne nuit, comme si leurs mots d’amour ne reviendraient jamais. Ces moments…

Je pense qu’il faut regarder de plus en plus ces moments‑là. Il faut enlever nos lunettes de culpabilité-de-mère-indigne, pis regarder qu’on fait toutes une maudite belle job.

Pour ce début d’année scolaire, j’ai regardé ma fille faire sa toute première rentrée en maternelle. Ou en « matapouelle » comme elle aime si bien le dire! Moi qui m’inquiétais pour sa force de caractère, pour ses réactions souvent intenses et, disons‑le, pour sa maudite tête de cochon. J’te jure, elle n’est pas toujours facile d’approche… Pis encore là, j’ai pris le temps d’enlever mes fichues lunettes de culpabilité qui voudraient-que-tout-soit-parfait… Pis j’ai regardé mon enfant. Pour ce qu’elle est. J’ai vu une grande fille déterminée courir vers son enseignante pour lui faire un câlin. J’ai vu une grande fille prête, avec son sac à dos trop lourd, foncer vers la vie qui l’attendait. Elle a fini sa première journée avec des dessins plein les poches et des amis plein le cœur. Faque quelque part… je dois sûrement avoir fait une maudite belle job

Alors je vous donne ce petit truc aujourd’hui. Quand vous passerez votre prochaine soirée de m****, oubliez la broue dans votre toupet, calmez la vapeur qui vous sort des oreilles et allez voir à quel point vos enfants sont formidables. Pis à ce moment‑là, prenez donc une seconde pour vous dire que vous faites une maudite belle job.

Joanie Fournier

 

Je ne sais plus comment être une bonne mère

« Nerveuse » est le mot que j’utiliserais pour expliquer ce qu

« Nerveuse » est le mot que j’utiliserais pour expliquer ce que je ressens en ce moment. Je suis assise sur une chaise dans la salle d’attente de mon médecin. Je m’y suis assise tellement souvent, mais jamais avec une telle nervosité. Naturellement, il y a du retard et je sens ma nervosité atteindre le niveau maximal. Je songe même à partir ou à inventer un mal d’oreilles.

Je ne sais vraiment pas comment lui dire ce qui m’amène. J’ai peur d’être jugée, mal comprise ou encore pire, incomprise.

Je ne sais pas exactement comment tout cela est arrivé. Je ne sais pas exactement à quel moment le rire de mes enfants a commencé à me taper sur les nerfs. Pourtant, avant, il était si mélodieux à mon oreille ! Maintenant, il est comme des ongles que l’on fait grincer sur une ardoise.

Je ne sais pas non plus à quel moment je me suis mise à angoisser lors de mon retour à la maison. Mon nid familial si douillet s’est transformé en véritable maison de la torture. Mon travail est devenu mon oasis de paix, ma maison, un désert intraitable.

Mon cœur se remplissait d’amour lorsque j’entendais le mot « maman ». Maintenant, il se remplit d’agacement et de culpabilité.

Moi qui étais tellement fière d’être une maman, je veux maintenant quitter mes enfants, partir loin, pour me retrouver.

Tout ce qui se passe à la maison m’énerve. Le poids de la culpabilité me fait couler, malgré tous mes efforts pour rester à flots.

Je ne me reconnais plus. J’adorais être mère. Ma famille était ce qui comptait le plus pour moi. Maintenant, je me sens perdue, angoissée, coupable de ne plus être cette mère.

J’étouffe sous cette culpabilité chaque fois que je m’impatiente (maintenant beaucoup trop souvent). Je crie, j’exige.

La nuit, je pleure. Je suis devenue une maman monstre. Une maman que mes enfants ne reconnaissent plus. Une maman qu’ils en sont venus à craindre.

J’entends mon nom. C’est mon tour. Je panique. Je m’assois face à mon médecin. Dans un souffle rempli de culpabilité et de crainte, je lui dis :

« Aide‑moi, je ne sais plus comment être une bonne mère ! » Il m’écoute, sans jugement. Je me sens comprise. Avec beaucoup de compassion, il me dit :

« Tu es en burnout parental ! On va t’aider. Tu es toujours une maman merveilleuse mais fatiguée, et je ne te laisserai pas tomber. »

Un mois s’est écoulé depuis ce jour-là. Je vais mieux. Je suis une psychothérapie et je prends une médication qui m’aide. Je me retrouve. Je redeviens cette mère que j’aimais tant être.

Ce jour-là, le jour où j’ai décidé de consulter, a été le premier pas sur le chemin de la construction. Eva Staire